« Fonction publique ' Fonctionnaires ' Pourvoi d'un poste de grade A 2 ' Rejet de candidature ' Violation des formes substantielles ' Recours en annulation ' Recours en indemnité »
- L'article 29, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable dans la présente espèce (ci-après le « statut »), énonce :
«1. En vue de pourvoir aux vacances d'emploi dans une institution, l'autorité investie du pouvoir de nomination, après avoir examiné :
a) les possibilités de promotion et de mutation au sein de l'institution ; [...]
ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves. [...] »
- L'article 45, paragraphe 1, du statut, dispose :
« 1. La promotion est attribuée par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur de la catégorie ou du cadre auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d'un minimum d'ancienneté dans leur grade, examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion ainsi que des rapports dont ils ont fait l'objet.
Ce minimum d'ancienneté est, pour les fonctionnaires nommés au grade de base de leur cadre ou de catégorie, de six mois à compter de leur titularisation ; il est de deux ans pour les autres fonctionnaires. »
- Le 16 mai 2000, le bureau du Parlement européen (ci-après le « bureau ») a adopté une décision fixant les différentes étapes de la procédure de nomination des hauts fonctionnaires. S'agissant des nominations aux postes de grade A 1 ou A 2, pour lesquelles le bureau agit en tant qu'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l'« AIPN »), les étapes prévues sont les suivantes :
« 1. Information du [b]ureau sur les postes vacants ; le cas échéant, décision du [b]ureau sur la procédure à suivre.
2. Publication d'un avis de vacance comportant une description précise des fonctions ainsi que des qualifications et de l'expérience requises.
3. Constitution d'un [c]omité consultatif pour la nomination des hauts fonctionnaires composé du [s]ecrétaire général, du [d]irecteur général du personnel ainsi que d'au moins un autre directeur général. En cas de nomination à un poste de grade A 2, le directeur général compétent pour le poste concerné doit en tout cas faire partie du [c]omité. Ce [c]omité est chargé d'aider le [b]ureau à préparer la nomination de hauts fonctionnaires en examinant si les candidats répondent aux exigences mentionnées dans l'avis de vacance.
à cette fin, la procédure suivante s'applique :
a) établissement par le [c]omité consultatif d'une fiche d'évaluation claire et transparente portant obligatoirement sur :
les exigences mentionnées dans l'avis de vacance ;
l'évaluation de chaque candidat (capacités de gestion, expérience de la gestion du personnel et de la gestion de crédits, connaissances techniques, etc.).
La fiche d'évaluation constitue la base des travaux ultérieurs du [c]omité.
b) Le [c]omité établit une liste à laquelle sont jointes les fiches d'évaluation. Cette liste comprend les noms de l'ensemble des candidats, tout en précisant les candidats que le [c]omité recommande pour la suite de la procédure de sélection. Elle est transmise au [b]ureau pour évaluation.
c) Le [b]ureau examine et finalise la liste qui lui est transmise.
d) Une fois la liste finalisée, le [c]omité consultatif procède à des entretiens avec les candidats désignés par le [b]ureau.
e) Le [c]omité consultatif soumet son rapport final au [p]résident qui le transmet au [b]ureau, accompagné de propositions et du dossier complet de la procédure (avis de vacance, fiches d'évaluation, rapport des entretiens et curriculum vitae).
4. Le [b]ureau arrête une décision sur la base du rapport (fiches d'évaluation et curriculum vitae) ainsi que des propositions du [p]résident. Dans le cadre de sa procédure de décision, le [b]ureau peut procéder à l'audition des candidats. »
Faits à l'origine du litige
- Le 10 juillet 2003, le Parlement a publié l'avis de vacance d'emploi no 10069 (ci-après l'« avis de vacance »), en vue de pourvoir le poste de grade A 2 de directeur des affaires budgétaires à la direction générale des commissions et délégations du Parlement, et ce d'abord par voie de promotion et de mutation. En raison d'une restructuration du secrétariat général du Parlement le 1er janvier 2004, ce poste a été réaffecté par la suite à la nouvelle direction générale des commissions chargées des politiques internes.
