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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Saupiquet v Commission (Customs union) French Text [2011] EUECJ T-131/10 (24 November 2011) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/T13110.html Cite as: [2011] EUECJ T-131/10 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
24 novembre 2011 (*)
« Droit douanier – Remboursement des droits à l’importation – Conserves de thon originaires de Thaïlande – Contingent tarifaire – Date d’ouverture – Dimanche – Épuisement du contingent – Article 239 du code des douanes communautaire – Articles 308 bis à 308 quater du règlement (CEE) nº 2454/93 – Règlement (CE) nº 975/2003 »
Dans l’affaire T-131/10,
Saupiquet, établie à Courbevoie (France), représentée par Me R. Ledru, avocat,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par M. B.-R. Killmann et Mme L. Bouyon, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2009) 10005 final de la Commission, du 16 décembre 2009, constatant qu’il n’est pas justifié de procéder au remboursement à la requérante des droits à l’importation pour des conserves de thon originaires de Thaïlande,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre),
composé de MM. S. Papasavvas, président, V. Vadapalas (rapporteur) et K. O’Higgins, juges,
greffier : Mme V. Nagy, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 14 juillet 2011,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le règlement (CE) n° 975/2003 du Conseil, du 5 juin 2003, portant ouverture et mode de gestion d’un contingent tarifaire pour les importations de conserves de thon relevant des codes NC 1604 14 11, 1604 14 18 et 1604 20 70 (JO L 141, p. 1), prévoyait, à partir du 1er juillet 2003, le bénéfice d’un taux de droit de 12 %, dans les limites du contingent tarifaire, ouvert annuellement et pour une durée initiale de cinq ans.
2 Le dimanche 1er juillet 2007, afin de bénéficier du contingent tarifaire pour la période allant du 1er juillet 2007 au 30 juin 2008, la requérante, Saupiquet, a présenté, à un bureau de douane français (ci-après le « bureau de douane »), des déclarations de mise en libre pratique pour des conserves de thon en provenance de Thaïlande qui n’ont été acceptées que le 2 juillet 2007, en raison de la fermeture dominicale de ce bureau.
3 Les douanes françaises ont par la suite transmis la demande de tirage sur le contingent tarifaire à la Commission des Communautés européennes.
4 Le 4 juillet 2007, la Commission a procédé à l’attribution du contingent tarifaire selon l’ordre chronologique des dates d’acceptation des déclarations douanières. À la suite de l’attribution du contingent tarifaire aux demandes de tirage dont les déclarations avaient été acceptées le 1er juillet 2007, celui-ci est arrivé à épuisement le jour même de son ouverture. De ce fait, la demande de tirage de la requérante n’a pas été prise en considération et celle-ci s’est dès lors vue contrainte de payer la différence entre le droit plein et le droit réduit prévu par le règlement n° 975/2003, soit la somme de 312 156 euros.
5 Le 23 janvier 2008, la requérante a demandé au bureau de douane, sur la base de l’article 239 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1, ci-après le « code des douanes »), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2700/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2000 (JO L 311, p. 17), de rembourser ce montant de 312 156 euros.
6 Le 16 octobre 2008, les autorités françaises ont transmis le dossier à la Commission afin qu’elle examine si le remboursement était justifié.
7 Le 16 décembre 2009, considérant qu’aucun manquement constitutif d’une situation particulière au sens de l’article 239 du code des douanes ne pouvait lui être reproché, la Commission a adopté la décision C (2009) 10005 final, constatant qu’il n’était pas justifié de procéder au remboursement à la requérante des droits à l’importation pour des conserves de thon originaires de Thaïlande (ci-après la « décision attaquée »).
8 Par lettre du 18 janvier 2010, les autorités françaises ont notifié la décision attaquée à la requérante.
Procédure et conclusions des parties
9 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 mars 2010, la requérante a introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée.
10 Le 21 mars 2011, le Tribunal a posé une question aux parties, lesquelles y ont répondu dans le délai imparti.
11 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale.
12 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l’audience du 14 juillet 2011.
13 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens.
