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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Germany v Commission (Agriculture) French text [1999] EUECJ C-44/97 (21 October 1999)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/1999/C4497.html
Cite as: [1999] EUECJ C-44/97

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IMPORTANT LEGAL NOTICE - The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.
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ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

21 octobre 1999 (1)

«Apurement des comptes - FEOGA - Non-reconnaissance des dépenses - Exercices 1992-1993»

Dans l'affaire C-44/97,

République fédérale d'Allemagne, représentée par MM. E. Röder, Ministerialrat au ministère fédéral de l'Économie, et B. Kloke, Oberregierungsrat au même ministère, en qualité d'agents, Postfach 13 08, D - 53003 Bonn,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. K.-D. Borchardt, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. C. Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l'annulation partielle de la décision 96/701/CE de la Commission, du 20 novembre 1996, modifiant la décision 96/311/CE relative à l'apurement des comptes des États membres au titre des dépenses financées par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie», pour l'exercice financier 1992 ainsi que de certaines dépenses pour l'exercice 1993 (JO L 323, p. 26), en tant qu'elle a refusé de mettre à la charge du FEOGA le montant de 19 591 000 DEM,

LA COUR (sixième chambre),

composée de MM. P. J. G. Kapteyn (rapporteur), faisant fonction de président de la sixième chambre, G. Hirsch et H. Ragnemalm, juges,

avocat général: M. J. Mischo,

greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, administrateur principal,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 16 décembre 1998, au cours de laquelle la République fédérale d'Allemagne a été représentée par M. C.-D. Quassowski, Regierungsdirektor au ministère fédéral de l'Économie, en qualité d'agent, assisté de M. G. Konopka, chef du département de la viande à la Bundesanstalt für Landwirtschaft und Ernährung, et la Commission par M. K.-D. Borchardt,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 9 mars 1999,

rend le présent

Arrêt

  1. Par requête déposée au greffe de la Cour le 4 février 1997, la République fédérale d'Allemagne a, en vertu de l'article 173, premier alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 230, premier alinéa, CE), demandé l'annulation partielle de la décision 96/701/CE de la Commission, du 20 novembre 1996, modifiant la décision 96/311/CE relative à l'apurement des comptes des États membres au titre des dépenses financées par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie», pour l'exercice financier 1992 ainsi que de certainesdépenses pour l'exercice 1993 (JO L 323, p. 26, ci-après la «décision attaquée»), en tant qu'elle a refusé de mettre à la charge du FEOGA le montant de 19 591 000 DEM.

  2. Il résulte du dossier que ce montant correspond à une correction forfaitaire de 2 % de l'ensemble des dépenses déclarées pour la livraison de viandes bovines à l'intervention au cours de l'exercice 1992. Cette correction forfaitaire a été effectuée par la Commission en vertu de ses «lignes directrices sur les corrections forfaitaires en cas de défaillances dans les contrôles effectués par les États membres», figurant dans sa décision du 31 juillet 1992 [doc. Com. (92) PV 1116] communiquée au comité du FEOGA le 3 juin 1993.

  3. Ces lignes directrices prévoient des corrections forfaitaires de 2 %, 5 % ou 10 % en fonction de la gravité des défaillances. La correction de 2 %, appliquée en l'espèce, intervient si la carence se limite à certains éléments du système de contrôle de moindre importance ou à l'exécution de contrôles qui ne sont pas essentiels pour garantir la régularité de la dépense, de sorte qu'il peut raisonnablement être conclu que le risque de pertes pour le FEOGA était mineur.

  4. La Commission a justifié cette correction forfaitaire par certaines défaillances du système allemand de contrôle dont elle se serait rendu compte lors d'enquêtes portant sur les mesures d'achat et de vente ainsi que sur le stockage de la viande bovine d'intervention, effectuées en 1993 et 1994, tant auprès de la Bundesanstalt für landwirtschaftliche Marktordnung (office fédéral pour l'organisation des marchés agricoles, ci-après la «BALM»), qui était l'organisme d'intervention allemand à l'époque, que de quatre entrepôts frigorifiques, ainsi que sur la base des inventaires annuels des 107 entrepôts frigorifiques existant en Allemagne.

  5. Les griefs de la Commission à l'encontre du système allemand de contrôle ont fait l'objet de discussions avec les autorités compétentes allemandes durant les années 1994 et 1995, au cours desquelles il y a eu, à différentes reprises, des échanges d'observations et des entretiens, dont l'un s'est tenu le 20 janvier 1995 dans les locaux de la BALM à Francfort. Ces entretiens sont cependant restés infructueux.

  6. À la demande du gouvernement allemand, l'affaire a été portée devant l'organe de conciliation institué par la décision 94/442/CE de la Commission, du 1er juillet 1994, relative à la création d'une procédure de conciliation dans le cadre de l'apurement des comptes du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), Section «garantie» (JO L 182, p. 45). Cependant, au vu de la persistance des appréciations divergentes des parties, l'organe de conciliation s'est abstenu de les départager et s'est borné, dans son rapport final du 29 mars 1996, à constater qu'il ne lui était pas possible d'identifier des éléments susceptibles de constituer une base valable pour parvenir à un accord entre les parties.

  7. Dans son rapport de synthèse relatif aux résultats des contrôles pour l'apurement des comptes du FEOGA, «section garantie», au titre de l'exercice 1992 ainsi que de certaines dépenses au titre de l'exercice 1993 (Doc. VI/6355/95, du 27 mars 1996) ainsi que dans le complément audit rapport (Doc. VI/5112/96, du 23 septembre 1996), la Commission a indiqué avoir constaté des défaillances à tous les stades des contrôles, à savoir lors de l'entrée en stock, en cours de stockage, et lors du déstockage de la viande bovine admise à l'intervention.

