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European Court of Human Rights


You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> Gozum v. Turkey - 4789/10 - Legal Summary [2015] ECHR 184 (20 January 2015)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2015/184.html
Cite as: [2015] ECHR 184

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      Information Note on the Court’s case-law No. 181

      January 2014

      Gözüm v. Turkey - 4789/10

      Judgment 20.1.2015 [Section II] See: [2015] ECHR 62 (French Text)

      Article 8

      Positive obligations

      Article 8-1

      Respect for family life

      Respect for private life

      Lacune du droit turc concernant le remplacement du prénom de la mère biologique par celui de la mère adoptive célibataire sur les documents personnels de l’enfant adopté : violation

      En fait - En mai 2007 la requérante, mère adoptive célibataire, n’a pu faire enregistrer son prénom à la place de celui de la mère biologique sur les documents administratifs de son enfant.

      En novembre 2007, le tribunal d’instance la débouta de son action au motif entre autres que sa demande était dépourvue de base légale. Elle se pourvut en cassation. En mars 2009, alors que son pourvoi était pendant, une réforme législative ouvrit la possibilité à une mère célibataire adoptive de faire inscrire son prénom à la place de celui de la mère biologique. En novembre 2009, la Cour de cassation confirma néanmoins le jugement de première instance par un arrêt qui resta muet sur cette réforme.

      En novembre 2010, la requérante obtenu l’officialisation de son prénom en tant que celui de la mère de l’enfant.

      En droit - Article 8 : La présente affaire a pour objet un aspect des problèmes que peuvent rencontrer les personnes désireuses de réaliser une adoption monoparentale et, au vu de la réaction judiciaire donnée face à ce problème, la Cour juge approprié de l’analyser comme une affaire concernant les obligations positives de l’État de garantir le respect effectif de la vie privée et familiale par l’intermédiaire de ses autorités législatives, exécutives et judiciaires.

      À l’époque pertinente, le droit civil turc reconnaissait à ces personnes le droit de donner leur patronyme à leur enfant adoptif, mais ne prévoyait aucun cadre normatif quant à la reconnaissance du prénom du parent adoptif en tant que celui du parent naturel.

      Dans la recherche de l’équilibre entre les différents intérêts de la mère biologique, de l’enfant et de la famille d’adoption, et l’intérêt général, l’État jouit d’une certaine marge d’appréciation, mais dans toutes les hypothèses, l’intérêt supérieur de l’enfant doit primer. La marge d’appréciation coïncide avec le pouvoir discrétionnaire qui se trouvait prétendument conféré aux juridictions civiles en matière de la réconciliation des différents intérêts personnels sous-jacents aux adoptions monoparentales. Mais ni les juges de première instance ni ceux de cassation n’ont ne serait-ce que pris acte du moyen que la requérante avait tiré des normes interprétatives découlant de l’article 1er du code civil, lesquelles leur commandait de combler la défaillance observée dans la loi, fût-il, de manière à protéger les intérêts concurrents liés à l’adoption de l’enfant. En outre, il n’y a dans les décisions litigieuses aucun élément qui puisse convaincre qu’en l’occurrence lesdits juges se soient employés à procéder d’une appréciation axée sur les circonstances particulières du cas présent, encore moins, soucieuse de la sauvegarde des intérêts supérieurs de l’enfant en question.

      L’équilibre que le législateur turc aurait entendu ménager exigeait que l’on accordât une importance toute particulière aux obligations positives découlant de l’article 8. À cette fin, pour être effective, il aurait fallu que la protection visée soit inscrite dans un cadre clairement établi dans l’ordre juridique interne, afin de permettre d’apprécier la proportionnalité des restrictions apportées aux droits fondamentaux ou d’ordre « intime » qui étaient reconnus à la requérante par l’article 8, sachant que le caractère incomplet et non-motivé de l’appréciation des juridictions internes sur l’exercice de ces droits - comme en l’espèce -, ne pouvait relever d’une marge d’appréciation acceptable.

      Ainsi en matière d’adoptions monoparentales, le droit civil turc présentait une lacune légale qui touchait les personnes se trouvant dans la situation de la requérante, dont la demande relevait d’une sphère juridique que le législateur turc n’avait assurément pas prévue et encadrée de manière à ménager un juste équilibre entre l’intérêt général et les intérêts concurrents des individus.

      Dès lors la protection de droit civil, telle qu’elle avait été conçue à l’époque pertinente, ne pouvait passer pour suffisante au regard des obligations positives mises à la charge de l’État défendeur par l’article 8 de la Convention.

      Conclusion : violation (unanimité).

      Article 41 : 2 500 EUR pour préjudice moral.

       

      © Council of Europe/European Court of Human Rights
      This summary by the Registry does not bind the Court.

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