14 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme non fondé ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
15 La requérante fait valoir en substance que la Commission a commis des manquements constitutifs d’une situation particulière au sens de l’article 239 du code des douanes. Au soutien du recours, elle invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation par la Commission de l’obligation d’arrêter les dispositions réglementaires nécessaires pour assurer l’accès égal et non discriminatoire au contingent tarifaire et, le second, de la violation par la Commission de l’obligation de reporter la date d’ouverture du contingent tarifaire pour assurer l’accès égal et non discriminatoire audit contingent.
Sur le premier moyen, tiré de la violation par la Commission de l’obligation d’arrêter les dispositions réglementaires nécessaires pour assurer l’accès égal et non discriminatoire au contingent tarifaire
16 Dans le cadre du présent moyen, la requérante soutient que, en ne prenant pas les mesures réglementaires nécessaires, la Commission a manqué à son obligation d’assurer un accès égal et non discriminatoire des importateurs au contingent tarifaire pour la période allant du 1er juillet 2007 au 30 juin 2008.
17 La requérante renvoie d’abord au règlement (CE) n° 1427/97 de la Commission, du 23 juillet 1997, modifiant le règlement (CEE) n° 2454/93 fixant certaines dispositions d’application du code des douanes (JO L 196, p. 31, ci-après le « règlement d’application »). La requérante souligne que les troisième et sixième considérants de ce règlement visent l’accès égal et continu de tous les importateurs aux contingents tarifaires jusqu’à leur épuisement et la coopération administrative entre la Commission et les autorités douanières nationales dans le cadre de la gestion des contingents tarifaires.
18 La requérante invoque également l’article 7 du règlement n° 975/2003, au titre duquel la Commission arrête les « dispositions nécessaires à la mise en œuvre » dudit règlement.
19 La requérante soutient encore qu’il appartient à la Commission de prendre les mesures d’exécution du code des douanes, en application des articles 247 et 247 bis dudit code, et de modifier la procédure d’attribution des contingents tarifaires figurant dans les articles 308 bis à 308 quater du règlement d’application pour la rendre compatible avec les principes généraux de droit de l’Union européenne de non-discrimination et d’accès égal.
20 La requérante ajoute que l’accord administratif concernant la gestion des contingents tarifaires adopté par le comité du code des douanes le 30 octobre 2007 (TAXUD/3439/2006-rev.1IT)(ci-après l’« accord administratif ») impose à la Commission un rôle « proactif » dans le cadre de la gestion des contingents tarifaires.
21 Selon la requérante, il résulte de ces dispositions que la Commission a l’obligation d’assurer l’accès égal de tous les importateurs aux contingents tarifaires. Cette obligation serait une obligation de résultat impliquant un comportement « proactif » et diligent de sa part. Si la Commission considère qu’aucune des dispositions exposées ci-dessus ne permet de régler la difficulté résultant de la fermeture des bureaux de douane le dimanche dans certains États membres, elle aurait dû arrêter les dispositions nécessaires pour assurer le respect du principe fondamental d’accès égal au contingent tarifaire. La Commission aurait donc manqué à son obligation.
22 De plus, selon la requérante, la fermeture des bureaux de douane le dimanche, en France comme dans d’autres États membres, compromettrait gravement les principes généraux du droit de l’Union de non-discrimination et d’accès égal aux contingents tarifaires, notamment dans le cas de contingents critiques comme celui en cause en l’espèce.
23 Ainsi, la Commission aurait dû interdire l’ouverture des contingents le dimanche ou traiter sur un pied d’égalité les déclarations de mise en libre pratique déposées le dimanche et le lundi suivant.
24 Dans la réplique, la requérante avance également qu’elle avait, dès le 5 juin 2007, demandé au bureau de douane s’il était possible de déposer des déclarations de mise en libre pratique le dimanche 1er juillet 2007. Il lui aurait été indiqué que le bureau de douane ne pouvait pas être ouvert ce jour-là, faute de personnel volontaire, mais que les déclarations en douane acceptées le 2 juillet 2007 seraient traitées sur un pied d’égalité avec celles acceptées le 1er juillet 2007 pour l’attribution du contingent tarifaire.
