QUATRIÈME
SECTION
AFFAIRE MEIRELLES c. BULGARIE
(Requête
no 66203/10)
ARRÊT
STRASBOURG
18 décembre 2012
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44
§ 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Meirelles c. Bulgarie,
La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième
section), siégeant en une chambre composée de :
Ineta Ziemele, présidente,
David Thór Björgvinsson,
George Nicolaou,
Ledi Bianku,
Zdravka Kalaydjieva,
Paul Mahoney,
Krzysztof Wojtyczek, juges,
et de Lawrence Early, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 27
novembre 2012,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette
date :
PROCÉDURE
. A l’origine de
l’affaire se trouve une requête (no 66203/10) dirigée contre la
République de Bulgarie. Une ressortissante brésilienne, Mme Ivana Meirelles
(« la requérante »), a saisi la Cour le 25 octobre 2010 en vertu de l’article
34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
(« la Convention »).
. La requérante
est représentée par Mes M. Kadieva et T. Marinova, avocates à
Plovdiv. Le gouvernement bulgare (« le Gouvernement ») a été
représenté par son agent, M. Kotseva, du ministère de la Justice.
. La requérante
allègue en particulier que les tribunaux ne se sont pas prononcés dans un délai
raisonnable sur sa demande de mesures provisoires relatives aux contacts avec
son enfant, alors qu’il existait un litige concernant des questions de violence
physique entre elle et son ancien compagnon et qu’elle ne pouvait pas rencontrer
l’enfant. De plus, elle se plaint de la durée de la procédure civile relative à
l’action en déchéance de l’autorité parentale.
. Le 19 mai 2011, la requête a été communiquée au
Gouvernement. Comme le permet l’article 29 § 1 de la Convention, il a en outre
été décidé que la
chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond.
EN FAIT
I. LES
CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
. La requérante
est née en 1986, à Rio de Janeiro, Brésil. Elle réside en Bulgarie, à une
adresse non précisée.
. En 2005, alors
qu’elle se trouvait au Portugal, elle se mit en concubinage avec un homme dénommé
B.A., de nationalité bulgare. En août 2006, le couple déménagea en Bulgarie et
s’installa dans l’appartement des parents de B.A. à Plovdiv.
. Le 6 décembre
2007, la requérante donna naissance à un enfant, prénommé H., et dont la
paternité fut reconnue par B.A. L’intéressée n’exerçait pas d’activité
professionnelle et avait une connaissance élémentaire de la langue bulgare.
A. Les
évènements de la fin du mois d’août 2009 et l’ouverture d’une procédure pénale
pour dommages corporels
. L’intéressée
affirme avoir fait l’objet d’agressions physiques et psychiques de la part de
B.A. depuis le début de leur relation, ainsi que de la part de ses
beaux-parents, et cela surtout après la naissance de H. Elle fut obligée de
rester enfermée dans sa chambre et de ne pas sortir de l’appartement sans être
accompagnée. Elle fut soumise également à une dépendance économique et sociale
totale.
. Elle décrit en
particulier deux scènes de violence physique qui se seraient déroulées comme
suit. D’abord, le 23 août 2009, alors qu’elle souhaitait sortir avec H. en
promenade, B.A. se mit en colère, lui donna des coups de poing, la jeta par
terre et continua à la frapper. En conséquence, elle eut trois dents cassées.
H. était présent et pleurait dans les bras de la mère de B.A., dénommée H.A.
Ensuite, le 31 août 2009, l’intéressée, après avoir donné le bain à H.,
fut prétendument insultée par son beau-père, dénommé F.A. Celui-ci l’attrapa
ensuite par la nuque et lui donna plusieurs coups dans le ventre, alors qu’elle
tenait H. dans ses bras, de sorte que ce dernier se serait cogné la tête contre
le mur.
. Il apparaît
qu’une enquête de police (дознание) contre B.A. fut ouverte auprès de la direction régionale des affaires
intérieures de Plovdiv, pour dommages corporels moyennement graves. Le 3
septembre 2009, la police se rendit au domicile de la famille. Une perquisition
fut effectuée et les agents de police saisirent un pistolet à gaz appartenant à
B.A., ainsi qu’un appareil photo contenant des photos de la requérante prises
après les deux incidents allégués. L’intéressée et l’enfant furent conduits à
la station de police, où ils passèrent la nuit.
. Le 4
septembre 2009, la requérante fit des dépositions auprès du tribunal de
district (Районен
съд) de Plovdiv. Selon une expertise
médicale établie le même jour à la demande de la police, l’intéressée
présentait des blessures au niveau des lèvres et trois de ses dents inférieures
avaient été cassées, ce qui lui causait des difficultés pour mâcher. Le médecin
indiqua que ces blessures avaient été causées par un objet contondant et qu’il
était possible qu’elles fussent le résultat de coups de poing. Il situa leur
survenue vers la fin du mois d’août.
. Le même jour,
B.A. se vit notifier un avertissement de police lui enjoignant de ne pas
commettre d’actes de violences physiques et psychiques, ainsi que de s’abstenir
de toute menace à l’égard de la requérante.
. Il apparaît qu’un
centre de crise pour femmes et enfants victimes de violences ou de traite ou
ayant perdu le soutien de leurs proches, situé à Stara Zagora (« le centre
de crise de Stara Zagora »), proposa d’accueillir temporairement la
requérante et l’enfant. L’intéressée affirme que, B.A. s’opposant à ce qu’elle
y amène l’enfant, il promit de respecter l’avertissement de police. Elle se
résolut alors à rester dans le logement commun.
. Il ressort des
éléments du dossier qu’une procédure pénale pour dommages corporels moyennement
graves fut ouverte contre B.A. à une date non précisée.
. Par un
jugement du 20 août 2010, le tribunal de district acquitta B.A. et rejeta l’action
civile de la requérante introduite dans le cadre de la procédure civile.
. Ce jugement
fut contesté par le parquet et par l’intéressée devant le tribunal régional (Окръжен съд).
. Le 18 janvier
2011, le tribunal régional annula le jugement de première instance et reconnut
B.A. coupable de dommages corporels moyennement graves causés à la requérante
entre le 20 et le 31 août 2009. Ce dommage consistait en trois dents inférieures
arrachées, sans lesquelles la requérante pouvait difficilement mâcher. Le
tribunal régional condamna B.A. à une peine d’emprisonnement de deux ans avec
sursis et au versement d’une indemnité de 3 000 levs (BGN) pour le
préjudice moral subi par la requérante.
B. La procédure sur les
allégations mutuelles de violence domestique
. Le 9
septembre 2009, des actions fondées sur la loi contre la violence domestique
furent introduites contre la requérante par B.A. en son nom et au nom de H.,
ainsi que par F.A., auprès du tribunal de district de Plovdiv. Joignant des
déclarations sur l’honneur, ils exposèrent que le 23 août 2009, la
requérante avait tenté de blesser B.A. avec un couteau. Puis, le 29 août 2009,
elle aurait frappé l’enfant avec une savate et aurait lancé des bouteilles
contre lui. Enfin, le 31 août 2009, F.A. aurait été mordu par la requérante.
