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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Consejo Regulador de la Denominacion de Origen Txakoli de Alava and Others v OHIM (TXAKOLI) (Intellectual property) French Text [2011] EUECJ T-341/09 (17 May 2011)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/T34109.html
Cite as: [2011] EUECJ T-341/09, [2011] EUECJ T-341/9

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AVIS JURIDIQUE IMPORTANT: The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.



ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

17 mai 2011 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire collective verbale TXAKOLI – Motifs absolus de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009 – Article 66, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T-341/09,

Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Álava, établi à Amurrio (Espagne),

Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Bizkaia, établi à Leioa (Espagne),

Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Getaria, établi à Getaria (Espagne),

représentés par Mes J. Grimau Muñoz et J. Villamor Muguerza, avocats,

parties requérantes,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 4 juin 2009 (affaire R 197/2009-2), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal TXAKOLI comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. O. Czúcz (rapporteur), président, Mme I. Labucka et M. K. O’Higgins, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 27 août 2009,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 30 octobre 2009,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 30 décembre 2009,

vu le mémoire en duplique déposé au greffe du Tribunal le 9 février 2010,

à la suite de l’audience du 26 octobre 2010,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 30 mai 2008, les requérants, le Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Álava, le Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Bizkaia et le Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Getaria, ont présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire collective à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal TXAKOLI.

3        Le produit et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 33, 35, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 33 : « Txakoli (chacolí) » ;

–        classe 35 : « Services de vente en gros, au détail et par les réseaux informatiques mondiaux, services d’importation et d’exportation, publicité, promotion et exclusivités commerciales, le tout en rapport avec le txakoli » ;

–        classe 41 : « Activités éducatives, de loisirs et culturelles en rapport avec le txakoli » ;

–        classe 42 : « Prestation de services scientifiques et technologiques, de recherche industrielle et de contrôle de qualité, tous en rapport avec l’élaboration du txakoli ».

4        Par décision du 11 décembre 2008, la demande d’enregistrement a été rejetée par l’examinateur au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et c), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009].

5        Le 4 février 2009, les requérants ont formé un recours contre cette décision auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 [devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009].

6        Par décision du 4 juin 2009 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours au motif que la marque demandée était descriptive et dépourvue de caractère distinctif à l’égard du produit et des services concernés, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009.

7        S’agissant du motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, la chambre de recours a indiqué que le terme « txakoli » (« chacolí » en espagnol) figure dans le Diccionario de la Lengua española de la Real Academia Española et y est défini comme un « vin léger un peu acide, produit au Pays basque, en Cantabrie et au Chili ». Elle en a déduit que le public pertinent ne percevra pas ce terme comme une marque mais comme la désignation d’un type de vin spécifique.

8        Par ailleurs, même si elle a considéré que ce terme correspondait aux mentions traditionnelles « chacolí » ou « txakolina » et était réservé, conformément à la législation espagnole et à celle de l’Union [notamment l’annexe III du règlement (CE) n° 753/2002 de la Commission, du 29 avril 2002, fixant certaines modalités d’application du règlement (CE) n° 1493/1999 du Conseil en ce qui concerne la désignation, la dénomination, la présentation et la protection de certains produits vitivinicoles (JO L 118, p. 1)], au vin protégé par les appellations d’origine dont les requérants sont les conseils régulateurs, elle a également considéré que, à l’instar de toute autre mention traditionnelle, il ne saurait être monopolisé au moyen d’une marque individuelle ou collective, car il est destiné à être librement utilisé par toutes les entreprises productrices de ce type de vin qui ont, ou pourraient avoir dans le futur, le droit d’utiliser cette mention traditionnelle.

9        S’agissant du motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la chambre de recours a considéré que la marque demandée était nécessairement dépourvue de caractère distinctif au regard du produit et des services visés dès lors qu’elle était exclusivement constituée de la mention traditionnelle du type spécifique de vin visé par la demande d’enregistrement et auquel se réfèrent les services en cause.