- Sous la rubrique « Nature des fonctions », l'avis de vacance précisait ce qui suit :
« Sous la responsabilité du directeur général :
superviser et coordonner, à l'intérieur du [s]ecrétariat général, l'organisation de la procédure budgétaire dans son ensemble, y compris la publication finale de budget ainsi que la procédure de décharge ;
superviser les activités des secrétariats de la commission des budgets et de la commission du contrôle budgétaire ;
organiser et gérer un réseau d'administrateurs chargés de la procédure budgétaire dans chaque commission parlementaire et, dans le cadre de la structure hiérarchique de la [d]irection générale et en coopération avec les chefs de division concernés, coordonner les activités des administrateurs dans la préparation et le suivi du budget ; dans ce contexte, promouvoir l'échange d'informations et faciliter les synergies entre les différentes parties concernées à la fois à la commission des budgets, à la commission du contrôle budgétaire et dans les autres commissions ;
organiser la mise en place et veiller au bon fonctionnement d'un système permettant le contrôle de la compatibilité entre la législation adoptée ou en instance ayant des implications budgétaires et les plafonds déterminés dans les [p]erspectives financières ; dans ce contexte, assurer l'information continue sur l'impact de la législation en cours à la fois à la commission des budgets et, par l'intermédiaire des administrateurs et directeurs concernés, aux secrétariats de commission concernés ;
superviser et coordonner les activités de la structure de support budgétaire ;
être en charge de tous les contacts interinstitutionnels qui concernent les questions budgétaires, y compris celles donnant lieu à des accords interinstitutionnels, et représenter le Parlement européen dans tout groupe administratif pour la coopération interinstitutionnelle dans le domaine budgétaire. »
- Sous la rubrique « Qualifications et connaissances requises », l'avis de vacance mentionnait :
« ' Études universitaires sanctionnées par un diplôme ou expérience professionnelle garantissant un niveau équivalent ;
connaissance approfondie de la structure et du fonctionnement de l'Union européenne et de ses [i]nstitutions, en particulier du Parlement européen ; très bonne connaissance des traités, des procédures législatives et des modalités d'exécution, ainsi que des relations avec les autres institutions et organes ;
très bonnes qualités d'organisation et aptitude à diriger une équipe dans le cadre des tâches décrites sous '[N]ature des fonctions' ;
bonne connaissance du dispositif réglementaire applicable aux [i]nstitutions communautaires, notamment en matière de personnel et de finances, et aptitude à la gestion administrative ;
très bonnes connaissances des procédures budgétaires ;
expérience confirmée dans les relations interinstitutionnelles ;
capacité d'analyse et de synthèse ;
connaissance approfondie d'une des langues officielles de l'Union européenne et très bonne connaissance d'une autre de ces langues. Pour des raisons fonctionnelles, la connaissance d'autres langues officielles sera prise en considération. »
- Par lettre du 5 septembre 2003, adressée au secrétaire général du Parlement, le requérant, M. Angel Angelidis, fonctionnaire du Parlement de grade A 3, a présenté sa candidature audit poste à pourvoir. Deux autres fonctionnaires du Parlement ont également présenté leur candidature au même poste, dont M. Alfredo De Feo, également de grade A 3. Les candidatures du requérant et de M. De Feo ont été présentées au titre de la promotion, alors que la troisième candidature a été présentée au titre de la mutation.
- Le secrétaire général du Parlement a constitué le comité consultatif prévu par la décision du bureau du 16 mai 2000 (ci-après le « comité »), composé de lui-même, du directeur général du personnel, du secrétaire général adjoint et du directeur général des commissions chargées des politiques internes. Par note confidentielle du 7 janvier 2004, le secrétaire général a informé les membres du bureau que le comité proposait à l'unanimité que les trois candidats soient convoqués à un entretien et qu'une copie du dossier de candidature complet de chacun des candidats était à la disposition des membres du bureau pour ceux qui le souhaitaient. Il a, en outre, invité le bureau à examiner et à finaliser la liste des candidats à convoquer à un entretien.
- Lors de sa réunion à huis clos du 12 janvier 2004, le bureau a examiné la note confidentielle du secrétaire général du 7 janvier 2004 et approuvé la liste proposée des candidats qui devaient être reçus pour un entretien avec le comité.
- Le 4 février 2004, le comité a procédé à l'entretien du requérant et de M. De Feo, le troisième candidat ayant retiré, le 2 février 2004, sa candidature présentée au titre de la mutation.
- Le 6 février 2004, le secrétaire général du Parlement a adressé aux membres du bureau une note confidentielle, au sujet du poste à pourvoir en cause. Cette note était ainsi libellée :
« Le [comité], ayant procédé aux entretiens des deux candidats restant sur la liste retenue par le [b]ureau lors de sa réunion du 12 janvier 2004, a unanimement conclu que seul M. Alfredo De Feo disposait des aptitudes requises pour ce poste.
Sur la base d'un examen comparatif des dossiers personnels des candidats et au vu de l'expérience plus éprouvée de M. De Feo ainsi que de ses réponses convaincantes aux questions posées lors de l'entretien, le [s]ecrétaire général propose aux membres du [b]ureau de nommer M. Alfredo De Feo au poste de [d]irecteur à la [d]irection D (Affaires budgétaires) de la [d]irection générale des commissions chargées des politiques internes ».
- Par décision du 25 février 2004, le bureau a décidé de nommer M. De Feo au poste à pourvoir en cause, conformément à l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut.
- Par lettre du 24 mars 2004, le secrétaire général du Parlement a informé le requérant que, à l'issue de la procédure et sur la base du rapport du comité, le bureau avait décidé, le 25 février 2004, de nommer M. De Feo à ce poste.
- Par lettre du 22 juin 2004, enregistrée au courrier officiel du Parlement le même jour, le requérant a introduit une réclamation contre la décision prise par le secrétaire général du Parlement, le 24 mars 2004, de rejeter sa candidature au poste litigieux.
- Par note du 10 novembre 2004, le secrétaire général du Parlement a proposé au bureau de rejeter, en sa qualité d'AIPN, la réclamation du requérant.
- Par décision communiquée au requérant par lettre du président du Parlement du 23 novembre 2004, le bureau a rejeté la réclamation du requérant.
Procédure et conclusions des parties
- Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 février 2005, le requérant a introduit le présent recours.
- Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale, et, dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure prévues à l'article 64 du règlement de procédure du Tribunal, a invité le Parlement à répondre par écrit à diverses questions et à produire certains documents. Le Parlement a déféré à cette demande dans le délai imparti.
- Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
annuler la décision du secrétaire général du Parlement, du 24 mars 2004, de rejeter sa candidature au poste litigieux, auquel M. De Feo a été nommé ;
annuler la nomination de M. De Feo audit poste ;
annuler la décision de l'AIPN du 23 novembre 2004, portant rejet de la réclamation ;
condamner le Parlement à lui verser une somme, évaluée ex aequo et bono à 5 000 euros, à titre de réparation du préjudice moral prétendument subi, sous réserve d'augmentation ou de diminution en cours d'instance ;
condamner le Parlement aux dépens.
- Le Parlement conclut à ce qu'il plaise au Tribunal :
rejeter le recours en annulation comme non fondé;
rejeter le recours en indemnité comme non fondé ;
décider sur les dépens comme de droit.
Sur la demande en annulation
Sur l'acte attaqué
Arguments des parties
- Le Parlement précise, d'une part, que la décision de nommer M. De Feo au poste litigieux et, par conséquent, de rejeter la candidature du requérant, a été adoptée le 25 février 2004 par le bureau, agissant en tant qu'AIPN en la matière, et non par son secrétaire général, par la « décision » du 24 mars 2004, dont l'annulation est formellement demandée par le requérant.
- Le Parlement rappelle, d'autre part, la jurisprudence constante, selon laquelle un recours en annulation formellement dirigé contre le rejet d'une réclamation a pour effet de saisir le juge communautaire d'une contestation de l'acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée.
- Dans ces conditions, le Parlement précise que les considérations exposées dans son mémoire en défense partent de la prémisse selon laquelle le présent recours vise, en réalité, à l'annulation de la décision du bureau du 25 février 2004.
- Le requérant n'a pas répondu à l'argumentation susvisée du Parlement.
Appréciation du Tribunal
- Il ressort clairement de la lecture de la décision du bureau du 25 février 2004 que c'est par celle-ci que la nomination de M. De Feo au poste litigieux est intervenue, laquelle impliquait, dans le même temps, le rejet de la candidature du requérant pour ledit poste. En revanche, la lettre que le secrétaire général du Parlement a adressée au requérant le 24 mars 2004 ne contenait aucune décision, mais se limitait à porter à la connaissance du requérant la décision du bureau du 25 février 2004.
- Dans ces conditions et ainsi que le relève à juste titre le Parlement, les deux premiers chefs de conclusions du requérant doivent être compris en ce sens qu'ils visent, en réalité, à l'annulation de la décision du bureau du 25 février 2004 (ci-après la « décision attaquée »).
- De même, il convient de considérer que le troisième chef de conclusions du requérant, formellement dirigé contre la décision de l'AIPN portant rejet de la réclamation, a également eu pour effet de saisir le Tribunal d'une contestation de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 22 février 2000, Rose/Commission, T-22/99, RecFP p. I'A'27 et II'115, point 21, et du 5 novembre 2003, Cougnon/Cour de justice, T-240/01, RecFP p. I'A'263 et II'1283, point 28).
Sur le fond
- à l'appui de son recours en annulation, le requérant invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l'obligation de motivation. Le deuxième moyen est tiré du non-respect de l'avis de vacance, de la violation de l'article 29, paragraphe 1, sous a), et de l'article 45 du statut ainsi que de prétendues erreurs manifestes d'appréciation. Le troisième moyen est pris d'un prétendu détournement de pouvoir.
- Il convient d'examiner, d'abord, le deuxième moyen.
Arguments des parties
- Le requérant rappelle que la nomination au poste litigieux emportait, conformément à l'avis de vacance, une promotion au grade A 2. Par conséquent, l'examen des candidatures impliquerait, conformément aux dispositions de l'article 45 du statut, un examen comparatif des mérites respectifs des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Cette obligation constituerait l'expression à la fois du principe d'égalité de traitement des fonctionnaires et du principe de leur vocation à la carrière.
- L'AIPN disposerait, certes, d'un large pouvoir d'appréciation, le contrôle du juge communautaire devant se limiter à la question de savoir si elle n'a pas usé de ce pouvoir de manière manifestement erronée. Toutefois, l'exercice de ce large pouvoir d'appréciation supposerait un examen scrupuleux des dossiers de candidature et une observation consciencieuse des exigences énoncées dans l'avis de vacance, de sorte que l'AIPN serait tenue d'écarter tout candidat qui ne répond pas à ces exigences. L'avis de vacance constituerait, en effet, un cadre légal que l'AIPN s'impose à elle-même et qu'elle doit respecter scrupuleusement.
- En outre, il ressortirait de la lecture des points 51 à 58 de l'arrêt du Tribunal du 9 juillet 2002, Tilgenkamp/Commission (T-158/01, RecFP p. I'A'111 et II'595), que l'avis de vacance forme un tout, de sorte que le non-respect de l'une ou l'autre des conditions qui y sont énoncées doit nécessairement conduire à conclure à l'absence de conformité de la candidature concernée aux critères retenus pour l'emploi à pourvoir.
- Or, en l'espèce, la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance des principes jurisprudentiels susvisés ainsi que du cadre légal que le Parlement se serait lui-même imposé par l'avis de vacance et serait entachée d'erreurs manifestes d'appréciation. Par conséquent, il y aurait lieu d'annuler la nomination de M. De Feo au poste litigieux, puisqu'il ne remplirait pas les conditions exigées par l'avis de vacance ou, en tout état de cause, il serait manifeste que le requérant satisferait mieux auxdites conditions.