Les demandeurs sollicitèrent l’application contre la requérante des mesures de
protection prévues par la loi.
. Toujours le 9
septembre 2009, le tribunal de district rejeta l’action introduite par F.A. au
motif qu’il n’était pas habilité par la loi à recourir contre la requérante.
Concernant l’action introduite par B.A. en son nom et au nom de son fils, le
tribunal nota que, selon le droit interne, les déclarations sur l’honneur
pouvaient, à elles seules, servir de base pour accorder des mesures de
protection contre les violences domestiques alléguées. Considérant comme
établie l’existence d’une menace réelle et imminente pour la vie et la santé de
B.A. et H., le tribunal de district ordonna des mesures provisoires. En
particulier, il somma la requérante, avec effet immédiat, de ne pas commettre d’actes
de violence domestique, de s’éloigner du logement commun, et de ne pas approcher
des lieux de repos et de contacts sociaux fréquentés par B.A. et H.
. Le 10
septembre 2009, en application de cette décision, l’intéressée fut expulsée de
l’appartement par la police. Plus tard, elle se rendit au centre de crise de
Stara Zagora, où elle bénéficia d’un hébergement.
. Le 25
septembre 2009, la requérante répondit à l’action de B.A. par l’introduction d’une
demande reconventionnelle consistant à dire que c’était elle qui avait fait l’objet
de violences domestiques, par une agression physique et psychologique, ainsi
que par l’isolement social et la dépendance économique. L’intéressée allégua en
particulier avoir été battue par B.A. et F.A. Elle présenta les documents
établis dans le cadre de l’enquête policière du 4 septembre 2009 et exposa
qu’une procédure pénale contre B.A. était en cours. Elle demanda en outre des
mesures de protection pour elle et l’enfant contre B.A.
. Entre le 5
octobre et le 9 décembre 2009, le tribunal de district tint quatre audiences
lors desquelles des témoins furent auditionnés - un ami de B.A., H.A., et la
directrice du centre de crise de Stara Zagora. Un rapport établi par les
services sociaux fut présenté, et les déclarations des parties ainsi que des
preuves écrites furent recueillies.
. Par un
jugement du 8 janvier 2010, le tribunal de district rejeta les actions de B.A.,
ainsi que sa demande de protection. Il releva en particulier que le seul
témoignage selon lequel la requérante avait commis des actes de violence
domestique venait de H.A., la mère de B.A., et considéra que compte tenu du
lien de parenté entre les deux, il ne convenait pas d’accorder crédit à cette
déclaration.
. Il fit de
même s’agissant de la demande reconventionnelle de la requérante. Le tribunal
constata qu’il n’avait pas été prouvé que celle-ci avait été agressée par B.A.,
le 31 août 2009, les faits n’ayant pas été établis. Les allégations de la
requérante étant essentiellement dirigées contre F.A., son beau-père, qui n’était
pas partie à la procédure, le tribunal précisa que l’intéressée pouvait se
retourner contre celui-ci dans le cadre d’une autre procédure car visiblement
il existait des preuves d’actes de violence domestique de sa part. Concernant
les dépositions de la requérante devant le juge et l’expertise médicale, datées
du 4 septembre 2009, le tribunal considéra qu’il s’agissait de preuves dont il
ne pouvait pas tenir compte car elles n’avaient pas été recueillies dans le
cadre de la procédure pour violences domestiques. Le tribunal ajouta qu’en tout
état de cause il ne ressortait pas de ces documents que B.A. avait commis des
actes de violence domestique le 31 août 2009. Enfin, il indiqua que son
jugement était susceptible d’appel dans un délai de sept jours.
. B.A.
interjeta appel de ce jugement dans sa partie concernant le rejet de ses
propres actions. La requérante contesta l’appel le 9 février 2010.
. Par un
jugement du 21 avril 2010, le tribunal régional estima établi que la requérante
avait commis les violences domestiques alléguées par B.A. Il fonda ses
conclusions sur les déclarations sur l’honneur de B.A. en son nom et au nom de
H., ainsi que sur des dépositions de H.A., dont il considéra qu’il convenait de
tenir compte, à l’opposé de ce que le tribunal de district avait estimé. Le
tribunal releva que la requérante n’avait pas présenté d’éléments prouvant que
ces actes n’avaient pas eu lieu. Dès lors, il annula la partie du jugement de
première instance refusant des mesures de protection pour B.A. et H. contre la
requérante. Il décida d’appliquer de telles mesures mais indiqua que, compte
tenu de l’ensemble des circonstances établies et du comportement de la
requérante, cette dernière ne présentait pas de danger réel et imminent pour la
vie et la santé des demandeurs. Par conséquent, le tribunal régional considéra
qu’il suffisait de délivrer à la requérante un avertissement lui rappelant de
ne pas commettre d’actes de violence domestique, sans pour autant lui interdire
de fréquenter les demandeurs. Ce jugement n’étant pas susceptible de cassation,
il devint définitif.
. Parallèlement
à cette procédure, la requérante demanda au parquet de district (Районна
прокуратура) de Plovdiv, le 23 septembre 2009, l’ouverture d’une procédure pénale
contre B.A. et F.A. en alléguant que leurs déclarations sur l’honneur du 9
septembre 2009 étaient fausses. Par une ordonnance du 11 janvier 2010, le
procureur de district refusa d’ouvrir une telle procédure faute de preuves
concordantes. Le dossier ne fait pas ressortir clairement si cette ordonnance
fut ou non l’objet d’un recours.
C. La
procédure relative à l’action en déchéance de l’autorité parentale
. Le 10
septembre 2009, soit le jour de l’expulsion de la requérante du domicile
commun, B.A. introduisit auprès du tribunal de district une action en déchéance
de l’autorité parentale contre celle-ci. Il soutint que depuis la naissance de
H., sa mère ne s’était pas occupée de lui. C’était lui seul, à l’aide de ses
parents, qui donnait les soins nécessaires à l’enfant. Il exposa que la
requérante n’avait pas un comportement stable et était agressive envers l’enfant
et les autres membres de la famille.
. A une date
non précisée, le tribunal de district demanda à B.A. d’indiquer la nouvelle adresse
de la requérante. B.A. répondit par un courrier en date du 9 octobre 2009.
. Le 23
septembre 2009, la requérante s’adressa au directeur de l’assistance sociale de
Plovdiv, ainsi qu’au directeur du service de protection de l’enfance de
Plovdiv. Elle soutint que H. vivait dans une ambiance de violence et dans de mauvaises
conditions d’hygiène.
