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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Osterreichische Post v Commission (Judgment) French Text [2016] EUECJ T-463/14 (27 April 2016) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/T46314.html Cite as: ECLI:EU:T:2016:243, EU:T:2016:243, [2016] EUECJ T-463/14 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
27 avril 2016 (*)
« Directive 2004/17/CE – Procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux – Décision d’exécution exemptant certains services du secteur postal en Autriche de l’application de la directive 2004/17 – Article 30 de la directive 2004/17 – Obligation de motivation – Erreur manifeste d’appréciation »
Dans l’affaire T‑463/14,
Österreichische Post AG, établie à Vienne (Autriche), représentée par Mes H. Schatzmann, J. Bleckmann et M. Oder, avocats,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par MM. A. Tokár et C. Vollrath, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision d’exécution 2014/184/UE de la Commission, du 2 avril 2014, exemptant certains services du secteur postal, en Autriche, de l’application de la directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux (JO L 101, p. 4), dans la mesure où cette directive continue à avoir vocation à s’appliquer à la passation de marchés portant sur certains services postaux en Autriche,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre),
composé de MM. A. Dittrich (rapporteur), président, J. Schwarcz et Mme V. Tomljenović, juges,
greffier : Mme S. Bukšek Tomac, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 29 octobre 2015,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 La requérante, Österreichische Post AG, est une société anonyme de droit autrichien qui est détenue à hauteur de 52,80 % par Österreichische Industrieholding AG qui, elle-même, est détenue à 100 % par la République d’Autriche. Elle fournit des services postaux complets ainsi que les services et prestations de services qui y sont liés, notamment, sur le territoire de l’Autriche et a, en vertu de la loi autrichienne, été désignée comme opérateur de service universel en Autriche.
2 Par lettre du 30 septembre 2013, la requérante a transmis à la Commission européenne une demande en application de l’article 30, paragraphe 5, de la directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux (JO L 134, p. 1), qu’elle a accompagnée de différents rapports d’expertise. Cette demande concernait certains services postaux ainsi que d’autres services fournis par la requérante sur le territoire autrichien. Elle visait à ce que la Commission constate que, du fait que les services en cause fournis en Autriche étaient directement exposés à la concurrence, sur des marchés dont l’accès n’était pas limité, les marchés destinés à permettre la prestation de ces services n’étaient pas soumis aux procédures de passation des marchés dans le secteur des services postaux prévues par la directive 2004/17.
3 Les services concernés par la demande de la requérante étaient les suivants :
– services postaux de lettres avec adresse entre clients professionnels (ci-après « B2B ») et entre clients professionnels et clients particuliers (ci-après « B2C ») au niveau national (services « intérieurs » et « à l’arrivée ») ;
– services postaux de lettres avec adresse entre clients particuliers (ci-après « C2C ») et entre clients particuliers et clients professionnels (ci-après « C2B ») au niveau national (services « intérieurs » et « à l’arrivée ») ;
– services postaux de lettres internationales avec adresse (« au départ ») B2B et B2C (ci-après « B2X ») ainsi que C2B et C2C (ci-après « C2X ») ;
– services postaux de lettres publicitaires avec adresse aux niveaux national et international ;
– services postaux de lettres publicitaires non adressées aux niveaux national et international ;
– services postaux de journaux avec adresse et non adressés ;
– services de gestion du courrier ;
– services à valeur ajoutée liés au courrier électronique et effectués entièrement par voie électronique ;
– philatélie – timbres-poste spéciaux ;
– services financiers.
4 Par lettres des 18 octobre et 5 décembre 2013, la Commission a informé la République d’Autriche de cette demande en invitant les autorités autrichiennes à lui communiquer tous les faits pertinents. Les autorités autrichiennes ont répondu par lettre du 17 décembre 2013.
5 Le 20 novembre 2013, par l’avis concernant une demande au titre de l’article 30 de la directive 2004/17 – Prolongation de délai (JO 2013, C 339, p. 8), la Commission a prolongé jusqu’au 2 avril 2014 le délai pour statuer sur la demande de la requérante.
6 Après des échanges de courrier et la tenue de plusieurs réunions entre les services de la Commission et la requérante, la Commission a adopté, le 2 avril 2014, la décision d’exécution 2014/184/UE exemptant certains services du secteur postal, en Autriche, de l’application de la directive 2004/17 (JO L 101, p. 4, ci-après la « décision attaquée »), destinée à la République d’Autriche. Par cette décision, elle a partiellement fait droit à la demande de la requérante.
7 L’article 1er de la décision attaquée dispose que la directive 2004/17 ne s’applique pas aux marchés attribués par les entités adjudicatrices afin d’assurer la prestation en Autriche des services suivants :
– services de gestion du courrier ;
– services à valeur ajoutée liés au courrier électronique et effectués entièrement par voie électronique ;
– services de philatélie ;
– services de paiement offerts pour son propre compte.
8 S’agissant des autres services visés par la demande de la requérante et mentionnés au point 3 ci-dessus, la Commission a constaté, au considérant 102 de la décision attaquée, que la condition d’exposition directe à la concurrence posée à l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 n’était pas remplie sur le territoire de l’Autriche. Ces services restaient donc soumis aux dispositions de la directive 2004/17.
Procédure et conclusions des parties
9 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 juin 2014, la requérante a introduit le présent recours, visant à l’annulation partielle de la décision attaquée.
10 Par lettre enregistrée au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a demandé le traitement confidentiel envers le public à l’égard de toute pièce transmise au Tribunal qui contiendrait des secrets d’affaires.
11 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.
12 Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure, le Tribunal a invité, d’une part, la requérante à préciser les données qui constituaient, selon elle, des secrets d’affaires et, d’autre part, la Commission à produire un document. Les parties ont déféré à ces demandes dans le délai imparti.
13 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 29 octobre 2015.
14 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler partiellement la décision attaquée dans la mesure où, contrairement à sa demande, la directive 2004/17 continue à avoir vocation à s’appliquer à la passation de marchés portant sur des services postaux non énumérés à l’article 1er de cette décision, à savoir :
– les services postaux de lettres avec adresse B2B et B2C au niveau national (services « intérieurs » et « à l’arrivée ») ;
– les services postaux de lettres avec adresse C2C et C2B au niveau national (services « intérieurs » et « à l’arrivée ») ;
– les services postaux de lettres internationales avec adresse (« au départ ») B2X et C2X ;
– les services postaux de lettres publicitaires avec adresse aux niveaux national et international ;
– les services postaux de lettres publicitaires non adressées aux niveaux national et international ;
– les services postaux de journaux avec adresse et non adressés ;
– à titre subsidiaire, dans la mesure où, selon le Tribunal, une annulation partielle de la décision attaquée ne serait pas admissible ou possible, annuler intégralement la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens.
15 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
16 Au soutien du recours, la requérante soulève sept moyens. Elle fait valoir, en substance, que la Commission a appliqué la directive 2004/17 de manière incorrecte en ce qu’elle n’aurait pas conclu que les conditions prévues à l’article 30, paragraphe 1, de cette directive étaient satisfaites. Selon la requérante, étant donné que les services postaux en cause étaient directement exposés à la concurrence, sur des marchés dont l’accès n’était pas limité, la Commission a, à tort, considéré que les marchés destinés à permettre la prestation de ces services continuaient à être soumis à la directive 2004/17.
17 Le premier moyen est tiré d’une application erronée des critères et des méthodes de délimitation du marché prévus par la directive 2004/17 et d’un défaut de motivation relatif à la méthode choisie par la Commission. Les deuxième à sixième moyens sont tirés d’une application erronée de la directive 2004/17 et d’un défaut de motivation. Ces moyens concernent la question de savoir si la requérante était directement exposée à la concurrence sur le marché des services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau national (deuxième moyen), sur le marché des services postaux de lettres avec adresse C2X au niveau national (troisième moyen), sur le marché des services postaux de lettres avec adresse B2X et C2X au niveau international (quatrième moyen), sur le marché des services postaux de courrier publicitaire avec adresse aux niveaux national et international (cinquième moyen) et sur le marché des services postaux de courrier publicitaire non adressé aux niveaux national et international (sixième moyen). Le septième moyen est tiré d’un défaut de motivation et d’une violation de l’obligation de motivation relatifs au marché des services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés.
Sur le premier moyen, tiré d’une application erronée des critères et des méthodes de délimitation du marché prévus par la directive 2004/17 et d’un défaut de motivation relatif à la méthode choisie par la Commission
18 La requérante fait valoir que la Commission a violé, d’une part, son obligation de motivation relative à la méthode choisie et, d’autre part, la directive 2004/17, en appliquant des critères et des méthodes erronés aux fins de conclure que les services postaux en cause n’étaient pas directement exposés à la concurrence.
19 En premier lieu, dans le cadre de son argumentation selon laquelle la Commission a violé son obligation de motivation, la requérante fait observer que la Commission s’est bornée à indiquer, au considérant 7 de la décision attaquée, que les critères et la méthodologie utilisés pour évaluer l’exposition directe à la concurrence en vertu de l’article 30 de la directive 2004/17 n’étaient pas nécessairement les mêmes que ceux utilisés pour effectuer une évaluation en vertu des articles 101 TFUE et 102 TFUE ou du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, relatif au contrôle des concentrations entre entreprises (JO L 24, p. 1). Cependant, la Commission n’aurait exposé ni les motifs à l’origine de son choix des critères et des méthodes différents de ceux qui doivent être utilisés pour effectuer une évaluation en vertu des articles 101 TFUE et 102 TFUE, ni en quoi consistaient les critères et les méthodes sur lesquels elle s’est appuyée pour prendre la décision attaquée.
20 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec, EU:C:1998:154, point 63 et jurisprudence citée).
21 Il est exact que, au considérant 7 de la décision attaquée, la Commission a constaté que cette décision était sans préjudice de l’application des règles de concurrence et que, en particulier, les critères et la méthodologie utilisés pour évaluer l’exposition directe à la concurrence en vertu de l’article 30 de la directive 2004/17 n’étaient pas nécessairement les mêmes que ceux utilisés pour effectuer une évaluation en vertu des articles 101 TFUE et 102 TFUE ou du règlement n° 139/2004.
22 Toutefois, il y a lieu de relever que, au considérant 8 de la décision attaquée, la Commission a constaté que cette décision avait pour objectif d’établir si les services visés par la demande de la requérante étaient soumis à un niveau de concurrence sur les marchés dont l’accès n’était pas limité au sens de l’article 30 de la directive 2004/17 susceptible de garantir que, même en l’absence de la discipline qu’imposaient les règles détaillées de passation des marchés fixées par cette directive, la passation de marchés pour les activités concernées reposerait sur des procédures transparentes et non discriminatoires et sur des critères permettant aux acheteurs de retenir la solution globalement la plus avantageuse sur le plan économique. En faisant ainsi référence à la directive 2004/17, la Commission a suffisamment exposé, dans la décision attaquée, les raisons pour lesquelles, selon elle, les critères et la méthodologie utilisés en droit de la concurrence de l’Union européenne ne pouvaient être simplement repris pour l’application de cette directive.
23 En ce qui concerne les critères et les méthodes appliqués, il convient de constater que la Commission a fait référence, notamment au considérant 3 de la décision attaquée, à l’article 30 de la directive 2004/17. Le paragraphe 2 de cette disposition énonce que, pour déterminer si une activité est directement exposée à la concurrence, il faut se fonder sur des critères qui soient conformes aux dispositions du traité FUE en matière de concurrence tels que les caractéristiques des biens ou des services concernés, l’existence de biens ou de services alternatifs, les prix et la présence, réelle ou potentielle, de plus d’un fournisseur des biens ou des services en question. À cet égard, il y a également lieu de constater que ces critères font l’objet de la décision 2005/15/CE de la Commission, du 7 janvier 2005, relative aux modalités d’application de la procédure prévue à l’article 30 de la directive 2004/17 (JO L 7, p. 7).
24 Par ces considérations, la Commission a, à suffisance de droit, motivé la méthode choisie. Par conséquent, l’argumentation de la requérante relative à une prétendue violation de l’obligation de motivation doit être rejetée.
25 En second lieu, la requérante fait valoir que la Commission a violé la directive 2004/17 en ce que celle-ci n’aurait pas appliqué les critères et les méthodes prévus par le traité FUE en matière de concurrence. Selon la requérante, l’approche de la Commission était en contradiction tant avec l’article 30 de la directive qu’avec la décision 2005/15 et la communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO 1997, C 372, p. 5, ci-après la « communication sur la définition du marché »). Les études, enquêtes et tests concernant la délimitation du marché en cause effectués par la requérante trouveraient leur fondement tant dans cette communication que dans la décision 2005/15 et constitueraient dans la jurisprudence et la doctrine ainsi que dans la pratique habituelle de la Commission des méthodes reconnues de détermination de la substituabilité des produits et donc de la délimitation du marché de produits en cause. Néanmoins, la Commission n’aurait pas appliqué les critères et les méthodes utilisés par la requérante. Elle n’aurait pas non plus suffisamment apprécié les éléments de preuve produits par la requérante et n’aurait pas, conformément au document de la Commission intitulé « Bonnes pratiques relatives à la communication de preuves économiques et de collecte de données dans des affaires concernant l’application des articles 101 et 102 TFUE et dans des affaires de concentration », apporté la preuve contraire.
26 Il a déjà été constaté (voir point 21 ci-dessus) que, selon le considérant 7 de la décision attaquée, la Commission a considéré que les critères et la méthodologie utilisés pour évaluer l’exposition directe à la concurrence en vertu de l’article 30 de la directive 2004/17 n’étaient pas nécessairement les mêmes que ceux utilisés pour effectuer une évaluation en vertu des articles 101 TFUE et 102 TFUE ou du règlement n° 139/2004.
27 Cette approche n’est pas entachée d’une erreur de droit.
28 En effet, premièrement, il est certes exact que, en vertu de l’article 30, paragraphe 2, de la directive 2004/17, pour déterminer si une activité est directement exposée à la concurrence, il faut se fonder sur des critères qui soient conformes aux dispositions du traité FUE en matière de concurrence. Toutefois, le libellé de cette disposition n’exige pas que ces critères soient précisément ceux des dispositions en matière de concurrence de l’Union. En outre, ainsi que l’affirme la Commission, la directive 2004/17 ne fait pas partie du droit de la concurrence de l’Union. Elle a pour fondement juridique l’article 47, paragraphe 2, et les articles 55 CE et 95 CE. L’objectif principal des règles de l’Union en matière de marchés publics consiste en la libre circulation des services et l’ouverture à la concurrence non faussée dans tous les États membres (voir, en ce sens, arrêt du 11 janvier 2005, Stadt Halle et RPL Lochau, C‑26/03, Rec, EU:C:2005:5, point 44), ainsi qu’il ressort notamment des considérants 2, 3 et 9 de la directive 2004/17. À cet égard, il y a lieu de rappeler que la directive 2004/17 vise à ouvrir à la concurrence de l’Union les marchés auxquels elle s’applique, en favorisant la manifestation d’intérêt la plus large possible parmi les opérateurs économiques des États membres (voir arrêt du 23 avril 2009, Commission/Belgique, C‑287/07, EU:C:2009:245, point 103 et jurisprudence citée). Au considérant 8 de la décision attaquée, la Commission a, à juste titre, fait référence à l’objectif visé par la directive 2004/17 afin de déterminer le niveau de concurrence effective à atteindre pour constater, en vertu de l’article 30 de cette directive, que la prestation d’une activité est directement exposée à la concurrence. De plus, ni les articles 101 TFUE et 102 TFUE ni le règlement n° 139/2004 ne font référence à la notion d’activité « directement exposée à la concurrence » figurant à l’article 30, paragraphe 2, de la directive 2004/17.
29 Deuxièmement, en ce qui concerne la décision 2005/15, il convient de rappeler que, selon le considérant 2 de cette décision, l’examen des conditions prévues à l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 doit se faire exclusivement au titre de cette directive et ne doit pas préjuger de l’application des règles de concurrence. En outre, il ressort du considérant 40 de cette directive que son article 30 devrait offrir la sécurité juridique aux entités concernées et un processus de décision approprié, permettant, dans de brefs délais, d’assurer une application uniforme du droit de l’Union en la matière. Ces considérations confirment que, dans le cadre de l’examen d’une demande effectuée au titre de l’article 30 de la directive 2004/17, la Commission n’est pas tenue d’appliquer les critères et les méthodes prévus par le traité FUE en matière de concurrence tels quels.
30 Dans la mesure où la requérante fait valoir que, à l’annexe I, section 3, de la décision 2005/15, la Commission a confirmé que les critères des dispositions en matière de concurrence s’appliquaient, il convient de constater que la première phrase de l’annexe I, section 3, de la décision 2005/15 relative à la délimitation du marché de produits en cause est certes identique à la définition du marché de produits en cause figurant au point 7 de la communication sur la définition du marché, qui concerne le droit de l’Union de la concurrence. Cependant, d’une part, la décision 2005/15 ne mentionne pas cette communication. D’autre part, en vertu de l’article 30, paragraphe 2, de la directive 2004/17, les critères pour déterminer si une activité est directement exposée à la concurrence doivent être conformes aux dispositions du traité en matière de concurrence. Par ailleurs, il n’est pas contesté par la Commission que les références au droit de la concurrence de l’Union jouent un rôle essentiel dans le cadre de la procédure prévue à l’article 30 de la directive 2004/17, ainsi qu’il ressort notamment du considérant 17 de la décision attaquée, dans lequel la Commission a expressément fait référence aux règles de concurrence de l’Union dans le cadre de son analyse de la substituabilité des services.