 Conclusions des parties

10      Les requérants concluent, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

11      L’OHMI conclut, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérants aux dépens.

 En droit

12      Les requérants avancent, en substance, deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 66, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 et, le second, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement. Ils invoquent, en outre, certaines déclarations de nature politique qui appuieraient leurs prétentions ainsi que certains arguments relatifs au principe de non-discrimination.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 66, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009

 Arguments des parties

13      Les requérants reconnaissent que le terme « txakoli » constitue une dénomination descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, comme toutes les mentions traditionnelles complémentaires protégées par le règlement n° 753/2002, mais font valoir que le motif absolu de refus prévu dans cette disposition n’est pas applicable en l’espèce. Ils soutiennent ainsi que le terme « txakoli » constitue, en substance, une indication pouvant servir, dans le commerce, à désigner la provenance géographique du produit et des services en cause et qu’il peut, par conséquent, être enregistré en vertu de l’article 66, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 qui prévoit que, par dérogation à l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement, de tels signes ou indications peuvent constituer des marques communautaires collectives.

14      À cet égard, les requérants font notamment valoir que, dès lors que le règlement n° 753/2002 et la réglementation espagnole reconnaissent les mentions traditionnelles complémentaires « chacolí » ou « txakolina » et « txakoli » uniquement pour les vins des appellations d’origine dont ils sont les conseils régulateurs, le terme « txakoli » sert à identifier exclusivement ces vins et ne peut pas être utilisé par des producteurs de vins en dehors des zones concernées par lesdites appellations d’origine. Ils affirment notamment que, pour qu’un terme soit reconnu comme une mention traditionnelle, ce qui importe c’est qu’il soit, ensemble avec l’indication géographique des vins, associé à l’origine de la caractéristique des vins qu’il désigne. Ils ajoutent que le public pertinent associe le terme « txakoli » au Pays basque (Espagne), en raison de son origine et de son orthographe, et considère, par conséquent, ce terme comme un indicateur d’origine géographique.

15      Ils invoquent, par ailleurs, l’enregistrement de certaines marques prétendument comparables.

16      L’OHMI conteste ces arguments.

 Appréciation du Tribunal

17      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

18      L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications descriptives des caractéristiques de produits ou de services pour lesquels l’enregistrement a été demandé puissent être librement utilisés par tous [arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C-191/01 P, Rec. p. I-12447, point 31, et arrêt du Tribunal du 25 mars 2009, allsafe Jungfalk/OHMI (ALLSAFE), T-343/07, non publié au Recueil, point 20].

19      Les signes et les indications visés par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 sont donc seulement ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du public pertinent, pour désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, les produits ou les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé (arrêt ALLSAFE, précité, point 21). Tel est le cas lorsqu’il existe pour le public pertinent un rapport direct et concret entre le signe verbal en cause et les produits et les services visés [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 20 juillet 2004, Lissotschenko et Hentze/OHMI (LIMO), T-311/02, Rec. p. II-2957, point 30, et du 30 novembre 2004, Geddes/OHMI (NURSERYROOM), T-173/03, Rec. p. II-4165, point 20].

20      Dès lors, le caractère descriptif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits et aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Rewe-Zentral/OHMI (LITE), T-79/00, Rec. p. II-705, point 27, et du 20 novembre 2002, Bosch/OHMI (Kit Pro et Kit Super Pro), T-79/01 et T-86/01, Rec. p. II-4881, point 20].

21      Par ailleurs, l’article 66 du règlement n° 207/2009 prévoit :

« 1.      Peuvent constituer des marques communautaires collectives les marques communautaires ainsi désignées lors du dépôt et propres à distinguer les produits ou les services des membres de l’association qui en est le titulaire de ceux d’autres entreprises. […]

2.      Par dérogation à l’article 7 paragraphe 1, [sous] c), peuvent constituer des marques communautaires collectives au sens du paragraphe 1 des signes ou indications pouvant servir, dans le commerce, à désigner la provenance géographique des produits ou des services […] »

22      En l’espèce, confirmant l’appréciation de l’examinateur, la chambre de recours a considéré que, du point de vue du public pertinent, à savoir le consommateur moyen basque et espagnol, le terme « txakoli » désignait le type de vin pour lequel l’enregistrement avait été demandé et auquel faisaient référence les services en cause et qu’il se heurtaite, par conséquent, au motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

23      À titre liminaire, même si les requérants ne contestent pas la définition du public pertinent retenue par la chambre de recours, il convient de considérer que, dès lors que le terme « txakoli » ou « chacolí » désigne le type de vin pour lequel l’enregistrement a été demandé (voir point 3 ci-dessus) et qu’il n’a pas de traduction dans d’autres langues de l’Union, il n’y a pas de raison de limiter le public pertinent au seul consommateur basque et espagnol. Cette précision n’a cependant pas de conséquences sur l’appréciation de la chambre de recours.

