BAILII is celebrating 24 years of free online access to the law! Would you consider making a contribution?

No donation is too small. If every visitor before 31 December gives just £1, it will have a significant impact on BAILII's ability to continue providing free access to the law.
Thank you very much for your support!



BAILII [Home] [Databases] [World Law] [Multidatabase Search] [Help] [Feedback]

Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> LPN v Commission French Text [2011] EUECJ T-29/08 (09 September 2011)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/T2908.html
Cite as: [2011] EUECJ T-29/8, [2011] EUECJ T-29/08

[New search] [Help]


AVIS JURIDIQUE IMPORTANT: The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.



ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

9 septembre 2011 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Refus d’accès – Documents relatifs à une procédure en manquement en cours concernant un projet de barrage sur la rivière Sabor – Exception relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit – Informations environnementales – Règlement (CE) n° 1367/2006 – Obligation de procéder à un examen concret et individuel – Intérêt public supérieur »

Dans l’affaire T-�29/08,

Liga para Protecção da Natureza (LPN), établie à Lisbonne (Portugal), représentée par MP. Vinagre e Silva, avocat,

partie requérante,

soutenue par

Royaume de Danemark, représenté initialement par Mme B. Weis Fogh, puis par M. C. Vang, en qualité d’agents,

par

République de Finlande, représentée initialement par M. J. Heliskoski, Mmes A. Guimaraes-Purokoski, M. Pere et H. Leppo, puis par M. Heliskoski et Mme Guimaraes-Purokoski, en qualité d’agents,

et par

Royaume de Suède, représenté par Mmes A. Falk, S. Johannesson et K. Petkovska, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes P. Costa de Oliveira et D. Recchia, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission du 22 novembre 2007 confirmant le refus d’accorder l’accès à des documents contenus dans le dossier d’une procédure en manquement ouverte contre la République portugaise concernant le projet de construction d’un barrage sur la rivière Sabor (Portugal), qui était susceptible d’enfreindre la directive 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages (JO L 103, p. 1), et la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7),

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. J. Azizi (rapporteur), président, Mme E. Cremona et M. S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 octobre 2010,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Règlement (CE) n° 1049/2001

1        Le règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), définit les principes, les conditions et les limites du droit d’accès aux documents de ces institutions prévu à l’article 255 CE.

2        Selon l’article 2 du règlement n° 1049/2001 :

« 1. Tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un État membre a un droit d’accès aux documents des institutions, sous réserve des principes, conditions et limites définis par le présent règlement.

[…]

3. Le présent règlement s’applique à tous les documents détenus par une institution, c’est-à-dire établis ou reçus par elle et en sa possession, dans tous les domaines d’activité de l’Union européenne.

[…] »

3        L’article 4, paragraphes 2, 3 et 6, du règlement n° 1049/2001 disposent, notamment :

« 2. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection :

–        […]

–        des procédures juridictionnelles et des avis juridiques,

–        des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit,

à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

3. L’accès à un document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui a trait à une question sur laquelle celle-ci n’a pas encore pris de décision est refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

L’accès à un document contenant des avis destinés à l’utilisation interne dans le cadre de délibérations et de consultations préliminaires au sein de l’institution concernée est refusé même après que la décision a été prise, dans le cas où la divulgation du document porterait gravement atteinte au processus décisionnel de l’institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

[…]

6. Si une partie seulement du document demandé est concernée par une ou plusieurs des exceptions susvisées, les autres parties du document sont divulguées. »

 Règlement (CE) n° 1367/2006

4        Aux termes du considérant 8 du règlement (CE) n° 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (JO L 264, p. 13) :

« La définition de l’information environnementale dans le présent règlement englobe les données sous toute forme concernant l’état de l’environnement. Cette définition, qui est alignée sur celle retenue par la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement et abrogeant la directive 90/313/CEE du Conseil (JO L 41 […], p. 26), a la même teneur que la définition figurant dans la convention d’Aarhus. La définition du terme ‘document’ figurant dans le règlement […] n° 1049/2001 englobe l’information environnementale telle qu’elle est définie dans le présent règlement. »

5        Selon le considérant 15 du règlement n° 1367/2006 :

« Lorsque le règlement […] n° 1049/2001 prévoit des exceptions, celles-ci devraient s’appliquer sous réserve des dispositions plus spécifiques du présent règlement relatives aux demandes d’accès aux informations environnementales. Les motifs de refus en ce qui concerne l’accès aux informations environnementales devraient être interprétés de manière restrictive, en tenant compte de l’intérêt que la divulgation des informations demandées présente pour le public et du fait que les informations demandées ont ou non trait à des émissions dans l’environnement […] »

6        L’article 3 du règlement n° 1367/2006 dispose :

« Le règlement […] n° 1049/2001 s’applique à toute demande d’accès à des informations environnementales détenues par des institutions ou organes communautaires, sans discrimination fondée sur la citoyenneté, la nationalité ou le domicile et, dans le cas d’une personne morale, sans discrimination concernant le lieu où elle a son siège officiel ou un véritable centre d’activités.

[…] »

7        Aux termes de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006, intitulé « Application des exceptions relatives aux demandes d’accès à des informations environnementales » :

« En ce qui concerne les dispositions de l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement […] n° 1049/2001, à l’exception des enquêtes, notamment celles relatives à de possibles manquements au droit communautaire, la divulgation est réputée présenter un intérêt public supérieur lorsque les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement. Pour ce qui est des autres exceptions prévues à l’article 4 du règlement […] n° 1049/2001, les motifs de refus doivent être interprétés de manière stricte, compte tenu de l’intérêt public que présente la divulgation et du fait de savoir si les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement. »

 Faits

8        La requérante, la Liga para Protecção da Natureza (LPN), une association de droit portugais établie à Lisbonne (Portugal), est membre de la Plataforma Sabor Livre, qui comprend plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) ayant pour objectif la protection de l’environnement. En cette qualité, elle suit le projet de construction d’un barrage sur la rivière Sabor au Portugal (ci-après le « projet de barrage ») pour veiller, notamment, à ce que les espèces et les habitats concernés bénéficient d’une protection appropriée au regard des exigences découlant de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7, ci-après la « directive habitats »).

9        Par lettre du 22 avril 2003, la LPN a introduit auprès de la direction générale (DG) « Environnement » de la Commission des Communautés européennes une plainte, enregistrée sous le numéro 2003/4523, dans laquelle elle soutenait que le projet de barrage portait atteinte aux sites d’importance communautaire (SIC) de « Morais » et de « Rivière Sabor et Maçãs » en violation de la directive habitats.

10      À la suite de cette plainte, la Commission a ouvert une procédure en manquement contre de la République portugaise et a contacté les autorités portugaises pour vérifier dans quelle mesure le projet de barrage était susceptible d’enfreindre la directive 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages (JO L 103, p. 1), ainsi que la directive habitats.

11      Par lettre du 27 mars 2007, la LPN a demandé à la DG « Environnement » un accès à des informations relatives au traitement de la plainte et à consulter des documents élaborés par « le groupe de travail de la Commission » ainsi que ceux échangés entre la Commission et les autorités portugaises.

12      Par lettre du 22 mai 2007, la DG « Environnement » a rejeté la demande d’accès aux documents formulée par la LPN, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, au motif que la divulgation des documents en cause aurait affecté le bon déroulement de la procédure en manquement ouverte au titre de l’article 226 CE, dans le cadre de laquelle la Commission et les États membres devraient coopérer dans un climat de confiance mutuelle pour pouvoir entamer des négociations et arriver à un règlement amiable du différend. Dans cette lettre, elle a notamment indiqué que, le 18 octobre 2005, la Commission avait adressé une lettre de mise en demeure aux autorités portugaises, à laquelle celles-ci avaient répondu le 16 décembre 2005, et que, depuis lors, les contacts bilatéraux se poursuivaient en vue de résoudre le différend.

13      Par lettre du 14 juin 2007, adressée à la Commission et enregistrée par celle-ci le 22 juin 2007, la LPN a réitéré sa demande d’accès et exigé que la Commission reconsidère sa décision de refus.

14      Par lettre du 16 juillet 2007, la Commission a informé la LPN du fait que, conformément à l’article 8, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001, le délai de réponse était prolongé de 15 jours ouvrables et expirait donc le 3 août 2007.

15      Par lettre du 3 août 2007, la Commission a informé la LPN que malheureusement, en raison du volume des documents demandés, il ne lui était pas possible de répondre dans les délais et que la Commission faisait tout ce qui était en son pouvoir pour lui donner une réponse finale le plus rapidement possible.

16      À la suite d’une annonce publique par le ministre de l’Économie portugais selon laquelle la Commission aurait classé ou serait sur le point de classer la plainte à l’origine de la procédure en manquement concernant le projet de barrage, la LPN a envoyé, les 27 septembre et 1er octobre 2007, deux autres courriers à la Commission.

17      Par lettre du 9 novembre 2007, la DG « Environnement » a répondu, en substance, que la Commission n’avait pas clos la procédure en manquement, mais qu’elle lui avait accordé une « haute priorité » afin de finaliser bientôt son appréciation. En outre, elle a fait savoir que, conformément à ses « règles internes », la plaignante serait informée de l’évolution du traitement du dossier et qu’elle aurait l’occasion de présenter ses observations avant que la Commission ne prenne une décision.

18      Par lettre du 22 novembre 2007 (ci-après la « décision litigieuse »), la Commission a répondu à la lettre de la LPN du 14 juin 2007 et a confirmé le refus d’accès aux documents demandés.

19      Au soutien de la décision litigieuse, la Commission a essentiellement considéré que les documents ayant fait l’objet de la correspondance entre elle et les autorités portugaises étaient tous couverts par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, tel qu’interprété par l’arrêt du Tribunal du 11 décembre 2001, Petrie e.a./Commission (T-�191/99, Rec. p. II-�3677, point 68), qui vise à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit.