. Le 19 octobre
2009, elle demanda aux services sociaux précités de l’assister dans l’organisation
d’une rencontre avec l’enfant. Une rencontre eut lieu le 12 novembre 2009 dans
les locaux des services sociaux, en présence d’un assistant social. Par des
lettres des 17 et 27 novembre 2009, la requérante se plaignit que ce dernier n’eût
pas présenté de rapport à la suite de cette rencontre et demanda aux services
sociaux d’établir un calendrier de rencontres régulières avec l’enfant afin de
préserver les liens. Par une lettre du 18 décembre 2009, les services sociaux
répondirent que l’établissement d’un rapport n’entrait pas dans les obligations
de l’assistant social. Par une lettre du 29 décembre 2009, se référant à la
décision de protection immédiate du tribunal de district du 9 septembre 2009, ils
ajoutèrent que les services sociaux ne pouvaient pas s’engager dans l’organisation
des rencontres entre la requérante et l’enfant.
. Le 5 janvier
2010, la requérante fut informée de l’action en déchéance de son autorité
parentale introduite par B.A.
. Le 5 février
2010, elle déposa une demande reconventionnelle. Elle demandait au tribunal
régional de lui accorder la garde de l’enfant et d’établir un régime restrictif
quant aux contacts avec B.A. Elle arguait que B.A. avait un comportement
agressif envers elle, y compris en présence de l’enfant. Elle demandait en
outre au tribunal d’ordonner des mesures provisoires en lui accordant un droit
de visite à raison de deux rencontres par semaine. Elle indiquait que son
partenaire s’opposait aux visites et qu’elle n’avait pu voir H. qu’une seule
fois depuis la séparation.
. Le 25 mars
2010, les avocates de la requérante introduisirent un recours fondé sur l’article
255 du code de procédure civile auprès du tribunal régional, faisant état de
retards indus de la procédure sur l’exercice de l’autorité parentale et
demandant qu’une audience soit fixée. A la même date, elles demandèrent
également au Conseil supérieur de la magistrature de procéder à une
vérification du fonctionnement du tribunal compétent et d’initier, le cas
échéant, une procédure disciplinaire.
. Le 1er
avril 2010, le juge désigné au sein du tribunal de district examina le dossier
et fixa la première audience au 26 avril 2010. Il demanda la convocation des
témoins, la production des preuves et l’établissement de rapports de la part
des services sociaux. Il laissa de côté la demande de mesures provisoires
relatives au droit de visite et indiqua qu’il se prononcerait sur cette
question lors de la première audience.
. A l’audience
du 26 avril 2010, B.A. et la requérante furent présents. Cette dernière indiqua
qu’elle n’avait vu son enfant que trois fois au cours des huit derniers mois et
allégua que B.A. empêchait les rencontres et refusait de laisser l’enfant seul
avec elle. Le juge en charge de l’affaire considéra que la demande d’ouverture
d’une procédure relative aux mesures provisoires était mal fondée au motif qu’elle
retarderait le déroulement de la procédure sur l’action en déchéance de l’autorité
parentale, ce qui n’était pas dans l’intérêt des parties et du bon fonctionnement
de la justice. Ensuite, le juge entendit un témoin et ordonna, à la demande de
la requérante, une expertise pédopsychologique.
. L’audience
suivante se tint le 26 mai 2010. Le juge du tribunal de district constata que l’expert
nommé n’avait pas été cité régulièrement. Il entendit un témoin et ajourna l’affaire
au 23 juin 2010.
. A l’audience
tenue à cette dernière date, le juge considéra de nouveau que l’expert n’avait
pas été cité régulièrement et que, par ailleurs, celui-ci avait fait savoir qu’il
renonçait faute des compétences requises. A la demande des parties, le tribunal
ordonna que l’expertise soit effectuée par un autre expert. Il ajourna l’affaire
au 20 septembre 2010.
. Le weekend
des 3 et 4 juillet 2010, la requérante rencontra H. dans une chambre d’hôtel
louée à cette fin. B.A. se serait installé dans le même hôtel et aurait refusé
de la laisser seule avec l’enfant. Le 3 août 2010, la requérante s’en
plaignit auprès des services sociaux régionaux. Un assistant social rencontra B.A.
le 17 août 2010. Ce dernier signa une déclaration attestant qu’il avait été informé
de ses obligations et droits parentaux.
. Le 14 juillet
2010, un inspecteur auprès du Conseil supérieur de la magistrature émit un avis
d’ouverture d’une procédure disciplinaire contre le juge en charge du dossier sur
l’autorité parentale. Il était fait grief à ce dernier d’avoir retardé indûment
l’examen du dossier pendant environ quatre mois.
. Il ressort du
dossier que la requérante partit au Brésil le 17 août 2010.
. L’audience
suivante dans la procédure sur les droits parentaux se tint le 20 septembre
2010. L’avocate de la requérante demanda la récusation du juge chargé de l’affaire
pour manque d’impartialité compte tenu de la procédure disciplinaire engagée à
la suite du recours de la requérante pour retards indus. Le juge rejeta d’abord
cette demande comme mal fondée ; puis, il se déporta de sa propre
initiative. L’affaire fut renvoyée au président du tribunal de district pour désignation
d’un autre juge.
. L’audience devant le nouveau juge se tint le 27 octobre 2010. Un pédopsychologue fut entendu. La
représentante de la requérante demanda des mesures provisoires en sollicitant
un régime des contacts fixé à trois weekends par mois. Elle souligna que depuis
le mois de septembre 2009 l’intéressée n’avait vu son enfant que quatre fois du
fait que B.A. évitait les rencontres ou l’empêchait de le voir seule. Le juge
procéda à l’examen des mesures provisoires demandées. Il fixa le régime des
visites de la mère à deux dimanches par mois, quinze jours en été et trois
heures le jour de l’anniversaire de l’enfant.
. Le juge
ordonna en outre une expertise pédopsychologique complémentaire et ajourna l’affaire
au 1er décembre 2010.
. A l’audience
tenue à cette dernière date, le juge constata que l’expert n’avait pas été
désigné. Il ordonna dès lors la désignation d’un expert. La représentante de la
requérante demanda la révision du régime des contacts afin d’inclure des jours
de visite pendant les fêtes de fin d’année. Le juge examina la demande et
accorda à la requérante des visites supplémentaires de trois heures par jour au
cours des fêtes indiquées. L’affaire fut reportée au 17 janvier 2011.
. Le 4 décembre
2010, la requérante revint en Bulgarie. Elle rencontra H. dans une chambre d’hôtel,
dans la journée du 5 décembre, et pendant quelques heures dans la journée du 6
décembre, date de l’anniversaire de l’enfant. B.A. ne l’aurait pas laissée seule
avec l’enfant au cours de cette visite.