31 Troisièmement, s’agissant de la communication sur la définition du marché et du document de la Commission intitulé « Bonnes pratiques relatives à la communication de preuves économiques et de collecte de données dans des affaires concernant l’application des articles 101 et 102 TFUE et dans des affaires de concentration », il convient de constater que ceux-ci se réfèrent exclusivement au droit de la concurrence de l’Union. Il ne ressort aucunement de ces documents que la Commission est tenue d’appliquer les critères et la méthodologie mentionnés dans ceux-ci dans le cadre d’une procédure relative au droit des marchés publics.
32 Quatrièmement, la requérante fait valoir que la pratique décisionnelle de la Commission a fait naître à son égard une confiance légitime en une délimitation du marché selon les méthodes du droit de la concurrence ou selon la communication sur la définition du marché. Elle fait référence, à cet égard, à la décision 2007/169/ CE de la Commission, du 16 mars 2007, établissant que l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 s’applique à certains services de courrier et de colis au Danemark (JO L 78, p. 28), à la décision d’exécution 2011/875/UE de la Commission, du 16 décembre 2011, exemptant certains services financiers du secteur postal en Hongrie de l’application de la directive 2004/17 (JO L 343, p. 77), et à la décision d’exécution 2014/299/UE de la Commission, du 22 mai 2014, exemptant certains services du secteur postal en Hongrie de l’application de la directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil, relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17 (JO L 156, p. 10).
33 Cette argumentation ne saurait être accueillie. En effet, d’une part, il convient de relever que le considérant 6 de la décision 2007/169, tout comme le considérant 10 de la décision d’exécution 2011/875 et le considérant 6 de la décision d’exécution 2014/299, soulignent que l’appréciation selon laquelle les services en cause étaient directement exposés à la concurrence a été faite uniquement aux fins de la mise en œuvre de la directive 2004/17 et ne préjugeait en rien de l’application des règles en matière de concurrence. Par ailleurs, la décision d’exécution 2014/299 n’avait pas comme base juridique la directive 2004/17, mais la directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17 (JO L 94, p. 243). D’autre part, il convient de constater que la Commission affirme qu’elle a correctement appliqué dans la décision attaquée la méthode relative à la délimitation du marché telle que prévue dans la communication sur la définition du marché. À cet égard, il ressort du considérant 17 de la décision attaquée que, aux fins d’analyser la substituabilité des services en cause, la Commission a fait référence aux critères figurant à la première phrase de l’annexe I, section 3, de la décision 2005/15, qui correspond à la définition du marché de produits figurant au point 7 de la communication sur la définition du marché. Dans la mesure où la requérante fait valoir que la Commission n’a pas appliqué cette communication, son argumentation est donc inopérante.
34 Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté.
35 Dans la mesure où la requérante fait valoir de manière générale, dans le cadre du présent moyen, que la Commission a, à tort, rejeté les études, les enquêtes et les tests concernant la délimitation du marché en cause qu’elle a effectués conformément à la communication sur la définition du marché, il convient de relever que cette argumentation ne concerne pas l’approche globale relative aux critères et à la méthodologie appliqués par la Commission, mais l’examen, effectué par cette dernière, de la question de savoir si les différents services postaux en cause étaient directement exposés à la concurrence. Cette argumentation sera donc examinée dans le cadre des deuxième à septième moyens, qui concernent les constatations de la Commission relatives à l’exposition directe à la concurrence de ces services postaux.
Sur le deuxième moyen, tiré d’une application erronée de la directive 2004/17 et d’un défaut de motivation, relatif à l’exposition directe à la concurrence sur le marché des services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau national
36 La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 30 de la directive 2004/17 et a entaché sa décision d’un défaut de motivation en ce qu’elle aurait constaté, aux considérants 14 à 33 de la décision attaquée, que les services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau national n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche. Selon la requérante, la Commission a commis une erreur en délimitant le marché en cause. Plus précisément, la Commission aurait erronément considéré que la distribution électronique et la distribution postale n’appartenaient pas au même marché B2X national.
37 Il ressort des considérants 14 à 33 de la décision attaquée que la Commission a conclu que les services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau national n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche et que, par conséquent, l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 ne s’appliquait pas aux contrats destinés à permettre la poursuite de ces activités en Autriche. Pour parvenir à cette conclusion, la Commission a constaté, aux considérants 14 à 30 de la décision attaquée, que, étant donné que l’affirmation de la requérante selon laquelle la distribution électronique et la distribution postale appartenaient au même marché en cause ne pouvait être acceptée, le marché de produits en cause était le marché des services postaux pour les lettres avec adresse B2X. Par la suite, elle a constaté, aux considérants 31 et 32 de la décision attaquée, que la requérante occupait une position très solide sur ce marché, avec une part de marché estimée à [confidentiel](1) %, que le marché postal était totalement libéralisé depuis janvier 2011 et que, sous l’effet de la libéralisation, les concurrents avaient gagné une part de marché globale estimée à [confidentiel] % seulement, même dans le segment le plus concurrentiel, à savoir les services de courrier avec adresse B2X.
38 À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante que la définition du marché en cause, dans la mesure où elle implique des appréciations économiques complexes de la part de la Commission, ne saurait faire l’objet que d’un contrôle restreint de la part du juge de l’Union (voir, par analogie, arrêts du 17 septembre 2007, Microsoft/Commission, T‑201/04, Rec, EU:T:2007:289, point 482 ; du 15 décembre 2010, CEAHR/Commission, T‑427/08, Rec, EU:T:2010:517, point 66, et du 24 mai 2012, MasterCard e.a./Commission, T‑111/08, Rec, EU:T:2012:260, point 169).
39 Cependant, le juge de l’Union ne saurait s’abstenir de contrôler l’interprétation, par la Commission, de données de nature économique. À cet égard, il lui incombe de vérifier si la Commission a fondé son appréciation sur des éléments de preuve qui sont exacts, fiables et cohérents, qui constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et qui sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (voir, par analogie, arrêts du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, Rec, EU:C:2011:815, point 54 ; Microsoft/Commission, point 38 supra, EU:T:2007:289, point 482, et du 9 septembre 2009, Clearstream/Commission, T‑301/04, Rec, EU:T:2009:317, point 47).
40 À cet égard, il convient de relever que la directive 2004/17 s’applique, en règle générale, aux activités visant à fournir des services postaux, conformément à son article 6. La procédure prévue à l’article 30 de la directive 2004/17 permet de déroger à cette règle en constatant, sur demande d’un État membre ou d’une entité adjudicatrice en vertu des paragraphes 4 et 5 de cet article, qu’un certain marché destiné à permettre la prestation d’une activité visée aux articles 3 à 7 de cette directive n’est pas soumis à cette dernière. Si, comme en l’espèce, une entité adjudicatrice a demandé à la Commission d’établir l’applicabilité de l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 à une activité donnée, il incombe à l’État membre concerné, conformément au paragraphe 5, deuxième alinéa, de cet article, d’informer la Commission de tous les faits pertinents et, notamment, de toute loi, de tout règlement, de toute disposition administrative ou de tout accord concernant la conformité aux conditions énoncées à l’article 30, paragraphe 1, de cette directive, ainsi que, le cas échéant, de la position adoptée par une autorité nationale indépendante compétente pour l’activité concernée. Conformément à l’article 30, paragraphe 6, premier alinéa, de ladite directive, pour adopter une décision au titre de cet article, la Commission dispose d’un délai de trois mois à partir du premier jour ouvrable suivant la date à laquelle la demande lui est notifiée et ce délai peut seulement être prorogé d’une période maximale de trois mois dans des cas dûment justifiés. Il ressort de l’article 30, paragraphe 5, quatrième alinéa, de la directive 2004/17 que, si, au terme du délai prévu au paragraphe 6 de cet article, la Commission n’a pas adopté de décision concernant l’applicabilité du paragraphe 1 du même article à une activité donnée, ce paragraphe 1 est réputé applicable.
41 Il résulte de cette procédure que la charge de la preuve relative au fait que les conditions prévues à l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 sont satisfaites incombe au demandeur et à l’État membre concerné, la Commission ne disposant en l’espèce que de pouvoirs limités au regard des vastes pouvoirs d’enquête qui lui sont conférés dans le cadre de l’application du droit de la concurrence de l’Union par le règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 TFUE] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), et par le règlement n° 139/2004. En outre, la Commission est tenue d’adopter une décision définitive dans le délai visé à l’article 30, paragraphe 6, de cette directive si elle estime que les conditions prévues au paragraphe 1 de cet article ne sont pas satisfaites.
42 Le présent moyen est composé de quatre branches. La première est tirée du fait que la Commission n’aurait pas suffisamment examiné l’argumentation de la requérante et aurait violé son obligation de motivation. Les deuxième à quatrième branches concernent certaines prétendues erreurs d’appréciation commises par la Commission dans la décision attaquée. La deuxième branche est tirée d’une appréciation erronée, figurant aux considérants 18 et 19 de la décision attaquée, des prétendus obstacles à la substituabilité de la facturation électronique et de la facturation postale ainsi que de la situation du marché. Par la troisième branche, la requérante fait valoir que, aux considérants 20 et 21 de la décision attaquée, la Commission a, d’une part, interprété de manière erronée le test du monopoleur hypothétique (ci-après le « test-MH ») effectué par la requérante et les données relatives à l’évolution des quantités et des prix découlant de l’analyse de choc fournies par la requérante et, d’autre part, violé son obligation de motivation. Enfin, la quatrième branche est tirée d’un défaut de motivation relatif à la constatation, figurant au considérant 24 de la décision attaquée, selon laquelle la requérante pourrait répercuter les hausses des coûts sur ses clients.
43 Afin d’étayer son argumentation et d’expliquer, premièrement, l’étude de la société de consultants E., intitulée « Austrian communications market » (Marché autrichien de communications), datant de septembre 2013 (ci-après l’étude « ACM »), annexée à la demande de la requérante relative à l’application de l’article 30 de la directive 2004/17, deuxièmement, l’analyse de choc qu’elle a effectuée et, troisièmement, les analyses de régression effectuées par la Commission, la requérante demande l’audition, en qualité de témoin, de l’auteur de l’étude ACM et de l’analyse de choc.
44 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre d’un recours en annulation, il appartient uniquement au juge de l’Union de vérifier si l’acte attaqué est entaché d’une des causes d’illégalité prévues à l’article 263 TFUE, sans pouvoir substituer son appréciation des éléments factuels d’ordre scientifique et technique à celle des autorités de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 2000, DSG/Commission, T‑234/95, Rec, EU:T:2000:174, points 146 et 168 et jurisprudence citée). Il convient également de rappeler que, en vertu de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Tribunal fixe les mesures d’instruction qu’il juge être appropriées. Selon une jurisprudence constante, le Tribunal est seul juge de la nécessité éventuelle de compléter les éléments d’information dont il dispose sur les affaires dont il est saisi (voir arrêt du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec, EU:C:2004:592, point 76 et jurisprudence citée). Il appartient donc au Tribunal d’apprécier la pertinence de la demande par rapport à l’objet du litige et à la nécessité de procéder à l’audition des témoins cités (ordonnance du 27 avril 2006, L/Commission, C‑230/05 P, RecFP, EU:C:2006:270, point 47). Dès lors que les points qui devraient être clarifiés par l’audition du témoin concernent les différentes branches du présent moyen, il conviendra d’apprécier la nécessité de l’audition de l’auteur de l’étude ACM et de l’analyse de choc après avoir examiné l’argumentation avancée par la requérante dans le cadre de ces branches.
Sur la première branche, tirée d’un examen insuffisant de l’argumentation de la requérante et d’une violation de l’obligation de motivation
45 La requérante fait valoir que la Commission n’a pas suffisamment examiné les études et les rapports d’expertise qu’elle a produits ni les tendances générales et la définition du marché qui s’ensuivrait, à savoir le fait que les modes de distribution postale et électronique appartiennent au même marché en cause. Ce faisant, la Commission aurait également violé son obligation de motivation. La Commission se serait bornée, au considérant 15 de la décision attaquée, à constater que le fait que les modes de distribution postale et électronique appartiennent au même marché en cause ne correspondait pas aux appréciations qu’elle avait portées dans ses décisions précédentes. Plus précisément, la requérante souligne que le fait que le mode de distribution du courrier d’affaires est technologiquement neutre a été pris en compte par le législateur de l’Union et, par la suite, également par le législateur autrichien, en particulier dans le domaine de la facturation électronique, en ce que les factures transmises électroniquement seraient assimilées aux factures transmises par voie postale. Dans une enquête effectuée en 2008, des experts de la Commission auraient eux-mêmes constaté que 57 % des entreprises interrogées envoyaient des factures électroniques. La grande majorité de ces factures électroniques seraient envoyées en tant que pièce jointe au format PDF d’un courriel. En outre, diverses études auraient démontré qu’il existait une étroite corrélation entre le fort développement de l’internet à haut débit et la substitution des envois électroniques aux envois postaux. La forte densité du raccordement à l’internet à haut débit en Autriche permettrait donc, également sur le plan technique, la substituabilité du courrier électronique aux envois postaux, notamment pour la partie la plus importante du courrier transactionnel, à savoir les factures. Cette substitution serait également démontrée par l’interaction entre le recul des envois postaux et la croissance des communications électroniques au niveau mondial et en Autriche ainsi que par les enquêtes et le test-MH effectués par la requérante. Différentes études parviendraient au même résultat.
46 En premier lieu, s’agissant de la prétendue violation de l’obligation de motivation, il y a lieu de rappeler, outre les exigences relatives à la motivation mentionnées au point 20 ci-dessus, que, si la Commission n’est pas obligée de discuter tous les points de fait et de droit ainsi que les considérations qui l’ont amenée à prendre une décision sur la définition du marché en cause, il n’en reste pas moins qu’elle est tenue, en vertu de l’article 296 TFUE, de mentionner, à tout le moins, les faits et les considérations revêtant une importance essentielle dans l’économie de sa décision (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 1998, European Night Services e.a./Commission, T‑374/94, T‑375/94, T‑384/94 et T‑388/94, Rec, EU:T:1998:198, point 95 et jurisprudence citée). L’auteur d’un acte n’est pas tenu de prendre position sur des éléments clairement secondaires ou d’anticiper des objections potentielles (voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2005, Allemagne et Danemark/Commission, C‑465/02 et C‑466/02, Rec, EU:C:2005:636, point 106 et jurisprudence citée).
47 En l’espèce, l’argumentation de la requérante ne démontre pas que la Commission a violé son obligation de motivation. En effet, s’il est exact que, au considérant 15 de la décision attaquée, la Commission a constaté que l’affirmation de la requérante selon laquelle le mode de distribution du courrier commercial était neutre sur le plan technologique, ce qui signifierait que les modes de distribution par voies électronique et postale appartenaient à un même marché, ne correspondait pas aux appréciations qu’elle avait portées dans ses décisions précédentes, il n’en demeure pas moins qu’elle a effectué d’autres constatations aux considérants 17 à 26 de la décision attaquée.
48 En effet, au considérant 17 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que, en vertu des règles de concurrence de l’Union, la substituabilité devait être analysée, notamment, sur la base des caractéristiques des produits, de leur prix et de leur usage prévu. Au considérant 18 de la décision attaquée, la Commission a constaté, en substance, que les caractéristiques et l’usage prévu des factures papier et des factures électroniques variaient considérablement parce que, d’une part, pour pouvoir envoyer ou recevoir une facture électronique, certaines infrastructures supplémentaires pourraient être nécessaires et, d’autre part, l’utilisation de la facturation électronique pourrait être associée à une série de services à valeur ajoutée et à d’autres avantages. À cet égard, elle a indiqué au considérant 19 de la décision attaquée qu’il existait des situations dans lesquelles les factures électroniques étaient devenues obligatoires de jure et de facto et que, dans ces cas, la question de la substituabilité ne se posait pas, les expéditeurs n’ayant pas la possibilité d’opter pour une distribution postale. Aux considérants 20 à 22 de la décision attaquée, la Commission a constaté, en contestant les résultats du test-MH effectué par la requérante et la présentation par cette dernière des graphiques relatifs à l’évolution des quantités et des prix, qu’aucune donnée certaine et concluante ne permettait de confirmer que la distribution électronique et la distribution postale étaient réellement substituables. Selon le considérant 23 de la décision attaquée, les clients, qu’il s’agisse d’entreprises ou de particuliers, qui ne sont pas en mesure de passer à la communication électronique ou qui ne sont pas disposés à le faire continueraient à représenter un marché segmenté, qui ne serait sans doute desservi que par la requérante, laquelle occuperait un quasi-monopole sur ce marché. Au considérant 24 de la décision attaquée, la Commission a constaté que la requérante pourrait répercuter les hausses de coûts sur les clients, qui, compte tenu de leur préférence intrinsèque pour la distribution postale, n’auraient d’autre choix que d’assumer la hausse de prix. Selon le considérant 26 de la décision attaquée, si l’une des principales conséquences d’une utilisation accrue des moyens de communications électroniques était la réduction de la taille globale du marché du courrier, il ne pouvait en être conclu que la communication électronique avait introduit une concurrence directe au sein du marché de la distribution postale.