20      En particulier, la Commission a indiqué que, dans le cadre d’une procédure en manquement, devait régner un climat de confiance mutuelle entre la Commission et l’État membre concerné pour leur permettre d’entamer un processus de négociation et de compromis dans le but d’un règlement amiable du différend sans qu’il faille engager un contentieux devant la Cour. Elle a également observé que, d’une part, le processus de négociation entre la Commission et les autorités portugaises était toujours en cours et, d’autre part, plusieurs échanges de vues et réunions avaient eu lieu ou devaient encore avoir lieu aux fins de l’appréciation de l’impact du projet de barrage. Elle en a déduit que la divulgation des documents demandés porterait atteinte à la capacité de la Commission à traiter la prétendue infraction, étant donné qu’elle était susceptible de remettre en cause un règlement amiable du différend avec les autorités portugaises avant que l’affaire ne soit portée devant la Cour. En outre, elle a considéré qu’un « accès partiel » au sens de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001, n’était pas possible pour lesdits documents, dès lors que l’exception invoquée s’appliquait à la totalité de ces documents.

21      Par ailleurs, en ce qui concerne un éventuel « intérêt public supérieur » au sens de l’article 4, paragraphe 2, dernière phrase, du règlement n° 1049/2001, la Commission a considéré qu’il faisait défaut. Selon elle, l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006, selon lequel la divulgation est réputée présenter un intérêt public supérieur lorsque les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement, ne s’appliquait pas à des enquêtes relatives à de possibles manquements au droit communautaire, comme en l’espèce. Elle a précisé que le risque de l’existence d’une violation grave de la directive habitats ne constituait pas non plus un tel intérêt, dès lors que la Cour était seule compétente pour établir que l’État membre concerné avait manqué à ses obligations en vertu du traité CE. Selon elle, la divulgation des documents demandés n’apporterait pas de clarification à cet égard tant que la Cour n’aurait pas définitivement tranché cette question.

22      Par lettre du 7 janvier 2008, la LPN a demandé à la Commission, au titre du règlement n° 1049/2001, de lui communiquer les « règles internes » mentionnées dans une lettre de la DG « Environnement » en date « du 22 novembre 2007 », afin qu’elle puisse « mieux examiner et suivre » la procédure de traitement de la plainte.

23      Le 18 janvier 2008, à savoir le jour de l’introduction du présent recours contre la décision litigieuse, la DG « Environnement » a communiqué à la LPN son intention de proposer à la Commission de classer sa plainte dans la procédure en manquement relative au projet de barrage et l’a invitée à présenter, dans un délai d’un mois à compter de la réception de ladite lettre, les observations qu’elle considérait être pertinentes.

24      Par lettre du 6 février 2008 adressée à la DG « Environnement », la LPN a réitéré sa demande d’accès aux documents contenus dans le dossier de la procédure en manquement ainsi qu’aux « règles internes » de la Commission, telles que mentionnées dans la lettre de cette DG du 9 novembre 2007, dont la connaissance était selon elle nécessaire pour exercer son droit d’être entendue de manière efficace et pour soumettre des « observations pertinentes ». Elle a également demandé que le délai de réponse d’un mois ne commence à courir qu’après qu’elle aura reçu les précisions sollicitées et les documents demandés.

25      Par lettre du 19 février 2008 adressée à la Commission, la LPN a réitéré sa demande d’accès aux « règles internes » spécifiques de la Commission.

26      Le 27 février 2008, la LPN a remis à la Commission un mémoire dans lequel elle a exposé des objections techniques, formelles et juridiques au classement de sa plainte.

27      Par courriel du 4 mars 2008, la LPN a apporté des précisions à ses observations exposées dans le mémoire du 27 février 2008.

28      Par lettre du 3 avril 2008, la Commission a fait savoir à la LPN, en substance, que, premièrement, elle avait décidé de classer la plainte concernant le projet de barrage lors de sa réunion du 28 février 2008, deuxièmement, dans les procédures d’infraction au droit communautaire, les plaignants ne bénéficiaient pas d’un accès privilégié aux documents et, partant, ils devaient se prévaloir du droit général d’accès prévu par le règlement n° 1049/2001 et, troisièmement, dès lors que la Commission avait classé la plainte, l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, dudit règlement cessait d’être applicable, de sorte que les documents demandés pouvaient désormais lui être remis, à condition qu’ils ne fussent pas couverts par une autre exception au sens de ce règlement. À cet effet, la Commission a joint une liste de documents dénommée « Répertoire des documents du dossier ». Enfin, la Commission a exposé les raisons pour lesquelles elle estimait opportun, au regard de la législation communautaire applicable en matière d’environnement, de ne plus poursuivre l’instruction de la plainte.

29      Par la suite, la LPN a demandé à avoir accès à certains des documents figurant dans le « Répertoire des documents du dossier » communiqué par la Commission.

30      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 mai 2008 et enregistrée sous la référence T-�186/08, la LPN a introduit un recours contre, notamment, la décision de la Commission du 28 février 2008 portant classement de la plainte.

31      Le 20 juin 2008, la LPN a pu consulter les dossiers de la DG « Environnement » et avoir accès au contenu de certains des documents demandés.

32      Par lettre du 11 juillet 2008, la LPN a réitéré sa demande d’accès aux documents dont le contenu ne lui avait pas été divulgué ou lui avait été divulgué seulement en partie.

33      Par lettre du 24 octobre 2008 portant la référence SG.E.3/MIB/psi D(2008) 8639 (ci-après la « décision du 24 octobre 2008 »), la Commission a, d’abord, accordé à la LPN l’accès à la totalité du contenu de 21 documents figurant dans une liste annexée à cette lettre. Elle lui a, ensuite, accordé un accès partiel au contenu de 16 autres documents figurant dans ladite liste. Elle lui a, enfin, refusé l’accès à 10 autres documents figurant dans cette liste (voir points 2.1 à 2.3 de la décision du 24 octobre 2008). Au soutien de ses refus d’accorder l’accès à certains documents ou à certaines parties de documents, elle a invoqué l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement n° 1049/2001 concernant la protection du processus décisionnel, sauf s’agissant de certains passages d’un document pour lesquels elle s’est également prévalue de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du même règlement concernant la protection des procédures juridictionnelles (voir points 2.4.1 et 2.4.2 de la décision du 24 octobre 2008).

34      Par lettre du 7 novembre 2008, la Commission a transmis à la LPN deux documents supplémentaires.

35      Par ordonnance du 7 septembre 2009, LPN/Commission (T-�186/08, non publiée au Recueil), le Tribunal a rejeté comme irrecevable le recours de la LPN, mentionné au point 30 ci-dessus, en ce qu’il vise l’annulation de la décision de la Commission du 28 février 2008 portant classement de la plainte.

 Procédure et conclusions des parties

36      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 janvier 2008, la LPN a introduit le présent recours.

37      Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement les 8, 19 et 20 mai 2008, le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le Royaume de Suède ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la LPN. Par ordonnance du 8 juillet 2008, le président de la troisième chambre du Tribunal a admis ces interventions. La République de Finlande a soumis son mémoire en intervention le 27 août 2008 et le Royaume de Danemark ainsi que le Royaume de Suède les leurs le 22 septembre 2008. La Commission a soumis ses observations sur ces mémoires en intervention le 5 février 2009.

38      La LPN, soutenue par les intervenantes, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision litigieuse ;

–        condamner la Commission aux dépens.

39      Dans le mémoire en défense, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la LPN aux dépens.

40      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 25 novembre 2008, la Commission demande à ce qu’il plaise au Tribunal de constater que « le présent recours est devenu sans objet en ce qui concerne les documents divulgués, du fait de la perte d’intérêt à agir de la [LPN] », que « l’objet du présent recours a été modifié en ce qui concerne les documents refusés » et que, « dans ces conditions et conformément à l’article 113 du règlement de procédure, il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours ».

41      La LPN et les intervenantes ont soumis leurs observations sur cette demande dans les délais impartis.

42      Dans ses observations sur la demande de non-lieu à statuer de la Commission, la LPN conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de demander à la Commission, au titre de mesure d’organisation de la procédure au sens de l’article 64 de son règlement de procédure, de produire les documents non encore ou seulement partiellement divulgués à la LPN.

43      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

44      Par lettre du 12 juillet 2010, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure au titre de l’article 64 du règlement de procédure, le Tribunal a demandé aux parties principales de déposer certains documents et de répondre par écrit à des questions écrites. Ces parties ont déféré à cette demande en produisant des listes identifiant l’ensemble des documents demandés, auxquels un accès intégral ou partiel avait été accordé à la LPN en cours d’instance, et ont répondu à ces questions dans les délais impartis. En outre, le Tribunal a demandé à ce que toutes les parties se prononcent à l’audience sur les conséquences éventuelles pour la solution du litige qu’il convenait de tirer des arrêts de la Cour du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau et Commission/Bavarian Lager (respectivement C-139/07 P et C-�28/08 P, non encore publiés au Recueil).

45      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal à l’audience du 5 octobre 2010.

46      À l’audience, en réponse à des questions du Tribunal, la LPN a renoncé à sa demande de voir contrôler la légalité de la décision du 24 octobre 2008 ainsi qu’à son troisième moyen, tiré du non-respect du délai prévu à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001, sous réserve que le Tribunal tienne compte du caractère tardif de la décision litigieuse dans le cadre de sa décision sur les dépens. En outre, la LPN a accepté que l’objet du litige soit limité aux documents et aux extraits de documents auxquels il ne lui avait pas encore été donné accès, à condition que la Commission soit condamnée aux dépens liés à la partie du litige sur laquelle le Tribunal ne statuerait pas. Ces déclarations ont été actées dans le procès-verbal de l’audience.

47      À la suite de demandes de rectification du procès-verbal de l’audience de la part de la République de Finlande et de la LPN, déposées au greffe du Tribunal respectivement les 19 et 20 octobre 2010, le Tribunal a décidé de rouvrir la procédure orale par ordonnance du 16 novembre 2010. Les autres parties ayant été entendues sur lesdites demandes, le Tribunal a procédé aux rectifications demandées du procès-verbal de l’audience, et la procédure orale a été close.