. Le tribunal
de district rendit son jugement sur l’exercice de l’autorité parentale le 23
février 2011. Il constata, sur la base des témoignages et des rapports des
services sociaux, que les deux parents étaient motivés pour s’occuper des soins
et de l’éducation de l’enfant. Le tribunal releva que dans la mesure où les
parents se disputaient l’autorité parentale, il lui revenait de prendre une
décision conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant. Il constata, d’une part,
qu’il avait été établi que depuis la naissance de l’enfant sa mère ne lui
procurait pas les soins nécessaires adéquats. De plus, elle n’avait pas prouvé
qu’elle avait un logement approprié pour héberger H. Enfin, elle n’exerçait aucune
activité professionnelle et comptait uniquement sur l’aide financière de ses
proches au Brésil. D’autre part, le tribunal observa qu’il existait entre le
père et l’enfant une forte relation émotionnelle, et que l’enfant bénéficiait
auprès de lui de tous les soins nécessaires à son développement et à son
éducation. B.A. pouvait en outre bénéficier de l’aide de ses parents, qui
participaient de manière active depuis la naissance à l’éducation de H.
. Ainsi, le
tribunal de district estima que la garde de H. devait être confiée à B.A. Il
releva cependant qu’afin de procurer à l’enfant un environnement émotionnel
sain pour son développement, il convenait de lui assurer la possibilité de
communiquer pleinement avec sa mère. Il nota que des mesures devaient être prises afin de renforcer et de préserver les liens entre la requérante et l’enfant,
les contacts entre les deux ayant subi une interruption importante au cours de
la procédure. Aussi le tribunal décida-t-il qu’il était dans l’intérêt
de l’enfant de fixer un régime de contacts peu restrictif, à savoir des visites
pendant deux weekends par mois, un mois en été, ainsi que trois heures par jour
à Noël, au Nouvel An, à Pâques et le jour de l’anniversaire de H. Enfin, le
tribunal condamna la requérante à verser une pension alimentaire mensuelle au
nom de l’enfant à hauteur de 60 BGN (soit environ 30 euros (EUR)).
. Le 30 mars
2011, la requérante interjeta appel de ce jugement auprès du tribunal régional.
. La première
audience fut fixée au 11 juillet 2011 puis reportée au 19 septembre 2011 à
la demande de B.A., ce dernier étant en congé annuel à la première date.
. A l’audience
tenue à cette dernière date, le tribunal recueillit des pièces écrites, parmi
lesquelles le jugement définitif condamnant B.A. pour avoir infligé une lésion
corporelle moyennement grave à la requérante. A la demande de cette dernière,
le tribunal ordonna l’élaboration d’un rapport social sur les relations entre chacun
des parents et l’enfant. La requérante demanda aussi l’audition d’un témoin au
sujet de ses capacités parentales. Le tribunal rejeta cette demande.
. Le 30
septembre 2011, la requérante adressa un courrier au tribunal régional en
expliquant que B.A. l’empêchait de communiquer avec l’enfant. Elle envoya la
même lettre à la direction de l’assistance sociale et au parquet de district en
demandant que des mesures soient prises dans le cadre de leurs compétences. L’intéressée
n’indiqua pas que des mesures provisoires avaient été fixées par une décision
de justice du 27 octobre 2010 (paragraphe 43 ci-dessus) et ne demanda pas d’assistance
pour son exécution.
. Par un jugement
du 30 novembre 2011, le tribunal régional confirma le jugement du tribunal de
district sur l’exercice de l’autorité parentale du 23 février 2011. Il examina
les documents et les preuves recueillis, y compris le jugement du 18 janvier
2011 condamnant B.A. pour dommages corporels. Le tribunal nota en particulier
que les deux parents disposaient des capacités intellectuelles nécessaires pour
l’éducation et la garde de l’enfant, et qu’aucun des deux ne présentait de danger
pour son développement mental et physique. Les données du dossier faisaient
apparaître un manque de respect et d’entente entre les parents, mais aucun comportement
d’agression dirigé contre l’enfant. Compte tenu du fait que ce dernier était
habitué à un environnement stable dans le foyer de son père où il se sentait
bien, et que les conditions dans lesquelles il vivait étaient conformes à ses
besoins, il paraissait inopportun de le sortir de ce cadre, sauf à lui faire
courir le risque d’un choc émotionnel. Le tribunal ajouta que le régime des
contacts entre la mère et l’enfant devait être maintenu tel que fixé par le
tribunal de district. Enfin, le tribunal régional précisa qu’il tenait compte
de toutes les pièces écrites présentées devant lui, mais n’accordait pas foi
aux faits établis dans le cadre des autres procédures engagées entre les
parties, le code de procédure civile l’obligeant à apprécier les preuves
directement.
. Le 4 janvier
2012, la requérante se pourvut en cassation par le biais du tribunal régional.
Elle soutint que les qualités morales et éducatives des parents, ainsi que l’âge
de l’enfant, n’avaient pas été pris en considération. De plus, les juridictions
inférieures n’avaient pas pris en compte le fait que B.A. avait été reconnu
coupable de dommages corporels moyennement graves à son égard.
. Par une
notification du 5 janvier 2012, reçue par l’une des représentantes de la
requérante le 9 janvier 2012, le tribunal régional indiqua que la requérante devait régler la taxe judiciaire et que sa demande de pourvoi devait être signée par toutes ses
représentantes. Le délai pour se conformer à ces instructions était de sept
jours. Une des représentantes de la requérante répondit à cette notification le
16 janvier 2012. Le 17 janvier 2012, le tribunal régional donna suite au
pourvoi et accorda à B.A. un délai d’un mois pour présenter son mémoire. Il ressort
de la base de données publique de la Cour suprême de cassation que la haute
juridiction tint une audience le 18 octobre 2012 et qu’elle rejeta le recours
de la requérante comme irrecevable par une décision définitive du 21 novembre
2012.
II. LE DROIT ET LA PRATIQUE
INTERNES PERTINENTS
A. Les mesures provisoires dans le
cadre des procédures sur l’exercice de l’autorité parentale
. Aux termes de
l’article 127, alinéa 2, du code de la famille de 2009, les litiges relatifs à
l’exercice de l’autorité parentale entre parents séparés peuvent être portés devant le tribunal de district. Selon l’article 127, alinéa 3, à la demande d’un des
parents, le tribunal fixe dans l’intérêt de l’enfant des mesures provisoires
relatives au droit de visite, après avoir recueilli l’avis de la direction de l’assistance
sociale.
B. La
procédure d’exécution en matière de droit de garde et de droit de visite
. Le code de
procédure civile de 2008 prévoit dans son article 528 que l’organe chargé de l’exécution
judiciaire peut demander l’assistance des services sociaux et de la police dans
toutes les procédures d’exécution ayant trait à l’obligation de « remettre
un enfant ».
C. Le recours en
cas de retards indus des procédures civiles
. Selon l’article
255 du code de procédure civile de 2008, les parties à une procédure civile
peuvent introduire un recours lorsque le tribunal tarde indûment à accomplir un
acte de procédure. Ce recours est introduit auprès de la juridiction supérieure
par l’intermédiaire du tribunal compétent pour l’affaire.