49 Contrairement à ce qu’allègue la requérante, la Commission ne s’est donc pas bornée à constater que le fait que les modes de distribution postale et électronique appartenaient au même marché en cause ne correspondait pas aux appréciations qu’elle avait portées dans ses décisions précédentes. La décision attaquée expose en revanche de manière suffisante les raisons pour lesquelles la Commission a considéré que le marché de produits en cause était uniquement le marché des services postaux pour les lettres avec adresse B2X. Il ne saurait être conclu que cette motivation ne permet pas aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle.
50 Par ailleurs, il convient de constater que le degré de précision de la motivation d’une décision doit être proportionné aux possibilités matérielles et aux conditions techniques ou de délai dans lesquelles elle doit intervenir (voir arrêt du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C‑350/88, Rec, EU:C:1990:71, point 16 et jurisprudence citée). En l’espèce, il ressort du considérant 16 de la décision attaquée que, compte tenu de la situation juridique et factuelle en Autriche, les autorités autrichiennes ont été invitées à exprimer leur point de vue en ce qui concerne la substitution de la distribution électronique à la distribution postale et, plus précisément, la définition du marché de produits en cause, mais elles n’auraient pas pu fournir d’informations complémentaires pour appuyer les affirmations de la requérante. En outre, la Commission ne disposait que de pouvoirs limités et d’un délai court pour prendre une décision définitive (voir points 40 et 41 ci-dessus).
51 En second lieu, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas suffisamment examiné son argumentation ni les études ou les rapports d’expertise qu’elle a produits afin de définir le marché en cause.
52 À cet égard, premièrement, la requérante affirme que la Commission n’a pas pris en considération le fait que, sur le plan réglementaire, les factures postales et électroniques étaient assimilées. Selon la requérante, le fait que le mode de distribution du courrier d’affaires est technologiquement neutre a été pris en compte par le législateur européen et, par la suite, également par le législateur autrichien, en particulier dans le domaine de la facturation électronique, en ce que les factures transmises électroniquement seraient assimilées aux factures transmises par voie postale.
53 Il est vrai que la directive 2010/45/UE du Conseil, du 13 juillet 2010, modifiant la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne les règles de facturation (JO L 189, p. 1), a introduit des règles selon lesquelles, ainsi qu’il ressort du considérant 8 de la directive 2010/45, concernant les exigences imposées en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), les factures papier et les factures électroniques doivent être traitées de façon identique.
54 Toutefois, ce fait ne démontre pas que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en ne considérant pas que les modes de distribution postale et électronique étaient substituables. En effet, la requérante ne conteste pas, ainsi qu’il ressort du considérant 19 de la décision attaquée, que, depuis janvier 2014, la facturation électronique était devenue obligatoire de jure au niveau fédéral en Autriche dans les relations entre les entreprises et le gouvernement. Dans ce cas, la question de la substituabilité ne se posait donc pas, ainsi que la Commission l’a constaté à juste titre au considérant 19 de la décision attaquée. En outre, sur le plan réglementaire, les services postaux et non les services électroniques sont reconnus comme étant des services d’intérêt économique général au sens de l’article 14 TFUE, ainsi qu’il ressort du considérant 3 de la directive 2008/6/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 février 2008, modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne l’achèvement du marché intérieur des services postaux de la Communauté (JO L 52, p. 3). S’agissant, à cet égard, de l’argument de la requérante selon lequel les différentes possibilités de distribution de lettres sont discutées de manière exhaustive dans la directive 2008/6, il y a lieu de constater que la requérante fait uniquement référence aux considérants 14, 15, 19 et 22 de cette directive, qui mentionnent cependant de façon très générale les modes de distribution électroniques. De plus, en vertu de l’article 3 de la directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 décembre 1997, concernant les règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l’amélioration de la qualité du service (JO 1998, L 15, p. 14), c’est l’offre de services postaux qui a la qualité de service universel. Contrairement à ce qu’allègue la requérante, il ne saurait donc être conclu que, en règle générale, les factures postales et électroniques sont assimilées sur le plan réglementaire.
55 Deuxièmement, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas suffisamment tenu compte du fait que la substituabilité du courrier électronique aux envois postaux, qui serait assurée en Autriche, sur le plan technique, par la forte densité du raccordement à l’internet à haut débit, était démontrée par des données et des tendances macroéconomiques selon lesquelles il existait une interaction entre le recul des envois postaux et la croissance des communications électroniques. Selon la requérante, il ressort du point 2.3.2 de l’étude ACM que [confidentiel] % des entreprises de communication envoient des factures électroniques et que [confidentiel] % de ces entreprises reçoivent des factures électroniques. Le changement des conditions de marché au regard de la substitution électronique provoquerait une concurrence suffisante à laquelle la requérante serait exposée.
56 À cet égard, d’une part, il convient de relever que l’annexe I, section 3, de la décision 2005/15 contient les règles prévues pour définir un marché de produits en cause. Selon ces règles, un marché de produits en cause comprend tous les produits ou les services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables en raison de leurs caractéristiques, de leurs prix et de l’usage auquel ils sont destinés. En outre, l’annexe I, section 3, de la décision 2005/15 contient une liste non exhaustive de facteurs normalement considérés comme importants pour définir un marché de produits en cause qui sont à prendre en compte dans l’analyse. Ces facteurs sont le degré de similitude physique entre les produits ou les services en cause, toute différence dans l’usage final qui est fait des produits, les écarts de prix entre deux produits, le coût occasionné par le passage d’un produit à un autre s’il s’agit de deux produits potentiellement concurrents, les préférences établies ou ancrées des consommateurs pour un type ou une catégorie de produit et les classifications de produits (nomenclatures des associations professionnelles, etc.).
57 D’autre part, selon la jurisprudence, la notion de marché concerné implique qu’une concurrence effective puisse exister entre les produits qui en font partie, ce qui suppose un degré suffisant d’interchangeabilité en vue du même usage entre tous les produits faisant partie d’un même marché (voir, par analogie, arrêts du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche/Commission, 85/76, Rec, EU:C:1979:36, point 28, et du 30 janvier 2007, France Télécom/Commission, T‑340/03, Rec, EU:T:2007:22, point 80). L’interchangeabilité ou la substituabilité ne s’apprécie pas au seul regard des caractéristiques objectives des produits et des services en cause, mais il convient également de prendre en considération les conditions de la concurrence et la structure de la demande et de l’offre sur le marché (voir, par analogie, arrêt CEAHR/Commission, point 38 supra, EU:T:2010:517, point 67 et jurisprudence citée).
58 À supposer même qu’il existe, ainsi que l’allègue la requérante, une interaction entre le recul des envois postaux, d’une part, et la croissance des communications électroniques et une forte densité du raccordement à l’internet à haut débit en Autriche, d’autre part, ces faits ne démontrent aucunement que, à la lumière des critères prévus par la décision 2005/15 et par la jurisprudence citée au point 57 ci-dessus, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en ne considérant pas que des services électroniques étaient substituables aux services postaux en cause. En effet, il ressort du considérant 17 de la décision attaquée que la Commission a analysé la substituabilité, en vertu des règles de concurrence de l’Union, notamment, sur la base des caractéristiques des produits, de leur prix et de leur usage prévu. Au considérant 18 de la décision attaquée, la Commission a constaté, en réponse à l’affirmation de la requérante selon laquelle la pénétration de l’internet et du haut débit était très élevée en Autriche, qu’il apparaissait que les caractéristiques et l’usage prévu des factures papier et des factures électroniques variaient considérablement. Ces constatations ne sont pas remises en cause par l’existence éventuelle d’une interaction entre le recul des envois postaux, d’une part, et la croissance des communications électroniques et d’une grande densité du raccordement à l’internet à haut débit, d’autre part.
59 S’agissant de l’argumentation selon laquelle il ressort du point 2.3.2 de l’étude ACM que [confidentiel] % des entreprises de communication envoient des factures électroniques et que [confidentiel] % de ces entreprises reçoivent des factures électroniques, force est de constater que, selon le point 1.2 de cette étude, [confidentiel] % seulement de tous les acteurs interrogés ont considéré le courriel comme un substitut aux lettres, tandis que [confidentiel] % ont vu les lettres et les courriels à la fois comme des substituts et comme des compléments et que [confidentiel] % ont vu dans le courriel un complément aux lettres et non un substitut. Cette argumentation ne saurait donc démontrer l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation de la Commission relative à la définition du marché en cause. Par ailleurs, dans la mesure où la requérante fait valoir que la Commission n’a fait aucune distinction entre les différents types de factures, il y a lieu de relever, d’une part, que, au considérant 18 de la décision attaquée, la Commission a examiné plusieurs modes de facturation électronique et, d’autre part, que la requérante n’a pas démontré qu’elle avait, pendant la procédure administrative, effectué elle-même une telle distinction afin d’établir la substituabilité de la distribution électronique à la distribution postale. La présentation de la répartition du courrier en Autriche, figurant en annexe de sa demande, à laquelle la requérante fait référence, n’est pas suffisante à cet égard.
60 Troisièmement, dans la mesure où la requérante fait observer que la Commission n’a pas suffisamment tenu compte des résultats du test-MH qu’elle a fait effectuer, il y a lieu de constater que la Commission a examiné ces résultats au considérant 20 de la décision attaquée et qu’elle a rejeté ceux-ci en considérant que, même si ces résultats semblaient indiquer que le courrier papier et le courrier électronique appartenaient au même marché en cause, certains aspects techniques du modèle d’enquête faisaient douter de la validité des résultats. Le bien-fondé de ce rejet sera examiné ci-après dans le cadre de la troisième branche du présent moyen, tirée d’une interprétation prétendument erronée du test-MH et des données relatives à l’évolution des quantités et des prix découlant de l’analyse de choc ainsi que d’une violation de l’obligation de motivation.
61 Quatrièmement, la requérante fait valoir que les études commandées par la Commission elle-même concluent à une substituabilité des deux modes de distribution postale et électronique. Selon elle, l’étude de la société WIK-Consult, intitulée « Main developments in the postal sector (2010-2013) » [Développements principaux dans le secteur postal (2010-2013)] d’août 2013 (ci‑après l’« étude WIK 2013 »), expose expressément qu’il existe une substitution de la distribution électronique à la distribution postale physique et que, ainsi, une concurrence existe. L’étude de Nikali, intitulée « The substitution of letter mail in targeted communication » (La substitution du courrier postal en communication adressée) et l’étude de Copenhagen Economics, intitulée « Main developments in the postal sector (2008-2010) » [Développements principaux dans le secteur postal (2008-2010)], parviendraient à des résultats similaires.
62 À cet égard, d’une part, il convient de constater que, faute d’avoir produit ces études devant le Tribunal, la requérante ne saurait démontrer que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation relative à la définition du marché en cause. Le renvoi, dans les notes en bas de page nos 34 et 39 de la requête, à des sites Internet relatifs aux études de Nikali et de Copenhagen Economics ne saurait pallier l’absence de production de ces documents invoqués à l’appui du recours, conformément à l’article 43, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991. D’autre part, dans la mesure où une partie de l’étude WIK 2013 a été produite par la Commission, il convient de constater que cette étude voit dans la possibilité de distribution électronique un motif d’un éventuel recul de la demande sur les marchés postaux. Toutefois, cette étude constate également, en ce qui concerne l’état de la concurrence sur le marché du courrier postal, que l’intensité de la concurrence reste faible et que les prestataires traditionnels conservent une position dominante. Sur cette base, il ne saurait donc être conclu que la Commission a erronément constaté l’absence d’exposition directe à la concurrence des services postaux en cause.
63 Cinquièmement, dans la mesure où, à cet égard, la requérante fait valoir que la Commission a suivi une décision de l’autorité de la concurrence française dans laquelle la voix par le protocole de l’internet (VoIP) aurait été jugée substituable à la téléphonie fixe et donc comme appartenant au même marché, il y a lieu de constater qu’elle n’a fourni aucun élément permettant d’établir que cette décision était comparable au cas d’espèce. Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel, dans une circulaire d’information en matière de concurrence datant de mai 2014, la Commission aurait confirmé que la substitution électronique avait des effets directs sur le secteur postal, il suffit de constater qu’il est expressément indiqué dans cette circulaire que celle-ci ne lie pas la Commission. Enfin, contrairement à ce qu’allègue la requérante, le fait que, au sein de la Commission, l’unité compétente antérieurement dénommée « Services postaux » ait été renommée « Services en ligne et services postaux » ne permet aucunement d’établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation relative à la définition du marché en cause. Le fait qu’une unité au sein de la Commission soit dénommée « Services en lignes et services postaux » ne constitue pas un élément d’analyse du marché pertinent susceptible d’établir que ces services sont directement en concurrence.
64 Sixièmement, dans le cadre de l’argumentation selon laquelle la Commission n’a pas tenu compte de ce que l’adaptation du service universel aux conditions réelles du marché faisait l’objet de discussions, la requérante fait référence à un document de réflexion de l’autorité de régulation allemande datant de novembre 2014 et à un document de réflexion du European regulators group for postal services (groupement européen de régulateurs pour services postaux, EGRP) datant de septembre 2014. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la légalité d’un acte attaqué s’apprécie en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté (voir arrêts du 28 mars 2000, T. Port/Commission, T‑251/97, Rec, EU:T:2000:89, point 38 et jurisprudence citée, et du 10 avril 2008, Deutsche Telekom/Commission, T‑271/03, Rec, EU:T:2008:101, point 244 et jurisprudence citée). En l’espèce, il convenait donc, en principe, de se fonder sur le cadre réglementaire tel qu’il résultait des actes pertinents au moment de l’adoption de la décision attaquée. Étant donné que les documents de réflexion en cause sont postérieurs à l’adoption de la décision attaquée par la Commission le 2 avril 2014, il ne saurait être conclu que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation relative à la définition du marché en cause en ne tenant pas compte de ceux-ci. En outre, la requérante n’a pas démontré que, au moment de l’adoption de la décision attaquée, des projets de modifications futures du cadre réglementaire en cause existaient dans l’Union ou en Autriche.
65 Par ailleurs, dans la mesure où la requérante souligne à cet égard que, selon le considérant 40 de la directive 2004/17, il convenait de prendre en considération les effets d’une ouverture à la concurrence, actuelle ou future, il y a lieu de relever que, en vertu de l’article 30, paragraphe 1, de cette directive, les marchés concernés ne sont pas soumis à cette directive si, dans l’État membre où la prestation est fournie, elle est directement exposée à la concurrence, sur des marchés dont l’accès n’est pas limité. L’examen de l’exposition directe à la concurrence doit dès lors être effectué sur la base des éléments disponibles au moment de l’adoption de la décision mettant fin à la procédure prévue par l’article 30 de la directive 2004/17, une nouvelle demande conformément à cette procédure à l’avenir n’étant pas exclue.
66 La première branche doit donc être rejetée.
Sur la deuxième branche, tirée d’une appréciation erronée des prétendus obstacles à la substituabilité de la facturation électronique et de la facturation postale ainsi que de la situation du marché
67 La requérante fait valoir, en faisant référence à l’étude ACM, que la Commission a commis des erreurs en ce qu’elle aurait constaté, aux considérants 18 et 19 de la décision attaquée, des obstacles à la substituabilité de la facturation électronique et de la facturation postale et que son appréciation de la situation du marché est erronée.
68 Il convient de relever que, au considérant 18 de la décision attaquée, la Commission a considéré, en substance, que les caractéristiques et l’usage prévu des factures papier et des factures électroniques variaient considérablement parce que, d’une part, pour pouvoir envoyer ou recevoir une facture électronique, par exemple, qui permettrait un traitement automatique, certaines infrastructures supplémentaires pourraient être nécessaires, notamment dans le cas des factures électroniques B2B. Ces infrastructures pourraient supposer le recours à un prestataire de services externe ou à une application interne spéciale, l’utilisation d’une signature électronique, etc. D’autre part, l’utilisation de la facturation électronique pourrait être associée à une série de services à valeur ajoutée et à d’autres avantages permettant, par exemple, un traitement automatisé et le financement des paiements par des tiers. Au considérant 19 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que, depuis janvier 2014, la facturation électronique était devenue obligatoire de jure au niveau fédéral dans les relations d’entreprises à gouvernement et que, dans ce cas, la question de la substituabilité ne se posait pas, les expéditeurs n’ayant pas la possibilité d’opter pour une distribution postale. En outre, il existerait d’autres situations similaires dans lesquelles les factures électroniques seraient devenues obligatoires de facto à la suite d’une demande importante de la part des consommateurs ou des fournisseurs.
69 En premier lieu, s’agissant des constatations de la Commission figurant au considérant 18 de la décision attaquée, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas tenu compte du fait que la grande majorité des factures envoyées électroniquement seraient des courriels avec pièce jointe au format PDF, qui n’auraient aucune caractéristique ni aucun usage allant au-delà de ceux d’une facture envoyée par voie postale sous la forme papier.
