Levi Strauss v OHMI - L&O Hunting Group (101) (Judgment) French Text [2015] EUECJ T-604/13 (03 June 2015)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2015/T60413.html
Cite as: [2015] EUECJ T-604/13, ECLI:EU:T:2015:351, EU:T:2015:351

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

3 juin 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale 101 – Marque communautaire verbale antérieure 501 – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑604/13,

Levi Strauss & Co., établie à Newcastle, Californie (États-Unis), représentée initialement par Mes V. von Bomhard et J. Schmitt, puis par Me von Bomhard, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. G. Schneider et M. Fischer, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

L&O Hunting Group GmbH, établie à Isny im Allgäu (Allemagne), représentée par Mes K. Kuck, K. Landes et G. Müllejans, avocats,

partie intervenante,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 6 septembre 2013 (affaire R 1538/2012-2), relative à une procédure d’opposition entre Levi Strauss & Co. et L&O Hunting Group GmbH,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich, président, J. Schwarcz (rapporteur) et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 20 novembre 2013,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 10 avril 2014,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 3 avril 2014,

à la suite de l’audience du 25 février 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 14 octobre 2010, Blaser Finanzholding GmbH, devenue L&O Hunting Group GmbH, l’intervenante, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal 101.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 18, 25 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et, s’agissant de la classe 25, correspondent à la description suivante : « Vêtements (habillement) ; chaussures ; chapellerie. »

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 232/2010, du 10 décembre 2010.

5        Le 10 mars 2011, la requérante, Levi Strauss & Co., a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque communautaire verbale antérieure 501, enregistrée le 7 septembre 1998 sous le numéro 26708, pour, notamment, les « vêtements (habillement) ; chaussures ; chapellerie », relevant de la classe 25.

7        L’opposition était fondée sur tous les produits couverts par la marque mentionnée au point 6 ci-dessus et était dirigée contre les produits mentionnés au point 3 ci-dessus.

8        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

9        Par décision du 18 juin 2012, la division d’opposition a rejeté l’opposition, en concluant qu’il y avait suffisamment de différences entre les signes en conflit pour éviter tout risque de confusion, même en tenant compte du caractère distinctif accru ou de la renommée de la marque antérieure, et que, eu égard au faible caractère distinctif des éléments composant les signes en conflit, les similitudes existantes entre eux étaient peu susceptibles d’évoquer la marque antérieure pour les consommateurs moyens, la marque demandée ne pouvant tirer indûment profit du caractère distinctif de la marque antérieure.

10      Le 17 août 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 6 septembre 2013, la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours (ci-après la « décision attaquée »).

12      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, aux points 19 à 22, que le public pertinent était le consommateur moyen de l’Union, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Elle a constaté qu’il n’était pas contesté que les produits concernés étaient identiques. S’agissant de la comparaison visuelle des signes en conflit, elle a estimé que la différence quant au premier chiffre de chacun d’eux et l’effet de symétrie provoqué par le signe constituant la marque demandée avaient un impact sur l’impression d’ensemble desdits signes tel que leurs caractéristiques communes étaient contrebalancées (points 24 à 30 de la décision attaquée). Sur le plan phonétique, elle a été d’avis que la différence dans le début de ces signes aurait une incidence sur l’impression phonétique d’ensemble, l’emportant sur leurs éléments communs (points 31 et 32). Tant sur le plan visuel que phonétique, elle a considéré que les mêmes signes n’étaient pas globalement similaires. Enfin, elle a estimé que les signes en question étaient différents sur le plan conceptuel (point 33). Pour elle, les différences claires entre eux sont suffisantes pour exclure de « façon sûre » un risque de confusion, malgré le caractère distinctif accru de la marque antérieure (points 34 à 41). Au vu de la circonstance que le degré de similitude entre les signes en cause n’était pas tel que le public pertinent établirait un lien entre eux, elle a considéré qu’une des trois conditions cumulatives pour appliquer l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 n’était pas remplie, rendant inutile l’examen des autres conditions.