24      Les requérants font valoir que le terme « txakoli » constitue, en substance, une indication pouvant servir, dans le commerce, à désigner la provenance géographique du produit et des services pour lesquels l’enregistrement a été demandé, au sens de l’article 66, paragraphe 2, du n° 207/2009, dès lors, d’une part, qu’il est une mention traditionnelle complémentaire protégée par le règlement n° 753/2002, et donc exclusivement réservé aux vins qui portent leurs appellations d’origine, et, d’autre part, qu’il est d’origine basque et est écrit en basque.

25      Il convient de préciser que le règlement n° 753/2002, invoqué par les requérants, a été abrogé, entre la date d’adoption de la décision attaquée et l’introduction du recours, par le règlement (CE) n° 607/2009 de la Commission, du 14 juillet 2009, fixant certaines modalités d’application du règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil en ce qui concerne les appellations d’origine protégées et les indications géographiques protégées, les mentions traditionnelles, l’étiquetage et la présentation de certains produits du secteur vitivinicole (JO L 193, p. 60). Le règlement n° 607/2009 reconnaît, tout comme le règlement n° 753/2002, les mentions « chacolí » et « txakolina » en relation avec les vins des appellations d’origine dont les requérants sont les conseils régulateurs. En revanche, conformément au nouveau règlement de base, à savoir le règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil, du 22 octobre 2007, portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole et dispositions spécifiques en ce qui concerne certains produits de ce secteur (règlement OCM unique) (JO L 299, p. 1), tel que modifié, il n’utilise plus l’expression « mention traditionnelle complémentaire ».

26      S’agissant, en premier lieu, des arguments des requérants visant à démontrer que le terme « txakoli » est une indication géographique, il convient de relever que, à supposer même que ce terme, ainsi que l’affirme la requérante, est équivalant aux termes « chacolí » et « txakolina », ledit terme ne constituerait, comme ceux-ci, qu’une mention traditionnelle complémentaire au sens de l’article 23 du règlement n° 753/2002 et non une appellation d’origine protégée ou une indication géographique protégée. Les appellations d’origine protégées reconnues par la réglementation viticole sont « txakoli de Álava », « txakoli de Bizkaia » et « txakoli de Getaria » et comportent, à côté du terme « txakoli » le nom d’une province ou d’un lieu déterminé indiquant la provenance géographique concrète du vin en cause ainsi que l’autorise l’article 52, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement (CE) n° 1493/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, portant organisation commune du marché vitivinicole (JO L 179, p. 1) – règlement de base antérieur au règlement n° 1234/2007 et sur lequel était fondé le règlement n° 753/2002 –, qui prévoyait que les États membres pouvaient admettre que le nom d’une région déterminée soit combiné avec une précision concernant notamment le type de produit.

27      La distinction entre indications géographiques, au sens large, et mentions traditionnelles résultait clairement du règlement n° 1493/1999, dès lors qu’il indiquait, à son article 47, paragraphe 2, sous e), que les règles relatives à la désignation, à la dénomination et à la présentation de certains produits relevant dudit règlement, ainsi qu’à la protection de certaines indications et mentions et de certains termes, comportaient, notamment, des dispositions régissant l’utilisation d’indications géographiques et de mentions traditionnelles.

28      Parmi ces dernières, l’article 23 du règlement n° 753/2002 définissait la mention traditionnelle complémentaire comme « un terme traditionnellement utilisé pour désigner les vins [de table avec indication géographique et les vins de qualité produits dans une région déterminée] dans les États membres producteurs, qui se réfère notamment à une méthode de production, d’élaboration, de vieillissement, ou à la qualité, la couleur, le type de lieu, ou à un événement historique lié à l’histoire du vin en question et qui est défini dans la législation des États membres producteurs aux fins de la désignation des vins en question produits sur leur territoire ». Les mentions traditionnelles complémentaires au sens du règlement n° 753/2002 étaient, par conséquent, des termes désignant certains éléments caractéristiques du vin, du lieu de production ou de son histoire et non sa provenance géographique.