. Lorsque ce
dernier accomplit immédiatement l’acte demandé et en informe la partie
concernée, le recours est considéré comme retiré. Si toutefois la partie
déclare explicitement, dans un délai d’une semaine après avoir reçu cette
information, qu’elle souhaite maintenir son recours, ce dernier est renvoyé
pour examen à la juridiction supérieure (article 256).
D. Les mesures de protection
contre la violence domestique
. La loi de
2005 sur la protection contre la violence domestique prévoit l’application de diverses
mesures. En particulier, le tribunal compétent peut sommer les auteurs d’actes
de violence domestique de s’en abstenir, de quitter le logement commun, de ne
pas approcher du logement de la victime ou de ses lieux de travail ou de
contacts sociaux, et l’obliger à suivre des programmes spécialisés. Le tribunal
peut encore fixer temporairement le domicile de l’enfant chez la victime si le
parent auteur des actes en a la garde (article 5), sauf lorsqu’une procédure
concernant la garde est pendante devant les juridictions (article 5, alinéa 3,
en relation avec l’alinéa 1, point 4).
. Parmi les
documents à présenter dans toute procédure sur le fondement de cette loi figure
une déclaration sur l’honneur de la personne qui se prétend victime de violence
domestique (article 9, alinéa 3). En cas d’absence d’autres preuves, le
tribunal peut ordonner des mesures de protection sur la seule base de cette
déclaration (article 13, alinéa 3).
. Le refus de
se plier aux mesures ordonnées par le tribunal peut conduire à l’imposition d’amendes,
à l’arrestation ou à des poursuites pénales.
E. Le code pénal
. Les articles
128 à 131 du code pénal de 1968 érigent en infraction pénale le fait de causer
à autrui, intentionnellement ou par négligence, un dommage corporel léger,
moyennement grave ou grave. Une détérioration permanente de la santé sans
danger pour la vie est ainsi qualifiée de dommage corporel moyennement grave
(article 129) et le fait de provoquer une telle détérioration est passible d’une
peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans.
EN DROIT
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE
8 DE LA CONVENTION CONCERNANT LES MESURES PROVISOIRES DE GARDE
. La requérante
allègue que les autorités nationales ont entravé son droit au respect de la vie
familiale en ce que, d’une part, sa demande de mesures provisoires relatives au
droit de visite de son enfant introduite dans le cadre de la procédure sur l’exercice
de l’autorité parentale n’a pas été examinée promptement et que, d’autre part, aucune
mesure d’exécution n’a été prise contre le père de son enfant, qui empêchait
les visites accordées. L’intéressée invoque l’article 8 de la Convention, ainsi
libellé :
« 1. Toute personne a droit au
respect de sa vie privée et familiale (...).
2. Il ne peut y avoir ingérence d’une
autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette
ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une
société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté
publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à
la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la
morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »
A. Sur la recevabilité
. Le
Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes pour ce qui
est de la partie du grief relative à l’absence de démarches prises par les
autorités afin d’exécuter les mesures provisoires déterminées par le juge le 27
octobre 2010 (paragraphe 43 ci-dessus). Il expose en particulier que le code de
procédure civile prévoit la possibilité pour le parent intéressé de s’adresser à
l’organe chargé de l’exécution des décisions judiciaires afin de demander la
coopération des autorités compétentes pour mettre en œuvre les mesures
provisoires, possibilité dont la requérante ne s’est pas prévalue.
. Se référant à
ses lettres en date du 30 septembre 2011 adressées au tribunal régional, à la
direction de l’assistance sociale et au parquet de district (paragraphe 52
ci-dessus), la requérante réplique qu’elle a informé les autorités compétentes
des obstacles qu’elle rencontrait pour communiquer avec son enfant. Elle ajoute
que ces autorités étaient déjà au courant, même avant la détermination des
mesures provisoires, que B.A. faisait obstacle aux visites, comme l’indique par
exemple la déclaration que ce dernier avait signée auprès de l’assistant social
le 17 août 2010 (paragraphe 39 ci-dessus). Ainsi, la requérante affirme qu’elle
a épuisé toutes les voies de droit internes permettant de mettre fin aux
obstacles mis par B.A. aux visites à son fils.
. La Cour rappelle que la finalité de l’article 35 est de ménager aux
Etats contractants l’occasion de prévenir ou de redresser les violations
alléguées contre eux avant que ces allégations ne lui soient soumises (voir,
parmi d’autres, Civet c. France [GC], no 29340/95, § 41, CEDH 1999-VI). L’article 35
§ 1 de la Convention doit être appliqué avec une certaine souplesse et sans
formalisme excessif, mais il n’exige pas seulement que les Requêtes aient été
adressées aux tribunaux internes compétents et qu’il ait été fait usage des
recours effectifs permettant de contester les décisions déjà prononcées : encore
faut-il en effet que le ou les griefs particuliers dont on entend saisir la
Cour aient d’abord être soulevés, au moins en substance, dans les formes et
délais prescrits par le droit interne, devant ces mêmes juridictions nationales
appropriées (voir, parmi d’autres, Cardot c. France, 19 mars 1991, § 34,
série A no 200, et Elçi et autres c. Turquie, nos 23145/93
et 25091/94, §§ 604-605, 13 novembre 2003).
. Se tournant
vers la présente espèce, la Cour constate qu’il est vrai que, onze mois après
la décision sur les mesures provisoires, la requérante a contacté certaines
institutions pour exposer les difficultés qu’elle avait
pour rencontrer son fils (paragraphe 52 ci-dessus). Toutefois, en vertu du
droit interne pertinent, le parent qui se plaint de la non-exécution d’une
décision de justice mettant en place des mesures provisoires de contact avec
son enfant doit s’adresser à l’organe chargé de l’exécution
des décisions judiciaires qui peut, de son côté, demander l’assistance des services sociaux et de la police afin d’assurer l’exécution
adéquate de cette décision (paragraphe 57 ci-dessus). Or,
il apparaît que la requérante n’a pas formulé une telle demande auprès de l’organe
compétent. Ses lettres étaient dirigées vers d’autres institutions et, de plus,
il apparaît que la requérante n’a pas porté à leur connaissance qu’elle était en
possession d’une décision judiciaire sur la détermination des mesures
provisoires, et pour l’exécution de laquelle elle sollicitait l’assistance des
autorités. Dans ces conditions, la Cour estime que c’est à tort que la
requérante a omis d’exercer la voie de recours prévue dans l’article 528 du
code de procédure civile selon les formes requises du droit interne. Par
ailleurs, l’intéressée ne soutient pas que cette voie n’aurait pas été effective
ou adéquate. Il convient dès lors d’accueillir l’objection soulevée par le
Gouvernement à cet égard et de déclarer cette partie du grief irrecevable pour non-épuisement des voies de recours internes, conformément à l’article 35 §§ 1 et 4
de la Convention.