 En droit

 Sur la demande de non-lieu à statuer

 Arguments des parties

48      La Commission rappelle que, par lettre du 3 avril 2008, elle a informé la LPN du fait que le motif de refus au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 avait cessé d’être applicable et qu’elle lui a adressé une liste de documents contenus dans le dossier de la procédure en manquement aux fins qu’elle puisse exercer son droit d’accès aux documents. Elle soutient également que, par la suite, la LPN a eu accès à certains documents demandés et a présenté une demande confirmative quant aux documents pour lesquels l’accès avait été refusé totalement ou partiellement. Elle affirme que, en réponse à cette demande, elle a adopté la décision du 24 octobre 2008. Enfin, elle indique que, par lettre du 7 novembre 2008, elle a transmis à la LPN deux documents supplémentaires.

49      La Commission en conclut, d’une part, que l’objet du présent recours a été modifié du fait que l’accès à une grande partie des documents demandés avait été accordé et, d’autre part, que, s’agissant des documents ayant fait l’objet d’un refus d’accès total ou partiel, les motifs du refus n’étaient plus les mêmes que ceux invoqués dans la décision litigieuse. Par conséquent, en ce qui concerne les documents ou les parties de documents divulgués, la LPN aurait perdu son intérêt à voir annuler cette décision, une telle annulation ne lui procurant aucun bénéfice supplémentaire.

50      La LPN, soutenue par les intervenantes, conclut au rejet de la demande de non-lieu à statuer.

51      La LPN fait valoir, à titre principal, en substance, que les documents divulgués ne lui ont été communiqués que tardivement et sur le fondement d’un motif insuffisant, à savoir le fait que la procédure en manquement était terminée, alors même que l’accès auxdits documents aurait été nécessaire au cours de cette procédure en manquement pour lui permettre de faire valoir utilement son point de vue et pour éviter le présent recours. Toutefois, dans la mesure où elle a pris connaissance du contenu de ces documents, elle ne s’oppose pas à ce que l’objet du présent litige soit limité aux documents non encore ou seulement partiellement divulgués, à condition que la Commission soit condamnée aux dépens liés à la partie du litige ayant perdu son objet. À l’audience, elle a confirmé son accord avec pareille limitation de l’objet du litige, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal d’audience (voir point 46 ci-dessus).

52      En outre, s’agissant des documents pour lesquels l’accès a été refusé intégralement ou partiellement, la LPN maintient sa demande d’annulation de la décision litigieuse. À cet égard, elle conteste que l’objet du litige et les motifs de refus aient été modifiés. Selon elle, la Commission ne saurait modifier, en cours d’instance, les motifs de refus invoqués dans le seul but d’éviter le contrôle de légalité de la décision litigieuse. En outre, elle soutient qu’elle continue à avoir un intérêt à obtenir la communication des documents non encore ou seulement partiellement divulgués ainsi qu’une réponse dûment motivée concernant les raisons pour lesquelles l’accès auxdits documents lui avait été refusé durant la procédure en manquement. Elle estime que, en l’espèce, le motif de refus relatif à la protection des objectifs des activités d’enquête invoqué dans la décision litigieuse n’était pas fondé.

53      En tout état de cause, la LPN fait valoir que la Commission doit supporter les dépens, d’une part, parce que celle-ci n’a pas dûment motivé le refus de divulguer les documents demandés durant la procédure en manquement et, d’autre part, parce que celle-ci est pleinement responsable de la situation ayant donné lieu au présent incident de procédure.

54      La République de Finlande conteste que l’objet du litige ait été modifié à la suite de l’adoption de la décision du 24 octobre 2008. Le seul fait que le motif de refus invoqué dans cette décision diffère des motifs de refus sur lesquels est fondée la décision litigieuse n’entraînerait ni une telle modification ni une perte par le recours de son objet au sens de l’article 113 du règlement de procédure. Selon le Royaume de Suède, le fait que la décision litigieuse est devenue « sans effet » en cours d’instance ne crée pas d’obligation pour le Tribunal de constater que le recours a perdu son objet tant que cette décision n’a pas été formellement retirée. Dans ces circonstances, la LPN posséderait toujours un intérêt légitime à voir contrôler la légalité de la décision litigieuse et à la voir annuler. Les intervenantes précisent que la Commission ne saurait modifier l’objet du litige en adoptant une seconde décision comportant une motivation nouvelle ou modifiée, une telle approche n’affectant pas la validité de la décision initiale et étant contraire au principe de sécurité juridique. Selon elles, si une telle approche était autorisée, une institution pourrait soustraire au contrôle du Tribunal les motifs d’un acte contesté en adoptant ultérieurement d’autres actes ayant le même objet, mais reposant sur des motifs différents.

 Appréciation du Tribunal

55      Il convient de rappeler que, au soutien de sa demande de non-lieu à statuer, la Commission invoque, en substance, deux arguments. D’une part, le présent recours aurait perdu son objet et la LPN son intérêt à agir dans la mesure où ce recours vise des documents qui ont été divulgués à celle-ci en cours d’instance. D’autre part, selon la Commission, en raison de la décision du 24 octobre 2008, l’objet du présent recours a été modifié dans la mesure où cette décision repose sur deux nouveaux motifs de refus qui sont différents de celui invoqué à l’appui de la décision litigieuse.

56      Ainsi qu’il a été reconnu par une jurisprudence établie, l’objet du litige, tel qu’il a été déterminé par le recours introductif d’instance, doit perdurer, tout comme l’intérêt à agir, jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle sous peine de non-lieu à statuer, ce qui suppose que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C-�362/05 P, Rec. p. I-�4333, point 42 ; arrêt du Tribunal du 24 septembre 2008, Reliance Industries/Conseil et Commission, T-�45/06, Rec. p. II-�2399, point 35).

57      Dans la mesure où la LPN s’est vu accorder en cours d’instance un accès à des documents et à des extraits de documents, il convient de considérer que le litige a perdu son objet et que, partant, il n’y a plus lieu de statuer (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 23 novembre 2004, Turco/Conseil, T-�84/03, Rec. p. II-�4061, points 28 à 30).

58      Quant aux documents non encore ou seulement partiellement divulgués à la LPN, il y a lieu de relever que le seul fait pour la Commission d’avoir adopté une nouvelle décision concernant l’accès à une partie des documents qui étaient visés par la décision litigieuse ne permet pas, en tant que tel, de conclure que le litige a perdu son objet.

59      En effet, même à supposer que l’adoption par la Commission de la décision du 24 octobre 2008 ait privé la décision litigieuse de certains de ses effets juridiques, le litige a conservé son objet du fait que cette dernière décision n’a pas été formellement retirée par la Commission (voir, en ce sens, arrêt Wunenburger/Commission, point 56 supra, points 47 à 49), comme celle-ci l’a reconnu en réponse à une question écrite du Tribunal, de sorte que la décision litigieuse continue, en principe, à produire des effets juridiques obligatoires.

60      En outre, s’agissant de la perte de l’intérêt à agir, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante qu’un requérant peut conserver un intérêt à demander l’annulation d’un acte pour permettre d’éviter que l’illégalité dont celui-ci est prétendument entaché ne se reproduise à l’avenir. Un tel intérêt à agir découle de l’article 266, premier alinéa, TFUE, en vertu duquel les institutions dont émane l’acte annulé sont tenues de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt. Toutefois, cet intérêt à agir ne saurait exister que si l’illégalité alléguée est susceptible de se reproduire à l’avenir indépendamment des circonstances de l’affaire ayant donné lieu au recours formé par le requérant (voir, en ce sens, arrêt Wunenburger/Commission, point 56 supra, points 50 à 53, et la jurisprudence qui y est citée ; arrêt Reliance Industries/Conseil et Commission, point 56 supra, point 43).

61      Or, en l’espèce, il y a lieu de rappeler, d’une part, que, dans la décision litigieuse, la Commission a arrêté une position de principe quant au refus d’accès à la totalité des documents contenus dans le dossier d’une procédure en manquement en cours dans le domaine du droit de l’environnement et, d’autre part, que la LPN est une association ayant pour objectif principal la protection de l’environnement et la participation active aux processus décisionnels en la matière. Par conséquent, ainsi que la Commission l’a reconnu à l’audience, il existe un risque suffisamment concret et indépendant des circonstances du cas d’espèce que, à l’avenir, dans des situations analogues, c’est-à-dire lorsque la LPN demandera à la Commission d’avoir accès à des documents ayant trait à des informations environnementales liées à une procédure en manquement en cours, la LPN se voie exposée à la même illégalité alléguée.

62      Dès lors, il convient de conclure que la LPN conserve un intérêt à agir contre la décision litigieuse dans la mesure où ladite décision portait refus d’accès aux documents concernés sur le fondement de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 visant notamment la protection des objectifs des activités d’enquête, telle que lue à la lumière des règles pertinentes du règlement n° 1367/2006.

63      Eu égard à ce risque de répétition de l’illégalité alléguée, il importe peu que, en cas d’annulation de la décision litigieuse, la Commission ne soit pas nécessairement obligée, en vertu de l’article 266, premier alinéa, TFUE, d’accorder à la LPN l’accès aux documents non encore ou seulement partiellement divulgués, au motif qu’elle peut continuer à invoquer l’exception concernant la protection du processus décisionnel en raison du caractère définitif et inattaquable de la décision du 24 octobre 2008. En effet, ainsi que la Commission l’a elle-même reconnu à l’audience, en pareille hypothèse, elle serait tenue de procéder à une nouvelle appréciation de la demande d’accès aux documents concernés au regard d’éventuels éléments de fait et de droit nouveaux.

64      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a donc lieu de rejeter la demande de non-lieu à statuer de la Commission dans la mesure où elle vise les documents concernés n’ayant pas encore été ou ayant été seulement partiellement communiqués à la LPN.