  8. Ces défaillances au niveau des contrôles constitueraient, selon la Commission, une violation de l'article 8, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 94, p. 13), ainsi que des articles 3 et 4 du règlement (CEE) n° 618/90 de la Commission, du 14 mars 1990, fixant les règles d'établissement de l'inventaire annuel des produits agricoles à l'intervention publique (JO L 67, p. 21).

  9. Se fondant sur ces dispositions, la Commission a adopté la décision attaquée.

  10. À l'appui de son recours, le gouvernement allemand conteste, à titre liminaire, les griefs de la Commission à l'égard du système allemand de contrôle dans leur ensemble, ainsi que l'exactitude des constatations auxquelles est parvenue la Commission. Le gouvernement allemand examine ensuite successivement les reproches formulés par la Commission à l'égard des contrôles effectués lors de la prise en charge, en cours de stockage et à la sortie du stock.

    À titre liminaire

  11. Pour contester le bien-fondé de la correction forfaitaire de 2 % opérée par la Commission, le gouvernement allemand invoque quatre moyens.

  12. En premier lieu, il fait valoir que, au cours des exercices précédents, les contrôles allemands ont été réalisés selon le même système, sans que la Commission ait mis à sa charge les dépenses effectuées. Aussi, cette absence d'imputation au gouvernement allemand empêcherait-elle la Commission d'invoquer les mêmes défauts à propos d'un exercice postérieur et confirmerait-elle l'absence de défaillance du système allemand de contrôle.

  13. La Commission reconnaît que, bien qu'elle ait constaté des défauts au niveau du contrôle du stockage public de la viande bovine d'intervention en Allemagne pour les exercices 1987 et 1988 et ait transmis à cet égard des recommandations aux autorités allemandes, elle a, en effet, renoncé à mettre des sommes à la charge du gouvernement allemand au titre de ces exercices. Elle estime néanmoins que cette circonstance ne l'empêchait pas de relever, à l'occasion d'examens ultérieurs du système de contrôle, tant des défauts déjà constatés et non corrigés que des carences nouvellement apparues et d'en tenir compte pour procéder à des imputations.

  14. À cet égard, ainsi que M. l'avocat général l'a relevé au point 21 de ses conclusions, le fait pour la Commission de ne pas tirer des conséquences financières de la constatation de défaillances lors d'un exercice ne saurait la priver du droit de le faire lors d'exercices ultérieurs, surtout si lesdites défaillances ont persisté. En outre, des défaillances nouvellement constatées peuvent, elles aussi, être prises en compte pour déterminer le niveau de la correction forfaitaire.

  15. En deuxième lieu, le gouvernement allemand invoque en sa faveur certaines considérations figurant dans les conclusions provisoires de l'organe de conciliation en date du 1er mars 1996, annexées à son rapport final.

  16. À cet égard, au vu de ces considérations, reprises aux points 24, 26 et 28 des conclusions de M. l'avocat général, il y a d'abord lieu de constater que l'organe de conciliation n'a pas abouti à des conclusions définitives mais que, après avoir considéré que les mesures allemandes ne permettaient pas d'établir avec certitude si le système allemand de contrôle satisfaisait ou non au besoin d'efficacité pour éviter des risques financiers pour le FEOGA, il a lui-même préconisé un examen approfondi du fonctionnement effectif de ce système.

  17. Ensuite, même si, dans certains cas précis, les considérations de l'organe de conciliation dénotent son opinion que les autorités allemandes ont prouvé l'exactitude de leurs affirmations, ces considérations, ainsi que M. l'avocat général l'a relevé au point 27 de ses conclusions, laissent ouverte la question de savoir si l'on peut tirer une conclusion générale à partir de ces cas.

  18. Enfin, selon l'article 1er, paragraphe 2, sous a), de la décision 94/442, la Commission, ainsi qu'elle l'a à juste titre soutenu sans être contredite sur ce point par le gouvernement allemand, lorsqu'elle arrête sa décision, n'est pas liée par les conclusions de l'organe de conciliation.

  19. Par conséquent, les considérations de ce dernier ne sauraient être concluantes, en l'espèce, pour l'appréciation du système allemand de contrôle.

  20. En troisième lieu, le gouvernement allemand fait grief à la Commission de ne pas avoir suffisamment motivé la décision attaquée.

  21. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le contexte particulier de l'élaboration des décisions relatives à l'apurement des comptes, la motivation d'une décision doit être considérée comme suffisante dès lors que l'État destinataire a été étroitement associé au processus d'élaboration de cette décision et qu'il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA la somme litigieuse (voir arrêts du 13 décembre 1990, Pays-Bas/Commission, C-22/89, Rec. p. I-4799, point 18, et du 1er octobre 1998, Pays-Bas/Commission, C-27/94, Rec. p. I-5581, point 36).

  22. En l'espèce, il ressort du dossier que le gouvernement allemand a été associé au processus d'élaboration de la décision attaquée. En effet, les incertitudes que la Commission éprouvait quant à la fiabilité du système allemand de contrôle ont été portées à plusieurs reprises à l'attention des autorités allemandes tant oralement que par écrit, des discussions ont eu lieu et l'organe de conciliation a été saisi.

  23. De surcroît, il convient de relever que la Commission a indiqué dans son rapport de synthèse les raisons qui l'ont amenée à refuser l'apurement du montant litigieux.

  24. Dans ces conditions, la motivation de la décision attaquée doit être considérée comme suffisante.

  25. En quatrième lieu, le gouvernement allemand estime que la Commission n'a pas tenu compte des éléments de preuve avancés pendant la période qui a précédé l'exercice du recours.