 Procédure et conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI et, dans le cas où elle participerait à la procédure, l’intervenante aux dépens.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens y compris ceux de l’intervenante.

16      La requérante a demandé, en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, à être entendue lors d’une audience et que le Tribunal statue à l’issue de la procédure orale. Le Tribunal a fait droit à cette demande.

 En droit

17      La requérante soulève deux moyens à l’appui du recours. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et le second de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

18      Il convient d’examiner tout particulièrement le premier moyen.

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, « en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure ».

20      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement (voir, par analogie, arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec, EU:C:1998:442, point 29, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec, EU:C:1999:323, point 17). Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, points 30 et 31 et jurisprudence citée].

21      Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, entre la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec, EU:C:2007:514, point 48, et GIORGIO BEVERLY HILLS, point 20 supra, EU:T:2003:199, point 32).

22      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

23      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

24      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a rejeté l’opposition.

 Sur le public pertinent

25      Il ressort de la décision attaquée que, la marque antérieure étant une marque communautaire, le public pertinent est le consommateur moyen de l’ensemble des États membres de l’Union, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. La requérante ne conteste pas la définition du public pertinent donnée par la chambre de recours.

26      D’ailleurs, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le public pertinent était constitué de consommateurs moyens dans l’Union.

 Sur la comparaison des produits

27      Il y a lieu de relever que la requérante ne conteste pas la conclusion de la chambre de recours quant à l’identité des produits revendiqués par la marque demandée, compris dans la classe 25, avec les produits désignés par la marque antérieure, relevant de cette même classe.

28      Puisqu’il ressort précisément de la décision attaquée que les produits de la classe 25, visés par les marques en conflit, sont identiques (voir points 3 et 6 ci-dessus), c’est à juste titre que la chambre de recours est parvenue à la conclusion que ces produits étaient identiques.

 Sur la comparaison des signes

29      La requérante soutient que la chambre de recours a accordé une importance excessive au fait que les signes en conflit commençaient par des chiffres différents et a ignoré que deux des trois chiffres les composant étaient identiques et placés dans une position identique. Une différence d’un seul chiffre ne serait pas, sur les plans visuel et phonétique, suffisante pour écarter tout risque de confusion. Selon la requérante, la chambre de recours ne pouvait se fonder sur la règle selon laquelle les différences traduisent plus facilement une impression d’ensemble différente dans des signes courts, sans procéder à une appréciation globale tenant compte de la renommée de la marque antérieure. Par ailleurs, la chambre de recours aurait perdu de vue que le principe selon lequel une plus grande importance est accordée aux éléments figurant en début des signes ne permet pas toujours de conclure à une dissemblance.

30      L’OHMI considère que, pour l’appréciation d’ensemble de la similitude des signes, il convient de se fonder sur le mode de commercialisation dominant des produits, les aspects visuel, phonétique et conceptuel n’ayant ainsi pas toujours la même importance. Pour l’habillement, le consommateur percevait les produits de façon visuelle. Les différences visuelles pourraient donc, dans un tel secteur économique, neutraliser une plus grande similitude phonétique. En outre, le consommateur percevrait visuellement la marque comme un tout sans l’épeler ou la décomposer. L’OHMI estime que les signes comparés sont fondamentalement différents notamment en raison de leur aspect symétrique dans un cas et asymétrique dans l’autre..

31      L’intervenante considère que, pour apprécier la similitude des signes comparés, il convient de tenir compte de l’impression d’ensemble qu’ils produisent. Dans la comparaison visuelle, la chambre de recours aurait, à juste titre, tenu compte de la structure différente des signes comparés, l’un étant symétrique et l’autre pas, cette différence notable dominant l’impression d’ensemble produite par la marque demandée. La chambre de recours aurait également correctement apprécié la circonstance que les signes en conflit seraient courts et que de légères différences pourraient modifier l’impression d’ensemble qu’ils produisent. Sur le plan phonétique, la prononciation des chiffres initiaux des signes en conflit les distingueraient l’un de l’autre, s’agissant, en outre, de la partie la plus accentuée lorsqu’ils seraient entièrement prononcés. Enfin, l’intervenante estime que les signes en conflit sont différents conceptuellement.