70 À cet égard, il y a lieu de constater qu’il ressort du point 2.3.2 de l’étude ACM, auquel la Commission a fait référence dans la note en bas de page n° 14 de la décision attaquée insérée au considérant 18 de cette décision, qu’il existe différents modèles de facturation électronique qui se distinguent selon leur niveau d’automatisation. Selon cette étude, il existe, d’une part, des processus semi‑automatisés au moyen de l’internet utilisant des factures PDF, des portails internet ou un prestataire de services et, d’autre part, une facturation électronique automatisée de bout en bout en tant que processus, de l’ordre au paiement entièrement intégré. Il ressort de cette étude que, si le processus semi-automatisé au moyen de l’internet utilisant des factures PDF est le format de communication préféré dans des relations B2C, des portails internet ont également déjà été utilisés par une grande partie des entreprises utilisant une facturation électronique et des prestataires de services sont utilisés notamment pour la facturation électronique B2B au niveau européen. À cet égard, l’étude ACM précise qu’il existe des prestataires de services sécurisant l’originalité d’un document en utilisant une signature électronique. En outre, selon l’étude ACM, afin de recevoir et d’envoyer des factures électroniques, des entreprises utilisent des solutions d’un prestataire de services externe ou une application interne spécialisée, programmée pour ceux‑ci.
71 Au vu de ces constatations figurant dans l’étude ACM que la requérante a transmise à la Commission, il ne saurait être conclu que la Commission a erronément constaté, au considérant 18 de la décision attaquée, que, pour pouvoir envoyer ou recevoir une facture électronique, certaines infrastructures supplémentaires pouvaient être nécessaires et que l’utilisation de la facturation électronique pourrait être associée à une série de services à valeur ajoutée et autres avantages.
72 En second lieu, s’agissant des constatations de la Commission figurant au considérant 19 de la décision attaquée, la requérante fait valoir que la part de marché des factures envoyées au niveau fédéral dans les relations d’entreprises à gouvernement ne représente que [confidentiel] % et qu’elle peut donc être laissée de côté dans l’appréciation de la délimitation du marché en cause. En outre, il ne serait pas approprié ni conforme aux décisions antérieures de la Commission de tenir compte des situations dans lesquelles les factures électroniques seraient devenues obligatoires de facto. De plus, la Commission n’aurait exposé en aucune manière quelle serait la part de marché concernée ni quels effets cela aurait sur la délimitation du marché en cause.
73 À cet égard, premièrement, il convient de relever que, même si les factures envoyées au niveau fédéral dans les relations d’entreprises à gouvernement peuvent être considérées comme étant négligeables en raison de leur faible quantité, il n’en demeure pas moins que la Commission pouvait, sans commettre une erreur à cet égard, considérer qu’il existait une telle facturation pour laquelle la question de la substituabilité ne se posait pas.
74 Deuxièmement, dans la mesure où la Commission a considéré que d’autres situations similaires existaient dans lesquelles les factures électroniques étaient devenues obligatoires de facto à la suite d’une demande importante de la part des consommateurs ou des fournisseurs, il convient de constater que, dans la note en bas de page n° 15 de la décision attaquée insérée au considérant 19 de cette décision, elle a fait référence au point 2.3.2 de l’étude ACM. Il ressort de cette étude que le choix des entreprises relatif au mode de facturation dépend notamment de l’échange interentreprises, de l’expérience à travers le réseau de fournisseurs ou de la demande des clients. Selon l’étude ACM, les raisons économiques pour lesquelles la facturation électronique est utilisée dépendent principalement des forces de marché extérieures, à savoir d’une demande importante de la part des clients ou des fournisseurs ou d’une initiative gouvernementale la rendant obligatoire.
75 Eu égard à ce renvoi à l’étude ACM, la situation de facto à laquelle la Commission s’est référée ressort à suffisance de droit de la décision attaquée. S’agissant de la part de marché concernée par cette situation, il convient de rappeler que, au vu des pouvoirs d’enquête limités de la Commission dans le cadre de la procédure visée à l’article 30 de la directive 2004/17 et du fait que la charge de la preuve incombe à la requérante (voir points 40 et 41 ci-dessus), il ne saurait être exigé que la Commission aille au-delà des constatations effectuées par la requérante dans la demande. À cet égard, il convient également de relever qu’il ressort du considérant 16 de la décision attaquée que les autorités autrichiennes n’ont pas pu fournir d’informations complémentaires pour appuyer les affirmations de la requérante (voir point 50 ci-dessus). En ce qui concerne les effets de cette situation de facto sur la délimitation du marché en cause, il ressort du considérant 30 de la décision attaquée, selon lequel la Commission a défini le marché de produits en cause notamment sur la base des informations mentionnées au considérant 19 de cette décision, que cet aspect est un élément qui a été pris en compte par la Commission afin de définir le marché en cause. En outre, rien ne permet de considérer que les critères prévus pour définir le marché en cause (voir points 56 et 57 ci-dessus) excluent la prise en compte d’une situation de facto. Enfin, dans la mesure où la requérante fait valoir que cette prise en compte n’est pas conforme aux décisions antérieures de la Commission, outre le fait que la requérante ne fournit aucune indication quant aux décisions de la Commission qui seraient de nature à étayer son argumentation, elle n’avance aucun argument susceptible de démontrer que la Commission était liée, en l’espèce, par sa propre pratique décisionnelle. Cette argumentation ne saurait donc être accueillie.
76 Par conséquent, la deuxième branche doit être rejetée.
Sur la troisième branche, tirée d’une interprétation erronée du test-MH et des données relatives à l’évolution des quantités et des prix découlant de l’analyse de choc ainsi que d’une violation de l’obligation de motivation
77 Cette branche est composée de deux griefs. Le premier concerne l’appréciation du test-MH que la requérante a fait effectuer au soutien de sa demande. Le second grief est tiré d’une interprétation erronée des données relatives à l’évolution des quantités et des prix découlant de l’analyse de choc fournies par la requérante.
– Sur le premier grief, tiré d’une interprétation erronée du test-MH et d’une violation de l’obligation de motivation
78 La requérante fait valoir que, au considérant 20 de la décision attaquée, la Commission a, d’une part, interprété de manière erronée le test-MH qu’elle a fait effectuer en ce qui concerne le marché des lettres avec adresse B2X au niveau national et qui démontrerait que la distribution postale et la distribution électronique appartiennent au même marché et, d’autre part, violé son obligation de motivation.
79 Il ressort du dossier que l’enquête comportant le test-MH, qui fait partie de l’étude ACM, a été effectuée auprès de 451 entreprises et qu’elle comportait deux types différents de questions. D’une part, par une série de questions directes, les entreprises ont été interrogées sur leur pratique en matière de traitement du courrier commercial. La question centrale était de savoir si ces entreprises enverraient leurs lettres par voie électronique si le prix de l’affranchissement d’une lettre passait de 62 à 65,1 centimes. Les entreprises devaient choisir parmi sept réponses différentes, à savoir pas de changement, changement total ou changement concernant 10, 20, 30, 50 ou 75 % de toutes les lettres. D’autre part, des questions indirectes qui ne portaient pas directement sur la réaction à des hausses de prix étaient posées. Les entreprises devaient indiquer parmi deux services différents définis par une série de caractéristiques lequel elles choisiraient.
80 La Commission a indiqué au considérant 20 de la décision attaquée ce qui suit :
« Le demandeur a effectué un [test-MH] au moyen de données d’enquête recueillies auprès de 451 entreprises autrichiennes. L’enquête incluait un ensemble de questions indirectes visant à déterminer les préférences pour le courrier papier ou le courrier électronique au moyen de techniques d’analyse conjointe. Les résultats indiqueraient qu’une augmentation de 5 % du prix d’affranchissement entraînerait une baisse de [confidentiel] % de la demande d’envoi de courrier. Même si ces résultats semblent indiquer que le courrier papier et le courrier électronique appartiennent au même marché en cause, certains aspects techniques du modèle d’enquête font douter de la validité des résultats. Par exemple, l’ensemble de caractéristiques pour définir les produits a été choisi d’une manière susceptible d’induire une certaine distorsion en faveur des moyens de communication électroniques. Les hypothèses controversées ne semblent pas être utilisées dans la littérature économique pertinente appliquant la technique de l’analyse conjointe, et il n’est pas possible de mesurer leur impact sur la baisse estimée de [confidentiel] %. »
81 En premier lieu, la requérante affirme que la Commission a violé son obligation de motivation en ce qu’elle n’aurait pas exposé la raison pour laquelle, selon elle, une certaine distorsion en faveur des moyens de communication électroniques intervenait et en quoi consistaient les hypothèses controversées dans la littérature économique.
82 À cet égard, s’agissant des motifs figurant dans la décision attaquée sur la base desquels la Commission a constaté une certaine distorsion en faveur des moyens de communication électroniques, il convient de relever que la Commission a indiqué au considérant 20 de la décision attaquée que, par exemple, c’est la manière dont avait été choisi l’ensemble des caractéristiques pour définir les produits qui l’avait amenée à effectuer une telle constatation. En ce qui concerne les hypothèses controversées, il ressort du considérant 20 de la décision attaquée qu’il s’agissait de celles mentionnées dans l’enquête en cause et non des hypothèses controversées dans la littérature économique.
83 Il est vrai que le manque de précision, dans la décision attaquée, des critiques de la Commission quant aux résultats du test-MH peut paraître regrettable. Toutefois, compte tenu du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée, caractérisé notamment par un délai déterminé pour adopter une décision définitive (voir point 40 ci-dessus), la Commission n’a pas manqué, en l’occurrence, à son obligation de motiver de manière suffisante la décision attaquée, conformément aux exigences de la jurisprudence exposées aux points 20 et 46 ci-dessus. Il serait à cet égard excessif d’exiger une description détaillée des critiques relatives à chaque caractéristique choisie dans l’enquête en cause ou relatives à chaque hypothèse controversée mentionnée dans celle-ci. Tel est d’autant plus le cas que la requérante a été étroitement impliquée dans la procédure administrative (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, Rec, EU:C:2008:392, points 179 et 180 et jurisprudence citée). En effet, il ressort du dossier que, après avoir produit le 2 décembre 2013 les questionnaires sur lesquelles l’enquête en cause était fondée, l’expert engagé par la requérante responsable de cette enquête a eu une réunion avec les services de la Commission le 6 mars 2014. Ensuite, le jour suivant, la Commission a envoyé le projet de décision à cet expert et en a discuté avec lui lors d’une réunion qui s’est tenue le 28 mars 2014. Le projet de décision examiné lors de la réunion du 28 mars 2014, qui a été produit par la Commission à la suite des mesures d’organisation de la procédure ordonnées par le Tribunal (voir point 12 ci-dessus), comportait déjà le texte du considérant 20 de la décision attaquée.
84 Par ailleurs, il convient de constater que tant les critiques formulées par la Commission relatives au choix des caractéristiques pour définir les produits que celles relatives aux hypothèses controversées concernent la partie de l’enquête en cause relative aux questions indirectes. Le fait que la requérante a affirmé, dans sa requête, que la Commission a, au considérant 20 de la décision attaquée, seulement analysé les questions indirectes et non les questions directes est un indice supplémentaire permettant de constater que le raisonnement de la Commission était connu de la requérante.
85 En second lieu, la requérante reproche à la Commission d’avoir interprété de manière erronée le test-MH et de ne pas avoir présenté de rapports d’expertise ou d’enquêtes susceptibles de réfuter ses enquêtes. Selon la requérante, bien que le test-MH englobe des questions directes et indirectes, la Commission n’a pas analysé les questions directes posées aux clients qui joueraient un rôle important. En faisant référence à la pratique de la Commission ainsi qu’à la communication sur la définition du marché, la requérante affirme que la Commission utilise habituellement les études de marketing mises à sa disposition par les entreprises concernées en tant que preuve de la délimitation du marché, ce qu’elle n’aurait pas fait en l’espèce. Les résultats de l’enquête auprès des clients portant sur une question directe démontreraient que [confidentiel] % des entreprises interrogées substitueraient, en cas de hausse minime des prix, totalement ou partiellement, leurs envois de lettres par voie postale par un envoi électronique et que [confidentiel] % des entreprises interrogées continueraient à effectuer des envois postaux. Ces résultats correspondraient à ceux d’une autre étude effectuée en 2012 concernant l’Autriche. En outre, selon les données de la requérante, même si les prix restaient les mêmes, [confidentiel] % des entreprises interrogées avaient l’intention à l’avenir d’envoyer leurs factures électroniquement. La Commission n’aurait pas tenu compte du fait qu’une telle disposition à remplacer les services postaux par des services électroniques en cas d’augmentation du prix des frais de port existerait également au Royaume-Uni et en Allemagne, ainsi qu’il ressortirait des données récoltées par l’autorité de régulation de la poste au Royaume-Uni et de l’étude de la société WIK-Consult, intitulée « Nachfrage nach Postdienstleistungen von Geschäftskunden » (Demande aux services postaux par des clients professionnels) de 2009 (ci-après l’« étude WIK 2009 »). S’agissant des reproches de la Commission relatifs aux questions indirectes, la requérante fait valoir que ces questions ont été posées, en utilisant une technique d’enquête reconnue, afin d’approfondir l’analyse de la situation. Conformément à la communication sur la définition du marché, tous les produits perçus comme substituables par le consommateur auraient été inclus dans l’enquête auprès des clients et il n’y aurait donc pas eu de distorsion en faveur des moyens de communication électroniques.
86 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler (voir points 38 à 41 ci-dessus) que, d’une part, afin de définir le marché en cause, la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation qui ne saurait faire l’objet que d’un contrôle restreint de la part du juge de l’Union et que, d’autre part, la charge de la preuve pour définir le marché en cause incombe à la requérante.
87 Premièrement, il convient de relever que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la Commission ne conteste pas qu’un test-MH puisse servir pour examiner la substituabilité des produits ou des services. En effet, la Commission a indiqué avoir appliqué la méthode relative à la délimitation du marché telle que prévue dans la communication sur la définition du marché (voir point 33 ci‑dessus). Il est constant que le test-MH fait, en principe, partie des méthodes prévues par cette communication. Selon le point 15 de ladite communication, une façon de procéder à la détermination de l’éventail des produits perçus comme substituables par le consommateur peut être envisagée comme un exercice mental présupposant une variation légère, mais durable, des prix relatifs et évaluant les réactions probables des clients. Il ressort du point 17 de cette communication que la question posée était de savoir si les clients des parties se tourneraient vers des produits de substitution facilement accessibles ou vers des fournisseurs implantés ailleurs, en cas d’augmentation légère de 5 à 10 %, mais permanente, des prix relatifs des produits considérés dans les territoires concernés. Si la substitution suffit, en raison du recul des ventes qui en découlerait, à ôter tout intérêt à une augmentation de prix, des produits de substitution et des territoires supplémentaires sont intégrés dans le marché en cause. Conformément aux points 39 à 41 de ladite communication, des tests quantitatifs qui s’inscrivent dans le cadre de diverses approches économétriques et statistiques (par exemple l’estimation des élasticités de la demande d’un produit, des enquêtes pour connaître le point de vue des clients et des concurrents ou des études de marché communiquées par les parties) peuvent être des éléments pertinents pour l’appréciation de la substituabilité de deux produits du point de vue de la demande.
88 À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort de la note en bas de page n° 7 de la décision 2005/15 que, quand elle définit le marché en cause, la Commission prend seulement en considération les produits aisément substituables aux produits considérés. Les produits aisément substituables sont ceux vers lesquels les consommateurs se tourneraient en réponse à une augmentation, modeste mais significative, du prix du produit considéré, par exemple de 5 %. Selon cette note en bas de page, cela permet à la Commission d’apprécier l’état de la concurrence dans le contexte d’un marché en cause constitué de tous les produits vers lesquels les consommateurs des produits considérés se tourneraient facilement. Toujours selon ladite note en bas de page, cependant, cela ne signifie pas que la Commission omet de prendre en considération les contraintes, sur le comportement concurrentiel des entités concernées, résultant de l’existence de produits de remplacement imparfaits, à savoir ceux vers lesquels un consommateur ne se tournerait pas en réponse à une augmentation, modeste mais significative, du prix du produit considéré, par exemple de 5 %. Ces effets seraient pris en considération une fois que le marché a été défini et les parts de marché déterminées.
89 Deuxièmement, s’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission n’a pas présenté de rapports d’expertise ou d’enquêtes susceptibles de réfuter ses enquêtes, il suffit de rappeler que la charge de prouver que les conditions prévues à l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 sont satisfaites incombe au demandeur et à l’État membre concerné (voir point 41 ci‑dessus). Il n’incombait donc pas à la Commission d’effectuer ses propres études.
90 Troisièmement, en ce qui concerne l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission n’aurait pas analysé les questions directes de l’enquête, celle-ci doit également être rejetée. Le fait que, au considérant 20 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que l’enquête en cause incluait un ensemble de questions indirectes et qu’elle n’a expressément mentionné en tant qu’exemples que des critiques relatives à la conception des questions indirectes de l’enquête ne saurait impliquer qu’elle n’a pas analysé les questions directes de celle-ci. En effet, d’une part, le terme « incluait » n’exclut pas que, outre les questions indirectes, d’autres questions aient également fait partie de l’enquête en cause, la Commission ayant d’ailleurs expressément demandé à l’expert chargé par la requérante de réaliser cette enquête les questionnaires relatifs à cette dernière comportant des questions directes et indirectes. D’autre part, le libellé du considérant 20 de la décision attaquée contenant des critiques quant à certains aspects techniques du modèle d’enquête en tant que tel, il ne saurait être conclu que ces critiques ne concernent que la partie relative aux questions indirectes de l’enquête.