  26. En revanche, la Commission soutient qu'elle les a examinés mais que ces éléments n'ont pas emporté sa conviction. Elle précise que ses constatations et la correction forfaitaire de 2 % concernent les insuffisances de contrôle dans leur ensemble, à savoir des défaillances affectant les trois stades de contrôle (lors de la prise en charge, en cours de stockage et à la sortie du stock) et non pas les insuffisances à chacun de ces trois stades pris séparément.

  27. Il y a lieu de rappeler, à cet égard, la jurisprudence constante de la Cour relative à la répartition de la charge de la preuve dans le cadre de recours en annulation introduits par un État membre contre une décision de la Commission en matière d'apurement des comptes du FEOGA.

  28. Lorsque la Commission refuse de mettre à la charge du FEOGA certaines dépenses, au motif qu'elles ont été provoquées par des infractions à la réglementation communautaire imputables à un État membre, il appartient à cet État de démontrer que les conditions sont réunies pour obtenir le financement refusé par la Commission (voir arrêts du 24 mars 1988, Royaume-Uni/Commission, 347/85, Rec. p. 1749, point 14, et du 10 novembre 1993, Pays-Bas/Commission, C-48/91, Rec. p. I-5611, point 16). La Commission n'est pas tenue de démontrer d'une façon exhaustive l'irrégularité des données transmises par les États membres, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu'elle éprouve à l'égard des chiffres communiqués par les administrations nationales. Cet allégement de la charge de la preuve pour la Commission s'explique par le fait que c'est l'État qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l'apurement des comptes du FEOGA, et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses chiffres et, le cas échéant, de l'inexactitude des calculs de la Commission (arrêt du 10 novembre 1993, Pays-Bas/Commission, précité, point 17). En cas de contestation, il appartient à la Commission de prouver l'existence d'une violation des règles de l'organisation commune des marchés agricoles et, une fois qu'elle l'a établie, il appartient à l'Étatmembre de démontrer, le cas échéant, que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à en tirer (arrêts du 19 février 1991, Italie/Commission, C-281/89, Rec. p. I-347, point 19; du 10 novembre 1993, Pays-Bas/Commission, précité, point 18, et du 18 mars 1999, Italie/Commission, C-59/97, Rec. p. I-1683, points 54 et 55).

  29. Dès lors, il convient d'examiner les éléments de preuve fournis par le gouvernement allemand à l'encontre des constatations sur lesquelles la Commission a fondé la décision attaquée.

    Sur les contrôles lors de la prise en charge

  30. Le gouvernement allemand avance cinq arguments pour réfuter les griefs de la Commission à l'encontre des contrôles opérés au stade de la prise en charge de la viande bovine d'intervention.

  31. En premier lieu, dans son rapport de synthèse, la Commission a reproché au gouvernement allemand l'utilisation fréquente, au lieu des agents de la BALM, des employés des entrepôts frigorifiques qui interviendraient comme mandataires de la BALM afin de peser la viande et d'en certifier la prise en charge. Cette utilisation de mandataires présenterait, selon la Commission, un risque pour l'exécution correcte des contrôles au stade de la prise en charge et ferait douter de la fiabilité des rapports établis par ces mandataires. Cela constituerait une défaillance du système allemand, parce que, une fois la viande congelée, emballée et déposée dans l'entrepôt frigorifique, il serait impossible de corriger par la suite les omissions ou les irrégularités des contrôles éventuellement constatées.

  32. Le gouvernement allemand estime que le système allemand de contrôle lors de la prise en charge ne comporte pas de défaillance à cet égard et fait valoir que la Commission n'a pas tenu compte, dans ses critiques, du fait que ledit système comporte deux étapes. Dans la première, des contrôles seraient effectués dans l'abattoir exclusivement par des agents de la BALM; dans la seconde, des contrôles seraient effectués dans l'entrepôt frigorifique soit par des agents de la BALM, soit, en raison du manque d'effectifs, par des collaborateurs de l'entrepôt frigorifique. Le gouvernement allemand précise cependant que, dans ce second cas, les contrôles réalisés par des mandataires de la BALM ont été vérifiés a posteriori par des vérifications documentaires et des inspections physiques de la viande prise en charge, effectuées par des agents de la BALM. Par conséquent, ce système de contrôle constituant un tout, il devrait être examiné dans son ensemble, et non pas jugé à partir d'une appréciation isolée de sa seconde étape.

  33. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l'article 14 du règlement (CEE) n° 859/89 de la Commission, du 29 mars 1989, relatif aux modalités d'application des mesures d'intervention dans le secteur de la viande bovine (JO L 91, p. 5), applicable au moment des faits, «la prise en charge des produits parl'organisme d'intervention intervient le jour de l'entrée des produits dans le centre d'intervention». C'est donc ce jour, et plus précisément le moment de la livraison de la viande à l'entrepôt frigorifique, qui est déterminant pour l'appréciation de la régularité des contrôles lors de la prise en charge.

  34. Par conséquent, ainsi que l'observe à juste titre la Commission, l'omission éventuelle des contrôles ou l'irrégularité de leur exécution au stade de la prise en charge ne sauraient être corrigées ultérieurement par des vérifications documentaires ou physiques, même si ces vérifications sont effectuées par des agents de la BALM.

  35. En effet, les contrôles documentaires et physiques invoqués par le gouvernement allemand, qui sont réalisés a posteriori par des agents de la BALM, même s'ils présentent une certaine utilité, ne seraient, en tout état de cause, pas susceptibles de remédier à d'éventuelles défaillances dans les contrôles effectués au moment de la prise en charge. Ainsi que M. l'avocat général l'a relevé aux points 77 à 79 de ses conclusions, lorsque le contrôleur de la BALM n'est pas présent au moment de la prise en charge, il inspectera les viandes soit lorsqu'elles se trouvent dans le tunnel de congélation (Schockraum), soit lorsqu'elles sont déjà stockées. Or, dans l'une et l'autre hypothèse, les vérifications approfondies de l'état de la viande ne sauraient être convenablement réalisées à un moment où la viande est soit en cours de congélation, soit déjà congelée, emballée et mise sur palette dans l'entrepôt.