. Pour ce qui est
de la partie du grief selon laquelle les autorités n’ont pas examiné
promptement la demande de mesures provisoires relatives au droit de visite de l’enfant
au cours de la procédure sur l’exercice de l’autorité parentale, la Cour
constate qu’elle n’est pas manifestement mal fondée
au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. Elle ne se heurte par ailleurs
à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de la déclarer recevable.
B. Sur le fond
. Le
Gouvernement expose que plusieurs éléments ont compliqué le processus de
détermination des mesures provisoires liées au droit de visite de la requérante
à son fils. D’abord, les positions des parties dans la procédure sur l’exercice
de l’autorité parentale ont été contradictoires, ce qui a rendu nécessaire un
certain temps pour recueillir des preuves. Ensuite, compte tenu des relations conflictuelles
des deux parents, ceux-ci n’ont pas eu un comportement coopératif dans la
procédure. De plus, la procédure parallèle conduite en application de la loi
sur la protection contre les violences domestiques devait aussi être prise en
compte. Compte tenu de l’ensemble de ces éléments et de la complexité de l’affaire,
le Gouvernement estime que même s’il est vrai qu’un retard de quatre mois a été
constaté dans la période du 5 février 2010 au 20 septembre 2010 par le Conseil
supérieur de la magistrature, la durée globale de l’examen de la demande de
mesures provisoires ne paraît pas excessive au point de porter atteinte au
droit au respect de la vie familiale de la requérante protégé par l’article 8.
. La requérante
estime que les autorités judiciaires ont manqué à se prononcer sur les mesures
provisoires pendant la période comprise entre le 10 septembre 2009 et le 27
octobre 2010, ce qui a eu pour résultat de l’éloigner de son enfant. Elle
estime que les autorités n’ont tenu compte ni de ses affirmations selon lesquelles
le père empêchait tout contact entre elle et l’enfant, ni du fait qu’elle avait
engagé une procédure pour mauvais traitements contre B.A. Elle met en avant
que, contrairement à ce qu’affirme le Gouvernement, les éléments de preuve
nécessaires pour la détermination des mesures provisoires avaient déjà été
recueillis au moment de l’introduction des actions des parties, soit le 10
septembre 2009 et le 5 février 2010 respectivement, et que la procédure
sur les allégations de violences domestiques avait pris fin le 21 avril 2010.
Par conséquent, à la date de la première audience, soit le 26 avril 2010, le
tribunal de district en charge de l’affaire sur l’exercice de l’autorité
parentale disposait de suffisamment d’éléments pour se prononcer sur les
mesures provisoires.
. La Cour
rappelle d’abord sa jurisprudence constante selon laquelle, si l’article 8 a
essentiellement pour objet de prémunir l’individu contre les ingérences
arbitraires des autorités publiques, il ne se contente pas de commander à l’Etat
de s’abstenir de pareilles ingérences : à cet engagement plutôt négatif
peuvent s’ajouter des obligations positives inhérentes à un respect effectif de
la vie privée ou familiale. Elles peuvent impliquer l’adoption de mesures
visant au respect de la vie familiale jusque dans les relations des individus
entre eux (X et Y c. Pays-Bas,
26 mars 1985, § 23, série A no 91, et M.C. c. Bulgarie, no
39272/98, § 150, CEDH 2003-XII).
. La Cour
réitère à cet égard le principe bien établi dans sa jurisprudence selon lequel
le but de la Convention consiste à protéger des droits concrets et effectifs
(voir, mutatis mutandis, Artico c. Italie, 13 mai 1980, § 33, série A no
37). Dans cette logique, elle rappelle qu’un respect
effectif de la vie familiale commande que les relations futures entre parents
et enfants se règlent sur la seule base de l’ensemble des éléments pertinents,
et non par le simple écoulement du temps (Mihailova c.
Bulgarie, no 35978/02, § 82, 12
janvier 2006).
. La Cour
rappelle ensuite qu’en matière de respect de la vie familiale, les obligations positives de l’Etat impliquent la
mise en place d’un arsenal juridique adéquat et suffisant pour assurer les
droits légitimes des intéressés. Cet arsenal doit permettre à l’Etat d’adopter
des mesures propres à réunir le parent et son enfant, y compris en cas de
conflit opposant les deux parents (voir, mutatis mutandis, Ignaccolo-Zenide c. Roumanie, no
31679/96, § 108, CEDH 2000-I, Sylvester c. Autriche, nos
36812/97 et 40104/98, § 68, 24 avril 2003, Zavřel
c. République tchèque, no 14044/05, § 47,
18 janvier 2007, et Mihailova,
précité, § 80). Elle rappelle aussi que les obligations
positives ne se limitent pas à veiller à ce que l’enfant puisse rejoindre son
parent ou avoir un contact avec lui, mais qu’elles englobent également l’ensemble
des mesures préparatoires permettant de parvenir à ce résultat (voir, mutatis
mutandis, Kosmopoulou
c. Grèce, no 60457/00, § 45, 5 février 2004, Amanalachioai c. Roumanie, no
4023/04, § 95, 26 mai 2009, Ignaccolo-Zenide, précité, §§ 105 et
112, et Sylvester, précité, § 70).
. Pour être
adéquates, les mesures visant à réunir le parent et son enfant doivent être
mises en place rapidement, car le passage du temps peut avoir des conséquences
irrémédiables pour les relations entre l’enfant et celui des parents qui ne vit
pas avec lui (voir, mutatis mutandis, Ignaccolo-Zenide, précité, § 102, Maire
c. Portugal, no 48206/99, § 74, CEDH
2003-VII, Pini et autres c. Roumanie, nos 78028/01 et 78030/01, § 175, CEDH 2004-V, Bianchi c. Suisse, no 7548/04, §
85, 22 juin 2006, Mincheva c. Bulgarie, no 21558/03, § 84, 2 septembre 2010). En particulier, compte
tenu de la nature et de l’objectif des mesures provisoires de garde, les
actions y afférentes doivent normalement être traitées avec un certain degré de
priorité à moins qu’il existe des raisons spécifiques de ne pas le faire (Bevacqua et S. c. Bulgarie, no
71127/01, § 68, 12 juin 2008).
. La tâche de
la Cour n’est pas de se substituer aux organes compétents pour réglementer les
questions de garde et de visites, mais d’apprécier sous l’angle de la
Convention les décisions que ces autorités ont rendues dans l’exercice de leur
pouvoir d’appréciation (Hokkanen c. Finlande, 23 septembre 1994, § 55, série A no 299-A).
. En l’espèce,
la Cour note en premier lieu qu’il n’est pas contesté que le lien entre la
requérante et son enfant relève de la notion de vie familiale au sens de l’article
8.