91 Quatrièmement, la requérante fait valoir que la Commission a erronément apprécié les résultats obtenus grâce à la question directe centrale posée dans le cadre de l’enquête en cause, par laquelle les entreprises interrogées ont été invitées à indiquer si elles enverraient leurs lettres par voie électronique si le prix de l’affranchissement d’une lettre passait de 62 à 65,1 centimes.
92 Ainsi qu’il a déjà été constaté (voir point 79 ci-dessus), en réponse à cette question, les entreprises devaient choisir parmi sept réponses différentes, à savoir pas de changement, changement total ou changement concernant 10, 20, 30, 50 ou 75 % de toutes les lettres. Au considérant 20 de la décision attaquée, la Commission s’est limitée à énoncer à cet égard que, même si les résultats de l’enquête en cause semblaient indiquer que le courrier papier et le courrier électronique appartenaient au même marché en cause, certains aspects techniques du modèle d’enquête faisaient douter de la validité des résultats. Dans son mémoire en défense, la Commission a précisé que le fait que les entreprises interrogées devaient indiquer, pour autant qu’elles envisageaient de passer de la distribution postale à la distribution électronique, un pourcentage minimum de 10 % du volume de leur courrier pouvait aboutir à surestimer l’ampleur de la propension à opérer une conversion en cas de hausse de prix. En outre, la Commission a ajouté, dans son mémoire en défense, que l’ensemble de l’enquête présentait une importante distorsion quant à la taille des entreprises interrogées en comparaison avec la répartition de la taille des entreprises dans l’économie autrichienne.
93 D’une part, en réponse à la critique de la Commission quant au fait que le choix d’un pourcentage minimal de 10 % de volume de courrier pouvait aboutir à une surestimation, la requérante réplique que le choix du pourcentage dans l’enquête était lié au volume d’envoi et que ce dernier était lié aux conditions du marché. Selon la requérante, les clients qui choisissent l’envoi électronique de lettres n’envoient électroniquement pas seulement une lettre, mais un pourcentage déterminé de leurs volumes d’envoi. En outre, il ressortirait des résultats de l’étude ACM que [confidentiel] % des entreprises interrogées envoient 100 à 1 000 lettres, factures comprises, par mois. Ainsi, 5 % de ce volume d’envoi correspondrait seulement à un total de 5 à 50 lettres par mois. Un volume d’envoi de 10 % correspondrait donc à au moins 10 à 100 lettres et représenterait mieux les conditions du marché. De plus, sur la base des résultats d’autres études de test‑MH effectuées au Royaume-Uni et en Allemagne, il serait apparu que des migrations massives pouvaient être observées en cas de hausse de prix. Selon la requérante, le choix d’un seuil de 10 % était donc déjà une estimation prudente. La requérante affirme que, si elle avait permis le choix d’un seuil de 5 % pour la reconversion minimale, la propension à se tourner vers la distribution électronique aurait même été plus importante. Enfin, l’analyse des résultats de l’enquête n’aurait pas été effectuée en corrélation avec le volume des envois, mais avec le nombre d’entreprises interrogées. En corrélation avec le volume des envois, le recul en cas d’augmentation hypothétique de 5 % aurait même été plus important.
94 Cette argumentation ne démontre pourtant pas que l’appréciation de la Commission, figurant au considérant 20 de la décision attaquée, selon laquelle certains aspects techniques du modèle d’enquête font douter de la validité des résultats, est erronée.
95 En effet, ainsi que l’affirme la Commission, le renvoi au nombre de lettres envoyées par les entreprises interrogées n’étaye pas l’allégation de la requérante selon laquelle un pourcentage minimal de 10 % aurait mieux reflété la réalité du marché, d’autant plus qu’il ressort du point 3.4.1 de l’étude ACM que [confidentiel] % des entreprises interrogées envoyaient 1 000 lettres ou plus par mois, à savoir [confidentiel] % 1 000 à 2 499 lettres, [confidentiel] % 2 500 à 4 999 lettres, [confidentiel] % 5 000 à 9 999 lettres et [confidentiel] % plus de 10 000 lettres. S’agissant des résultats des études effectuées au Royaume-Uni et en Allemagne, ainsi que l’affirme la Commission, outre le fait que celles-ci ne concernent pas le marché autrichien et qu’elles ne sont donc, contrairement à ce qu’allègue la requérante, pas pertinentes afin de définir le marché en cause, il ressort du point 3.4.1 de l’étude ACM que ces études portaient sur la question de savoir si les entreprises en cause étaient tout à fait ou plutôt enclines à passer à l’envoi électronique en cas d’augmentation de prix et ne concernaient donc pas la question de l’ampleur d’un tel changement. En outre, s’agissant de l’étude effectuée en Allemagne, à savoir l’étude WIK 2009, il ressort de celle-ci que le résultat de l’enquête effectuée dans le cadre de cette étude a été interprété en ce sens que les entreprises, en cas d’augmentation des prix des lettres, ont plus tendance à changer de prestataire qu’à recourir davantage à l’envoi électronique.
96 Dans la mesure où la requérante fait valoir que, si elle avait permis de choisir un seuil de 5 % pour la reconversion minimale, la propension à se reporter sur la distribution électronique aurait même été plus importante, il y a lieu de constater que cette argumentation n’a aucunement été étayée et doit donc être rejetée comme étant non fondée. En outre, il convient de relever que, à supposer même que l’argumentation en question soit admise, le niveau que cette propension aurait pu atteindre ne ressort aucunement du dossier. Il en va de même de l’argument de la requérante selon lequel le recul de la distribution postale aurait été encore plus important si l’analyse des résultats de l’enquête avait été effectuée en corrélation avec le volume des envois.
97 D’autre part, en réponse à la critique de la Commission quant au fait que, selon elle, l’ensemble de l’enquête présentait une importante distorsion relative à la taille des entreprises interrogées en comparaison avec la répartition selon la taille des entreprises dans l’économie autrichienne, la requérante réplique que les entreprises interrogées étaient représentatives des conditions réelles du marché et des volumes d’envoi sur le marché de la distribution de lettres. Elle souligne qu’il ressort de l’étude ACM que ce sont avant tout les grandes entreprises qui procèdent à des envois de courrier, les petites entreprises procédant à des volumes d’envoi inférieurs. Selon la requérante, si l’enquête avait été menée en tenant compte de la répartition selon la taille des entreprises dans l’économie, cela aurait eu pour conséquence de fausser plus fortement la réalité du marché. La requérante aurait dans son fichier des clients professionnels 5 641 clients, et 160 d’entre eux enverraient par an des lettres correspondant à [confidentiel] % de son volume total d’envoi. Eu égard aux conditions réelles du marché, il serait correct d’interroger les entreprises qui génèrent un volume d’envoi idoine et non celles qui ne jouent aucun rôle sur le marché. Au total, 57 des 160 clients professionnels clés de la requérante auraient pris part à l’enquête correspondant à un volume estimé de [confidentiel] % du volume d’envoi de l’ensemble de ses clients professionnels. En outre, la requérante aurait englobé dans l’enquête les petites entreprises expédiant moins de 100 envois par mois, qui n’atteindraient qu’une part de [confidentiel] % du volume d’envoi, à hauteur de 8,4 %, parce que sa banque de données n’engloberait pas les expéditeurs postaux qui déposent eux-mêmes leurs lettres dans une filiale de la poste. L’enquête constituerait donc une représentation complète des conditions du marché. Par ailleurs, la requérante fait valoir qu’il se peut que les grandes entreprises soient plutôt enclines à se tourner vers l’envoi électronique. Selon elle, toutefois, même si seul un petit nombre de ses gros clients professionnels se tourne vers l’envoi électronique, cela serait susceptible d’engendrer des coûts d’infrastructure du réseau potentiellement répercutés sur le reste des expéditeurs, ce qui pourrait amener ces expéditeurs à se tourner eux aussi vers la distribution électronique.
98 Cette argumentation ne démontre pas que l’appréciation de la Commission figurant au considérant 20 de la décision attaquée, selon laquelle certains aspects techniques du modèle d’enquête font douter de la validité des résultats, est erronée.
99 En effet, étant donné que la requérante détenait une part de marché d’environ [confidentiel] % sur le marché des services postaux de lettres avec adresse B2X national, ce qui est constant, force est de constater que presque toutes les entreprises autrichiennes étaient des clients de la requérante. Ainsi que l’affirme la Commission, dès lors que la requérante juge elle-même plausible que les entreprises d’une certaine taille soient plutôt enclines à la substitution électronique, le fait que l’enquête se concentre sur les grandes entreprises comporte le risque que celle-ci ne reflète pas de manière appropriée les souhaits des petites et moyennes entreprises clientes. En ce qui concerne, à cet égard, l’allégation de la requérante selon laquelle, même si seul un petit nombre de ses gros clients professionnels se tourne vers l’envoi électronique, cela serait susceptible d’engendrer des coûts d’infrastructure du réseau potentiellement répercutés sur le reste des expéditeurs, celle-ci doit être rejetée comme non étayée. En effet, la requérante indique elle-même que ses prix sont strictement régulés et que, par conséquent, une augmentation des prix n’est possible qu’avec l’autorisation de l’autorité de régulation.
100 En outre, ainsi que l’affirme la Commission, à supposer même que le volume d’envoi du courrier des entreprises interrogées soit le bon critère, il n’apparaît pas que l’enquête réalisée auprès des entreprises interrogées ait tenu compte des rapports de taille. En effet, il ressort des statistiques autrichiennes produites par la Commission qu’il y avait en Autriche environ 311 000 entreprises en 2011. Ainsi qu’il a déjà été constaté (voir point 99 ci-dessus), presque toutes ces entreprises étaient des clients de la requérante. Au vu de ce qui précède, la requérante ne saurait, sans fournir aucune explication à cet égard, affirmer que la prise en compte des 5 641 clients inscrits dans son fichier garantissait un choix représentatif des entreprises interrogées par rapport au volume d’envoi du courrier. Au contraire, le choix des seules entreprises inscrites dans le fichier des clients professionnels de la requérante est susceptible d’accorder plus de poids aux entreprises ayant un grand volume d’envoi de courrier, puisqu’il est permis de penser que les entreprises ayant un petit volume d’envoi de courrier ont moins d’intérêt à être inscrites dans ledit fichier. De plus, tandis qu’il ressort du point 3.4.1 de l’étude ACM que [confidentiel] % des entreprises interrogées avaient un volume de courrier supérieur à 10 000 envois par mois, la requérante a indiqué, dans sa réplique, que seulement [confidentiel] % de ces 5 641 clients avaient un tel volume. Par ailleurs, les grandes entreprises parmi les 451 entreprises interrogées dans l’enquête ont fortement été favorisées également dans la mesure où, selon la requérante, 57 des 160 grandes entreprises de son fichier clients ont participé à l’enquête et dès lors que, sur les 5 481 entreprises restantes, seules 394 ont participé. Ainsi que l’affirme la Commission, la requérante n’a pas non plus démontré que les petites entreprises qui expédient moins de 100 lettres par mois ont été surreprésentées dans l’enquête, contrairement à ce qu’elle l’a affirmé. En effet, tandis que, selon la requérante, [confidentiel] % des 5 461 clients de son fichier étaient des petites entreprises, dans l’enquête en cause, ce segment représentait seulement [confidentiel] % des entreprises interrogées.
101 Dans la mesure où la requérante fait valoir, à cet égard, que les résultats du test-MH correspondaient à ceux d’une autre étude effectuée en 2012 concernant l’Autriche, faute d’avoir établi un tel fait en l’absence de production de cette étude, cette argumentation doit être rejetée comme non fondée.
102 Cinquièmement, la requérante fait valoir qu’il ressort de l’enquête menée que [confidentiel] % de ses clients prévoyaient à l’avenir, même si les prix restaient les mêmes, de remplacer la distribution postale de leurs lettres par une distribution électronique. Cette argumentation doit être rejetée. En effet, il convient de relever qu’un tel résultat, au demeurant très général, était entaché des mêmes défauts techniques que ceux entachant les résultats obtenus en réponse à la question directe centrale relative au test-MH.
103 Sixièmement, la requérante fait valoir que les questions indirectes ont été posées, en utilisant une technique d’enquête reconnue, afin d’approfondir l’analyse de la situation. Conformément à la communication sur la définition du marché, tous les produits perçus comme substituables par le consommateur auraient été inclus dans l’enquête auprès des clients et il n’y aurait donc pas eu de distorsion en faveur des moyens de communication électroniques.
104 Ainsi qu’il a déjà été constaté (voir point 79 ci-dessus), il ressort du dossier que l’enquête comportant le test-MH incluait également des questions indirectes. Par ces questions qui ne portaient pas directement sur leur réaction face à des hausses de prix, les entreprises devaient indiquer parmi deux services différents définis par une série de caractéristiques lequel elles choisiraient. Au considérant 20 de la décision attaquée, la Commission a énoncé à cet égard que, même si les résultats de l’enquête en cause semblaient indiquer que le courrier papier et le courrier électronique appartenaient au même marché en cause, certains aspects techniques du modèle d’enquête faisaient douter de la validité des résultats. Selon elle, par exemple, l’ensemble des caractéristiques pour définir les produits a été choisi d’une manière susceptible d’induire une certaine distorsion en faveur des moyens de communication électroniques. Dans son mémoire en défense, la Commission a précisé que les questions indirectes posées aux clients étaient organisées sous forme de « paquets » comportant, outre le choix entre la distribution électronique et la distribution postale, des aspects subjectifs faisant appel à une appréciation, par exemple, relative à la protection de l’environnement, aux exigences légales ou à la sécurité. Ce mode d’interrogation comporterait le risque d’astreindre en vérité l’entreprise interrogée à exprimer une préférence donnée. En outre, il serait manifeste que toute une série de ces éléments appréciatifs étaient formulés de telle sorte qu’ils privilégiaient la distribution électronique.
105 La requérante conteste ces reproches et fait valoir que de nombreuses études mentionnées au point 2.3.2 de l’étude ACM établissent que, en plus du prix, les expéditeurs tiennent compte, pour prendre leur décision, d’autres préférences. Sur la base des résultats de ces études, des considérations liées à l’environnement, à la sécurité et aux exigences légales constitueraient des préférences empiriquement démontrées. Il serait conforme à la méthode habituelle et scientifiquement reconnue d’intégrer ces préférences dans l’enquête. Selon la requérante, les différentes préférences de l’expéditeur ont été prises en compte de manière équilibrée dans l’enquête.
106 Cette argumentation ne démontre pas que l’appréciation de la Commission relative aux aspects techniques du modèle d’enquête est erronée. Il n’apparaît pas que la Commission ait commis des erreurs en considérant que l’organisation des questions indirectes sous forme de « paquets » comportant, outre le choix entre la distribution électronique et la distribution postale, des aspects subjectifs faisant appel à une appréciation était susceptible de falsifier les résultats de l’enquête. En effet, ainsi que l’affirme la Commission, la prise en compte de tels aspects subjectifs a pu empêcher les entreprises interrogées d’exprimer leur vraie préférence pour la distribution électronique ou la distribution postale. S’il est vrai que d’autres études citées au point 2.3.2 de l’étude ACM ont indiqué parmi les aspects en faveur d’une distribution électronique également d’autres préférences des entreprises, il n’en demeure pas moins qu’il ne ressort pas de l’étude ACM que ces différentes préférences ont déjà été utilisées de la même manière dans la littérature économique pertinente appliquant la technique de l’analyse conjointe, ainsi que la Commission l’a constaté au considérant 20 de la décision attaquée. En outre, en se bornant à affirmer que ces différentes préférences ont été prises en compte de manière équilibrée dans l’étude ACM, la requérante n’a nullement établi que tel était effectivement le cas.
107 Le premier grief doit donc être rejeté.
– Sur le second grief, tiré d’une interprétation erronée des données relatives à l’évolution des quantités et des prix découlant de l’analyse de choc
108 La requérante fait valoir que la Commission a erronément constaté, au considérant 21 de la décision attaquée, que les données relatives à l’évolution des quantités et des prix découlant de l’analyse de choc fournies par la requérante ne permettaient pas de confirmer que la distribution électronique et la distribution postale étaient des substituts réels. L’analyse de choc constituerait l’analyse du recul de la demande à la suite du « choc » consistant en l’augmentation par la requérante des prix, intervenue en mai 2011 et autorisée par le régulateur. Selon la requérante, l’élasticité de la demande à hauteur de [confidentiel] % en cas d’augmentation des prix de 5 % qui ressortirait du test-MH restait du même ordre que l’élasticité causée par l’augmentation des prix intervenue en mai 2011, qui aurait été de [confidentiel] % ou de [confidentiel] % en fonction de la prestation de service choisie.