  36. En deuxième lieu, la Commission a souligné, dans son rapport de synthèse, que l'utilisation des mandataires crée inévitablement un risque de conflit d'intérêts entre l'abattoir vendeur et l'entrepôt frigorifique chargé du stockage de la marchandise, lorsque ces deux établissements appartiennent au même groupe d'entreprises (entreprises liées). Ce risque se concrétiserait notamment, dans le cas des entreprises liées, par la possibilité d'introduire dans le système de paiement des faux procès-verbaux; il s'avérerait donc indispensable que le gouvernement allemand prenne des mesures efficaces pour que ce conflit d'intérêts ne porte pas préjudice à la qualité des contrôles. Or, selon la Commission, les instructions de la BALM ne contiennent pas un seul mot sur le problème particulier des entreprises liées.

  37. Concernant les mesures pour faire face au risque de conflit d'intérêts, le gouvernement allemand soutient que, dès l'instant où, dans le cadre des opérations d'intervention, l'abattoir vendeur était lié à un entrepôt frigorifique, la BALM a évité, dans la mesure du possible, que la viande achetée soit stockée dans cet entrepôt. Dans de rares cas où, pour des raisons organisationnelles, il n'était pas possible de respecter ce principe, les contrôles de la prise en charge dans l'entrepôt frigorifique lié à l'abattoir ont exclusivement été effectués par des agents de la BALM. Le gouvernement allemand précise que la BALM avait imposé le respect de ces principes en transmettant à ses agences régionales des instructions orales.

  38. Quant à l'introduction de faux procès-verbaux dans le système de paiement, le gouvernement allemand soutient qu'elle n'est possible qu'en cas de collusion de l'ensemble des personnes et des services responsables de la prise en charge de la viande bovine d'intervention et du contrôle administratif (abattoir, contrôleur de la BALM/personne mandatée par la BALM, peseur assermenté, entrepôt frigorifique, agences régionale et centrale de la BALM). Toutefois, selon le gouvernement allemand, face à un concert frauduleux aussi étendu et important de l'ensemble des personnes et des services, aucun système n'offrirait de protection suffisante.

  39. La Commission rappelle que, en réponse à sa lettre du 13 avril 1994, qui faisait état du risque d'introduction de faux procès-verbaux, le gouvernement allemand a soutenu, par lettre du 6 juillet 1994, que, «en vue de garantir la concordance des procès-verbaux de prise en charge entre la centrale du BALM, ses agences régionales et l'entrepôt frigorifique ... [on] introduira, parallèlement à la procédure de contrôle actuelle, - comme le propose FEOGA - une procédure interne de contrôle et d'ajustement». Par cette déclaration, le gouvernement allemand aurait reconnu que la procédure utilisée jusque-là ne protégeait pas intégralement le système de paiement contre l'introduction de faux procès-verbaux.

  40. Concernant les mesures destinées à écarter, à ce stade, le risque de conflit d'intérêts dû à l'intervention des mandataires de la BALM, il y a lieu de relever que la régularité des contrôles lors de la prise en charge revêt une importance accrue dans le cas où l'entrepôt frigorifique est lié à l'abattoir et exige des mesures particulières assurant la réalité et l'efficacité de ces contrôles.

  41. Ainsi que l'a relevé M. l'avocat général au point 85 de ses conclusions, par ses instructions orales, la BALM a reconnu cette importance, sans pour autant leur assurer le poids qu'auraient eu des instructions écrites. Dès lors, il y a lieu de considérer que le caractère oral des instructions de la BALM ne saurait être susceptible d'assurer à celles-ci une efficacité sans faille et constitue de ce fait une défaillance du système allemand de contrôle.

  42. Quant au risque d'introduction de faux procès-verbaux, dans le cas d'entreprises liées, il convient de constater qu'un tel risque n'est pas exclu. En effet, il résulte des affirmations des autorités allemandes contenues dans leur lettre du 6 juillet 1994, qu'elles ont reconnu la réalité de ce risque en annonçant qu'elles allaient introduire une procédure visant à garantir que les exemplaires de procès-verbaux de prise en charge en possession de la centrale de la BALM, de ses agences régionales et de l'entrepôt frigorifique concordent parfaitement.

  43. En troisième lieu, la Commission a fait valoir, dans son rapport de synthèse, qu'il ressort de l'examen des rapports de contrôle mis à sa disposition que, lorsque les contrôles sont effectués par des agents de la BALM, leurs rapports comportent certaines observations négatives aboutissant au refus de la prise en charge, maisque, en revanche, si les contrôles sont assurés par les employés des entrepôts frigorifiques agissant comme mandataires de la BALM, les rapports rédigés par ces derniers ne comportent pas de telles observations. Cette constatation serait confirmée, selon la Commission, par des contrôles ultérieurs réalisés par les agents de la BALM et consignés dans les «rapports sur le contrôle dans l'entreprise de destination».

  44. Concernant ces derniers rapports, le gouvernement allemand soutient que dans le système allemand seul le «procès-verbal relatif à l'appréciation qualitative et à la prise en charge de la viande bovine» fait foi; le «rapport sur le contrôle dans l'entreprise de destination» ne constituerait qu'un document interne de la BALM. En outre, selon le gouvernement allemand, le formulaire du «procès-verbal relatif à l'appréciation qualitative et à la prise en charge de la viande bovine» ne comportait à l'origine aucune rubrique appropriée permettant aux agents ou aux mandataires de la BALM de consigner les particularités ou les défauts apparus lors de la prise en charge. Cependant, ultérieurement, la BALM aurait, sur la suggestion du FEOGA, remanié ce formulaire afin d'y inclure une rubrique pour consigner les particularités ou défauts apparus.