29      Cette conclusion est confirmée par le fait que de nombreuses mentions traditionnelles protégées par le règlement n° 753/2002 et, actuellement, par le règlement n° 607/2009, sont associées à un nombre important d’appellations d’origine, couvrant parfois tout un État membre, voire plusieurs, empêchant ainsi de considérer que la qualification d’un terme de « mention traditionnelle complémentaire » a pour effet de le transformer en une indication géographique et encore moins de considérer que cette qualification ne fait que confirmer que le terme constituait déjà en lui-même une indication de l’origine géographique des vins.

30      Par ailleurs, contrairement à ce que prétendent les requérants, le règlement n° 753/2002 ne prévoyait pas, pour qu’un terme soit reconnu comme une mention traditionnelle, qu’il soit, ensemble avec l’indication géographique des vins, associé à l’origine de la caractéristique des vins qu’il désigne.

31      Certes, la première version du règlement n° 753/2002, à son article 24, paragraphe 6, indiquait que les « mentions traditionnelles » devaient servir à identifier les vins comme étant originaires du lieu visé par l’indication géographique qu’ils portaient lorsque la caractéristique qu’elles exprimaient pouvait être attribuée essentiellement à cette origine géographique. Ce paragraphe, parmi d’autres, a cependant été supprimé avec effet au 1er février 2004 par l’article 1er, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 316/2004 de la Commission, du 20 février 2004, modifiant le règlement n° 753/2002 (JO L 55, p. 16). Il ressort des considérants 2 et 3 du règlement n° 316/2004 que cette suppression visait à répondre aux critiques de certains États tiers tirées du fait que cette disposition réservait certaines « mentions traditionnelles », à savoir celles figurant dans la liste où se trouvait les mentions « chacolí » et « txakolina », aux seuls vins de l’Union européenne.

32      Le recours introduit par la République italienne contre le règlement n° 316/2004, dans le cadre duquel celle-ci alléguait que les « mentions traditionnelles » ne formaient qu’un tout avec les indications géographiques, a été rejeté par l’arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, Italie/Commission (T-226/04, non publié au Recueil).

33      Au vu de ces éléments, force est de constater que, même si elle associe les termes « chacolí » ou « txakolina », voire le terme « txakoli », aux vins des appellations d’origine dont les requérants sont les conseils régulateurs, la réglementation en matière viticole invoquée par les requérants ne considère lesdits termes que comme l’indication d’une caractéristique des vins, et non comme une indication de leur provenance géographique, et ce malgré le lien prétendument existant entre ces termes, notamment le terme « txakoli », et le Pays basque.

34      Il convient, dès lors, d’écarter les arguments des requérants selon lesquels ce terme constituerait « au fond » une indication géographique.

35      En tout état de cause, il convient d’observer que l’article 66, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 prévoyant une exception au motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement, il ne doit pas être interprété d’une manière extensive en couvrant les signes constituant une indication géographique uniquement au fond (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 juin 2005, Olesen/Commission, T-190/03, RecFP p. I-A-181 et II-805, point 47).

36      Par ailleurs, il importe d’observer que, s’agissant du marché très spécifique du vin, admettre, dans le cadre de l’examen de la demande d’enregistrement présentée par les requérants à l’OHMI, que le terme « txakoli » désigne ou puisse servir pour désigner, dans un usage normal du point de vue du public pertinent, le Pays basque comme provenance géographique du vin en cause, reviendrait à empiéter sur la compétence des autorités intervenant dans les procédures visant à la création de nouvelles appellations d’origine ou indications géographiques protégées contenant ce terme (ou ses équivalents « chacolí » ou « txakolina »), ou visant à l’augmentation du nombre d’appellations associées à ces mentions.

37      Il revient, cependant, à ces autorités de déterminer, dans le cadre de leur marge d’appréciation et après avoir examiné toutes les circonstances pertinentes telles que celles discutées par les parties dans la présente affaire, si le terme « txakoli » doit être protégé en tant que désignation de la provenance géographique du vin en cause, et ce dans le respect de la procédure spécifique prévue à cet égard par le règlement n° 1234/2007, laquelle comporte notamment des droits spécifiques pour les personnes intéressées et implique la possibilité de contester devant le juge de l’Union la décision définitive de la Commission à cet égard.

38      S’agissant, en second lieu, des marques enregistrées invoquées par les requérants, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que les décisions que les chambres de recours de l’OHMI sont amenées à prendre, en vertu du règlement n° 40/94, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci [arrêt de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C-412/05 P, Rec. p. I-3569, point 65, et arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI - LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T-346/04, Rec. p. II-4891, point 71].