109 La Commission a indiqué au considérant 21 de la décision attaquée ce qui suit :
« Le demandeur a également présenté des graphiques de l’évolution des quantités et des prix, qui indiquaient une sensibilité nettement moindre des quantités aux prix par rapport à celle indiquée dans l’analyse de l’enquête. Afin de faire la lumière sur cette apparente contradiction, le demandeur a été invité à fournir les vraies données utilisées pour produire les graphiques et quantifier la sensibilité de la demande. La sensibilité de la demande calculée par le demandeur au moyen des données réelles variait entre [confidentiel] % et [confidentiel] %, en fonction de la technique utilisée. Le demandeur n’a toutefois pas utilisé l’analyse économétrique standard pour produire ces résultats. Les résultats préliminaires d’une analyse distincte réalisée par nos services au moyen du même ensemble de données et de techniques économétriques standard pour l’estimation de la demande dans la littérature économique indiquent que la sensibilité des quantités aux évolutions de prix pourrait être de 3,1 % seulement. »
110 Dans la note en bas de page insérée à la quatrième phrase du considérant 21 de la décision attaquée, il est indiqué :
« [Dans] l’analyse des demandes, le prix est généralement considéré comme une variable endogène. Cette endogénéité doit être prise en considération pour que la sensibilité associée des quantités aux prix soit considérée comme une estimation non biaisée de l’élasticité. Le demandeur a omis de prendre en considération l’endogénéité de cette manière et n’a pas suffisamment justifié l’exogénéité des prix, partant du principe sans fondement que les prix étaient exogènes. »
111 Plus précisément, la requérante fait valoir que la Commission utilise également des analyses de choc en tant que preuve de délimitation des marchés. Selon la requérante, il n’y aurait pas de contradiction apparente en ce qui concerne les résultats de l’enquête menée dans le cadre de l’étude ACM. Dans l’analyse de choc, elle aurait opéré, pour des motifs d’ordre pratique et des considérations techniques liées à l’impôt sur le chiffre d’affaires, une distinction entre les lettres standard déposées dans une grande filiale, qui tomberaient sous le coup de l’obligation de service universel, et celles directement déposées dans un centre de tri, qui ne tomberaient pas sous le coup de l’obligation de service universel, mais seraient soumises à la TVA. Pour mai 2011, elle aurait calculé une élasticité de la demande de [confidentiel] % pour une augmentation des prix de 1 % en ce qui concerne les lettres standard non soumises à l’obligation de service universel et de [confidentiel] % en ce qui concerne celles soumises à l’obligation de service universel. Une hausse de prix postulée de 5 % dans le cadre d’un test-MH conduirait à une baisse de la demande de lettre standard de respectivement [confidentiel] % et [confidentiel] %. Le résultat du test-MH, qui aurait établi une élasticité de la demande de [confidentiel] %, serait donc concluant. Selon la requérante, l’analyse de choc a été confirmée par deux contrôles de vraisemblance, à savoir une analyse économétrique simple et une analyse économétrique complémentaire. Enfin, la requérante fait valoir que les analyses économétriques que la Commission aurait effectuées sur la base des données qu’elle avait fournies ne seraient pas appropriées ni suffisantes pour réfuter le caractère fiable et compréhensible de ses analyses. Tandis que le résultat de la première analyse de la Commission se situerait dans le même ordre de grandeur que les élasticités de la demande mesurées par la requérante, à savoir [confidentiel] %, la seconde analyse serait erronée du fait de l’utilisation de variables sans liens et de données de périodicités différentes.
112 Cette argumentation ne démontre pas que l’appréciation de la Commission est entachée d’une erreur manifeste.
113 En effet, en premier lieu, s’agissant de l’argumentation selon laquelle la Commission utilise également des analyses de choc en tant que preuve de délimitation des marchés, il y a lieu de constater que la Commission n’a pas contesté l’utilité d’une telle analyse pour définir le marché en cause. La Commission a indiqué avoir appliqué la méthode relative à la délimitation du marché telle que prévue dans la communication sur la définition du marché (voir point 33 ci-dessus). Selon le point 38 de cette communication, un des éléments que la Commission juge pertinents pour son appréciation de la substituabilité de deux produits au niveau de la demande constitue la preuve d’une substitution dans un passé récent. D’après ce point, il est possible, dans certains cas, de tirer des éléments d’informations d’événements ou de chocs qui se sont produits récemment sur le marché et qui constituent des exemples réels de substitution de deux produits. Ledit point indique que, lorsqu’elle est disponible, cette information est généralement fondamentale pour la définition du marché. Toujours selon le point 38 de la communication sur la définition du marché, si les prix relatifs ont déjà changé par le passé (toutes choses étant égales par ailleurs), les réactions en termes de quantités demandées seront déterminantes pour établir l’existence d’une substituabilité.
114 En deuxième lieu, s’agissant de l’argumentation selon laquelle la Commission a erronément constaté qu’il y avait une contradiction apparente entre les résultats de l’enquête menée par la requérante et ceux de l’analyse de choc effectuée par cette dernière du fait que les graphiques de l’évolution des quantités et des prix utilisés dans le cadre de l’analyse de choc indiquaient une sensibilité nettement moindre des quantités aux prix par rapport à celle indiquée dans l’analyse de l’enquête en cause, celle-ci doit également être rejetée.
115 En effet, ainsi que l’affirme la Commission, il ressort des graphiques que la requérante lui a fournis que la demande avait commencé à reculer en avril 2011, à savoir avant l’augmentation des prix par la requérante en mai 2011. S’il est vrai que la demande a continué à reculer en mai 2011, il n’en demeure pas moins qu’il ne saurait être exclu que les motifs exceptionnels qui avaient entraîné un recul dès le mois d’avril, à savoir, selon la requérante, des décalages entre certains de ses grands clients, ont également contribué d’une certaine manière au recul de mai 2011, de sorte que la Commission a pu à juste titre considérer que la sensibilité des quantités aux prix était nettement moindre par rapport à celle indiquée dans l’analyse de l’enquête en cause.
116 En revanche, dans la mesure où la Commission fait valoir que la requérante aurait dû prendre en compte le seul mois de mai 2011 et non la période allant d’avril à juin 2011, en raison du fait que la hausse des prix analysée serait entrée en vigueur le 1er mai 2011, son argumentation ne saurait être accueillie. En effet, même s’il ressort du matériel publicitaire de la requérante datant de février 2011 et produit par la Commission que la hausse des prix intervenue le 1er mai 2011 avait été portée à la connaissance du public longtemps à l’avance, il y a lieu de relever que ce fait ne saurait remettre en cause l’affirmation de la requérante selon laquelle ses clients réagissent de manière différée aux hausses de prix.
117 En troisième lieu, la requérante fait valoir qu’elle a procédé, pour étayer les résultats de l’analyse de choc, à deux contrôles de vraisemblance, à savoir une analyse économétrique simple et une analyse économétrique complémentaire. Selon elle, l’analyse économétrique simple des données sous la forme d’une analyse de régression étayait les élasticités de la demande calculées selon la formule standard. Dans cette analyse, les effets saisonniers qui pouvaient être observés dans le secteur postal auraient été contrôlés par une variable muette. De cette analyse ressortirait une élasticité de [confidentiel] % en présence d’une hausse de prix de 5 %. Le résultat de l’analyse économétrique complémentaire serait une élasticité de [confidentiel] % en présence d’une hausse de prix de 5 %. À titre complémentaire, la requérante aurait présenté à la Commission une évaluation de la doctrine standard relative aux élasticités de la demande dans le secteur postal qui confirmerait également les élasticités mesurées par la requérante en présence d’une hausse de prix de 1 %. Selon la requérante, la Commission a seulement critiqué l’analyse économétrique complémentaire en raison du fait que celle-ci ne constituerait pas une analyse économétrique standard. Dans cette analyse, la requérante aurait procédé à une analyse de régression utilisant le volume des lettres en tant que variable dépendante expliquée et le prix des lettres en tant que variable indépendante explicative. Dans un tel cas, il y aurait endogénéité, puisque la variable explicative exercerait une influence sur la variable expliquée. Toutefois, contrairement à ce que supposerait la Commission, dans les études scientifiques du secteur postal, le problème connu d’endogénéité serait accepté. L’hypothèse serait que les prix des lettres sont exogènes, ce qui serait confirmé par les analyses produites par la requérante. L’analyse économétrique complémentaire serait confirmé par le fait qu’elle aboutisse aux mêmes résultats que les autres analyses de la requérante, dont l’analyse économétrique simple qui, selon la requérante, n’était pas entachée du problème d’endogénéité parce qu’elle n’intégrait pas le prix en tant que variable explicative. Contrairement à ce qu’allègue la Commission, l’utilisation d’une analyse économétrique standard ne serait donc pas requise.
118 Premièrement, en ce qui concerne l’argument selon lequel la Commission a critiqué seulement l’analyse économétrique complémentaire en raison du fait que celle-ci ne constituerait pas une analyse économétrique standard et non l’analyse économétrique simple, il y a lieu de constater qu’il ne ressort pas du considérant 21 de la décision attaquée que la critique formulée par la Commission relative à l’absence d’analyse économétrique standard ne concernait que l’analyse économétrique complémentaire effectuée par la requérante. En effet, en constatant audit considérant que, en dépit du fait que la sensibilité de la demande calculée par la requérante au moyen des données réelles variait entre [confidentiel] % et [confidentiel] %, en fonction de la technique utilisée, la requérante n’avait toutefois pas utilisé l’analyse économétrique standard pour produire ces résultats, la Commission n’a aucunement différencié l’analyse économétrique simple de l’analyse économétrique complémentaire effectuées par la requérante. Il ressort plutôt de la note en bas de page insérée à la quatrième phrase du considérant 21 de la décision attaquée (voir point 110 ci-dessus) que la Commission a rejeté les deux analyses économétriques de la requérante en raison du fait que cette dernière avait omis de prendre en considération la question de l’endogénéité des prix et n’avait pas suffisamment prouvé que les prix étaient exogènes.
119 Deuxièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel l’analyse économétrique simple n’était pas entachée du problème d’endogénéité des prix, parce que celle-ci n’intégrerait pas le prix en tant que variable explicative, et serait donc, en tout état de cause, une analyse valable, il convient de constater, ainsi que l’affirme la Commission, que, par cette analyse, la requérante cherchait à prouver la sensibilité de la demande aux prix ou la réaction en termes de quantité au choc dû à l’augmentation des prix du 1er mai 2011. En effet, il ressort de cette analyse que, selon cette dernière, la modélisation de la demande de courrier postal au moyen de l’économétrie permettait de quantifier la baisse de la demande due à l’augmentation du prix en isolant cet effet des autres facteurs. Cette analyse contenait également un résultat relatif à la chute du volume due à l’augmentation du prix. Ainsi que l’a indiqué la requérante lors de l’audience, les données prises en compte dans le cadre de l’analyse économétrique simple se référaient précisément à la période concernée par la hausse de prix effectuée le 1er mai 2011. L’analyse économétrique simple de la requérante devait, par conséquent, contenir le facteur « prix ».
120 Troisièmement, dans la mesure où la requérante fait valoir que, dans les études scientifiques du secteur postal, le problème connu d’endogénéité est accepté et que l’hypothèse est que les prix des lettres sont exogènes, elle se borne à faire référence à une étude censée étayer sa thèse, sans pourtant la produire. À cet égard, il convient de relever que la Commission a produit l’étude en cause, qui est consacrée à l’élasticité des prix sur le marché postal aux États-Unis. Ainsi qu’elle affirme, étant donné le contexte réglementaire entièrement différent, les résultats de cette étude ne sauraient être utiles pour le marché autrichien. En outre, il ressort de cette étude que, même pour le marché postal américain, l’hypothèse de l’exogénéité des prix est jugée incorrecte.
121 De même, pour autant que la requérante affirme avoir présenté à la Commission une évaluation de la doctrine standard relative aux élasticités de la demande dans le secteur postal qui confirmerait également les élasticités mesurées par elle en présence d’une hausse de prix de 1 %, en se bornant à faire référence à une liste d’études scientifiques sans pourtant les produire, la requérante n’a aucunement établi que la Commission a erronément rejeté ses analyses économétriques. Par ailleurs, il convient de constater qu’aucune de ces études scientifiques ne concerne le marché autrichien.
122 La requérante fait également valoir que les résultats de ses analyses de régression peuvent être évalués par deux critères de qualité. Le premier serait le test t. Selon la requérante, si le résultat du test t, à savoir le seuil p (probabilité), est inférieur à 0,05 ou 5 %, la variable est réputée être statistiquement significative. En l’espèce, toutes les valeurs p des deux analyses de la requérante seraient inférieures à 0,05. Le second critère de qualité serait le coefficient de détermination R2. Ce dernier indiquerait le pourcentage de fluctuation dans la variable expliquée qui pourrait être expliquée par l’équation de régression et donc par les variables explicatives. Plus le R2 serait proche de la valeur 1, plus le pouvoir explicatif du facteur d’influence examiné serait important. Plus la force explicative du facteur d’influence serait grande, plus la régression serait bonne. Selon la requérante, les seuils supérieurs à 0,2 serait acceptables, les seuils supérieurs à 0,4 représenteraient de bonnes estimations et les seuils supérieurs à 0,5 indiqueraient une très bonne évaluation de la régression. La requérante indique que, en l’occurrence, ses deux analyses atteignent des seuils excellents, à savoir l’analyse économétrique simple le seuil de 0,92 et l’analyse économétrique complémentaire le seuil de 0,88.
123 À cet égard, il convient de constater que, en réponse à une question posée par le Tribunal lors de l’audience, la requérante a indiqué que les valeurs p et les seuils R2 n’étaient pas susceptibles de résoudre le problème d’endogénéité. Ni le test t ni le coefficient R2 ne donnent des indications sur le lien causal entre les différents facteurs utilisés dans les analyses de régression et le recul quantitatif, qui constitue précisément la question centrale d’une analyse de l’élasticité de la demande.
124 En quatrième lieu, la requérante fait valoir que les résultats des deux analyses économétriques réalisées par la Commission au moyen des données qu’elle avait fournies sont erronés. Selon la requérante, la Commission n’a pas indiqué les raisons pour lesquelles elle a utilisé les variables choisies. En outre, ces analyses de régression ne concerneraient que la période allant jusqu’en 2012 et la Commission aurait utilisé des périodes d’observations et des périodicités différentes, ce qui ne correspondrait à aucune analyse économétrique standard. En ce qui concerne la première analyse de régression de la Commission, la requérante affirme que le prix des lettres explique le volume des lettres, comme dans son analyse économétrique complémentaire. La première analyse de régression démontrerait également que le volume des lettres baissait de 10,15 %, un résultat comparable à ceux produits par la requérante. S’agissant de la seconde analyse de régression de la Commission, cette dernière aurait procédé à une estimation en variables instrumentales. Elle aurait remplacé tant la variable « frais de port » que la variable « lignes fixes à haut débit/lignes d’abonnés et propagation » par les deux variables « modification du produit intérieur brut (PIB) » et « prix de l’électricité pour les clients industriels ». Selon la requérante, pour pouvoir constituer un instrument, la variable « frais de port » doit avoir un lien statistique avec la variable « prix de l’électricité pour les clients industriels », ce qui ne serait pourtant pas le cas. Cette absence de lien à long terme aurait été confirmée par des tests standard de coïntégration.
125 Cette argumentation ne démontre pas que la constatation de la Commission figurant au considérant 22 de la décision attaquée, selon laquelle aucune donnée certaine et concluante ne permet de confirmer que la distribution électronique et la distribution postale sont des substituts réels, est erronée. En effet, il convient de rappeler que la charge de la preuve relative au fait que les conditions prévues à l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 sont satisfaites incombe au demandeur et à l’État membre concerné, la Commission ne disposant que de pouvoirs limités (voir point 41 ci-dessus). Il s’ensuit que, en l’espèce, la Commission n’était pas obligée d’effectuer ses propres analyses.
126 En tout état de cause, il y a lieu de relever qu’il ressort expressément de la dernière phrase du considérant 21 de la décision attaquée (voir point 109 ci‑dessus) que l’analyse effectuée par les services de la Commission n’a donné que des résultats préliminaires. Dans sa lettre du 4 avril 2014 à la requérante, la Commission a indiqué à cet égard que son analyse ne devait pas être considérée comme une analyse définitive du marché postal en Autriche et que des méthodes plus fines ou de meilleures données pourraient apporter des résultats différents. Il s’ensuit que les constatations relatives à l’analyse effectuée par les services de la Commission, figurant dans la dernière phrase du considérant 21 de la décision attaquée, constituent des motifs complémentaires de ceux exposés dans le reste de ce considérant. Par conséquent, à supposer même que cette analyse soit erronée, ce fait ne saurait impliquer que la décision attaquée est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.
127 Dans la mesure où la requérante a fait valoir, lors de l’audience, que la Commission a violé son droit d’être entendue en ce que cette dernière ne lui aurait pas donné accès à ses données et calculs économétriques avant l’adoption de la décision attaquée, il y a lieu de relever que cette argumentation est irrecevable parce que, en vertu de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du 2 mai 1991, qui correspond à l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. En tout état de cause, une telle argumentation est également non fondée, car il ressort d’une lettre de l’expert désigné par la requérante adressée à la Commission datant du 1er avril 2014 que, même si cette dernière n’avait pas donné accès à toutes ses données, elle avait néanmoins donné la possibilité à cet expert de discuter de son analyse économétrique.