 Résumé des moyens d’annulation

65      À la suite de la limitation de l’objet du présent litige lors de l’audience, il convient d’examiner deux moyens d’annulation ayant été soulevé, en substance, par la LPN.

66      D’une part, la LPN soutient que la décision litigieuse viole plusieurs dispositions du règlement n° 1367/2006 et, en particulier, l’article 6 dudit règlement.

67      D’autre part, la LPN invoque une méconnaissance de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 concernant notamment la protection des objectifs des activités d’enquête.

68      Ce dernier moyen est subdivisé en trois branches. Premièrement, la LPN reproche à la Commission d’avoir illégalement omis d’examiner et de motiver, de manière concrète et individuelle, si et dans quelle mesure cette exception s’appliquait à chacun des documents pour lesquels un accès avait été demandé et qui n’avaient pas encore été divulgués. Deuxièmement, la Commission se serait erronément abstenue d’apprécier si, du moins, un accès partiel auxdits documents devait être accordé. Troisièmement, la Commission aurait méconnu les intérêts publics, tels qu’invoqués dans la demande d’accès, exigeant la divulgation desdits documents.

69      Compte tenu des chevauchements entre les premier et second moyens, le Tribunal estime opportun de les apprécier conjointement.

 Sur les premier et second moyens, tirés de la violation du règlement n° 1367/2006 et de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001

 Arguments des parties

–       Sur le premier moyen, tiré de la violation du règlement n° 1367/2006

70      Eu égard aux dispositions pertinentes du règlement n° 1367/2006, la LPN estime que les documents pour lesquels un accès a été demandé contiennent des informations qui doivent lui être divulguées, compte tenu des intérêts en matière d’environnement qu’elle entend défendre et protéger dans le cadre du projet de barrage. Selon elle, même si, en vertu de l’article 6 dudit règlement, l’existence d’un intérêt public supérieur permettant d’écarter les exceptions invoquées ne pouvait pas être présumée en l’espèce, la Commission ne serait pas pour autant dispensée de son obligation d’apprécier concrètement s’il existe, à tout le moins, un intérêt public à la divulgation. Toutefois, contrairement aux exigences découlant de l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du même règlement, la Commission aurait fait une application « automatique » des dispositions du règlement n° 1049/2001 et n’aurait pas respecté son devoir d’interpréter restrictivement tout motif de refus fondé sur l’article 4, paragraphe 2, de ce dernier règlement, compte tenu de l’intérêt public à la divulgation.

71      Par conséquent, la décision litigieuse devrait être annulée pour violation de l’obligation d’interpréter de façon stricte les dispositions de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, laquelle s’imposerait en vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006.

72      Dans la réplique, la LPN conteste la thèse de la Commission selon laquelle le règlement n° 1367/2008 n’est pas applicable au cas d’espèce. La Commission aurait elle-même implicitement reconnu ne pas avoir examiné si les documents concernés contenaient ou non des informations sur des émissions dans l’environnement. Dès lors, elle aurait commis une erreur de droit dans l’interprétation dudit règlement.

73      Les règles générales d’accès énoncées par le règlement n° 1049/2001 n’auraient pas pour effet d’écarter les règles plus spéciales énoncées par le règlement n° 1367/2006 concernant l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement. Selon la LPN, contrairement à ce que prétend la Commission, il convient de comprendre au sens large la notion d’« informations environnementales », au sens du considérant 8 du règlement n° 1367/2006, lequel devrait être lu à la lumière de la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998 (ci-après la « convention d’Aarhus »), approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2005/370/CE du Conseil, du 17 février 2005 (JO L 124, p. 1).

74      La LPN estime, en effet, que, conformément à l’article 3 du règlement n° 1367/2006, ce ne sont que la forme de l’exercice de ce droit d’accès et la manière dont les informations sont divulguées par la Commission qui sont régies par le règlement n° 1049/2001. Lors de l’application de ce règlement, notamment des exceptions pouvant justifier le refus d’une demande d’accès à des informations environnementales, la Commission devrait donc tenir compte des conditions spécifiques prévues par le règlement n° 1367/2006. Cette appréciation serait confirmée par le considérant 15 dudit règlement qui renverrait expressément aux exceptions prévues par le règlement n° 1049/2001, lesquelles devraient être appliquées sous réserve des dispositions plus spécifiques du règlement n° 1367/2006 relatives aux demandes d’accès aux informations environnementales.

75      Par ailleurs, même si, s’agissant des exceptions visées à l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement n° 1049/2001, l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 1367/2006 exclut de son champ d’application les « enquêtes, notamment celles relatives à de possibles manquements au droit communautaire », la seconde phrase de cette disposition disposerait clairement que les motifs de refus fondés sur les autres exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 doivent être interprétés de manière stricte, compte tenu de l’intérêt public que présente la divulgation et de la question de savoir si les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement. Ainsi, d’une part, même si la présomption de l’existence d’un intérêt public supérieur était écartée, la Commission serait tenue d’apprécier concrètement l’existence d’un intérêt public et, d’autre part, si l’information demandée avait trait à des émissions dans l’environnement, comme en l’espèce, la Commission devrait interpréter les motifs de refus de manière stricte.

76      À cet égard, la LPN soutient que la Commission ne saurait valablement invoquer l’arrêt Petrie e.a./Commission, point 19 supra, qui avait été rendu avant l’entrée en vigueur des règlements nos 1049/2001 et 1367/2006. Elle précise que le code de conduite concernant l’accès du public aux documents du Conseil et de la Commission, du 6 décembre 1993 (JO L 340, p. 41, ci-après le « code de conduite »), mis en œuvre par la décision 93/731/CE du Conseil, du 20 décembre 1993, relative à l’accès du public aux documents du Conseil (JO L 340, p. 43), et [par] la décision 94/90/CECA, CE, Euratom de la Commission, du 8 février 1994, relative à l’accès du public aux documents de la Commission (JO L 46, p. 58), qui avait précédé ces règlements, n’exigeait pas une appréciation aussi concrète et motivée des situations dans lesquelles un accès à des documents pouvait porter atteinte au bon déroulement d’une enquête et ne prévoyait même pas qu’un intérêt public supérieur puisse primer l’intérêt à protéger les objectifs des activités d’enquête. Enfin, elle indique que, à la différence de la situation à l’origine de l’arrêt Petrie e.a./Commission, point 19 supra, en cas d’application du code de conduite, seulement deux des documents dûment identifiés auraient échappé à la « règle de l’auteur » et que, en l’espèce, la Commission n’a même pas consulté les autorités portugaises pour savoir s’il était possible de divulguer des documents émanant de leur sphère.

77      À cet égard, la LPN prétend que, en l’espèce, du fait de l’application du règlement n° 1367/2006, même les informations liées à une enquête étaient susceptibles d’être divulguées, compte tenu du résultat de l’appréciation de l’intérêt public qu’il convient d’effectuer en vertu de l’article 6 dudit règlement.

78      En substance, les intervenantes font valoir que, en adoptant la décision litigieuse, la Commission a violé l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006.

79      Selon la République de Finlande et le Royaume de Suède, le législateur communautaire a souligné, dans le règlement n° 1367/2006, l’importance de l’accès du public aux informations environnementales par rapport aux règles générales d’accès énoncées par le règlement n° 1049/2001. Dès lors, même si l’article 6 du règlement n° 1367/2006 n’était pas directement applicable à une procédure en manquement, telle que celle du cas d’espèce, il contiendrait des règles spéciales sur la manière dont il convient d’apprécier, dans le contexte de l’application du règlement n° 1049/2001, l’intérêt général particulièrement important à la divulgation d’informations environnementales, notamment en matière d’émissions dans l’environnement.

80      Ainsi, selon le Royaume de Danemark et la République de Finlande, lorsqu’une institution examine une demande d’accès à un document contenant des informations environnementales, elle doit tenir compte des objectifs du règlement n° 1367/2006, tel qu’interprété à la lumière de la convention d’Aarhus, qui mentionne l’importance particulière et la nécessité d’améliorer l’accès du particulier auxdites informations par rapport à celui prévu par les règles générales du règlement n° 1049/2001, étant donné qu’un tel accès contribue largement à la protection de l’environnement. La Commission devrait donc prendre en considération ces principes lors de l’examen et de l’application des exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001, y compris dans le cadre de l’appréciation de l’existence d’un intérêt public (supérieur) à la divulgation, afin de garantir la plus grande transparence possible pour les citoyens de l’Union.

81      La République de Finlande et le Royaume de Suède contestent la thèse de la Commission selon laquelle la dernière phrase de l’article 6, paragraphe 1, du règlement nº 1367/2006 se borne à rappeler le principe selon lequel les exceptions du règlement nº 1049/2001 doivent être interprétées et appliquées de manière restrictive. Cette phrase signifierait en outre que, lors de l’examen des informations pertinentes, l’institution doit particulièrement tenir compte de cette exigence d’interprétation stricte ainsi que de l’intérêt public à recevoir des informations sur des émissions dans l’environnement. Dès lors, même si la mise en balance des intérêts divergents devait s’effectuer formellement dans le cadre du seul règlement n° 1049/2001, à la lumière du règlement n° 1367/2006, il faudrait accorder un poids d’autant plus important à l’intérêt général à une transparence accrue s’agissant d’informations environnementales.

82      La Commission conclut au rejet du premier moyen.

–       Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001

83      Dans le cadre de la première branche du second moyen, tirée de l’absence d’examen concret des documents concernés, la LPN conteste le bien-fondé de la motivation, qu’elle estime également trop vague et générale, avancée par la Commission dans la décision litigieuse pour justifier le refus de sa demande d’accès. Selon elle, en vertu de l’obligation d’interprétation stricte que lui impose l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006, la Commission devait examiner concrètement chacun des documents concernés afin d’apprécier s’ils entraient ou non dans le champ d’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, ce qu’elle a omis de faire en l’espèce, contrairement aux exigences établies par la jurisprudence. Par ailleurs, admettre que tous les documents ayant trait à des activités d’inspection, d’enquête ou d’audit sont couverts par cette exception tant que les suites à donner à ces activités ne sont pas arrêtées reviendrait à soumettre l’accès auxdits documents à un événement aléatoire, futur et éventuellement lointain, dépendant d’un pouvoir discrétionnaire de la Commission ainsi que de la célérité et de la diligence des différentes autorités.