 Sur la similitude visuelle

32      Dans le cadre de la comparaison visuelle des signes en conflit, la chambre de recours a estimé que la différence quant au premier chiffre de chacun d’eux et l’effet de symétrie provoqué par le signe de la marque demandée avaient un impact sur l’impression d’ensemble desdits signes tel que leurs caractéristiques communes étaient contrebalancées (points 24 à 30 de la décision attaquée). Elle en a, dès lors, conclu que les signes en conflit n’étaient pas globalement similaires sur le plan visuel.

33      Pour parvenir à une telle conclusion, la chambre de recours s’est tout particulièrement fondée sur la jurisprudence selon laquelle plus un signe est court, plus le public est à même de percevoir les différences entre les signes en conflit, de telles différences pouvant aboutir à des impressions d’ensemble différentes [voir, en ce sens, arrêts du 6 juillet 2004, Grupo El Prado Cervera/OHMI – Héritiers Debuschewitz (CHUFAFIT), T‑117/02, Rec, EU:T:2004:208, point 48 ; du 20 avril 2005, Krüger/OHMI – Calpis (CALPICO), T‑273/02, Rec, EU:T:2005:134, point 39, et du 21 février 2013, Esge/OHMI – De’Longhi Benelux (KMIX), T‑444/10, EU:T:2013:89, point 27], et sur celle selon laquelle le consommateur porte généralement son attention sur le début du mot [arrêts du 13 février 2007, Ontex/OHMI – Curon Medical (CURON), T‑353/04, EU:T:2007:47, point 67, et du 23 mai 2007, Henkel/OHMI – SERCA (COR), T‑342/05, EU:T:2007:152, point 39].

34      Il convient de rappeler, comme la chambre de recours dans la décision attaquée, que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails [arrêts GIORGIO BEVERLY HILLS, point 20 supra, EU:T:2003:199, point 33, et du 28 juin 2005, Canali Ireland/OHMI – Canal Jean (CANAL JEAN CO. NEW YORK), T‑301/03, Rec, EU:T:2005:254, point 50]. Il en est d’autant plus ainsi lorsque la marque est courte ou composée de très peu d’éléments, comme c’est le cas en l’espèce.

35      Les signes comparés sont des nombres, chacun composé de trois chiffres, dont les deux derniers sont identiques et ainsi placés dans une position identique dans lesdits signes, ce que la requérante a souligné. La seule différence entre les signes comparés réside dans le premier chiffre de chacun d’eux, à savoir le chiffre 5 dans la marque antérieure et le chiffre 1 dans la marque demandée. Si, comme le soutient l’OHMI, la perception visuelle d’un signe peut être plus intense lorsque le signe est court et que, ainsi, les différences même mineures ne peuvent être ignorées, un tel constat ne saurait automatiquement conduire à la constatation d’une absence de similitude visuelle entre les signes comparés. En application de la jurisprudence citée au point 33 ci-dessus, ce n’est que lorsque les différences relevées dans les signes comparés peuvent aboutir à des impressions d’ensemble différentes que, dans un cas comme celui de l’espèce, il peut être conclu à une absence de similitude visuelle.

36      Au point 30 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est bornée à conclure que les signes comparés n’étaient pas globalement similaires sur le plan visuel, en se fondant tant sur le fait que le premier chiffre de chacun des signes comparés était différent que sur le caractère symétrique du signe 101 et sur celui asymétrique du signe 501, ce qui, selon elle, avait un impact sur l’impression d’ensemble contrebalançant clairement les caractéristiques communes desdits signes.