- à cet égard, en premier lieu, le requérant avance que M. De Feo n'avait pas d'expérience professionnelle en matière de contrôle budgétaire. Or, une telle expérience serait un point essentiel, exigé par l'avis de vacance, sous la rubrique « Nature des fonctions », au deuxième tiret. Certes, M. De Feo aurait été chef du secrétariat de la commission des budgets, mais non de celle du contrôle budgétaire, laquelle fonctionnerait de manière totalement différente et indépendante.
- En revanche, le requérant posséderait une expérience professionnelle importante en la matière, compte tenu notamment du mandat que lui aurait confié, en juillet 1999, le secrétaire général du Parlement, à l'occasion de sa nomination au poste de conseiller, qu'il occupait au moment de l'introduction de sa candidature pour le poste litigieux. Dans le cadre de ce mandat, le secrétaire général du Parlement aurait chargé le requérant d'une tâche de coordination interne, à savoir la mise en place d'un réseau d'administrateurs émanant des différentes commissions parlementaires spécialisées. Or, l'organisation et la gestion d'un tel réseau serait une des fonctions énumérées sous la rubrique « Nature des fonctions » de l'avis de vacance, au troisième tiret.
- Cette coordination budgétaire à travers une « task force », proposée par le requérant, aurait été boycottée par M. De Feo parce qu'elle bouleversait ses objectifs et n'aurait, par conséquent, pas été mise en place. Le requérant aurait, néanmoins, réussi à mettre en place, en collaboration avec son ancien directeur M. J., un « forum budgétaire ». Celui-ci aurait fonctionné jusqu'au départ à la retraite de M. J. et aurait, ensuite, été arrêté par le nouveau directeur M. N. et par le directeur général, M. L., qui appuyaient les objectifs de M. De Feo.
- En second lieu, le requérant soutient que son expérience professionnelle, ses responsabilités actuelles et passées en tant que chef d'unité et ses capacités de gestion et de négociation sont à l'évidence meilleures que celles de M. De Feo. En effet, son curriculum vitae et son parcours professionnel, en particulier le poste de conseiller chargé des questions budgétaires qu'il occupait au moment de l'introduction de sa candidature pour le poste litigieux, démontreraient à suffisance que ses qualités et ses compétences correspondraient parfaitement aux exigences de l'avis de vacance.
- Ainsi, les tâches confiées au requérant par le secrétaire général du Parlement, dans le cadre du mandat que ce dernier lui a donné, couvriraient les principales conditions requises et énumérées sous la rubrique « Nature des fonctions » de l'avis de vacance, concernant tant les aspects horizontaux de la coordination budgétaire (préparation et suivi de l'exécution du budget général) que ses aspects verticaux (travaux législatifs spécifiques).
- Pour ce qui est des « qualifications et connaissances requises », le requérant relève que sa formation universitaire est d'un niveau supérieur à celle de M. De Feo, puisqu'il est titulaire de deux doctorats dont un en sciences économiques. Le requérant maîtriserait, par ailleurs, un éventail de langues plus large que celui de M. De Feo.
- En outre, le requérant aurait plus d'ancienneté, dans le service en général et dans le grade A 3 en particulier, que M. De Feo. Il aurait même été, en tant que chef de division, le supérieur hiérarchique direct de ce dernier, entre 1988 et 1990. Cette circonstance ne permettrait ainsi pas de comprendre l'affirmation contenue dans la décision de rejet de la réclamation du requérant, selon laquelle « en ce qui concerne l'aspect relatif au management, force est de constater que le candidat retenu dispose d'une expérience dans le domaine du management largement supérieure ». Le requérant conteste cette constatation, faute d'éléments pertinents à cet égard, susceptibles d'être quantifiés objectivement.
- Le requérant s'estime ainsi en droit de se demander ce qui a conduit l'AIPN à ne pas retenir sa candidature, alors qu'elle répondait parfaitement aux exigences de l'avis de vacance. à la connaissance du requérant, M. De Feo ne saurait se prévaloir d'une compétence aussi complète et polyvalente que lui et, surtout, aussi conforme à ce qui était exigé par l'avis de vacance. Le requérant conclut que la décision attaquée repose sur des erreurs manifestes d'appréciation et qu'il a un intérêt certain et légitime, au sens de la jurisprudence (arrêt de la Cour du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement, 111/83, Rec. p. 2323, point 29, et arrêt Booss et Fischer/Commission, point 31 supra, point 24), à voir annulés tant le rejet de sa candidature que la nomination de M. De Feo au poste litigieux.
- En tout état de cause, le requérant considère qu'il est nécessaire, afin de pouvoir pleinement et objectivement vérifier la légalité de la nomination de M. De Feo et le contrôle des connaissances de ce dernier par le jury, que le Parlement produise les critères, les barèmes et les grilles d'évaluation des candidats retenus pour l'entretien, les procès-verbaux des entretiens et les avis rendus par le comité, la pondération précise des critères et des exigences énumérés dans l'avis de vacance ainsi que les documents relatifs à la procédure de nomination de M. De Feo, y compris son curriculum vitae. Ce ne serait qu'après l'étude de ces documents que le requérant pourrait développer plus amplement et à suffisance de droit les motifs de son recours et obtenir la protection de ses droits statutaires. Il conviendrait, en outre, de savoir si et dans quelle mesure le comité a pris en considération, pour l'établissement de son évaluation, les rapports de notation des candidats.