84      En outre, serait erronée la thèse selon laquelle la divulgation de tous les documents concernés compromet la capacité de la Commission à traiter l’infraction et à aboutir, le cas échéant, à une solution amiable. Selon la LPN, sa demande d’accès vise, au contraire, à « aider la Commission à trouver un accord qui garantisse et veille au respect des règles environnementales communautaires strictes, qui lient tant les États membres que la Commission ». Or, cette dernière n’aurait pas expliqué les raisons pour lesquelles la divulgation des documents concernés était susceptible de remettre en cause un tel règlement amiable avec les autorités portugaises. Elle estime que la Commission ne saurait justifier le refus de la demande d’accès par des risques purement hypothétiques et infondés. En outre, l’exemple du compte rendu d’une visite de représentants de la DG « Environnement » dans la région dans laquelle le barrage sur la rivière Sabor devait être construit, en juillet 2007, à laquelle elle a participé, prouverait qu’un tel risque n’existait pas en l’espèce. Selon elle, c’est à tort que la Commission se réfère à l’arrêt Petrie e.a./Commission, point 19 supra, dès lors qu’il a été rendu à une époque où le règlement n° 1367/2006 n’était pas encore en vigueur et qu’il s’est fondé, dans une large mesure, sur la « règle de l’auteur », non reprise par le règlement n° 1049/2001, exonérant la Commission de son obligation de procéder à l’examen de documents établis par des tiers. Elle soutient que, en l’espèce, la Commission était tenue de procéder à cet examen, document par document, ce qu’elle a omis de faire. Toute autre interprétation serait contraire aux exigences établies par la jurisprudence concernant l’article 4, paragraphe 5, dudit règlement.

85      Dans le cadre de la deuxième branche du second moyen, la LPN soutient que le refus de la Commission de lui accorder, à tout le moins, un accès partiel aux documents concernés enfreint le principe de proportionnalité.

86      Il ressortirait de la décision litigieuse que la Commission a omis de procéder à une appréciation concrète des informations figurant dans ces documents en se limitant à citer la lettre de mise en demeure et la réponse des autorités portugaises sans examiner leur teneur spécifique à la lumière de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001. De plus, la LPN estime que la Commission a fait erronément référence à des catégories très générales de documents du dossier sans même préciser leur nombre ainsi qu’à l’existence de prétendues « opinions motivées demandées » (reasoned opinions requested) qu’elle ignore. Toutefois, un examen concret et individuel desdits documents aurait été indispensable pour déterminer si une divulgation partielle était possible.

87      Dans la réplique, la LPN estime, au regard de tout ce qui précède, que la Commission a violé les principes de coopération, de transparence et de proportionnalité.

88      Dans le cadre de la troisième branche du second moyen, la LPN rejette le constat selon lequel il n’existait aucun intérêt public justifiant la divulgation des documents concernés au motif que les atteintes à l’environnement concernées ne pouvaient être établies que par la Cour dans l’hypothèse où celle-ci était saisie par la Commission. Ce constat serait, d’abord, incompatible avec le droit fondamental de tout particulier de participer aux procédures relatives à l’environnement, tel que reconnu par le règlement n° 1367/2006. Selon la LPN, l’intérêt public visant, notamment, à protéger l’environnement n’a pas besoin d’être confirmé préalablement par le juge de l’Union européenne. Ensuite, ce constat méconnaîtrait le fait que la Commission lui avait assuré le droit de faire valoir ses observations avant qu’une décision définitive sur la procédure en manquement ouverte à la suite de sa plainte ne soit prise. À cet égard, elle fait valoir que les documents pour lesquels un accès avait été demandé lui permettaient d’exercer plus utilement son droit d’être entendue dans ce contexte aux fins de la protection des intérêts publics environnementaux affectés par le projet de barrage.

89      Par ailleurs, l’hypothèse d’une constatation par la Cour de l’existence d’une infraction commise par la République portugaise au droit communautaire serait dépourvue de pertinence et ne serait pas susceptible d’affecter le droit de tout particulier de participer, de manière concrète et préventive, à la protection de l’environnement, d’autant que les conséquences négatives pour l’environnement d’une telle violation du droit communautaire ne pourraient plus être réparées par l’État membre a posteriori.

90      Selon les intervenantes, la Commission a interprété et appliqué de façon erronée l’exception relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit prévue par l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, et paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001.

91      Les intervenantes rappellent qu’une institution doit apprécier concrètement, dans chaque cas d’espèce, si un document relève des exceptions énumérées à l’article 4 du règlement n° 1049/2001. Cet examen concret et individuel devrait en principe être effectué pour toute information contenue dans chacun des documents visés dans la demande d’accès et ressortir des motifs de la décision. Or, la motivation de la décision litigieuse ne révélerait pas que la Commission ait effectué un tel examen concret et individuel du contenu des documents concernés. Dans cette décision, ne seraient même pas identifiés les documents dont la Commission refusait la divulgation, la liste desdits documents ayant uniquement été transmise à la LPN en cours d’instance. Le Royaume de Suède ajoute que l’établissement de cette liste n’équivaut en tout état de cause pas à un examen de la question de savoir si la divulgation de chacun de ces documents, en tout ou en partie, était susceptible de porter concrètement et réellement atteinte à un intérêt protégé.

92      Contrairement à ce que prétend la Commission, les conditions permettant à celle-ci de s’exonérer, à titre exceptionnel, de son obligation d’examiner concrètement et individuellement les documents concernés, à savoir les hypothèses dans lesquelles l’accès doit manifestement être refusé ou accordé, ne seraient pas réunies en l’espèce. L’examen individuel et concret des documents pour lesquels un accès a été demandé serait un principe fondamental d’interprétation du règlement n° 1049/2001, auquel il ne pourrait être dérogé que pour des raisons impérieuses que la Commission n’aurait pas invoquées. Selon les intervenantes, le seul fait que les documents concernés visent une enquête en cours ne suffirait pas à lui seul à justifier l’application de l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, de ce règlement.

93      Les intervenantes font valoir que, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006 (voir points 80 et 81 ci-dessus), les exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 sont d’interprétation et d’application strictes. Selon le Royaume de Danemark et le Royaume de Suède, le principe de transparence vise à garantir, par le droit d’accès aux documents, le plus grand respect possible du principe d’ouverture lors de la prise des décisions par les institutions ainsi qu’une plus grande légitimité et responsabilité des institutions à l’égard des citoyens (considérants 1 à 4 du règlement n° 1049/2001) et détermine ainsi l’interprétation à donner tant aux principes généraux qu’aux dispositions particulières du règlement n° 1049/2001, et ce pour toute activité de ces institutions, y compris les procédures en manquement diligentées par la Commission.

94      En outre, le risque d’affectation de l’intérêt protégé devrait être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique. Plus précisément, la divulgation des documents concernés devrait être effectivement susceptible de porter atteinte à la protection des objectifs des activités d’enquête concernant les manquements en cause. Cependant, la motivation de la décision litigieuse se référerait, de manière générale, à la phase précontentieuse d’une procédure en manquement en cours et à l’intérêt des États membres à voir garantir la confidentialité, sans pour autant préciser les raisons pour lesquelles les activités d’enquête en cause seraient spécifiquement affectées du fait de la divulgation du contenu de chacun desdits documents. Or, ces motifs reviendraient à reconnaître que toute procédure en manquement, du moins jusqu’à l’achèvement de sa phase administrative, doit être conduite dans le secret absolu, ce qui serait incompatible avec l’objectif du règlement n° 1049/2001 d’assurer le plus large accès possible aux documents. Cette appréciation serait confirmée par l’abolition de la règle de l’auteur, l’objectif du législateur communautaire ayant été de limiter le pouvoir de l’auteur d’empêcher la divulgation d’un document provenant de sa plume en invoquant, de manière abstraite, son intérêt à voir respecter la confidentialité du contenu dudit document. Ainsi, la Commission n’aurait pas respecté son obligation d’examiner, de manière concrète et individuelle, chacun des documents concernés pour déterminer le caractère confidentiel ou non de leur contenu et, partant, d’interpréter et d’appliquer de manière stricte l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001. Le Royaume de Danemark ajoute que, en ce faisant, la Commission a également enfreint son obligation de motivation découlant dudit règlement.

95      De même, selon les intervenantes, la Commission a violé l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001, en vertu duquel il lui incombe d’apprécier si l’intérêt protégé par l’exception en cause justifie de refuser l’accès à l’intégralité ou à seulement certaines parties du document concerné, les autres parties dudit document devant être divulguées. Or, en l’absence d’examen concret et individuel des documents concernés, la Commission aurait nécessairement méconnu la possibilité d’une divulgation partielle de leur contenu. À cet égard, le Royaume de Danemark et le Royaume de Suède contestent la thèse de la confidentialité générale et absolue du contenu de tous les documents et de toutes les informations concernant une procédure en manquement. Même à supposer que ces documents contiennent des informations confidentielles, la Commission aurait dû examiner concrètement si une partie desdits documents concernait des informations non confidentielles dissociables susceptibles d’être divulguées.