. La Cour
estime ensuite que, devant les circonstances qui lui sont soumises, sa tâche
consiste à examiner si la réponse des autorités à la nécessité de prendre des
mesures propres à maintenir les liens de la requérante avec son enfant au cours
de la procédure sur l’exercice de l’autorité parentale a été conforme à leurs
obligations positives découlant de l’article 8.
. La Cour
observe qu’à l’époque des faits, le droit interne prévoyait que le tribunal de
district était compétent pour fixer, au cours de tout litige sur l’exercice de
l’autorité parentale et à la demande de l’un des parents séparés des mesures
provisoires relatives au droit de visite (paragraphe 56 ci-dessus). Il est vrai que la requérante n’a pas introduit d’action en déchéance
de l’autorité parentale contre le père accompagnée d’une demande de mesures
provisoires dès sa séparation d’avec son enfant et son compagnon, intervenue au
début du mois de septembre 2009, parallèlement à sa demande reconventionnelle de
mesures de protection contre les violences domestiques prétendues, alors qu’elle
était libre de le faire. Toutefois, elle s’est prévalue de la voie en question
le 5 février 2010, dès qu’elle a été informée que son compagnon avait
introduit, pour sa part, une action fondée sur l’article 127 du code de la
famille (paragraphe 33 ci-dessus). Le tribunal a
fixé le régime des visites le 27 octobre 2010. La Cour retient dès lors que la demande
relative aux mesures provisoires a été examinée entre ces deux dates, distantes
de plus de huit mois et demi.
. La Cour note en
outre que la demande de mesures provisoires de garde a été formulée dans une
situation où la requérante et le père de son enfant, alors âgé de deux ans,
étaient séparés et se trouvaient en litige concernant l’autorité parentale. De
plus, les relations des deux parents s’étaient détériorées et ils avaient tous
deux engagé des procédures ayant trait à des violences physiques aussi bien entre
eux qu’à l’égard de l’enfant. Enfin, la requérante prétendait que B.A., le
père, l’empêchait de rendre des visites à son fils, ou bien que ce dernier ne
la laissait pas voir son enfant seule lors des rares rencontres qui ont eu lieu
(paragraphes 33, 36 et 43 ci-dessus).
. Dans de
telles circonstances, la Cour estime qu’il pesait sur le tribunal compétent une
obligation de se prononcer d’urgence sur les mesures provisoires relatives au
régime des contacts entre la requérante et son enfant, compte tenu en outre du
bas âge de ce dernier (paragraphe 75 ci-dessus). Elle ne relève pas de
raisons spécifiques de ne pas le faire, d’autant plus que la demande de la
requérante était fondée, entre autres, sur des allégations de comportement
agressif de la part de B.A. envers elle et sur le fait qu’elle n’avait vu l’enfant
que trois fois en l’espace de huit mois (paragraphes 33 et 36 ci-dessus ; voir
aussi Bevacqua et S., précité,
§ 68).
. La Cour rappelle
avoir déjà dit qu’une durée d’examen d’environ huit mois pour une demande de
mesures provisoires de garde est sujette à critique, notamment si les autorités
ne démontrent pas une attention suffisante au besoin de réagir avec une diligence
particulière pendant cette période (Bevacqua et S., précité, § 76). Il convient dès
lors de vérifier si, compte tenu des circonstances de l’affaire, les autorités
bulgares ont procédé avec l’attention et la promptitude nécessaires pour
examiner la demande de la requérante.
. Il est vrai
que les allégations de la requérante, ainsi que les circonstances pertinentes
concernant la situation de l’enfant nécessitaient une vérification qui ne
pouvait être réalisée sans recueillir des preuves. Dès lors, la requérante ne
pouvait s’attendre à une réponse immédiate dès l’introduction de sa demande d’application
de mesures provisoires. Force est toutefois de constater qu’aucun examen du
dossier n’a été entrepris avant le 1er avril 2010, soit pendant
environ deux mois après la demande. C’est seulement à cette date que le
tribunal compétent ordonna la convocation des témoins, la réalisation de
rapports sociaux et la production des preuves.
. De plus, il
apparaît que la question spécifique des mesures provisoires n’a été traitée
avec aucune priorité par la suite non plus car le tribunal de district a, dans
un premier temps, délibérément refusé de se prononcer au motif que cet examen
retarderait la procédure sur la déchéance de l’autorité parentale (paragraphe
36 ci-dessus) et, dans un second temps, reporté les audiences à deux reprises
pour des erreurs visiblement non attribuables à la requérante, telle que la
citation irrégulière d’un expert (paragraphes 37-38 ci-dessus).
. La Cour note par ailleurs qu’un changement du juge initialement désigné
a dû être effectué, ce qui a nécessité un temps supplémentaire d’environ un
mois entre le déport du premier juge et l’audience tenue devant le nouveau juge (paragraphes 42-43 ci-dessus), laps de temps qui ne semble pas
déraisonnable en soi. En revanche, aucune raison valable n’a été avancée par le
Gouvernement pour expliquer le refus d’examiner la demande de mesures
provisoires entre le 5 février et le 27 octobre 2010, alors qu’il était évident
que la requérante ne bénéficiait pas de contacts réguliers avec son enfant. De
plus, depuis le 21 avril 2010, elle ne se trouvait plus dans l’interdiction
de l’approcher, selon la dernière décision définitive dans la procédure pour
violences domestiques (paragraphe 26 ci-dessus). D’ailleurs, le Conseil
supérieur de la magistrature a constaté, et le Gouvernement le reconnaît, que
la procédure a été indûment retardée pendant environ quatre mois (paragraphes
40 et 70 ci-dessus). Enfin le tribunal de district a noté, dans son jugement du
23 février 2011, que les contacts entre la mère et l’enfant avaient subi une
interruption importante (paragraphe 48 ci-dessus).
. Au vu de ce
qui précède, et notamment en raison du défaut injustifié de se prononcer,
pendant une période de plus de huit mois, sur la question des contacts de la
requérante avec son enfant de bas âge, dans des conditions de relations tendues
entre les parents, la Cour estime que les autorités n’ont pas rempli leur obligation
positive de prendre des mesures adéquates pour préserver les relations entre la
requérante et son enfant.
. Il y a eu dès
lors violation de l’article 8 de la Convention de ce chef.
II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE
6 DE LA CONVENTION
. La requérante
se plaint de la durée de la procédure sur l’action en déchéance de l’autorité
parentale. Elle invoque l’article 6 de la Convention, dont les parties
pertinentes se lisent comme suit :
« Toute personne a droit à ce que sa cause
soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui
décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère
civil (...) »
. Le
Gouvernement soulève une exception de non-épuisement des voies de recours
internes en faisant valoir que la requérante aurait pu introduire une action en
dommages et intérêts fondée sur la loi de 1988 sur la responsabilité
délictuelle de l’Etat et demander ainsi une compensation pour les prétendus retards
dans la procédure. Il estime en outre que malgré le retard de quatre mois
constaté par l’inspecteur du Conseil supérieur de la magistrature (paragraphe 40
ci-dessus), les deux premières juridictions ont examiné l’affaire avec
suffisamment de diligence.