37      Or, en développant une telle analyse, la chambre de recours n’a pas établi que les signes comparés produisent sur le public pertinent des impressions d’ensemble différentes.

38      En effet, dans le secteur de l’habillement, l’aspect visuel est prépondérant, au stade de l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion entre les signes comparés, eu égard au mode de commercialisation des produits en cause [voir, en ce sens, arrêts du 14 octobre 2003, Philipps-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec, EU:T:2003:264, point 55, et du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, Rec, EU:T:2004:293, point 49], la décision d’achat étant normalement le résultat d’une inspection visuelle du produit, la marque étant perçue comme un tout sans être épelée comme un acronyme ou une suite de lettres, comme l’OHMI le reconnaît lui-même. Il peut être déduit d’un tel contexte qu’une dissemblance entre deux signes résultant d’un seul des trois éléments qui les composent ne peut, sans que soit relevé d’autre circonstance particulière, produire une impression d’ensemble différente pour chacun des signes comparés. Or, d’une part, les signes comparés sont identiques dans leurs deuxième et troisième chiffres, à savoir les chiffres 0 et 1. D’autre part, si selon la jurisprudence citée au point 33 ci-dessus, le consommateur porte généralement son attention sur le début du mot, le constat d’une différence dans le premier chiffre des signes comparés ne peut être regardé comme une circonstance particulière qui, à elle seule, sans autre caractérisation spécifique de ce chiffre, fonderait une impression d’ensemble différente des signes comparés.

39      Quant à la supposée différence de structure des signes comparés invoquée par l’OHMI – une structure symétrique « binaire » s’agissant du signe 101 et une structure asymétrique s’agissant du signe 501 –, rien dans la décision attaquée ne permet de démontrer que, à supposer que l’analyse de la chambre de recours fût sur ce point pertinente, une telle différence soit clairement perçue comme telle par le public pertinent, et non comme simplement la représentation de deux nombres différents coïncidant en deux des trois chiffres qui les composent, et qu’elle soit susceptible de produire sur ledit public une impression d’ensemble différente à la vue des signes comparés.

40      Dès lors, il y a lieu de considérer que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en ayant conclu que, sur le plan visuel, les signes comparés n’étaient pas globalement similaires, ces signes présentant, au contraire, un certain degré de similitude visuelle.

 Sur la similitude phonétique

41      Il y a lieu de rappeler que, aux points 31 et 32 de la décision attaquée, la chambre de recours a été d’avis que la différence dans le début des signes en conflit avait une incidence sur l’impression phonétique d’ensemble, l’emportant sur leurs éléments communs. Dès lors, les signes en conflit n’étaient pas globalement similaires.

42      Dans le cadre de l’appréciation de la similitude phonétique des signes comparés, la chambre de recours s’est, à juste titre, fondée, notamment, sur la jurisprudence selon laquelle le degré de similitude phonétique entre deux marques est d'une importance réduite dans le cas de produits qui sont commercialisés d'une telle manière que, habituellement, le public pertinent, lors de l'achat, perçoit la marque les désignant de façon visuelle, comme c’est le cas pour les produits en cause en l'espèce (voir, en ce sens, arrêts BASS, point 38 supra, EU:T:2003:264, point 55, et NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection, point 38 supra, EU:T:2004:293, point 49).

43      Dans un tel contexte, il convient de relever que la requérante ne conteste pas le constat de l’importance réduite du degré de similitude phonétique entre les signes comparés. Néanmoins, elle soutient notamment que, lorsque les signes comparés sont prononcés, leurs parties communes sont les plus longues. Il en serait ainsi en allemand et en français, dans cette dernière langue la marque demandée étant, sur le plan phonétique, totalement incluse dans la marque antérieure. Ces arguments n’ont pas été contestés par l’OHMI et l’intervenante, et ils ne pourraient l’être puisqu’ils sont objectivement vérifiés. Ainsi, s’il ne peut être nié, comme la chambre de recours l’a indiqué au point 31 de la décision attaquée, que la différence phonétique dans le début des signes en conflit est susceptible d’être facilement perçue et remarquée par le public pertinent, la chambre de recours n’a pas, ainsi, démontré que l’impression d’ensemble produite par les signes comparés serait dominée par cette différence au point de pouvoir conclure que les signes ne sont pas similaires sur le plan phonétique, eu égard aux observations de la requérante, qui, elles, sont établies.