- En premier lieu, le Parlement rétorque que, contrairement aux affirmations du requérant, l'AIPN n'a pas violé l'avis de vacance en nommant M. De Feo au poste litigieux. Le Parlement fait observer que la seule allégation précise formulée par le requérant à cet égard concerne la prétendue absence d'expérience professionnelle en matière de contrôle budgétaire de M. De Feo.
- Or, la simple lecture du texte de l'avis de vacance permettrait de constater que ledit avis n'exige nullement une telle expérience professionnelle. L'avis de vacance exigerait seulement, sous la rubrique « Qualifications et connaissances requises », de « très bonnes connaissances des procédures budgétaires » ainsi que de « très bonnes qualités d'organisation et [une] aptitude à diriger une équipe dans le cadre des tâches décrites sous '[N]ature des fonctions' ». Le deuxième tiret, figurant sous la rubrique « Nature des fonctions » de l'avis de vacance, invoqué par le requérant, préciserait uniquement qu'il incomberait au directeur nommé de « superviser les activités des secrétariats de la commission des budgets et de la commission du contrôle budgétaire ».
- En deuxième lieu, en réponse aux allégations du requérant afférentes à une prétendue erreur manifeste d'appréciation de l'AIPN, en ce qu'elle a préféré retenir la candidature de M. De Feo à la sienne pour le pourvoi du poste litigieux, le Parlement souligne que l'AIPN n'a jamais mis en doute le fait que le requérant possédait formellement les qualifications requises par l'avis de vacance, ce qui ressortirait, d'ailleurs, de la décision de rejet de la réclamation.
- Toutefois, il ressortirait de la jurisprudence que les fonctionnaires, même s'ils réunissent les conditions pour pouvoir être promus, n'ont pas pour autant un droit subjectif à la promotion, l'AIPN jouissant en la matière d'un large pouvoir d'appréciation. Le requérant ne saurait donc se prévaloir d'un éventuel droit à être nommé au poste litigieux, même s'il remplissait formellement les conditions fixées à cet égard par l'avis de vacance.
- Eu égard à ce large pouvoir d'appréciation, le Parlement fait valoir que, en estimant, après un examen comparatif des mérites des deux candidats, que ceux de M. De Feo étaient globalement supérieurs à ceux du requérant et en décidant, en conséquence, de nommer M. De Feo au poste litigieux, l'AIPN s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas usé de son pouvoir discrétionnaire de manière manifestement erronée.
- Ainsi, s'agissant, premièrement, de la formation universitaire et des connaissances linguistiques des deux candidats, le Parlement rappelle que l'avis de vacance exigeait des « études universitaires sanctionnées par un diplôme » ainsi qu'une « connaissance approfondie d'une des langues officielles de l'Union et [une] très bonne connaissance d'une autre de ces langues ». Les deux candidats rempliraient ces conditions. Plus particulièrement, M. De Feo serait titulaire d'un diplôme universitaire en droit (laurea in giurisprudenza) ainsi que d'un diplôme d'études supérieures européennes et il posséderait, outre sa langue maternelle, des connaissances en français, en anglais et en espagnol.
- Si le requérant pouvait, notamment en ce qui concerne les connaissances linguistiques, se prévaloir de qualifications supérieures à celles de M. De Feo, il n'en resterait pas moins que, selon la jurisprudence, l'AIPN peut légalement préférer un candidat qualifié à un autre candidat qualifié pour des motifs tenant compte de l'intérêt du service.
- En outre, le Parlement fait observer qu'il ressort de la jurisprudence qu'il est normal que les qualifications d'un candidat soient plus ou moins élevées et que l'AIPN ne saurait être censurée pour avoir pris en considération la candidature d'une personne dont les compétences professionnelles sont de valeurs différentes, pourvu que cette dernière possède, dans chacune des qualifications nécessaires pour le poste à pourvoir, un niveau adéquat, et, globalement, l'ensemble des qualités lui permettant d'exercer efficacement les fonctions en question.
- S'agissant, deuxièmement, de l'ancienneté respective des deux candidats dans le service, et notamment dans le grade A 3, le Parlement rappelle la jurisprudence selon laquelle, pour un candidat, ni le fait d'avoir assuré l'intérim dans l'emploi concerné ni une longue période de service dans le grade inférieur ne constituent des éléments d'appréciation décisifs pouvant l'emporter sur l'intérêt du service, lequel est le critère déterminant pour le choix parmi les candidats à une promotion. Dès lors, une plus grande ancienneté du requérant dans le grade A 3 ne constituerait pas, en soi, un facteur déterminant lui permettant de prétendre à une promotion au poste litigieux.
- S'agissant, troisièmement, des qualifications professionnelles des deux candidats, il ressortirait de la note du secrétaire général du Parlement du 10 novembre 2004, proposant au bureau de rejeter la réclamation du requérant, et de la décision de rejet de la réclamation que les qualifications de M. De Feo dépasseraient largement celles du requérant, tant en ce qui concerne les connaissances des procédures budgétaires et du dispositif réglementaire applicable aux institutions qu'en ce qui concerne l'aptitude à diriger une équipe.
- D'une part, M. De Feo aurait travaillé dans le domaine budgétaire depuis 1989, d'abord en tant que membre du secrétariat de la commission des budgets (entre 1989 et 1996), puis comme conseiller auprès du directeur responsable pour le budget (entre 1996 et 1999) et, enfin, en tant que chef de division du secrétariat de la commission des budgets (entre 1999 et 2004). En revanche, le requérant n'aurait travaillé dans le domaine en question qu'à partir de 1999, en tant que conseiller auprès du directeur de la direction D de la direction générale chargée des questions budgétaires.