128 Le second grief et, par conséquent, la troisième branche doivent donc être rejetés.
Sur la quatrième branche, tirée d’un défaut de motivation relatif à la possibilité de répercuter les hausses des coûts sur les clients
129 La requérante fait valoir que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation relatif à la constatation figurant à son considérant 24 selon laquelle elle pourrait répercuter les hausses de coûts sur ses clients. Selon elle, ses prix sont strictement régulés et elle a produit des documents exhaustifs démontrant que, en cas d’augmentation des prix, ses clients se tourneraient vers une distribution alternative. Compte tenu de la dynamique du marché, la conclusion de la Commission selon laquelle elle aurait une position dominante serait dénuée de fondement et ne serait pas non plus suffisamment motivée. En outre, selon une enquête de satisfaction de 2013, [confidentiel] % de ses grands clients interrogés auraient mentionné la substitution par des moyens électroniques comme étant le motif du recul de leur volume de courrier distribué par la requérante. Selon la requérante, la Commission n’aurait présenté aucune preuve établissant que, contrairement aux résultats présentés par elle, la réduction globale de la taille du marché du courrier n’avait pas de rapport avec l’accroissement de la substitution par des moyens électroniques. Selon elle, bien que la Commission envisage le renforcement des communications et envois sans papier en lieu et place des envois postaux, elle dénie toute corrélation entre l’effondrement des envois de lettres postales et l’accroissement des envois électroniques.
130 Il convient de relever que, au considérant 24 de la décision attaquée, la Commission a énoncé ce qui suit :
« La poste autrichienne pourrait répercuter les hausses de coûts sur les clients qui, compte tenu de leur préférence intrinsèque pour la distribution postale, n’auraient d’autre choix que d’assumer la hausse de prix. Pour cette même raison, la position clairement dominante de la poste autrichienne ne garantit pas que les éventuelles baisses de coûts seront répercutées sur les clients. »
131 Dans la note en bas de page insérée à la première phrase du considérant 24 de la décision attaquée, la Commission a indiqué qu’une hausse du tarif avait été instaurée, en mai 2011, à la suite de l’approbation par les autorités nationales compétentes d’une demande de la requérante.
132 À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (voir arrêt du 22 mars 2001, France/Commission, C‑17/99, Rec, EU:C:2001:178, point 35 et jurisprudence citée). Il ressort de l’argumentation de la requérante que cette dernière fait valoir dans le cadre de la présente branche en substance, d’une part, une violation de la formalité substantielle et, d’autre part, une absence de bien‑fondé de la motivation.
133 En premier lieu, s’agissant de la prétendue violation de l’obligation de motivation, il y a lieu de relever que les constatations de la Commission figurant au considérant 24 de la décision attaquée satisfont aux exigences de l’obligation de motivation telles qu’énoncées aux points 20 et 46 ci-dessus. En effet, d’une part, s’agissant de la constatation selon laquelle la requérante pourrait répercuter les hausses de coûts sur les clients qui, compte tenu de leur préférence intrinsèque pour la distribution postale, n’auraient d’autre choix que d’assumer la hausse de prix, il ressort de la note en bas de page insérée à la première phrase du considérant 24 de la décision attaquée, qui fait référence à la hausse des prix intervenue en mai 2011 sur demande de la requérante, que la Commission estimait qu’une telle répercussion serait possible même en tenant compte du fait qu’une hausse des prix devait être approuvée par les autorités nationales compétentes. D’autre part, en ce qui concerne la motivation relative à la constatation selon laquelle la requérante détient une position dominante sur le marché autrichien, il convient de constater que, au considérant 23 de la décision attaquée, la Commission a indiqué, en faisant référence à une lettre de la requérante datant du 2 décembre 2013 selon laquelle cette dernière avait évalué à [confidentiel] % sa part de marché sur le marché du courrier commercial national, que la requérante détenait une grande majorité du marché du courrier papier.
134 En second lieu, s’agissant de l’argumentation de la requérante remettant en cause le bien-fondé des constatations figurant au considérant 24 de la décision attaquée, celle-ci ne saurait non plus être accueillie. En effet, premièrement, en ce qui concerne l’argument selon lequel la requérante aurait produit des documents exhaustifs démontrant que, en cas d’augmentation des prix, ses clients se tourneraient vers une distribution alternative, force est de constater, d’une part, que la requérante ne fait référence à aucun élément de preuve précis au soutien de son affirmation et, d’autre part, que son argumentation relative au test-MH et à la présentation des graphiques de l’évolution des quantités et des prix a déjà été rejetée dans le cadre de l’examen de la troisième branche du présent moyen. Deuxièmement, s’agissant de l’argument selon lequel, compte tenu de la dynamique du marché, la conclusion de la Commission selon laquelle la requérante avait une position dominante était erronée, il ressort de l’examen de la deuxième branche du présent moyen que la Commission n’a pas commis d’erreur en constatant, aux considérants 18 et 19 de la décision attaquée, des obstacles à la substituabilité de la facturation électronique et de la facturation postale ainsi que la situation du marché. Troisièmement, en ce qui concerne l’affirmation selon laquelle, d’après une enquête de satisfaction de 2013, [confidentiel] % des grands clients de la requérante interrogés avaient mentionné la substitution par des moyens électroniques comme étant le motif du recul de leur volume de courrier distribué par la requérante, il convient de relever que, en se bornant à indiquer le résultat de cette enquête de satisfaction, la requérante ne parvient aucunement à démontrer que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant que la distribution électronique et la distribution postale n’étaient pas des substituts réels. Quatrièmement, dans la mesure où la requérante fait valoir que la Commission n’a présenté aucune preuve, il a déjà été rappelé que la charge de la preuve relative au fait que les conditions prévues à l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 sont satisfaites incombe au demandeur et à l’État membre concerné, la Commission ne disposant que de pouvoirs limités (voir point 41 ci‑dessus). Cinquièmement, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la Commission n’a aucunement dénié l’existence d’une corrélation entre la baisse des envois de lettres postales et l’accroissement des envois électroniques. En effet, la Commission a indiqué au considérant 26 de la décision attaquée que, si l’une des principales conséquences d’une utilisation accrue des moyens de communication électroniques était la réduction de la taille globale du marché du courrier, elle ne pouvait en conclure que la communication électronique avait introduit une concurrence directe au sein du marché de la distribution postale.
135 Il s’ensuit que la quatrième branche du présent moyen tout comme ce dernier dans son ensemble doivent être rejetés.
136 S’agissant de la demande d’audition, en qualité de témoin, de l’auteur de l’étude ACM et de l’analyse de choc (voir point 43 ci-dessus), au vu de ce qui précède, sur la base des pièces du dossier et en raison des réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé et donc en mesure de comprendre toutes les questions économiques concernées afin de décider si l’appréciation de la Commission était entachée d’une erreur manifeste. Par conséquent, il n’y a pas lieu de donner suite à cette demande pour autant qu’elle concerne le présent moyen.
Sur le troisième moyen, tiré d’une application erronée de la directive 2004/17 et d’un défaut de motivation, relatif à l’exposition directe à la concurrence sur le marché des services postaux de lettres avec adresse C2X au niveau national
137 La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 30 de la directive 2004/17 et commis un défaut de motivation en ce qu’elle aurait constaté, aux considérants 34 à 42 de la décision attaquée, que les services postaux de lettres avec adresse C2X au niveau national n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche. Selon la requérante, la Commission a commis une erreur en délimitant le marché en cause. Plus précisément, la Commission aurait erronément considéré que la distribution électronique et la distribution postale n’appartenaient pas au même marché C2X national. À cet égard, la requérante fait valoir que la Commission, d’une part, a pris en compte des chiffres inexacts relatifs à l’utilisation de l’internet en Autriche et, d’autre part, n’a tenu compte ni des études produites par la requérante, ni de l’évolution constante, ni de la substitution électronique omniprésente. Afin d’étayer son argumentation et d’expliquer l’étude ACM et ses lettres à la Commission des 8 novembre et 2 décembre 2013, la requérante demande l’audition, en qualité de témoin, de son expert, qui est notamment l’auteur de l’étude ACM.
138 À titre liminaire, il convient de rappeler que l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (voir point 132 ci-dessus). Il ressort de l’argumentation de la requérante que, en substance, cette dernière ne fait pas valoir une violation de l’obligation de motivation en tant que violation d’une formalité substantielle. La requérante souhaite plutôt remettre en cause le bien-fondé de la motivation de la décision attaquée en ce que la Commission aurait pris en compte des chiffres incorrects et n’aurait pas tenu compte de l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier la situation en Autriche (voir également point 39 ci-dessus).
139 Il ressort des considérants 34 à 42 de la décision attaquée que la Commission a conclu que les services postaux de lettres avec adresse C2X au niveau national n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche et que, par conséquent, l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 ne s’appliquait pas aux contrats destinés à permettre la poursuite de ces activités en Autriche. Pour parvenir à cette conclusion, la Commission a constaté, aux considérants 39 et 40 de la décision attaquée, que le marché de produits en cause était le marché des services postaux pour les lettres avec adresse C2X, pour lequel la part de marché de la requérante était d’environ [confidentiel] %. Selon le considérant 38 de la décision attaquée, la distribution électronique et la distribution postale pour les lettres avec adresse C2X n’appartiennent pas au même marché. À cet égard, la Commission a indiqué au considérant 36 de cette décision que, selon l’étude WIK 2013, près de 30 % de la population en Autriche n’avait jamais utilisé l’internet, environ 55 % de la population n’utilisait pas les services bancaires en ligne et 75 % ne remplissait pas de formulaires administratifs en ligne. Selon le considérant 37 de la décision attaquée, la requérante n’a fourni aucune preuve empirique supplémentaire pour appuyer ses affirmations et démontrer la substituabilité.
140 En premier lieu, la requérante fait valoir que les chiffres cités au considérant 36 de la décision attaquée, tirés de l’étude WIK 2013, relatifs à l’utilisation de l’internet en Autriche sont inexacts et ne présentent pas de pertinence en ce qui concerne la délimitation du marché en cause. Selon elle, un relevé de l’Office statistique de l’Union européenne (Eurostat) confirme qu’en 2012 seulement 17 % de la population autrichienne a déclaré ne pas encore avoir utilisé l’internet. En outre, il serait approprié de prendre comme référence les ménages dont plus de 80 % auraient eu accès à l’internet en 2013 selon les données d’Eurostat. Entre 2002 et 2012, la part des ménages ayant un accès à l’internet en Autriche serait passée de 34 à 79 % et la part des ménages ayant un accès à l’internet haut débit serait passé de 10 à 77 % entre 2003 et 2012. De plus, en 2013, 75 % des autrichiens auraient utilisé l’internet pour envoyer des courriels, parmi lesquels les utilisateurs dans la tranche d’âge de 25 à 64 ans en auraient représenté la plus grande part. Selon la requérante, en ce qui concerne la délimitation du marché en cause, seule l’utilisation de la fonction courriel revêt une importance, puisque, par exemple, des factures en tant que pièces jointes au format PDF pourraient également être envoyées. La requérante ajoute que ces évolutions sont aussi conformes à l’expérience de la vie, puisque, d’une part, la communication entre les consommateurs s’effectuerait par courriels, messages courts (SMS) et autres services similaires et, d’autre part, les lettres postales ne seraient plus écrites que dans des cas exceptionnels. Enfin, selon la requérante, il est significatif pour la délimitation du marché que la disponibilité de l’internet pour les entreprises en Autriche se situait à près de 100 % en 2012.
141 Cette argumentation ne démontre pas que l’appréciation de la Commission est entachée d’une erreur manifeste en ce que celle-ci aurait fondé son appréciation sur des éléments de preuve inexacts.
142 En effet, premièrement, il convient de rappeler que la charge de la preuve relative au fait que les conditions prévues à l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 sont remplies incombe au demandeur et à l’État membre concerné, la Commission ne disposant en l’espèce, par rapport aux vastes pouvoirs d’enquête conférés dans le cadre de l’application du droit de la concurrence de l’Union par le règlement n° 1/2003 et par le règlement n° 139/2004, que de pouvoirs limités (voir point 41 ci-dessus). De plus, la légalité d’une décision de la Commission prise au titre de l’article 30 de la directive 2004/17 doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir, par analogie, arrêts du 15 avril 2008, Nuova Agricast, C‑390/06, Rec, EU:C:2008:224, point 54 ; du 12 octobre 2011, Dimos Peramatos/Commission, T‑312/07, EU:T:2011:587, point 95, et du 15 juillet 2014, Italie/Commission, T‑463/07, EU:T:2014:665, point 108).
143 En l’espèce, il convient de constater que, ainsi qu’il ressort du considérant 35 de la décision attaquée, à la suite de l’invitation de la Commission à exprimer leur point de vue sur la définition du marché de produits en cause, conformément à l’article 30, paragraphe 5, deuxième alinéa, de la directive 2004/17, les autorités autrichiennes n’ont pas pu fournir d’informations complémentaires pour appuyer les affirmations de la requérante.
144 Deuxièmement, en ce qui concerne l’argument selon lequel les chiffres tirés de l’étude WIK 2013 relatifs à l’utilisation de l’internet en Autriche sont inexacts et ne présentent pas de pertinence, il y a lieu de constater que la requérante ne remet pas en cause les données résultant de l’étude WIK 2013 en général. En particulier, elle n’affirme pas que cette étude repose sur des données erronées. Au contraire, pendant la procédure administrative, c’est la requérante qui a présenté cette étude. En outre, au soutien de son argumentation relative à l’exposition directe à la concurrence sur les marchés B2X et C2X, la requérante a fait référence à cette étude pour démontrer que, selon elle, la diminution des envois postaux devait être imputée en particulier à la substitution électronique. Au demeurant, il convient de relever que l’étude WIK 2009, à savoir l’étude précédant l’étude WIK 2013 provenant de la même société de consultants, a été citée à plusieurs reprises dans l’étude ACM de la requérante.
145 Troisièmement, contrairement à ce qu’allègue la requérante, il n’apparaît pas erroné dans le cadre de la présente délimitation du marché en cause de faire référence au fait qu’environ 55 % de la population n’utilise pas les services bancaires en ligne et que 75 % de la population ne remplit pas de formulaires administratifs en ligne. Ainsi que l’affirme la Commission, ces chiffres sont pertinents pour la définition du marché en cause, puisqu’ils concernent des segments essentiels du marché C2X, qui comprend des envois entre particuliers et des envois des particuliers aux professionnels. À cet égard, il convient également de relever que l’argument de la requérante selon lequel seule l’utilisation de la fonction courriel revêt une importance, puisque, par exemple, des factures en tant que pièces jointes au format PDF pourraient également être envoyées, ne saurait être accueilli en ce qui concerne le marché C2X. En effet, la requérante n’a aucunement démontré que les envois de factures par des particuliers n’étaient pas négligeables dans ce marché.
146 Quatrièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la communication entre les consommateurs s’effectue par courriels, SMS et autres services similaires et selon lequel les lettres postales ne sont plus écrites que dans des cas exceptionnels, il y a lieu de relever que celui-ci n’a pas été étayé par des éléments de preuve. En ce qui concerne, à cet égard, un document de l’autorité de régulation allemande datant de novembre 2014, force est de constater que, celui-ci ayant été produit au stade de la réplique sans aucune justification concernant le retard, il doit être rejeté comme étant irrecevable, en vertu de l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure du 2 mai 1991. En outre, il a déjà été rappelé que la légalité d’un acte attaqué s’apprécie en fonction des éléments de fait et de droit existant au moment de l’adoption de celui-ci (voir point 64 ci‑dessus). Par ailleurs, la requérante n’affirme même pas que le document de l’autorité de régulation allemande se réfère à la situation en Autriche. Enfin, ainsi que l’affirme la Commission, il ressort du point 5.2.2.2 de la demande de la requérante que cette dernière a expédié en 2012 environ [confidentiel] de lettres de particuliers.
147 Cinquièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel il est significatif pour la délimitation du marché que la disponibilité de l’internet pour les entreprises en Autriche se situait à près de 100 % en 2012, à le supposer établi, il convient de rappeler que, sur le marché C2X, il est particulièrement important que les particuliers disposent de l’internet pour pouvoir envoyer leurs communications électroniques.
148 En second lieu, la requérante fait valoir que la Commission n’a tenu compte ni des études qu’elle a produites, ni de l’évolution constante, ni de la substitution électronique omniprésente. Elle renvoie, à cet égard, à son exposé général de l’évolution du marché B2X dans la requête, à l’étude WIK 2013, à l’étude ACM, au point 5 de sa lettre du 8 novembre 2013 à la Commission et aux points 3 et 4 de sa lettre à la Commission du 2 décembre 2013. Selon elle, la Commission a erronément évalué uniquement l’étude WIK 2013 qu’elle a produite.
149 Cette argumentation ne démontre pas non plus que l’appréciation de la Commission est entachée d’une erreur manifeste en ce que celle-ci n’aurait pas fondé son appréciation sur l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération.