44      Dès lors, il y a lieu de considérer que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en ayant conclu que, sur le plan phonétique, les signes en conflit n’étaient pas globalement similaires, ces signes présentant un faible degré de similitude phonétique.

 Sur la similitude conceptuelle

45      Il convient de rappeler que la chambre de recours a fait sienne l’appréciation portée par la division d’opposition, suivant laquelle les signes comparés n’ont pas de concept en commun, puisque les chiffres, en tant que tel, ne véhiculent aucun concept. Elle a complété cette analyse en ajoutant que, même à considérer que les chiffres véhiculent un concept, les signes comparés sont différents, puisqu’ils sont constitués de deux nombres spécifiques différents.

46      S’il est vrai que, comme le souligne la requérante, les signes comparés sont des combinaisons de trois chiffres dont ceux des dizaines et des unités sont identiques, et que, dans cette mesure, ils sont visuellement similaires, il convient de relever qu’un tel constat ne suffit pas à établir une similitude conceptuelle, les nombres en tant que tels ne véhiculant aucun concept comme la division d’opposition et la chambre de recours l’ont souligné. En outre, à supposer que des nombres puissent véhiculer un concept, les nombres différents qui forment les signes comparés traduiraient des concepts différents, à savoir celui des quantités respectives auxquels ils renvoient, chacun de ces signes ayant, sur le plan conceptuel, une valeur intrinsèque absolue [voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, Rec, EU:T:2010:347, point 91].

47      Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu, en substance, que les signes ne pouvaient être comparés sur le plan conceptuel, puisque les nombres en tant que tels ne véhiculaient aucun concept.

48      Il résulte de tout ce qui précède que, en concluant que les signes comparés n’étaient pas globalement similaires, la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation de la similitude desdits signes, ceux-ci présentant un certain degré de similitude.

 Sur le risque de confusion

49      La chambre de recours a, conformément à la jurisprudence, décidé que, en l’absence de toute similitude entre la marque antérieure et la marque demandée, la notoriété ou la renommée de la marque antérieure, l’identité ou la similitude des produits ou des services concernés ne suffisent pas pour établir le risque de confusion entre les marques en conflit (voir, en ce sens, arrêts du 12 octobre 2004, Vedial/OHMI, C‑106/03 P, Rec, EU:C:2004:611, point 54, et Il Ponte Finanziaria/OHMI, point 21 supra, EU:C:2007:514, points 50 et 51).

50      Dès lors qu’il a été jugé au point 48 ci-dessus que la chambre de recours avait commis une erreur d’appréciation en ayant conclu que les signes comparés n’étaient pas globalement similaires, son appréciation quant à l’absence, en l’espèce, de risque de confusion entre les marques en conflit est de ce seul fait erronée, puisqu’une telle appréciation était uniquement fondée sur l’appréciation elle-même erronée de l’absence de similitude desdits signes.

51      Par conséquent, sans qu’il soit besoin d’examiner le second moyen du recours, il convient d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

52      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

53      En l’espèce, l’OHMI et l’intervenante ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter chacun leurs propres dépens, ainsi que les dépens de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) du 6 septembre 2013 (affaire R 1538/2012-2), relative à une procédure d’opposition entre Levi Strauss & Co. et L&O Hunting Group GmbH est annulée.

2)      L’OHMI et L&O Hunting Group sont condamnés à supporter leurs propres dépens ainsi que les dépens de Levi Strauss & Co.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 juin 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.

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