- D'autre part, les connaissances de M. De Feo seraient également supérieures à celles du requérant en ce qui concerne le dispositif réglementaire applicable aux institutions, en raison, notamment, de la participation de M. De Feo à des négociations interinstitutionnelles, et plus particulièrement à celles concernant la refonte du règlement financier en 2001.
- En ce qui concerne, enfin, l'aptitude à diriger une équipe, M. De Feo serait chef de division au secrétariat de la commission des budgets depuis le 1er juillet 1999 et aurait dirigé sa division à la grande satisfaction de l'institution, alors que le requérant, bien qu'il eà»t été chef de division de 1988 à 1999, n'aurait pas démontré une aptitude comparable dans ce domaine.
- En troisième et dernier lieu, en réponse aux affirmations du requérant relatives à la légalité de la nomination de M. De Feo au poste litigieux, le Parlement relève que, ainsi qu'il aurait été expliqué dans la décision de rejet de la réclamation, l'examen comparatif des mérites des deux candidats, au sens de l'article 29, paragraphe 1, sous a), et de l'article 45 du statut, a bien eu lieu en l'espèce.
- Le comité aurait disposé des dossiers de candidature de tous les candidats, comprenant un sommaire mentionnant leurs diplômes, leur expérience professionnelle et leurs connaissances linguistiques ainsi que leurs curriculum vitae.
- En outre, le requérant et M. De Feo auraient été invités à un entretien avec le comité, à l'issue duquel celui-ci aurait proposé la nomination de M. De Feo au poste litigieux. Ainsi qu'il ressortirait de la note confidentielle du secrétaire général du Parlement du 6 février 2004, informant le bureau des conclusions du comité, cette proposition aurait été faite « sur [la] base d'un examen comparatif des dossiers personnels des candidats et au vu de l'expérience plus éprouvée de M. De Feo ainsi que de ses réponses convaincantes aux questions posées lors de l'entretien ».
- Il s'ensuit, selon le Parlement, que le comité disposait de toutes les informations pertinentes et qu'il a procédé à un examen comparatif des mérites de ces deux candidats. Partant, le troisième grief avancé par le requérant devrait également être rejeté ainsi que le présent moyen dans son intégralité.
Appréciation du Tribunal
- Selon une jurisprudence constante, l'AIPN dispose, en particulier lorsque le poste à pourvoir est très élevé et correspond aux grades A 1 ou A 2, d'un large pouvoir d'appréciation dans la comparaison des mérites des candidats au poste en question (arrêts du Tribunal du 6 juillet 1999, Forvass/Commission, T-203/97, RecFP p. I'A'129 et II'705, point 45 ; du 20 septembre 2001, Coget e.a./Cour des comptes, T-95/01, RecFP p. I'A'191 et II'879, point 113 ; Tilgenkamp/Commission, point 32 supra, point 50, et du 4 juillet 2006, Tzirani/Commission, T-88/04, non encore publié au Recueil, point 77).
- Cependant, ce large pouvoir d'appréciation a pour contrepartie l'obligation, pour l'autorité communautaire qui en dispose, de respecter les garanties conférées par l'ordre juridique communautaire dans les procédures administratives et, parmi elles, l'obligation d'examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d'espèce (arrêt Parlement/Frederiksen, point 31 supra, point 15). Ce pouvoir doit, donc, s'exercer dans le respect le plus complet de toutes les réglementations pertinentes, c'est-à -dire non seulement de l'avis de vacance, mais également d'éventuelles règles de procédure dont l'autorité se serait dotée pour l'exercice de son pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal du 18 septembre 2003, Pappas/Comité des régions, T-73/01, RecFP p. I'A'207 et II'1011, point 53). Ces règles constituent une partie du cadre légal que l'AIPN doit respecter rigoureusement dans l'exercice de son large pouvoir d'appréciation (arrêt Tzirani/Commission, point 60 supra, point 78). C'est seulement ainsi que le juge communautaire peut vérifier si les éléments de fait et de droit dont dépend l'exercice du pouvoir d'appréciation ont été réunis (arrêt de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C-269/90, Rec. p. I'5469, point 14).
- Le non-respect des règles de procédure relatives à l'adoption d'un acte, fixées par l'institution compétente elle-même, constitue une violation des formes substantielles, au sens de l'article 230, deuxième alinéa, CE (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil, 68/86, Rec. p. 855, points 48 et 49 ; arrêt du Tribunal du 19 mai 1994, Consorzio gruppo di azione locale Murgia Messapica/Commission, T-465/93, Rec. p. II'361, point 56), laquelle peut être examinée par le juge communautaire même d'office (voir arrêt du Tribunal du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission, T-228/99 et T-233/99, Rec. p. II'435, point 143, et la jurisprudence citée).
- Dès lors, il convient d'examiner, d'abord, si, lors de l'adoption de la décision attaquée, les règles de procédure pertinentes ont pleinement été respectées. Ce n'est qu'en cas de réponse affirmative à cette question qu'il conviendra d'examiner, ensuite, si l'AIPN a commis une erreur manifeste dans son appréciation, ainsi que l'allègue le requérant.