25 La Commission conteste tous ces arguments et souligne que la gestion des contingents tarifaires est réglementée par les articles 308 bis à 308 quater du règlement d’application selon la méthode du « premier arrivé, premier servi ».
26 Quant à l’argument avancé par la requérante au stade de la réplique, il serait irrecevable, à défaut d’avoir été mentionné dans la requête.
27 Force est de constater que les articles 308 bis à 308 quater du règlement d’application doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que la Commission puisse prendre une décision excluant un opérateur d’un contingent tarifaire du fait que ce contingent a été épuisé le jour même de son ouverture tombant un dimanche, jour de fermeture des bureaux de douane dans l’État membre où est établi l’opérateur en cause (arrêt de la Cour du 17 février 2011, Bolton Alimentari, C-494/09, non encore publié au Recueil, point 37).
28 En outre, la fermeture dominicale des bureaux de douane dans un État membre n’est pas imputable à la Commission et elle n’est pas, de ce seul fait, dans l’obligation de remédier à un traitement différent des opérateurs de cet État membre résultant du fait que les jours d’ouverture de ses bureaux de douane se distinguent de ceux existant dans d’autres États membres (arrêt Bolton Alimentari, précité, point 36).
29 En l’espèce, le bureau de douane n’a accepté les déclarations de mise en libre pratique que le 2 juillet 2007, en raison de sa fermeture dominicale, et la Commission a simplement procédé à l’attribution du contingent tarifaire en cause selon l’ordre chronologique des dates d’acceptation des déclarations de mise en libre pratique, conformément aux dispositions des articles 308 bis à 308 quater du règlement d’application.
30 Par conséquent, les prétentions de la requérante selon lesquelles la Commission aurait dû interdire l’ouverture des contingents le dimanche ou traiter sur un pied d’égalité les demandes de mise en libre pratique déposées le dimanche et le lundi suivant ne peuvent être retenues.
31 De même, l’argument relatif à la non-discrimination et à l’accès égal au contingent tarifaire, qui avait été avancé par l’importateur dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Bolton Alimentari, précité, mais qui n’a pas été retenu par la Cour, ne peut être retenu.
32 En effet, au soutien de cet argument, la requérante invoque, en réponse à une question posée par le Tribunal, l’article 20, relatif à l’égalité en droit, et l’article 21, relatif à la non-discrimination, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2007, C 303, p. 1). À cet égard, il convient de souligner que le traité de Lisbonne ayant consacré dans les traités fondateurs la force contraignante de la charte, elle est devenue une source de droit primaire de l’Union. Toutefois, pour que la Commission puisse se voir reprocher d’avoir enfreint les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, il faudrait qu’elle ait traité d’une manière différente des situations comparables de façon à entraîner un désavantage pour certains importateurs par rapport à d’autres. Or, comme il a été rappelé aux points 28 et 29 ci-dessus, d’une part, la Commission ne peut être tenue pour responsable de la fermeture des bureaux de douane le dimanche dans quelques États membres et, d’autre part, la Commission a simplement procédé à l’attribution du contingent tarifaire en cause selon l’ordre chronologique des dates d’acceptation des déclarations de mise en libre pratique.
33 Il appartiendra, le cas échéant, aux autorités nationales de remédier à cette situation par l’application de l’article 239 du code des douanes (voir, en ce sens, arrêt Bolton Alimentari, précité, point 55).
34 Les autres arguments de la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause cette appréciation.
35 Premièrement, en ce qui concerne les arguments relatifs aux troisième et sixième considérants du règlement d’application, il est de jurisprudence constante que les considérants d’un acte de l’Union n’ont pas de valeur juridique contraignante et ne sauraient être utilement invoqués pour déroger aux dispositions mêmes de l’acte concerné (voir arrêt de la Cour du 2 avril 2009, Tyson Parketthandel, C-134/08, Rec. p. I-2875, point 16, et la jurisprudence citée). Ainsi, il ne saurait être fait des troisième et sixième considérants du règlement d’application une interprétation contraire à celle évoquée au point 27 ci-dessus.