39      En tout état de cause, force est de constater que les marques invoquées par les requérants ne sont pas pertinentes en l’espèce dès lors qu’il s’agit de marques individuelles ne se heurtant pas au motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), et non de marques collectives descriptives ayant été enregistrées en vertu de l’article 66, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009. En particulier, les deux premières sont des marques figuratives comportant, outre les termes cités par les requérants, « zumo » et « don sabor mosto », des aspects figuratifs très distinctifs. Pour ce qui est de la marque verbale MOSTO, « mosto » signifiant moût de raisin en espagnol, il convient d’observer que, contrairement à ce que prétendent les requérants, elle n’a pas été enregistrée pour le moût de raisin.

40      Il résulte de ce qui précède que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en n’appliquant pas l’article 66, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 afin d’écarter le motif de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

 Arguments des parties

41      Les requérants font valoir que, pour qu’une mention traditionnelle soit protégée par le règlement n° 753/2002, elle doit évoquer une indication géographique qui sert à l’associer à une région et soutiennent que le caractère distinctif du terme « txakoli » découle de son lien direct avec le Pays basque, ledit lien étant démontré par le fait qu’il est réservé aux appellations d’origine dont ils sont les conseils régulateurs. Ils ajoutent que l’exclusivité de l’usage du terme « txakoli » résulte de sa qualification de « mention traditionnelle » dans ce règlement en relation avec leurs appellations d’origine.

42      Ils soutiennent, à titre purement indicatif, que leur position est confirmée par un arrêt du Tribunal Superior de Justicia (Cour supérieure de justice) du Pays basque du 4 juin 2007, concernant la légalité d’une amende imposée à un producteur basque ayant utilisé ce terme pour désigner ses vins, qui a jugé que le terme « txakoli » ne pouvait pas être utilisé par des opérateurs n’ayant pas droit à l’une des appellations d’origine des requérants et que, ensemble avec lesdites appellations, il était associé à l’origine des caractéristiques qu’il décrivait.

43      En se fondant sur les normes nationales relatives aux appellations d’origine dont ils sont les conseils régulateurs, les requérants font valoir que les termes « chacolí », « txakoli » ou « txakolina » sont spécifiques en eux-mêmes et, ayant été définis avec précision dans lesdites normes, jouissent d’une réputation et d’un caractère distinctif acquis grâce à l’effort des viticulteurs et producteurs bénéficiant desdites appellations d’origine.

44      L’OHMI conteste ces arguments.

 Appréciation du Tribunal

45      Force est de constater que les requérants se bornent, en substance, à répéter les arguments qu’ils avancent à l’appui de leur premier moyen et qui ont été rejetés ci-dessus.

46      S’agissant de leur argument selon lequel l’exclusivité de l’usage du terme « txakoli » résulte de sa qualification de « mention traditionnelle » par le règlement n° 753/2002, il convient d’observer que, à supposer même que cette exclusivité soit réelle – ce qu’a admis, par ailleurs, la chambre de recours même si l’OHMI ne partage pas cette appréciation –, cette exclusivité est sans pertinence dans le cadre de l’examen de la demande d’enregistrement que les requérants ont présentée à l’OHMI et qui fait l’objet de la décision attaquée. En effet, l’exclusivité conférée par d’autres dispositions du droit de l’Union ne saurait impliquer automatiquement l’enregistrement du signe en cause en tant que marque communautaire. Un tel enregistrement confère des droits spécifiques à son titulaire, dont la possibilité de bénéficier d’une exclusivité sans limitation de temps – pourvu que les formalités visant au renouvellement de la marque soient accomplies (voir article 46 du règlement n° 207/2009) –, qui ne découlent pas d’autres normes telles que celle relevant de la politique agricole.

47      S’agissant de l’arrêt du Tribunal Superior de Justicia du 4 juin 2007, il convient d’observer que les requérants affirment qu’il n’est invoqué qu’à titre indicatif. En tout état de cause, conformément à une jurisprudence constante, la jurisprudence des juridictions nationales ne constitue qu’un élément qui, sans être déterminant, peut seulement être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque communautaire [arrêt du Tribunal du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T-337/99, Rec. p. II-2597, point 58 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, Develey/OHMI (Forme d’une bouteille en plastique), T-129/04, Rec. p. II-811, point 32]. Or, il résulte de l’examen qui précède que les arguments que les requérants tirent de cet arrêt sont soit non fondés soit dépourvus de pertinence.