96      Les intervenantes soutiennent que, en l’espèce, la Commission a également méconnu l’existence d’un intérêt public à la divulgation des documents concernés. Contrairement aux exigences reconnues par la jurisprudence, la Commission n’aurait pas mis en balance dans la décision litigieuse, d’une part, la nécessité de protéger les activités d’enquête et, d’autre part, l’intérêt public lié à la divulgation des informations sur l’environnement, dont l’importance serait soulignée par le règlement n° 1367/2006. Selon elles, une telle mise en balance aurait dû aboutir à la conclusion que l’intérêt à la divulgation primait l’intérêt à protéger la confidentialité. À cet égard, l’éventuelle inapplicabilité de la présomption de l’existence d’un intérêt public supérieur, au sens de l’article 6, paragraphe 1, du même règlement, ne dispenserait pas la Commission de rechercher si un tel intérêt public supérieur à la divulgation existe. Cela serait d’autant plus vrai que, d’une part, dans le cadre de cette mise en balance, la Commission devrait tenir compte des objectifs du règlement n° 1367/2006 et de la convention d’Aarhus, qui confèrent un poids particulier à l’accès public des informations environnementales (voir points 80 et 81 ci-dessus) et, d’autre part, celle-ci n’aurait, en tout état de cause, pas examiné si la divulgation des informations contenues dans chacun des documents concernés était susceptible de porter atteinte aux objectifs des activités d’enquête protégés par l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001.

97      Enfin, d’après la République de Finlande, la Commission n’était pas fondée à se limiter à apprécier un intérêt public supérieur relatif à la poursuite d’une violation grave de la directive habitats, mais elle devait examiner d’office toutes les circonstances qui étaient susceptibles d’être pertinentes à cet égard. La Commission aurait donc fait une mauvaise application de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001, et de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006.

98      La Commission conclut au rejet du second moyen.

 Appréciation du Tribunal

–       Observations liminaires

99      Les premier et second moyens concernent, en substance, l’interprétation et l’application de l’exception, relative notamment à la protection des « objectifs des activités […] d’enquête », prévue par l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, tel que lu à la lumière de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006.

100    À cet égard, il convient de rappeler tout d’abord que, dans le cadre d’un recours en annulation introduit au titre de l’article 230 CE, la légalité de l’acte attaqué s’apprécie en fonction des éléments de droit et de fait existant à la date à laquelle l’acte a été pris (arrêt du Tribunal du 11 mars 2009, Borax Europe/Commission, T-�121/05, non publié au Recueil, point 48).

101    Or, en l’espèce, au moment de l’adoption de la décision litigieuse, une procédure en manquement ouverte contre la République portugaise au titre de l’article 226 CE était en cours. Par conséquent, la Commission était, en principe, en droit d’invoquer l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, relative à la protection des objectifs des activités d’enquête (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission, T-�391/03 et T-�70/04, Rec. p. II-�2023, point 113, et du 12 septembre 2007, API/Commission, T-�36/04, Rec. p. II-�3201, points 121, 133 et 134).

102    Lorsqu’elle refuse l’accès aux documents concernés sur le fondement de cette exception, la Commission doit néanmoins, d’une part, satisfaire à son obligation d’examiner si ces documents étaient effectivement couverts, dans leur totalité, par cette exception et, d’autre part, correctement mettre en balance les éventuels intérêts publics supérieurs à leur divulgation et l’intérêt à la protection de leur confidentialité (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C-�39/05 P et C-�52/05 P, Rec. p. I-�4723, points 33 et suivants, et arrêt du Tribunal du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T-�2/03, Rec. p. II-�1121, points 69 et suivants).

103    Ainsi, étant donné que la LPN et les intervenantes reprochent à la Commission, à titre principal, de ne pas avoir effectué un examen concret et individuel des documents concernés et de ne pas avoir suffisamment tenu compte, dans ce cadre, des dispositions du règlement n° 1367/2006, il convient d’examiner, dans un premier temps, dans quelle mesure ce dernier règlement est susceptible de modifier la portée de l’obligation d’examen incombant à la Commission au titre du règlement n° 1049/2001.

104    À cet égard, il y a lieu de rappeler que la décision litigieuse a été adoptée sur le fondement tant du règlement n° 1049/2001 que du règlement n° 1367/2006.

–       Sur les incidences du règlement n° 1367/2006 sur la portée de l’obligation d’examen de la Commission

105    Il ressort des considérants 8 et 15 du règlement n° 1367/2006, et, en particulier, de la formule « sous réserve des dispositions plus spécifiques du présent règlement relatives aux demandes d’accès aux informations environnementales », lus conjointement avec les articles 3 et 6 dudit règlement, que ce règlement constitue une lex specialis par rapport au règlement n° 1049/2001 en remplaçant, modifiant ou précisant certaines des dispositions de ce dernier règlement lorsque la demande d’accès vise des « informations environnementales » ou des informations « ayant trait à des émissions dans l’environnement ».

106    En effet, premièrement, il ressort de l’article 3 du règlement n° 1367/2006 que le règlement n° 1049/2001 constitue la réglementation applicable à toute demande d’accès à des informations environnementales détenues par l’institution concernée.

107    Deuxièmement, s’agissant du droit d’accès à des documents contenant de telles informations, le considérant 15, deuxième phrase, et l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement n° 1367/2006, dont les libellés respectifs coïncident largement, réaffirment le principe selon lequel toute exception à un droit subjectif ou à un principe général relevant du droit de l’Union, y compris au droit d’accès prévu par l’article 255 CE, lu conjointement avec le règlement n° 1049/2001, doit être appliquée et interprétée de manière restrictive (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 15 mai 1986, Johnston, 222/84, Rec. p. 1651, point 36, et Suède et Turco/Conseil, point 102 supra, point 36). En ce qui concerne le droit d’accès à des documents contenant des informations environnementales, cette obligation d’interprétation stricte des exceptions prévues par le règlement n° 1049/2001 est renforcée, d’une part, par la nécessité pour l’institution concernée de tenir compte de l’intérêt public à la divulgation de telles informations ainsi que par la référence au fait de savoir si ces informations ont trait à des émissions dans l’environnement et, d’autre part, par le fait que le règlement n° 1049/2001 ne contient pas de précisions analogues quant à l’application desdites exceptions dans ce domaine.

108    Troisièmement, l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006 ne remet pas en cause le principe posé par l’article 4, paragraphe 2, in fine, du règlement n° 1049/2001, selon lequel l’institution concernée doit tenir compte d’un éventuel intérêt public supérieur à la divulgation, mais il se limite à modifier et à préciser les conditions dans lesquelles cette institution va examiner s’il existe un intérêt public supérieur à la divulgation dans le cadre d’une demande d’accès à des documents contenant des informations environnementales. Ainsi, l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 1367/2006 prévoit une présomption légale selon laquelle la divulgation présente un intérêt public supérieur lorsque les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement, sauf lorsque ces informations concernent une enquête, notamment celle relative à de possibles manquements au droit communautaire. Il en résulte que, ainsi que l’avancent la LPN et les intervenantes, même si cette présomption légale ne s’applique pas à des documents ayant trait à des enquêtes entamées dans le cadre de procédures en manquement, cette disposition ne dispense pas pour autant la Commission de son obligation de tenir compte, dans chaque cas d’espèce, d’éventuels intérêts publics supérieurs à la divulgation, surtout de ceux liés à des informations environnementales dans un sens plus large que celui des « émissions dans l’environnement », ainsi que d’effectuer la mise en balance exigée par la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêt Suède et Turco/Conseil, point 102 supra, points 44, 45 et 67).

109    C’est au regard de ces considérations qu’il convient de vérifier si, en l’espèce, la Commission a satisfait à son obligation d’examiner si les documents concernés étaient effectivement couverts, dans leur totalité, par l’exception prévue au titre de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, lu conjointement avec l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006.

–       Sur les exigences régissant l’obligation d’examen de la Commission

110    Ainsi qu’il a été reconnu par une jurisprudence établie, compte tenu de la nécessité d’interpréter et d’appliquer strictement toute exception au droit d’accès, la circonstance qu’un document concerne une activité d’enquête, au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, ne saurait, à elle seule, suffire à justifier l’application de cette exception, celle-ci n’étant applicable que si la divulgation des documents concernés est effectivement susceptible de porter atteinte à la protection des objectifs des activités d’enquête de la Commission concernant les manquements en cause (voir, en ce sens, arrêts Franchet et Byk, point 101 supra, points 105 et 109, et API/Commission, point 101 supra, point 127). En effet, ce risque d’atteinte à l’intérêt protégé doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (arrêt Suède et Turco/Conseil, point 102 supra, points 43 et 63). En outre, ainsi qu’il résulte de son libellé, cette exception ne vise pas à protéger les activités d’enquête en tant que telles, mais l’objectif de ces activités, qui consiste, dans le cadre d’une procédure en manquement, à amener l’État membre concerné à se conformer au droit communautaire (voir, en ce sens, arrêt API/Commission, point 101 supra, points 127 et 133, et la jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, point 44 supra, non encore publiées au Recueil, points 109 à 115).

111    Ainsi, dans le cadre d’une procédure en manquement ouverte au titre de l’article 226 CE, lorsque la divulgation d’un document est susceptible de nuire au bon déroulement de cette procédure en manquement et, en particulier, aux négociations entre la Commission et l’État membre, cette institution peut, en principe, refuser de donner accès à ce document, car sa divulgation porterait atteinte à la protection de l’objectif des activités d’enquête, à savoir amener l’État membre à se conformer au droit communautaire.

112    Par ailleurs, ainsi qu’il a été reconnu dans la jurisprudence, lorsque la divulgation d’un document est demandée à une institution, celle-ci est tenue d’apprécier, dans chaque cas d’espèce, si ce document relève des exceptions au droit d’accès énumérées à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 (arrêt Suède et Turco/Conseil, point 102 supra, point 35). À cet égard, il a été précisé, d’une part, que l’examen d’une demande d’accès à des documents doit revêtir un caractère concret et individuel et porter sur le contenu de chaque document visé dans ladite demande et, d’autre part, que cet examen doit ressortir des motifs de la décision de l’institution, en ce qui concerne toutes les exceptions mentionnées aux paragraphes 1 à 3 de l’article 4 du même règlement sur lesquelles cette décision est fondée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal Verein für Konsumenteninformation/Commission, point 102 supra, points 69 à 74 ; voir également, en ce sens, conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, point 44 supra, points 73 à 80).

113    Il existe toutefois plusieurs exceptions à l’obligation de la Commission d’examiner concrètement et individuellement les documents pour lesquels un accès a été demandé.