  45. Au sujet des «rapports sur le contrôle dans l'entreprise de destination», la Commission observe que ce sont les services allemands eux-mêmes qui ont produit cette catégorie de rapports pour démontrer le fonctionnement régulier du système allemand de contrôle, après que la Commission eut constaté des irrégularités dans les procès-verbaux de prise en charge. Quant à l'absence à l'époque de rubrique spécifique dans le «procès-verbal relatif à l'appréciation qualitative et à la prise en charge de la viande bovine», la Commission estime que cette omission constitue une faiblesse supplémentaire du système allemand.

  46. À cet égard, il n'est pas contesté, ainsi que le confirment les «rapports sur le contrôle dans l'entreprise de destination» réalisés a posteriori par les agents de la BALM, que les contrôles effectués lors de la prise en charge par les mandataires de cette dernière comportaient des défauts.

  47. Concernant l'argument du gouvernement allemand selon lequel ces rapports ne constituent qu'un document interne à cette dernière, seul le procès-verbal rédigé lors de la prise en charge faisant foi, il convient de le rejeter. En effet, ainsi que le soutient à juste titre la Commission, ce sont les services allemands eux-mêmes qui ont mis en avant ces documents pour démontrer le fonctionnement régulier de leur système de contrôle. Il s'ensuit que, si ces documents permettent de renforcer les constatations de la Commission, cette dernière ne saurait être empêchée de les invoquer.

  48. Quant à l'absence d'une rubrique spécifique dans le «procès-verbal relatif à l'appréciation qualitative et à la prise en charge de la viande bovine» afin de consigner des particularités ou des défauts, il y a lieu de constater, ainsi que le relève M. l'avocat général au point 81 de ses conclusions, que, s'il est établi que lescontrôles principaux sont ceux effectués lors de la prise en charge de la viande, l'absence, dans le procès-verbal utilisé en 1992 pour les contrôles de la prise en charge, d'une rubrique appropriée pour consigner d'éventuelles particularités apparues lors de la vérification de la prise en charge, ou des défauts mineurs relevés sur la viande à prendre en charge, constitue une faiblesse supplémentaire du système allemand de l'époque. Cela vaudrait d'autant plus si ce document était effectivement le seul faisant foi, comme l'affirme le gouvernement allemand. Ce dernier a d'ailleurs reconnu cette faiblesse et déclare y avoir remédié en incluant, pour les exercices ultérieurs, une telle rubrique.

  49. En quatrième lieu, la Commission a retenu dans son rapport de synthèse d'autres indices lui permettant de douter de la fiabilité du système allemand. Elle souligne l'existence, dans trois cas, d'irrégularités dues à des manipulations frauduleuses qui démontreraient des défaillances du système allemand et ajoute que ses doutes ont été corroborés par les statistiques disponibles relatives aux contrôles qui révéleraient des divergences considérables entre les agences régionales de la BALM quant au nombre des contrôles effectués par celles-ci. La Commission précise que certaines régions, dont le volume de livraisons nationales serait moins important, ont connu un taux de contrôles élevé, alors que des régions comme celles de Mülheim, Mannheim et Munich, dont le volume de livraisons nationales est très important, se sont caractérisées par un taux de contrôles relativement réduit.

  50. Le gouvernement allemand soutient que les trois cas d'irrégularités constatées ne sauraient remettre en cause la sécurité et la régularité de l'ensemble du système de contrôle, d'autant plus qu'elles ont été découvertes grâce aux vérifications effectuées par les services allemands. Quant aux divergences régionales résultant des données statistiques relatives aux contrôles, le gouvernement allemand soutient que, pour l'exercice financier 1992, environ 52 % des contrôles effectués dans les entrepôts frigorifiques, soit plus de la moitié, l'ont été par un contrôleur de la BALM et que tous les autres contrôles ont été effectués par des mandataires de la BALM, de sorte qu'un contrôle de 100 % des prises en charge aurait été assuré.

  51. À cet égard, il convient de relever que, si les trois cas d'irrégularités constatées, dues à des agissements frauduleux, ne permettent pas, à eux seuls, de mettre en cause la sécurité et la régularité de l'ensemble du système allemand de contrôle, ainsi que le fait à juste titre valoir le gouvernement allemand, ils font cependant apparaître que ce système, en raison de l'utilisation de mandataires, reste fragile. En effet, la seule présence des agents de la BALM lors de la livraison des marchandises à l'entrepôt frigorifique serait de nature à rendre plus difficiles des agissements frauduleux.

  52. Cette appréciation est corroborée par la constatation que certaines agences régionales de la BALM qui admettent à l'intervention des quantités de viande bovine très importantes sont également celles qui ont effectué un nombre réduit de contrôles. En effet, ainsi que le relève M. l'avocat général au point 83 de sesconclusions, même si, au total, le taux de contrôles effectués directement par des agents de la BALM est de 52 %, le faible taux de contrôles officiels et indépendants des agences de Mülheim, Mannheim et surtout Munich était susceptible de faciliter les agissements frauduleux de personnes peu scrupuleuses.

  53. En cinquième lieu, selon le gouvernement allemand, la Commission contesterait le système d'entrée en stock pratiqué en Allemagne en se fondant - certes pas de manière expresse, mais en substance - sur l'article 17, paragraphe 4, du règlement (CEE) n° 2456/93 de la Commission, du 1er septembre 1993, portant modalités d'application du règlement (CEE) n° 805/68 du Conseil en ce qui concerne les mesures générales et des mesures spéciales d'intervention dans le secteur de la viande bovine (JO L 225, p. 4), qui permettrait qu'un mandataire de l'organisme d'intervention procède à des opérations de prise en charge, à condition qu'il soit totalement indépendant de l'adjudicataire. Le gouvernement allemand reproche à la Commission d'appliquer rétroactivement à l'exercice financier 1992 cette exigence introduite par l'article 17, paragraphe 4, du règlement n° 2456/93, alors que ce règlement n'était pas encore entré en vigueur à l'époque des faits et que l'article 8 du règlement n° 729/70, quant à lui, ne l'imposait pas.