- Or, force est de constater que les règles internes du Parlement, telles qu'elles ont été fixées par la décision du bureau du 16 mai 2000, n'ont pas été respectées en l'espèce.
- Premièrement, les fiches d'évaluation des candidats, prévues au point 3, sous a), de la décision du bureau du 16 mai 2000, n'ont pas été établies par le comité avant l'établissement de la liste des candidats, prévue au point 3, sous b), de ladite décision. En réponse à une question écrite du Tribunal, le Parlement a indiqué que, en l'espèce, il n'était pas nécessaire d'établir lesdites fiches avant les entretiens entre le comité et les candidats, étant donné que le comité avait proposé et le bureau avait décidé d'inviter tous les candidats à un entretien.
- Cet argument ne saurait être retenu. Il ressort du point 3, sous a) et b), de la décision du bureau du 16 mai 2000 que les fiches d'évaluation doivent être établies avant que le comité propose d'inviter certains candidats à un entretien. En effet, elles ne visent pas seulement à permettre au bureau de décider quels candidats méritent d'être invités à un entretien, mais, aux termes mêmes de la dernière phrase du point 3, sous a), de la décision du bureau du 16 mai 2000, « constitue[nt] la base des travaux ultérieurs du [c]omité ».
- Les informations qui doivent figurer sur les fiches d'évaluation, précisées au point 3, sous a), de la décision du bureau du 16 mai 2000, sont, de toute évidence, destinées à permettre au bureau, en tant qu'AIPN, de fonder sa décision concernant le pourvoi du poste en cause sur tous les éléments pertinents du cas d'espèce, sans qu'il soit nécessaire que les membres du bureau procèdent eux-mêmes, au cours d'une réunion d'une durée nécessairement limitée, à un examen détaillé des dossiers personnels de chaque candidat et de tous les autres documents et éléments éventuellement pertinents.
- Par ailleurs, les fiches d'évaluation des candidats n'ont même pas été établies à un stade ultérieur de la procédure. Dans sa réponse aux questions du Tribunal, le Parlement a précisé que la note confidentielle du 6 février 2004, adressée aux membres du bureau par le secrétaire général (voir point 11 ci-dessus), comportait une annexe exposant les thèmes abordés lors des entretiens du comité avec les candidats ainsi qu'un résumé succinct desdits entretiens. Ce document n'ayant pas été communiqué au Tribunal auparavant, le Parlement l'a annexé à sa réponse aux questions du Tribunal et a soutenu qu'il tenait lieu tant de fiches d'évaluation que de rapport d'entretiens.
- Cependant, contrairement à ce que soutient le Parlement, ledit document ne saurait être assimilé à une fiche d'évaluation, au sens de la décision du bureau du 16 mai 2000. Ce document ne comporte aucun des éléments qui, selon le point 3, sous a), de ladite décision, doivent figurer sur la fiche d'évaluation, mais porte exclusivement sur les entretiens du comité avec les candidats, en donnant un bref résumé des thèmes abordés lors de ces entretiens, des réponses données par chaque candidat aux questions du comité ainsi que l'impression que ce dernier s'est faite, à partir de ces réponses, quant aux aptitudes et aux capacités du candidat concerné. Dans ces conditions, si ce document peut, tout au plus, être qualifié de rapport d'entretiens, il ne saurait en revanche être admis, comme le fait valoir à tort le Parlement, qu'il tenait lieu à la fois de fiches d'évaluation et de rapport d'entretiens.
- Deuxièmement, il y a lieu de constater que le point 3, sous e), de la décision du bureau du 16 mai 2000 n'a pas non plus été respecté. En réponse à une question écrite du Tribunal à cet égard, le Parlement a affirmé que le document annexé à la note confidentielle du secrétaire général du 6 février 2004 (voir point 68 ci-dessus) tenait également lieu de rapport final du comité au sens de cette disposition, dès lors qu'il avait été approuvé par les autres membres du comité, avant sa signature par le secrétaire général.
- Or, tout d'abord, force est de constater que cette dernière affirmation n'est nullement étayée. Ensuite, même à la supposer exacte, cette affirmation est dépourvue de toute pertinence. En effet, il suffit de rappeler que, de par son contenu, ledit document peut, tout au plus, être qualifié de rapport d'entretiens et ne saurait aucunement être assimilé à un rapport final du comité, au sens du point 3, sous e), de la décision du bureau du 16 mai 2000. Par ailleurs, il convient de relever que, d'une part, ce document a été adressé directement aux membres du bureau et non au président du Parlement et, d'autre part et surtout, il n'était pas accompagné du « dossier complet de la procédure », au sens de ladite disposition.
- Enfin, le Tribunal constate que le point 4 de la décision du bureau du 16 mai 2000 n'a pas non plus été respecté en l'espèce. Selon cette disposition, le bureau arrête sa décision sur la base du rapport final du comité, évoqué ci-dessus, « ainsi que des propositions du [p]résident ». Or, la décision attaquée ne fait état d'aucune proposition écrite, ni même orale, du président du Parlement, qui préside également le bureau.
- Il ressort des considérations qui précèdent que le Parlement n'a pas respecté, en l'espèce, sa propre réglementation en la matière, ce qui constitue une violation des formes substantielles. à cet égard, il importe peu que le requérant n'ait pas formellement soulevé un tel moyen et se soit limité à suggérer au Tribunal de demander au Parlement la production de certains documents de la procédure interne de sélection, un tel moyen pouvant, ainsi qu'il a déjà été rappelé, être soulevé d'office par le Tribunal.