114    En effet, il a été itérativement jugé que, dès lors que l’examen concret et individuel auquel l’institution doit en principe procéder en réponse à une demande d’accès formulée sur le fondement du règlement n° 1049/2001 a pour objet de permettre à l’institution concernée, d’une part, d’apprécier dans quelle mesure une exception au droit d’accès est applicable et, d’autre part, d’apprécier la possibilité d’un accès partiel, ledit examen peut ne pas être nécessaire lorsque, en raison des circonstances particulières de l’espèce, il est manifeste que l’accès doit être refusé ou bien au contraire accordé. Tel pourrait être le cas, notamment, si certains documents soit, tout d’abord, étaient manifestement couverts dans leur intégralité par une exception au droit d’accès, soit, à l’inverse, étaient manifestement accessibles dans leur intégralité, soit, enfin, avaient déjà fait l’objet d’une appréciation concrète et individuelle par la Commission dans des circonstances similaires (arrêts Verein für Konsumenteninformation/Commission, point 102 supra, point 75, et API/Commission, point 101 supra, point 58).

115    En outre, il a été dit pour droit qu’il était en principe loisible à l’institution concernée de se fonder, y compris dans le cadre de la motivation de la décision de refus, sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents, des considérations d’ordre général similaires étant susceptibles de s’appliquer à des demandes de divulgation portant sur des documents de même nature, à condition qu’elle vérifie dans chaque cas si les considérations d’ordre général normalement applicables à un type de documents déterminé sont effectivement applicables à un document donné dont la divulgation est demandée (voir, en ce sens, arrêt Suède et Turco/Conseil, point 102 supra, point 50).

116    Par ailleurs, contrairement à ce qu’avancent la LPN et les intervenantes, si les considérants et les dispositions du règlement n° 1367/2006 réaffirment le principe selon lequel toutes les exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 au droit d’accès prévu par l’article 255 CE doivent être interprétées de manière restrictive lorsque la demande d’accès porte sur des informations environnementales (voir points 105 à 108 ci-dessus), ils ne contiennent aucune indication permettant de conclure que les considérations générales figurant aux points 114 et 115 ci-dessus ne seraient pas applicables à une demande d’accès à des informations environnementales.

117    Certes, l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006, en tant que règle spéciale par rapport aux dispositions de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001, contient des précisions relatives à l’interprétation stricte des exceptions qui sont prévues dans lesdites dispositions ainsi qu’à la mise en balance des intérêts divergents (voir points 105 à 108 ci-dessus), ce qui peut aboutir à un accès à des informations environnementales plus large que l’accès à d’autres informations contenues dans des documents détenus par les institutions. Toutefois, ce constat n’a pas d’incidence sur la question de savoir si l’institution concernée doit ou non effectuer un examen concret et individuel des documents ou des informations demandés. Dès lors, les conditions reconnues par la jurisprudence qui autorisent cette institution à renoncer, à titre exceptionnel, à un tel examen concret et individuel, s’appliquent mutatis mutandis lorsque les documents concernés relèvent manifestement d’une même catégorie susceptible d’être couverte par une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001. En effet, conformément à ces principes jurisprudentiels, même s’il résulte de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 1367/2006, que la présomption de l’existence d’un intérêt public supérieur à la divulgation d’informations sur des émissions dans l’environnement est inapplicable dans le cadre d’une procédure en manquement en cours, la totalité des documents issus d’une telle procédure en manquement est susceptible d’être protégée en tant que catégorie.

–       Sur le respect par la Commission de son obligation d’examen des documents concernés

118    S’agissant de la question de savoir si, en l’espèce, la Commission a satisfait à son obligation d’examiner les documents concernés, il convient de rappeler que, aux termes de la décision litigieuse, les documents ayant fait l’objet de la correspondance entre la Commission et les autorités portugaises durant la procédure en manquement étaient tous couverts par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit. Au soutien de cette conclusion, la Commission s’est fondée, en substance, sur la jurisprudence visée aux points 112 et 115 ci-dessus. Selon la Commission, dès lors que l’exception invoquée s’applique à la totalité des documents concernés, la nécessité de protéger la confidentialité des échanges de correspondances entre elle et l’État membre concerné, dans le cadre d’une procédure en manquement en cours, s’oppose également à un accès partiel auxdits documents, au sens de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001.

119    Il ressort de cette motivation que la Commission s’est essentiellement appuyée sur le principe autorisant l’institution concernée à renoncer à un examen concret et individuel de chacun des documents concernés ou, du moins, à une motivation détaillée dans la décision litigieuse quant à cet examen, au motif que tous ces documents font manifestement partie d’une même catégorie de documents entrant dans le champ d’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001.

120    Cette motivation n’est entachée d’aucune erreur de droit ou de fait.

121    En effet, contrairement à ce que soutiennent la LPN et les intervenantes, en raison des circonstances particulières de l’espèce, il était manifeste, d’une part, que tous les documents concernés entraient, pour ce qui est de l’intégralité de leur contenu, dans la même catégorie de documents et, d’autre part, que l’accès à cette catégorie de documents devait être refusé sur le fondement de l’exception invoquée (voir, en ce sens, arrêt Verein für Konsumenteninformation/Commission, point 102 supra, point 75). En effet, c’est à bon droit que la Commission s’est référée, de manière générale, au fait que tous les documents concernés sont issus de la correspondance qu’elle a échangée avec les autorités portugaises dans le cadre de la procédure en manquement ouverte contre la République portugaise. En outre, eu égard à la liste des documents figurant à l’annexe B.6 du mémoire en défense, il n’est pas concevable que la Commission ait pu accorder l’accès à un seul de ces documents ou à une partie de leur contenu, sans remettre en cause les négociations en cours avec les autorités portugaises. Ainsi, conformément à ce qui a été considéré au point 111 ci-dessus, la divulgation, fût-elle partielle, des documents concernés aurait été effectivement susceptible de porter atteinte à la protection des objectifs des activités d’enquête de la Commission concernant les manquements allégués de la République portugaise en relation avec le projet de barrage (voir, en ce sens et par analogie, conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, point 44 supra, points 109 à 112 et 118 à 121).

122    Dans ce contexte, l’argument des intervenantes selon lequel une telle approche reviendrait à reconnaître qu’une procédure en manquement pourrait se dérouler dans le « secret absolu » ne saurait prospérer, cette situation étant la conséquence inévitable de la reconnaissance de l’exception visant la protection des activités d’enquête, en particulier lorsque celles-ci sont en cours, et du fait que, dans les conditions visées aux points 114 à 117 ci-dessus, l’institution concernée peut invoquer cette exception, de manière générale, afin de protéger la confidentialité de toute une catégorie de documents. Pour les mêmes motifs, la LPN et les intervenantes ne sauraient prétendre que, si la Commission était autorisée à renoncer à un examen concret et individuel du contenu de chacun des documents concernés, elle ne pourrait pas tenir suffisamment compte de l’intérêt public à la divulgation au sens de l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement n° 1367/2006, d’autant que cette disposition n’est pas applicable au cas d’espèce (voir point 136 ci-après).

123    Cette appréciation est confirmée par les principes reconnus dans l’arrêt Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, point 44 supra (points 54 à 62), sur lesquels les parties se sont prononcées lors de l’audience.

124    En effet, dans cet arrêt, la Cour a reconnu qu’il était loisible à l’institution concernée de se fonder sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents, des considérations d’ordre général similaires étant susceptibles de s’appliquer à des demandes de divulgation portant sur des documents de même nature. Selon la Cour, s’agissant des procédures administratives de contrôle des aides d’État, de telles présomptions générales peuvent résulter du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article 93 [CE] (JO L 83, p. 1), ainsi que de la jurisprudence relative au droit de consulter les documents du dossier administratif de la Commission. À cet égard, la Cour a rappelé que la procédure de contrôle des aides d’État était, compte tenu de son économie générale, une procédure ouverte contre un État membre, dans le cadre de laquelle seul ce dernier dispose de droits de la défense, y compris le droit de se voir communiquer certains documents, à la différence des intéressés, qui ne disposent pas, dans ce cadre, du droit de consulter les documents du dossier administratif de la Commission. La Cour a également jugé qu’il y avait lieu de tenir compte de cette circonstance aux fins de l’interprétation de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement nº 1049/2001. En effet, si ces intéressés étaient en mesure d’obtenir l’accès, sur le fondement du règlement nº 1049/2001, aux documents du dossier administratif de la Commission, le régime de contrôle des aides d’État serait mis en cause (voir, en ce sens, arrêt Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, point 44 supra, points 54 à 59).

125    La Cour en a déduit que, lorsque les activités des institutions s’inscrivent dans le cadre des fonctions administratives qui leur sont spécifiquement attribuées par l’article 88 CE, il y avait lieu de tenir compte de la circonstance que les intéressés autres que l’État membre concerné dans les procédures de contrôle des aides d’État ne disposaient pas du droit de consulter les documents du dossier administratif de la Commission et, dès lors, de reconnaître l’existence d’une présomption selon laquelle la divulgation des documents du dossier administratif porterait, en principe, atteinte à la protection des objectifs des activités d’enquête, avec pour conséquence que l’institution concernée pouvait même se dispenser d’un examen concret et individuel préalable des documents concernés. Il n’en reste pas moins que, selon la Cour, à cet égard, les intéressés conservent le droit de démontrer qu’un document donné n’est pas couvert par ladite présomption générale ou qu’il existe un intérêt supérieur justifiant sa divulgation (voir, en ce sens, arrêt Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, point 44 supra, points 60 à 62).