  54. Selon la Commission, ce reproche est injustifié, parce que les critiques faites au système allemand de contrôle pour l'exercice 1992 ne se fondent ni en fait ni en droit sur le régime institué par le règlement n° 2456/93, mais sur la circonstance que, contrairement aux exigences de l'article 8, paragraphe 1, du règlement n° 729/70, le gouvernement allemand n'a pas pris les mesures nécessaires pour s'assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEOGA, et prévenir et poursuivre les irrégularités.

  55. À cet égard, il y a lieu de relever que, même si l'article 8, paragraphe 1, du règlement n° 729/70 ne comportait pas de dispositions aussi précises que celles de l'article 17, paragraphe 4, du règlement n° 2456/93, il n'en reste pas moins que, selon une jurisprudence constante de la Cour, cette disposition, qui constitue dans le domaine agricole une expression des obligations imposées aux États membres par l'article 5 du traité CE (devenu article 10 CE), définit les principes selon lesquels la Communauté et les États membres doivent organiser la mise en oeuvre des décisions communautaires d'intervention agricole financées par le FEOGA ainsi que la lutte contre la fraude et les irrégularités en rapport avec ces opérations (voir arrêt du 6 mai 1982, BayWa e.a., 146/81, 192/81 et 193/81, Rec. p. 1503, point 13). Elle impose aux États membres l'obligation générale de prendre les mesures nécessaires pour s'assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEOGA, même si l'acte communautaire spécifique ne prévoit pas expressément l'adoption de telle ou telle mesure de contrôle (voir arrêts du 12 juin 1990, Allemagne/Commission, C-8/88, Rec. p. I-2321, points 16 et 17, et du 1er octobre 1998, Royaume-Uni/Commission, C-209/96, Rec. p. I-5655, point 43).

  56. Une telle obligation du gouvernement allemand résultant déjà de la réglementation en vigueur à l'époque des faits, la Commission ne saurait se voir reprocher d'avoir fait une application rétroactive du règlement n° 2456/93.

    Sur les contrôles en cours de stockage

  57. S'agissant des contrôles en cours de stockage, le gouvernement allemand conteste l'exactitude des constatations de la Commission relatives, respectivement, à l'inscription dans l'inventaire, au contrôle des inventaires et à l'absence d'instructions nationales explicites quant à l'exécution de ces contrôles.

  58. En premier lieu, la Commission a constaté, dans son rapport de synthèse, qu'il y avait dans les inventaires une coïncidence entre le poids enregistré et le poids contrôlé. Cette coïncidence amènerait à conclure, selon la Commission, que les contrôleurs ne procédaient pas aux contrôles des stocks conformément à l'article 3 du règlement n° 618/90, qui exige une vérification de la présence physique de la marchandise, mais qu'ils reprenaient directement les indications de quantité et de poids des comptes de stock de l'entrepôt frigorifique. Cette constatation serait, en outre, confirmée par des déclarations fournies par des employés des entrepôts frigorifiques rencontrés par la Commission lors des vérifications sur place.

  59. Le gouvernement allemand estime que l'article 3 du règlement n° 618/90 n'impose pas la vérification du poids de la viande lors de l'inventaire et soutient que c'est à la Commission de prouver les affirmations des employés des entrepôts frigorifiques. Pour sa part, le gouvernement allemand offre, à titre de preuve contraire, le témoignage de certains agents de la BALM.

  60. La Commission produit une lettre du gouvernement allemand du 6 juillet 1994 d'où il résulterait que ce gouvernement, d'une part, a reconnu que les contrôleurs de la BALM n'étaient pas toujours présents lors de l'établissement de l'inventaire et, d'autre part, a affirmé son intention de contrôler plus étroitement à l'avenir le respect par les stockeurs des dispositions du règlement n° 618/90.

  61. À cet égard, il y a lieu de relever que, si l'article 3 du règlement n° 618/90 n'impose pas de peser la viande, ainsi que le soutient à juste titre le gouvernement allemand, il exige néanmoins la vérification effective de la présence physique de la marchandise.

  62. Pour prouver que cette exigence n'a pas été remplie, la Commission se fonde sur les déclarations des employés des entreprises frigorifiques, tandis que le gouvernement allemand, qui soutient la thèse contraire, propose le témoignage des agents de la BALM.

  63. Dans le cadre de l'appréciation de ces offres de preuve, il y a lieu de constater, ainsi que le relève M. l'avocat général au point 122 de ses conclusions, que lesagents de la BALM ne pourraient rapporter la preuve de leurs affirmations que dans les cas où ils étaient effectivement présents lors de l'établissement de l'inventaire.

  64. Or, il résulte des déclarations du gouvernement allemand que les agents de la BALM n'étaient pas toujours présents lors de l'établissement de cet inventaire. Il s'ensuit que les constatations de la Commission, tirées des témoignages rapportés selon lesquels, dans certains cas, les stockeurs se sont bornés à transcrire sur les inventaires les éléments comptables de stocks, ne sauraient être infirmées par le témoignage des agents de la BALM.

  65. Il y a lieu d'ajouter que ces constatations sont confirmées par la déclaration contenue dans la lettre du 6 juillet 1994 dans laquelle le gouvernement allemand, conscient de l'existence d'irrégularités, s'est engagé, pour l'avenir, à suivre de plus près l'établissement des inventaires en vue de respecter le règlement n° 618/90.