- Les précédentes considérations ne sauraient être infirmées par les arguments avancés lors de l'audience par le Parlement. à cet égard, celui-ci avait soutenu que, d'une part, le bureau ayant lui-même fixé les règles de procédure applicables dans sa décision du 16 mai 2000, il pouvait, s'il l'estimait nécessaire, s'en écarter et que, d'autre part, à supposer même qu'un vice de procédure ait été commis en l'espèce, ce vice ne saurait justifier l'annulation de la décision attaquée, dont le contenu aurait été le même en l'absence dudit vice.
- En effet, s'agissant du premier de ces arguments, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence, le Parlement ne saurait s'écarter des règles internes qu'il s'est lui-même fixées, sans modifier formellement ces règles (voir, en ce sens, arrêt Royaume-Uni/Conseil, point 62 supra, point 48).
- S'agissant du second argument, il convient de relever que la violation, comme en l'espèce, des formes substantielles, au sens de l'article 230, deuxième alinéa, CE, lesquelles sont essentielles à la sécurité juridique, entraîne l'annulation de l'acte vicié, sans qu'il soit nécessaire d'établir l'existence d'un préjudice (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 avril 2000, Commission/ICI, C-286/95 P, Rec. p. I'2341, point 52).
- En tout état de cause, c'est à tort que le Parlement soutient que si les règles fixées dans la décision du bureau du 16 mai 2000 avaient été respectées en l'espèce, la décision de ce dernier relative au pourvoi du poste litigieux aurait été la même que la décision attaquée. La violation desdites règles a conduit le bureau à adopter la décision attaquée sans avoir au préalable examiné tous les éléments pertinents du cas d'espèce. Or, si ces éléments avaient effectivement été examinés, il ne saurait être exclu que la décision du bureau aurait été différente.
- Il ressort de l'ensemble des considérations qui précèdent que la décision attaquée doit être annulée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens avancés par le requérant.
Sur la demande en indemnité
Arguments des parties
- Le requérant entend obtenir des dommages-intérêts pour le préjudice moral prétendument subi, tant en raison de la décision attaquée qu'en raison de l'atteinte portée à sa carrière et sollicite, à ce titre, le paiement d'une somme provisionnelle de 5 000 euros.
- En premier lieu, le préjudice moral invoqué découlerait de l'absence totale de motivation de la décision attaquée. Le fait que le requérant se serait vu contraint d'introduire le présent recours pour connaître les raisons du rejet de sa candidature justifierait la condamnation du Parlement à lui verser la somme sollicitée et, en tout état de cause, devrait conduire à la condamnation du Parlement aux dépens.
- En second lieu, le requérant invoque la violation du devoir de sollicitude de l'administration à l'égard des fonctionnaires ainsi que du principe de bonne administration. Après avoir rappelé la jurisprudence relative au devoir de sollicitude, le requérant souligne que, en l'espèce, l'absence d'une analyse attentive du dossier et de ses compétences professionnelles témoigne de la légèreté de l'approche de l'administration, qui aurait ignoré complètement la situation du requérant.
- Dès lors, les conditions posées par la jurisprudence pour l'engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté seraient toutes remplies en l'espèce, le requérant ayant subi un préjudice réel et certain, au sens de cette même jurisprudence. Le requérant se trouverait, en effet, dans un état d'incertitude et d'inquiétude quant à son avenir professionnel, qui aurait des répercussions certaines et graves sur sa vie professionnelle et familiale.
- Le Parlement conteste l'argumentation du requérant et estime que la demande indemnitaire de ce dernier doit être rejetée comme non fondée.
Appréciation du Tribunal
- Pour les raisons exposées ci-dessus, il convient d'annuler la décision attaquée et, dès lors, son illégalité, alléguée par le requérant, doit être considérée comme établie.
- Toutefois, il a été jugé que l'annulation d'un acte de l'administration pouvait constituer en elle-même une réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que le fonctionnaire requérant peut avoir subi, notamment si l'acte n'a comporté aucune appréciation blessante à son égard (arrêt du Tribunal du 25 février 1999, Giannini/Commission, T-282/97 et T-57/98, RecFP p. I'A'33 et II'151, point 40)
- En l'espèce, il convient de faire application de cette jurisprudence. En effet, le rejet de la candidature du requérant a été motivé, dans la décision de rejet de la réclamation, par référence à la prétendue supériorité des qualités et des compétences professionnelles de M. De Feo, sans que cette motivation comporte une quelconque appréciation blessante à l'égard du requérant. Par conséquent, l'annulation de la décision attaquée est parfaitement suffisante, au sens de la jurisprudence précitée, pour réparer le préjudice moral éventuellement subi par le requérant en raison de cette décision. Il y a donc lieu de rejeter la présente demande en indemnité.
Sur les dépens
- Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens.
- Le Parlement ayant succombé en l'essentiel de ses conclusions, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du requérant.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision du bureau du Parlement européen, du 25 février 2004, portant nomination de M. Alfredo De Feo à l'emploi de directeur des affaires budgétaires de la direction générale des commissions chargées des politiques internes du Parlement européen est annulée.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) Le Parlement est condamné aux dépens.
Vilaras
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Martins Ribeiro
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Jürimäe
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Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 décembre 2007.
* Langue de procédure : le français.