126    S’agissant du contrôle que la Commission est appelée à exercer dans le cadre d’une procédure en manquement ouverte au titre de l’article 226 CE, force est de constater que ce contrôle relève d’une fonction administrative, dans le cadre de laquelle elle dispose d’un large pouvoir discrétionnaire et elle engage un dialogue bilatéral avec l’État membre concerné (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 10 juillet 2007, AEPI/Commission, C-�461/06 P, non publiée au Recueil, point 24, et ordonnance du Tribunal du 5 septembre 2006, AEPI/Commission, T-�242/05, non publiée au Recueil, points 28 et 29). Par ailleurs, il a été reconnu par une jurisprudence constante que la position procédurale des parties ayant saisi la Commission d’une plainte, telle que celle de la LPN en l’espèce, est fondamentalement différente dans le cadre d’une procédure en manquement ouverte au titre de l’article 226 CE de celle qui est la leur, par exemple, dans le cadre d’une procédure d’application des règles communautaires de concurrence, telle que celle prévue par le règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1), et par le règlement (CE) n° 773/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO L 123, p. 18), au cours de laquelle les plaignants disposent de garanties procédurales spécifiques dont le respect est soumis à un contrôle juridictionnel effectif dans le cadre d’un recours contre une décision de rejet de plainte. En revanche, les plaignants au sens de la communication 2002/C 244/03 n’ont pas la possibilité de saisir le juge de l’Union d’un recours contre une éventuelle décision de classer leur plainte et ne bénéficient pas de droits procéduraux, comparables à ceux dont ils peuvent disposer dans le cadre d’une procédure ouverte au titre des règlements précités, leur permettant d’exiger que la Commission les informe et les entende (voir, en ce sens, ordonnance LPN/Commission, point 35 supra, point 56, et la jurisprudence citée).

127    Dès lors, en l’absence de droit pour la LPN, dans le cadre d’une telle procédure, de consulter les documents du dossier administratif de la Commission, il convient de reconnaître, par analogie avec la situation des intéressés dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État, l’existence d’une présomption générale selon laquelle la divulgation des documents du dossier administratif porterait, en principe, atteinte à la protection des objectifs des activités d’enquête. Il était dès lors suffisant pour la Commission de vérifier si cette présomption générale devait s’appliquer à l’ensemble des documents concernés, sans qu’elle doive nécessairement procéder à un examen concret et individuel préalable du contenu de chacun de ces documents. Or, étant donné que, au moment de l’adoption de la décision litigieuse, la procédure en manquement en cause était en cours, la Commission devait nécessairement partir du principe que cette présomption générale s’appliquait à l’intégralité des documents concernés.

128    La présomption visée au point 125 ci-dessus n’exclut pourtant pas le droit pour les intéressés de démontrer qu’un document donné dont la divulgation est demandée n’est pas couvert par ladite présomption ou qu’il existe un intérêt public supérieur justifiant la divulgation du document visé en vertu de l’article 4, paragraphe 2, du règlement nº 1049/2001 (arrêt Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, point 44 supra, point 62).

129    S’agissant du premier aspect, force est de constater que ni la LPN ni les intervenantes n’ont avancé des éléments susceptibles de remettre en cause le bien-fondé de l’appréciation selon laquelle l’ensemble des documents concernés était couvert par l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001.

130    Dans ces circonstances, les griefs tirés de l’absence d’examen concret et individuel des documents concernés, du refus illégal d’accorder un accès partiel auxdits documents ainsi que de la violation du règlement n° 1367/2006 doivent être rejetés.

131    Enfin, compte tenu de la troisième branche du second moyen, il y a lieu d’examiner si, dans la décision litigieuse, la Commission a correctement conclu à l’absence d’un intérêt public ou d’un intérêt public supérieur à la divulgation des documents concernés.

–       Sur l’intérêt public supérieur à la divulgation

132    S’agissant de l’intérêt public supérieur au sens de l’article 4, paragraphe 2, dernière phrase, du règlement n° 1049/2001, il y a lieu de rappeler que, aux termes de la décision litigieuse, un tel intérêt fait défaut en l’espèce. Selon la Commission, l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006, en vertu duquel la divulgation est réputée présenter un tel intérêt public supérieur lorsque les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement, ne s’applique pas à des enquêtes relatives à de possibles manquements au droit communautaire.

133    Cette appréciation de l’absence d’un intérêt public supérieur au sens de l’article 4, paragraphe 2, in fine, du règlement n° 1049/2001 n’est entachée d’aucune erreur de droit ou de fait.

134    En effet, premièrement, force est de constater que, au moment de l’adoption de la décision litigieuse, la procédure en manquement ouverte contre la République portugaise était en cours. Partant, la présomption de l’existence d’un intérêt public supérieur à la divulgation, au titre de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 1367/2006, ne trouvait pas à s’appliquer au cas d’espèce, de sorte qu’il n’est même pas besoin de se prononcer sur la question de savoir si les documents concernés contenaient ou non des informations ayant effectivement trait à des « émissions » dans l’environnement.

135    Deuxièmement, dans la mesure où la LPN et les intervenantes font valoir que le règlement n° 1367/2006 vise à améliorer la transparence en matière environnementale par rapport à celle garantie par les règles du règlement n° 1049/2001, il y a lieu de relever que l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 1367/2006, en tant que lex specialis par rapport au règlement n° 1049/2001 en remplaçant, modifiant ou précisant certaines des dispositions de ce dernier règlement lorsque la demande d’accès vise des « informations environnementales » ou des informations « ayant trait à des émissions dans l’environnement » (voir point 105 ci-dessus), exclut précisément une telle amélioration aux fins de la mise en balance des intérêts divergents au sens de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001, lorsque les documents concernés sont contenus dans le dossier d’une procédure en manquement en cours. Dès lors, elles ne sauraient reprocher à la Commission de n’avoir pas dûment pris en considération un tel intérêt public supérieur à la divulgation et, partant, de n’avoir pas correctement effectué la mise en balance des intérêts divergents.

136    Troisièmement, dans le contexte de l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement nº 1049/2001, la LPN et les intervenantes ne peuvent pas non plus se prévaloir utilement de l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement n° 1367/2006. En effet, d’une part, cette dernière disposition ne vise que l’obligation d’interprétation restrictive des exceptions autres que celles mentionnées à l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 1367/2006, c’est-à-dire autres que celles prévues à l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement nº 1049/2001. D’autre part, l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement n° 1367/2006 ne se réfère qu’à un « intérêt public » à la divulgation et non à un intérêt public « supérieur » au sens de l’article 4, paragraphe 2, in fine, du règlement n° 1049/2001. Partant, doit être rejeté l’argument de la LPN et des intervenantes selon lequel, en l’espèce, les principes de transparence accrue, d’accès public aux documents, de la meilleure participation du citoyen au processus décisionnel et d’une plus grande légitimité seraient néanmoins constitutifs d’un intérêt public, voire d’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents concernés.

137    Quatrièmement, dans la mesure où la LPN s’est référée à son intérêt à participer activement à la procédure en manquement en cause afin de promouvoir l’intérêt public à la protection de l’environnement, dont elle se porterait garante en tant que ONG, il suffit de constater que le droit d’accès aux documents ne dépend pas de la nature de l’intérêt particulier que le demandeur d’accès pourrait avoir ou ne pas avoir pour obtenir l’information requise (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 1er février 2007, Sison/Conseil, C-�266/05 P, Rec. p. I-�1233, point 44).

138    Par ailleurs, à l’audience, en réponse à des questions du Tribunal, la LPN et les intervenantes n’étaient ni en mesure d’identifier un éventuel autre intérêt public supérieur que celui de la prétendue transparence accrue en matière environnementale, dont la Commission aurait dû tenir compte aux fins de l’application au cas d’espèce de l’article 4, paragraphe 2, in fine, du règlement n° 1049/2001, ni capables d’expliquer si et dans quelle mesure les informations demandées avaient trait à des émissions dans l’environnement au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1367/2006.

139    Dans ces conditions, il convient de rejeter le grief de la LPN et des intervenantes tiré de ce que la Commission a omis de tenir compte d’un intérêt public ou d’un intérêt public supérieur à la divulgation des informations environnementales en cause et d’effectuer correctement la mise en balance des intérêts divergents au sens de l’article 4, paragraphe 2, in fine, du règlement n° 1049/2001, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres arguments avancés par la LPN et par les intervenantes dans ce contexte.

140    Par conséquent, les premier et second moyens doivent être rejetés dans leur totalité comme non fondés, et il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

141    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La LPN ayant succombé dans la mesure où son recours vise des documents et des parties de documents auxquels l’accès lui a été refusé, il convient de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

142    Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Dès lors, le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.

143    Par ailleurs, en vertu de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens. À cet égard, force est de constater que, si la LPN n’avait pas obtenu, en cours d’instance, un accès à certains documents ou extraits de documents, elle aurait succombé en ce qui concerne la totalité de son recours pour les motifs exposés aux points 99 à 140 ci-dessus. Dès lors, il convient de la condamner à supporter la totalité de ses dépens ainsi que de ceux exposés par la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté en ce qu’il porte sur des documents et des parties de documents auxquels l’accès a été refusé à la Liga para Protecção da Natureza (LPN) dans la décision SG.E.3/MIB/psi D (2008) 8639 de la Commission, du 24 octobre 2008.

2)      Il n’y a plus lieu de statuer pour le surplus.

3)      La LPN supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

4)      Le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.

Azizi

Cremona

Frimodt Nielsen

Signatures

Table des matières

Cadre juridique

Règlement (CE) n° 1049/2001

Règlement (CE) n° 1367/2006

Faits

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur la demande de non-lieu à statuer

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Résumé des moyens d’annulation

Sur les premier et second moyens, tirés de la violation du règlement n° 1367/2006 et de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001

Arguments des parties

– Sur le premier moyen, tiré de la violation du règlement n° 1367/2006

– Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement n° 1049/2001

Appréciation du Tribunal

– Observations liminaires

– Sur les incidences du règlement n° 1367/2006 sur la portée de l’obligation d’examen de la Commission

– Sur les exigences régissant l’obligation d’examen de la Commission

– Sur le respect par la Commission de son obligation d’examen des documents concernés

– Sur l’intérêt public supérieur à la divulgation

Sur les dépens


* Langue de procédure : le portugais.


BAILII: Copyright Policy | Disclaimers | Privacy Policy | Feedback | Donate to BAILII
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/T2908.html