  66. En deuxième lieu, concernant le contrôle des inventaires, la Commission, dans son rapport de synthèse, a reproché au gouvernement allemand le fait que les procès-verbaux d'inventaire annuel ne font pas état du respect de l'article 4 du règlement n° 618/90, qui impose l'obligation de procéder à une inspection physique de 5 % de la quantité stockée conformément aux méthodes figurant à l'annexe III dudit règlement. Selon la Commission, il devrait, en effet, résulter de ces procès-verbaux que la procédure et les opérations, y compris l'indication du poids, prescrites par l'annexe III du règlement n° 618/90 ont minutieusement été suivies. Or, les procès-verbaux d'inventaire annuel, y compris les états de stock qui les accompagnent, ne fourniraient pas ces renseignements.

  67. Le gouvernement allemand conteste les constatations de la Commission et soutient que des lots correspondant à au moins 5 % de la quantité totale stockée ont été sélectionnés et vérifiés sur place. En outre, lors de la vérification supplémentaire, exigée par l'annexe III du règlement n° 618/90, portant sur 20 % de la quantité de 5 % déjà contrôlée, il y a eu une vérification du poids par les agents de la BALM.

  68. Selon la Commission, les indications de poids figurant dans la partie correspondante des procès-verbaux des inventaires indiquent seulement dans quel lot ou dans quelle catégorie de la marchandise les 20 % de la quantité de 5 % déjà contrôlée, soit 1 % de l'ensemble du stock, ont été sélectionnés pour le contrôle du poids, mais ne permettent pas, notamment, d'établir la quantité exacte qui a fait l'objet d'inspections physiques.

  69. À cet égard, ainsi que le relève M. l'avocat général au point 125 de ses conclusions, lorsque, en relation avec l'utilisation de ressources de la Communauté, le droit communautaire prescrit des contrôles concrets, comme en l'espèce l'inspection physique de 5 % des viandes bovines stockées, les autorités nationales doivent veiller à ce qu'il soit possible de vérifier dans la procédure d'apurement des comptes, au moyen de pièces ou des mentions adéquates, si cette obligation a étérespectée. Dès lors, il convient de constater que, si, dans un système de contrôle, ne figurent pas de telles pièces ou mentions, leur absence constitue une défaillance de ce dernier.

  70. Par ailleurs, comme le relève M. l'avocat général au même point de ses conclusions, cette défaillance a été reconnue par le gouvernement allemand dans la lettre du ministère fédéral de l'Alimentation, de l'Agriculture et des Forêts du 6 octobre 1995, produite par le gouvernement allemand lui-même, dans laquelle ce dernier a annoncé que, à l'avenir, «les contrôles à effectuer lors du stockage seront, selon [les] propositions [de la Commission], complètement documentés».

  71. En troisième lieu, la Commission a reproché au gouvernement allemand de ne pas avoir émis d'instructions nationales explicites à suivre par les contrôleurs lors des contrôles physiques de 5 % de la viande stockée, mais de s'être borné à renvoyer à l'annexe III du règlement n° 618/90. Ce renvoi ne serait pas, selon la Commission, suffisant pour garantir l'exécution correcte de l'inspection physique ni, le cas échéant, pour la prouver.

  72. Le gouvernement allemand estime, au contraire, que le renvoi à l'annexe III du règlement n° 618/90, effectué par les instructions de service, est suffisant en raison de son caractère exhaustif et compréhensible.

  73. À cet égard, il y a lieu de relever que, s'il est vrai que la procédure à suivre résulte clairement de l'annexe III du règlement n° 618/90, qui était jointe aux instructions de service et était compréhensible pour les contrôleurs, les autorités allemandes ne sont cependant pas en mesure de prouver l'exécution correcte des opérations requises par ladite annexe parce que, ainsi que le relève M. l'avocat général au point 126 de ses conclusions, elles auraient dû inclure à cet effet, dans leurs instructions de service, l'obligation pour les contrôleurs d'établir des rapports détaillés permettant de vérifier l'exécution correcte des contrôles physiques sur 5 % de la viande stockée.

  74. Dès lors, en l'absence d'une telle instruction, il convient de constater que le système allemand de contrôle comporte à cet égard une défaillance.

    Sur les contrôles à la sortie du stock

  75. De même que pour les contrôles lors de la prise en charge, la Commission a, dans son rapport de synthèse, reproché au gouvernement allemand d'avoir confié les contrôles à la sortie du stock, non aux agents de la BALM, mais à des mandataires de cette dernière qui étaient des employés des entrepôts frigorifiques. Cette utilisation des mandataires autoriserait, selon la Commission, des manipulations et des abus lors des opérations de déstockage, qui deviendraient encore plus faciles dans le cas des entreprises frigorifiques appartenant au même groupe d'entreprises que l'acheteur (entreprises liées). Selon la Commission, du moins le gouvernementallemand aurait-il dû émettre des instructions écrites en vue d'assurer que ces contrôles seraient effectués en présence des agents de la BALM.

  76. Le gouvernement allemand estime que les contrôles lors du déstockage ont été correctement exécutés. Il affirme que, dans le cas où le déstockage a été réalisé dans le cadre des entreprises liées, les vérifications ont été exclusivement effectuées par les agents de la BALM.

  77. À cet égard, il y a lieu de relever que, si la réglementation applicable en 1992 ne prescrit pas la présence des agents de l'organisme d'intervention lors du déstockage de la viande, il n'en reste pas moins que, dans le cas des entreprises liées, les contrôles effectués par des agents de la BALM, ou du moins en leur présence, constitueraient une garantie en vue d'écarter les risques de manipulations ou d'abus éventuels.