. La requérante
réplique que selon le droit et la pratique internes, ce recours n’est pas
effectif pour les griefs tirés des durées des procédures judiciaires.
. La Cour
estime qu’il ne s’impose pas en l’espèce d’examiner la question de l’épuisement
des voies de recours internes, dans la mesure où ce grief est en tout état de
cause manifestement mal fondé pour les motifs exposés ci-dessous.
. La Cour retient
que la période à prendre en considération a débuté au moment où la requérante a
été assignée, soit le 5 janvier 2010, et qu’elle s’est achevée par une décision
définitive du 21 novembre 2012 de la Cour suprême de cassation (paragraphe 55 ci-dessus).
Sa durée globale s’élève donc à deux ans et dix mois pour trois degrés de
juridiction.
. La Cour garde
à l’esprit que dans les affaires concernant l’état des personnes, une diligence
particulière s’impose eu égard aux éventuelles conséquences qu’une lenteur
excessive peut avoir notamment sur la jouissance du droit au respect de la vie
familiale (Laino c. Italie
[GC], no 33158/96, § 18, CEDH 1999-I). Elle a examiné
ci-dessus, dans le contexte de l’article 8, les effets des retards de la
procédure sur l’examen de la demande de la requérante tendant à l’adoption de
mesures provisoires. Le grief soulevé sur le terrain de l’article 6 est
différent dans la mesure où il concerne le point de savoir si l’examen du
bien-fondé de la procédure civile a eu lieu dans un délai raisonnable.
. Eu égard aux
critères établis dans sa jurisprudence (Frydlender c. France [GC],
no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII) et compte tenu, en
particulier, de la nature du litige en cause, mais aussi de la durée globale de
la procédure, au regard du fait que l’affaire a été soumise à trois degrés de
juridiction et que l’établissement des rapports sociaux, l’audition des témoins
et le recueil d’autres preuves nécessitent inévitablement un certain temps, la
Cour n’aperçoit aucune apparence de violation de l’article 6 § 1 de la
Convention dans le cas d’espèce (voir aussi Bevacqua et S., précité,
§§ 76, 91-93, où la Cour a jugé que la durée d’examen d’un litige
similaire pendant environ deux ans et trois semaines par deux degrés de
juridiction, malgré un retard constaté dans l’adoption des mesures provisoires,
n’était pas contraire à l’article 6 § 1).
. Il convient
dès lors de déclarer ce grief irrecevable pour défaut manifeste de fondement,
au sens de l’article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention.
III. SUR LES AUTRES VIOLATIONS
ALLÉGUÉES
. Dans sa
requête initiale la requérante soulève un grief tiré de l’article 3 en
alléguant des mauvais traitements de la part de particuliers en relation avec
les évènements de la fin du mois d’août 2009. Invoquant les articles 6, 8, 13
et 14, elle se plaint ensuite de l’iniquité et de la durée de la procédure pour
violences domestiques, de l’absence de motivation des décisions de justice et
du défaut des autorités de prendre des mesures pour la protéger contre les
violences domestiques alléguées. L’intéressée dénonce également l’absence d’ouverture
d’une procédure pénale pour fausses déclarations contre B.A. et F.A. Enfin, au
regard de l’article 8, elle se plaint d’une entrave à son droit au respect de
la vie familiale en raison de la décision adoptée par les deux premières
juridictions qui ont statué sur la question de l’exercice de l’autorité
parentale, et accordé notamment cet exercice au père de l’enfant.
. En ce qui
concerne cette partie de la requête, compte tenu de l’ensemble des éléments en
sa possession et dans la mesure où elle est compétente pour connaître des
allégations formulées, la Cour ne relève aucune apparence de violation des
droits et libertés garantis par la Convention ou ses Protocoles. Il s’ensuit que ces griefs sont
manifestement mal fondés et qu’ils doivent être rejetés, en application de l’article
35 §§ 3 et 4 de la Convention.
IV. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE
41 DE LA CONVENTION
98. Aux termes de l’article 41 de la
Convention,
« Si la Cour
déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le
droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement
les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y
a lieu, une satisfaction équitable. »
A. Dommage
. La requérante
réclame 30 000 EUR au titre du préjudice moral qu’elle aurait subi.
. Le
Gouvernement conteste ces prétentions.
. La Cour estime
que la requérante a subi un dommage moral en raison du défaut des autorités d’examiner
avec diligence et priorité l’application des mesures provisoires de garde au
sujet de son enfant au cours de la procédure sur l’action en déchéance de l’autorité
parentale. Statuant en équité, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer à la
requérante 1 500 EUR au titre du préjudice moral.
B. Frais et dépens
. La
requérante demande également 962 BGN
(environ 490 EUR) pour les frais et dépens engagés devant les juridictions
internes pour la réalisation d’une expertise, les taxes judiciaires et les honoraires
d’avocat. En ce qui concerne les frais engagés dans la procédure devant la
Cour, l’intéressée demande, justificatifs à l’appui, 36 BGN (environ 18 EUR)
pour frais postaux, ainsi que 5 460 EUR pour frais de conseil et de représentation
correspondant à 91 heures de travail rémunérées à 60 EUR l’heure.
. Le
Gouvernement estime que ces demandes sont excessives.
. Selon la
jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses
frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur
nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce et compte tenu
des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour rejette la
demande relative aux frais et dépens de la procédure nationale, estime
raisonnable la somme de 2 500 EUR tous frais confondus au titre des frais
et dépens pour la procédure devant elle et l’accorde à la requérante.
C. Intérêts moratoires
. La Cour juge
approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de
la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois
points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1. Déclare la requête recevable
quant au grief tiré de l’article 8 concernant le défaut allégué des autorités
de se prononcer promptement sur la demande relative aux mesures provisoires de
garde, et irrecevable pour le surplus ;
2. Dit qu’il y a eu violation
de l’article 8 de la Convention pour ce qui est de la durée pendant laquelle
les juridictions ont examiné la question des mesures provisoires de garde ;
3. Dit
a) que l’Etat défendeur doit verser à
la requérante, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu
définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les
sommes suivantes, à convertir en BGN au taux applicable à la date du
règlement :
i) 1 500 EUR (mille cinq cents
euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage
moral ;
ii) 2 500 EUR (deux mille cinq
cents euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par la
requérante, pour frais et dépens ;
b) qu’à compter de l’expiration dudit
délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple
à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale
européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de
pourcentage ;
4. Rejette la demande de
satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit
le 18 décembre 2012, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Lawrence Early Ineta
Ziemele
Greffier Présidente