36 Deuxièmement, concernant la référence à l’article 7 du règlement n° 975/2003, selon lequel « [l]a Commission arrête les dispositions nécessaires à la mise en œuvre [dudit règlement], notamment les amendements et adaptations techniques que requièrent les modifications de la nomenclature combinée et du [tarif intégré des Communautés européennes] », et aux articles 247 et 247 bis du code des douanes, habilitant la Commission à prendre les mesures d’exécution dudit code, il convient de constater que ces dispositions ne prévoient pas, même implicitement, l’obligation pour la Commission de pallier la fermeture dominicale des bureaux de douane de certains États membres.
37 Troisièmement, en ce qui concerne l’argument relatif à l’accord administratif, dont il résulterait pour la Commission un rôle « proactif » l’obligeant par exemple à donner des conseils aux États membres et à vérifier le caractère critique des contingents tarifaires à l’occasion de chaque session d’attribution, il y a lieu de relever que, en tout état de cause, ainsi qu’il a été rappelé au point 28 ci-dessus, la fermeture dominicale des bureaux de douane dans un État membre n’est pas imputable à la Commission et qu’elle n’est pas, de ce seul fait, dans l’obligation de remédier à un traitement différent des opérateurs de cet État membre. Par ailleurs, l’accord administratif ne saurait, de par sa nature, déroger aux règles établies à l’article 308 bis du règlement d’application et ne peut, dès lors, être interprété d’une manière contraire audit article (arrêt Bolton Alimentari, précité, points 33 et 42).
38 Enfin, même à supposer que l’argument de la requérante mentionné au point 24 ci-dessus soit recevable, celui-ci doit être rejeté comme inopérant dans la mesure où il a trait au comportement des autorités françaises et n’est donc pas susceptible de remettre en cause l’appréciation du Tribunal relative aux obligations de la Commission.
39 Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté.
Sur le second moyen, tiré de la violation par la Commission de l’obligation de reporter la date d’ouverture du contingent tarifaire pour assurer l’accès égal et non discriminatoire audit contingent
40 Selon la requérante, sachant que les bureaux de douane de certains États membres seraient fermés le dimanche 1er juillet 2007, et ce d’autant plus que le contingent tarifaire était un « contingent critique » s’épuisant plus rapidement chaque année, la Commission aurait dû prendre, en complément de la législation en vigueur, les dispositions nécessaires afin d’assurer un accès égal et non discriminatoire au contingent tarifaire en différant son ouverture au lundi 2 juillet 2007.
41 La Commission réfute cet argument et avance qu’il est semblable au précédent.
42 À cet égard, comme le relève la Commission, il y a lieu de relever que le second moyen est le pendant du premier. En effet, prétendre que la Commission aurait dû reporter la date d’ouverture du contingent tarifaire pour assurer l’accès égal et non discriminatoire audit contingent tarifaire et reprocher à celle-ci de ne pas avoir pris les dispositions nécessaires à cette fin revient en substance au même.
43 Force est en outre de constater que les articles 308 bis à 308 quater du règlement d’application ne prévoient pas la possibilité, pour la Commission, de suspendre l’ouverture d’un contingent tarifaire en raison de la fermeture dominicale des bureaux de douane et qu’une telle suspension ne saurait être admise, puisqu’elle impliquerait nécessairement de faire dépendre, dans toute l’Union, l’ouverture d’un tel contingent des particularités existant dans cet État membre (arrêt Bolton Alimentari, précité, points 40 et 41).
44 La Commission ne saurait donc être tenue de reporter la date d’ouverture du contingent tarifaire.
45 Par ailleurs, ainsi qu’il a été exposé aux points 31 et 32 ci-dessus, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir, dans la présente affaire, manqué à son obligation d’assurer l’accès égal et non discriminatoire audit contingent.
46 L’argument de la requérante, selon lequel la Commission aurait dû reporter la date d’ouverture du contingent tarifaire, ne peut donc être retenu.
47 Il s’ensuit que le second moyen doit être rejeté ainsi que le recours dans son intégralité.
Sur les dépens
48 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Saupiquet est condamnée aux dépens.
Papasavvas |
Vadapalas |
O’Higgins |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 novembre 2011.
Signatures
* Langue de procédure : le français.