  78. En tout état de cause, compte tenu, d'une part, des affirmations catégoriques du gouvernement allemand et, d'autre part, de l'absence d'une vérification exhaustive effectuée par la Commission sur l'ensemble des entreprises liées, il convient de conclure que la Commission n'a pas rapporté la preuve que les agents de la BALM ont été absents lors de la livraison de viandes à des entreprises liées à la société propriétaire de l'entrepôt.

  79. Il y a lieu, cependant, de relever, à l'instar de ce qui a été constaté lors de l'examen du système allemand de contrôle portant sur la prise en charge, que les autorités allemandes n'ont pas non plus inclus, pour le cas des entreprises liées, d'instructions écrites exigeant la présence des agents de la BALM lors du déstockage de la viande. Il s'ensuit que cette absence d'instructions écrites constitue une défaillance du système allemand de contrôle.

  80. La Commission, dans son rapport de synthèse, a aussi reproché au gouvernement allemand de ne pas avoir veillé à ce que la viande bovine fasse l'objet d'un pesage et d'une comptabilité correcte à la sortie du stock. Elle invoque notamment certains cas où le déstockage a été effectué sous le contrôle de mandataires de la BALM et dans lesquels le poids de la marchandise livrée était identique à celui de la marchandise prise en charge. Selon la Commission, les viandes devant être, lors de la prise en charge, pesées puis seulement ensuite emballées, alors que lors du déstockage elles doivent être pesées avec leur emballage (poids brut), il est peu probable que la perte de poids que connaît généralement la viande stockée soit exactement compensée par le poids de l'emballage. C'est pourquoi la Commission doute que les viandes déstockées aient toujours été pesées.

  81. D'une part, la Commission rappelle à cet égard que l'article 2 du règlement (CEE) n° 147/91 de la Commission, du 22 janvier 1991, définissant et fixant les limites de tolérance pour les pertes de quantités de produits agricoles stockés en intervention publique (JO L 17, p. 9), a fixé, pour la viande bovine, le pourcentage de pertes normales admises lors du stockage à 0,6.

  82. D'autre part, selon la Commission, dans les cas de pertes de viande bovine non identifiées, dépassant le seuil de tolérance de 0,6 % établi par le règlement n° 147/91, les États membres doivent comptabiliser au crédit du FEOGA un montant bien supérieur à la valeur vénale des quantités perdues, en vertu des règlements (CEE) n° 3492/90 du Conseil, du 27 novembre 1990, déterminant les éléments à prendre en considération dans les comptes annuels pour le financement des mesures d'intervention sous forme de stockage public par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, section «garantie» (JO L 337, p. 3), et (CEE) n° 3597/90 de la Commission, du 12 décembre 1990, relatif aux règles de comptabilisation pour les mesures d'intervention entraînant l'achat, le stockage et la vente de produits agricoles par les organismes d'intervention (JO L 350, p. 43).

  83. La Commission estime qu'une quantité très significative de viande a été sortie du stock, sans que le gouvernement allemand remplisse ses obligations en vertu de l'article 8 du règlement n° 729/70, qui impose l'obligation de s'assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEOGA, et que, par conséquent, il y avait des carences lors des contrôles à la sortie du stock, dont les conséquences financières seraient imputables au gouvernement allemand.

  84. Pour défendre son système de contrôle, le gouvernement allemand invoque trois séries d'arguments.

  85. En premier lieu, les acheteurs veilleraient eux-mêmes à ce que la viande adjugée et payée soit correctement livrée, en quantité et qualité, parce que les conditions de vente de la BALM excluent toute réclamation ultérieure. Les manipulations lors des opérations de déstockage seraient donc signalées.

  86. En deuxième lieu, des contrôles subséquents effectués par les agents de la BALM confirmeraient la réalisation correcte des opérations de déstockage.

  87. En troisième lieu, les cas concrets d'anomalies constatées par la Commission, dans lesquels le poids au déstockage correspondait au poids à l'entrée en stock, ne proviendraient pas de manipulations ni de défaut de pesage, mais d'une erreur ayant abouti à ce que deux catégories différentes de viande aient été comptabilisées ensemble, alors qu'elles auraient dû l'être séparément.

  88. Il y a lieu d'écarter cette argumentation du gouvernement allemand. D'abord, la simple allégation que les acheteurs n'auraient émis aucune réclamation ne saurait être considérée comme preuve de la régularité des contrôles effectués lors du déstockage, parce que, ainsi que l'explique le gouvernement allemand lui-même, les conditions de vente de la BALM excluent toute réclamation postérieure à la livraison. Ensuite, les contrôles documentaires réalisés a posteriori par des agents de la BALM ne sauraient permettre de remédier aux irrégularités éventuellement commises lors du déstockage. Enfin, l'erreur invoquée par le gouvernement allemand confirme l'absence de fiabilité du système allemand de contrôle.

  89. Il s'ensuit que les doutes de la Commission selon lesquels la viande n'a pas été toujours pesée lors du déstockage sont à la fois sérieux et raisonnables.

  90. Il résulte de l'examen de l'ensemble des éléments fournis par le gouvernement allemand que ce dernier n'a pas rapporté la preuve que son système de contrôle est exempt de défaillances susceptibles d'engendrer des risques de pertes mineures pour le FEOGA et qu'il n'est pas parvenu à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes.

  91. Dès lors, eu égard à l'ensemble des considérations qui précèdent, le recours du gouvernement allemand doit être rejeté.

    Sur les dépens

  92. 92. Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République fédérale d'Allemagne et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

    Par ces motifs,

    LA COUR (sixième chambre)

    déclare et arrête:

    1) Le recours est rejeté.

    2) La République fédérale d'Allemagne est condamnée aux dépens.

    Kapteyn Hirsch Ragnemalm

    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 octobre 1999.

    Le greffier Le président de la sixième chambre

    R. Grass J. C. Moitinho de Almeida


    1: Langue de procédure: l'allemand.


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