48      S’agissant, enfin, de l’argument selon lequel les termes « chacolí », « txakoli » ou « txakolina » sont spécifiques en eux-mêmes et jouissent d’un caractère distinctif et d’une réputation, il y a lieu d’observer que ces conditions étaient requises par l’article 24, paragraphe 5, du règlement n° 753/2002 pour qu’un terme puisse être qualifié de « mention traditionnelle » et sont, par conséquent, communes à toutes ces mentions. Or, compte tenu des finalités respectives des règlements n° 753/2002 et n° 207/2009, il y a lieu de considérer que le caractère distinctif auquel faisait référence le premier de ces règlements concernait l’aptitude du terme à identifier une caractéristique particulière du vin en cause et pas l’aptitude à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises au sens de l’article 4 du second. La reconnaissance d’un caractère distinctif et d’une réputation pour un terme dans le cadre de sa qualification en tant que « mention traditionnelle » est dès lors sans pertinence en l’espèce.

49      Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter le moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Sur les arguments tirés de certaines déclarations de nature politique et ceux relatifs au principe de non-discrimination

 Arguments des parties

50      Les requérants ont présenté au Tribunal des déclarations officielles du parlement de la Communauté autonome du Pays basque, des Juntas Generales de Álava ainsi que d’une commission du parlement espagnol aux termes desquelles ces institutions les soutiennent dans leur revendication de l’usage exclusif des termes « txakoli » et « chacolí » sur leur territoire. Ils font valoir que ces déclarations visent à renforcer le terme « txakoli » et revendiquent l’exclusivité dudit terme.

51      Ils font valoir, en outre, que la décision attaquée nie la réalité factuelle et juridique qui les protège pour utiliser le terme « txakoli » comme l’un des indicateurs du Pays basque et crée ainsi une discrimination notable et injustifiée par rapport à d’autres vins et zones géographiques de l’Espagne et de l’Union. Par ailleurs, après la clôture de la procédure orale, ils ont présenté au Tribunal des documents relatifs à une question parlementaire et à la réponse de la Commission à ladite question qui démontreraient, selon eux, qu’il leur serait impossible de défendre leurs intérêts face à des producteurs qui utilisent le terme « chacolí » si la marque demandée n’était pas enregistrée.

52      L’OHMI conteste ces arguments.

 Appréciation du Tribunal

53      En premier lieu, il convient de souligner que les différentes instances de l’OHMI et le Tribunal adoptent leurs décisions en toute indépendance par rapport aux prises de position politiques.

54      En deuxième lieu, force est de constater que le refus d’enregistrement de la marque demandée est sans incidence sur le droit exclusif dont disposeraient, à présent, les requérants pour utiliser les termes « chacolí », « txakolina » et même « txakoli », en vertu de la réglementation en matière viticole et n’a pas pour conséquence d’autoriser l’usage de ce terme à des opérateurs autres que ceux qui bénéficient de ce droit en vertu de cette réglementation, ni d’empêcher les requérants d’exiger le respect de ladite réglementation. Au vu de cette circonstance, le Tribunal a estimé qu’il n’y avait pas lieu de rouvrir la procédure orale et de verser au dossier les documents mentionnés au point 51 ci-dessus, produits par les requérants après la clôture de celle-ci.

55      En troisième lieu, il convient de relever que les requérants ne précisent pas leur argument tiré de l’existence d’une discrimination et n’indiquent pas quels « autres vins ou zones géographiques » se trouvant prétendument dans la même situation auraient obtenu l’enregistrement de marques consistant en un terme qui constitue une « mention traditionnelle complémentaire » et non une appellation d’origine ou une indication géographique protégée. Pour ce qui est, en particulier, de l’affirmation des requérants selon laquelle toutes les mentions traditionnelles sont des termes descriptifs dont l’usage est réservé à certaines appellations d’origine, il importe d’observer que cette circonstance est sans pertinence pour la solution du présent litige dès lors que cette exclusivité résulte de la seule réglementation en matière viticole alors que les requérants cherchent à bénéficier, en outre, de l’exclusivité conférée par l’enregistrement d’une marque communautaire.

56      Ces derniers arguments des requérants devant donc également être écartés, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

57      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Álava, le Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Bizkaia et le Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Getaria sont condamnés aux dépens.

Czúcz

Labucka

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 mai 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol.


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