150 En effet, premièrement, dans la mesure où la requérante fait référence à son argumentation relative à la délimitation du marché B2X, il y a lieu de relever, d’une part, que la Commission a tenu compte de celle-ci dans le cadre de son examen du marché B2X, ainsi qu’il ressort des considérants 14 à 33 de la décision attaquée, et qu’il a été constaté, dans le cadre de l’examen du deuxième moyen, que la Commission n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation à cet égard. Dans le cadre du présent moyen, la requérante n’a ajouté aucun élément supplémentaire. Il y a lieu de relever, d’autre part, ainsi que l’affirme la Commission, que la requérante n’a aucunement démontré que les enquêtes auprès des entreprises et les études relatives à la structure de la demande des entreprises s’appliquaient également à la structure de la demande des particuliers et qu’elles constituaient donc des données pertinentes devant être prises en considération par la Commission lors de l’examen de la définition du marché C2X.
151 Deuxièmement, s’agissant du renvoi global à l’étude WIK 2013, à l’étude ACM, au point 5 de la lettre de la requérante à la Commission du 8 novembre 2013 et aux points 3 et 4 de sa lettre à la Commission du 2 décembre 2013, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 21 du statut de la Cour de justice et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991, toute requête doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Selon une jurisprudence constante, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit qui doivent figurer dans la requête, car il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir arrêts du 9 mars 2015, Deutsche Börse/Commission, T‑175/12, EU:T:2015:148, point 354 et jurisprudence citée, et du 25 mars 2015, Slovenská pošta/Commission, T‑556/08, EU:T:2015:189, point 434 et jurisprudence citée). Par conséquent, ce renvoi doit être rejeté comme étant irrecevable.
152 Le troisième moyen doit donc être rejeté.
153 S’agissant de la demande d’audition, en qualité de témoin, de l’expert de la requérante (voir point 137 ci-dessus), au vu de ce qui précède, sur la base des pièces du dossier et en raison des réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé et donc en mesure de comprendre toutes les questions économiques concernées afin de décider si l’appréciation de la Commission était entachée d’une erreur manifeste. Par conséquent, il n’y a pas lieu de donner suite à cette demande pour autant qu’elle concerne le présent moyen.
Sur le quatrième moyen, tiré d’une application erronée de la directive 2004/17 et d’un défaut de motivation, relatif à l’exposition directe à la concurrence sur le marché des services postaux de lettres avec adresse B2X et C2X au niveau international
154 La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 30 de la directive 2004/17 et entaché sa décision d’un défaut de motivation en ce qu’elle aurait constaté, aux considérants 43 à 50 de la décision attaquée, que les services postaux de lettres avec adresse B2X et C2X au niveau international n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche. Selon la requérante, la Commission a commis une erreur en délimitant le marché en cause pour les mêmes raisons que celles exposées en ce qui concerne les marchés B2X et C2X nationaux. En outre, la requérante fait valoir que, en tout état de cause, sa part sur le marché des envois postaux en cause était en deçà de [confidentiel] % et que, du fait d’une forte concurrence, celle-ci a continuellement baissé entre 2010 et 2012, ce dont la Commission n’aurait pas tenu compte. Selon la requérante, la Commission a rejeté sa demande en considérant erronément et sans fournir d’explications suffisantes qu’une séparation du marché en cause en sous-domaines B2X international et C2X international était nécessaire. En tout état de cause, elle aurait fourni à la Commission des estimations des parts de marché respectives des marchés B2X international et C2X international. La Commission n’aurait pas expliqué pourquoi, selon elle, ces estimations n’étaient pas vraisemblables. À tout le moins, en suivant sa propre argumentation, la Commission aurait dû exempter le marché B2X international de l’application de la directive 2004/17. Afin d’étayer son argumentation et d’expliquer l’étude ACM et sa lettre à la Commission du 2 décembre 2013, la requérante demande l’audition, en qualité de témoin, de son expert, qui est notamment l’auteur de l’étude ACM.
155 Il ressort des considérants 43 à 50 de la décision attaquée que la Commission a conclu que l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 ne s’appliquait pas aux contrats destinés à permettre la poursuite des services postaux de lettres avec adresse B2X et C2X au niveau international en Autriche. Selon le considérant 43 de la décision attaquée, la Commission a rejeté l’affirmation de la requérante selon laquelle le mode de livraison du courrier transfrontalier était neutre sur le plan technologique et selon laquelle les services de distribution électronique et de distribution postale appartenaient au même marché en cause, essentiellement pour les mêmes raisons que celles exposées en ce qui concerne les services postaux de lettres avec adresse B2X et C2X au niveau national. Au considérant 46 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que la concurrence pour le courrier postal transfrontalier était très différente pour les particuliers et les entreprises, que les particuliers n’avaient en général pas d’autre choix réel que d’envoyer leur courrier international en passant par leur prestataire de service universel national et que les volumes envoyés par les particuliers étaient en général trop faibles pour encourager les nouveaux arrivants à pénétrer le marché. Selon le considérant 47 de la décision attaquée, la situation concurrentielle était également déterminée par la taille et par la population de chaque ville étant donné que les prestataires de services transfrontaliers n’exploitaient pas un réseau d’accès à l’échelle nationale, mais enlevaient généralement le courrier directement à l’adresse du client. Aux considérants 48 et 49 de cette décision, la Commission a indiqué que sa pratique antérieure établissait une distinction entre les services postaux transfrontaliers pour le marché des lettres avec adresse B2X et les services postaux transfrontaliers pour le marché des lettres avec adresse C2X et que rien ne prouvait que la situation soit différente en Autriche. Par conséquent, selon la Commission, deux marchés de produits distincts devaient être pris en considération, à savoir les services postaux transfrontaliers pour les lettres avec adresse B2X au départ et les services postaux transfrontaliers pour les lettres avec adresse C2X au départ. Selon le considérant 50 de la décision attaquée, la requérante n’a pas pu donner d’informations détaillées au sujet de ses parts de marché sur chaque marché en cause, ni sur les parts de marché de ses principaux concurrents. La Commission en a conclu, au même considérant, que, en l’absence d’informations relatives à l’ampleur de la concurrence sur chacun de ces marchés, il n’était pas possible de conclure que les conditions d’octroi d’une exemption en vertu de l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 aux services postaux transfrontaliers pour les lettres avec adresse B2X au départ et aux services postaux transfrontaliers pour les lettres avec adresse C2X au départ en Autriche étaient remplies.
156 En premier lieu, s’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission a commis une erreur en délimitant le marché en cause pour les mêmes raisons que celles exposées en ce qui concerne les marchés B2X et C2X nationaux, il suffit de relever que ces raisons ont déjà été rejetées dans le cadre de l’examen des deuxième et troisième moyens, qui concernent précisément les marchés B2X et C2X nationaux.
157 En deuxième lieu, la requérante fait valoir que la Commission a rejeté sa demande en considérant erronément et sans fournir d’explications suffisantes à cet égard qu’une séparation du marché en cause en sous-domaines B2X international et C2X international était nécessaire.
158 Premièrement, en ce qui concerne la prétendue violation de l’obligation de motivation, il convient de relever que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la Commission ne s’est pas bornée à renvoyer globalement, au considérant 48 de la décision attaquée, à sa pratique antérieure. En effet, d’une part, il ressort de la note en bas de page insérée audit considérant, qui fait référence à la note en bas de page n° 6 de la décision attaquée, que la Commission a renvoyé à une affaire antérieure spécifique. D’autre part, elle a indiqué, aux considérants 46, 47 et 49 de cette décision, les raisons pour lesquelles, selon elle, une distinction entre les services postaux transfrontaliers pour le marché des lettres avec adresse B2X et les services postaux transfrontaliers pour le marché des lettres avec adresse C2X devait être établie. Selon elle, la concurrence était très différente et il y avait lieu de tenir compte du fait que la situation concurrentielle était également déterminée par la taille ou par la population de chaque ville. Rien ne prouvait, selon la Commission, que la situation ait été différente en Autriche. Une telle motivation est, à la lumière des exigences mentionnées aux points 20 et 46 ci-dessus, suffisante pour permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle.
159 Deuxièmement, s’agissant de l’argumentation selon laquelle la Commission a erronément considéré qu’une séparation du marché en cause en sous-domaines B2X international et C2X international était nécessaire, la requérante se borne en substance à affirmer que les données concernant les parts de marché séparées en ces sous-domaines ne peuvent être fournies. Or, une telle argumentation ne permet pas de conclure que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en établissant une distinction entre les services postaux transfrontaliers pour le marché des lettres avec adresse B2X et les services postaux transfrontaliers pour le marché des lettres avec adresse C2X. En effet, d’une part, cette argumentation ne remet aucunement en cause les raisons fournies par la Commission aux considérants 46 à 49 de la décision attaquée en faveur d’une telle distinction (voir point 155 ci-dessus). À cet égard, il y a lieu de constater que l’étude WIK 2013, qui a été présentée à la Commission par la requérante, confirmait les constatations de la Commission figurant au considérant 46 de la décision attaquée. D’autre part, tandis que la requérante a opéré, dans sa demande, une distinction entre les marchés B2X et C2X au niveau national, elle n’a donné aucune raison pour laquelle elle n’aurait pas dû faire de même s’agissant des marchés B2X et C2X au niveau international, ni dans sa demande ni dans sa lettre du 14 janvier 2014 à la Commission, refusant précisément cette distinction, ainsi que l’affirme la Commission.
160 En troisième lieu, la requérante fait valoir qu’elle a fourni à la Commission des estimations des parts de marché respectives des marchés des lettres avec adresse B2X et C2X internationaux au point 2.1 de sa lettre du 2 décembre 1013 et que la Commission n’a pas expliqué pourquoi, selon elle, ses estimations n’étaient pas vraisemblables. Cette argumentation ne saurait être accueillie. En effet, ainsi qu’il ressort du point 2.1.3 de cette lettre, la requérante s’est bornée à formuler des estimations uniquement pour un marché global B2X et C2X international, sans pour autant établir une distinction entre les services postaux transfrontaliers pour le marché des lettres avec adresse B2X et les services postaux transfrontaliers pour le marché des lettres avec adresse C2X. Dans la mesure où la requérante fait valoir qu’elle a communiqué, au point 5 de sa lettre du 8 novembre 2013, les estimations demandées par la Commission, il convient de constater que ce point contient la part du courrier C2X dans le volume général des lettres de la requérante, qui ne permet aucune conclusion quant à la part de marché de la requérante sur le marché du courrier C2X au niveau international. La Commission pouvait donc à juste titre et sans enfreindre son obligation de motivation constater, au considérant 50 de la décision attaquée, que la requérante n’avait pas pu donner d’informations détaillées au sujet de ses parts de marché sur chaque marché en cause, ni sur les parts de marché de ses principaux concurrents.
161 En quatrième lieu, la requérante affirme que, à tout le moins, en suivant sa propre argumentation, la Commission aurait dû exempter le marché B2X international de l’application de la directive 2004/17. Selon la requérante, en tenant compte du fait que, selon le considérant 46 de la décision attaquée, ses services n’étaient pas substituables sur le marché C2X international, il en résultait que sa part de marché sur le marché B2X international devait se situer considérablement en deçà de [confidentiel] %, ce qui correspondrait également à la constatation de la Commission, figurant au considérant 47 de la décision attaquée, selon laquelle les concurrents de la requérante se trouvaient principalement dans les secteurs urbains.
162 Cette argumentation doit être accueillie. En effet, d’une part, la Commission n’a pas contesté que la part de marché de la requérante sur le marché des services postaux de lettres avec adresse B2X et C2X au niveau international était en deçà de [confidentiel] %, ainsi qu’il ressort du point 5.2.2.2 de la demande de la requérante. D’autre part, comme l’affirme la requérante, il résulte du considérant 46 de la décision attaquée que ses services en cause n’étaient pas substituables sur le marché C2X international, puisque, selon la Commission, les particuliers n’ont en général pas d’autre choix réel que d’envoyer leur courrier international en passant par leur prestataire de service universel national. Il s’ensuit que la part de marché de la requérante sur le marché des services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau international devait se situer largement en dessous de [confidentiel] %, ce dont la Commission n’a pas tenu compte en considérant que ces services postaux n’étaient pas directement exposés à la concurrence. Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en n’exemptant pas les services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau international de l’application de la directive 2004/17.
163 Par conséquent, le quatrième moyen doit être accueilli dans la mesure où il concerne les services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau international. Il doit être rejeté pour autant qu’il concerne les services postaux de lettres avec adresse C2X au niveau international.
164 S’agissant de la demande d’audition, en qualité de témoin, de l’expert de la requérante (voir point 154 ci-dessus), au vu de ce qui précède, sur la base des pièces des dossiers et en raison des réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé et donc en mesure de comprendre toutes les questions économiques concernées afin de décider si l’appréciation de la Commission était entachée d’une erreur manifeste. Par conséquent, il n’y a pas lieu de donner suite à cette demande pour autant qu’elle concerne le présent moyen.
Sur le cinquième moyen, tiré d’une application erronée de la directive 2004/17 et d’un défaut de motivation, relatif à l’exposition directe à la concurrence sur le marché des services postaux de courrier publicitaire avec adresse aux niveaux national et international
165 La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 30 de la directive 2004/17 et commis un défaut de motivation en ce qu’elle aurait constaté, aux considérants 51 à 56 de la décision attaquée, que les services postaux de courrier publicitaire avec adresse aux niveaux national et international n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche. Selon la requérante, à la suite de la complète libéralisation des services postaux, une distinction entre lettres avec adresse B2X national et publicité avec adresse n’était plus justifiée. Par conséquent, la Commission aurait commis une erreur en délimitant le marché en cause pour les mêmes raisons que celles exposées en ce qui concerne le marché B2X national. En outre, de nombreuses études auraient démontré que le marché des services postaux de publicité avec adresse avait fortement diminué du fait de la substitution électronique. Cependant, dans la décision attaquée, la Commission n’aurait pas pris en compte les arguments et les études présentés par la requérante, mais elle se serait bornée à renvoyer à ses décisions antérieures qui concerneraient un autre marché géographique et ne prendraient pas en compte la dynamique de l’évolution du marché de la communication.
166 Il ressort des considérants 51 à 56 de la décision attaquée que la Commission a conclu que les services postaux de courrier publicitaire avec adresse aux niveaux national et international n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche et que, par conséquent, l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 ne s’appliquait pas aux contrats destinés à permettre la poursuite de ces activités en Autriche. Pour parvenir à cette conclusion, la Commission a constaté, au considérant 51 de la décision attaquée, que le courrier publicitaire avec adresse était défini comme le courrier se composant uniquement de documents publicitaires ou de marketing et comprenant un message identique. Selon ce considérant, ce type de courrier publicitaire, qui pouvait être adressé à des entreprises ou à des particuliers, devait mentionner le nom et l’adresse du client et était subordonné à l’accord de celui-ci, qui devait accepter de recevoir ces informations. Au considérant 52 de la décision attaquée, la Commission a rejeté l’affirmation de la requérante selon laquelle le marché du courrier publicitaire avec adresse pouvait être inclus dans le marché des services postaux B2X pour les lettres avec adresse, en raison du fait que, selon elle, la requérante n’avait fourni aucune preuve empirique à cet égard et que cette affirmation ne correspondait pas à sa décision 2007/564/CE, du 6 août 2007, exemptant certains services du secteur postal en Finlande, à l’exclusion des Îles Åland, de l’application de la directive 2004/17 (JO L 215, p. 21). Elle a donc constaté, aux considérants 53 et 54 de la décision attaquée, que le marché de produits en cause était le marché des services postaux pour le courrier publicitaire avec adresse sur lequel la requérante avait une part de marché de [confidentiel] %.
167 Il convient de relever que, à supposer même que, ainsi que l’allègue la requérante, les lettres avec adresse B2X national et le courrier publicitaire avec adresse appartiennent au même marché, l’argumentation de la requérante n’est pas en mesure de remettre en cause le bien-fondé des considérations de la Commission. En effet, étant donné que la Commission pouvait à juste titre constater que le marché de produits en cause pour les services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau national était le marché des services postaux pour les lettres avec adresse B2X sur lequel la requérante avait une part de marché estimée à [confidentiel] % (voir le deuxième moyen) et étant donné qu’il est constant que la part de marché de la requérante sur le marché des services postaux de courrier publicitaire avec adresse aux niveaux national et international était également de [confidentiel] %, il convient de constater que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que la requérante n’était pas directement exposée à la concurrence en Autriche sur ce marché.
168 En tout état de cause, l’argumentation de la requérante ne démontre pas que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en constatant, au considérant 53 de la décision attaquée, que le marché de produits en cause était le marché des services postaux pour le courrier publicitaire avec adresse. En effet, à l’appui de son argumentation selon laquelle, à la suite de la complète libéralisation des services postaux, une distinction entre lettres avec adresse B2X national et publicité avec adresse n’était plus justifiée, la requérante fait notamment référence au considérant 17 de la directive 2008/6, selon lequel le publipostage consistant uniquement en matériel de publicité ou de marketing et contenant un message identique, à l’exception du nom, de l’adresse et du numéro d’identification du destinataire, peut être considéré comme un envoi de correspondance. À cet égard, il y a lieu de relever, ainsi que l’affirme la Commission, que le fait que la directive 2008/6 considère, d’un point de vue réglementaire, le courrier publicitaire avec adresse comme un envoi de correspondance ne préjuge pas de la définition correcte du marché en cause dans le cadre de l’examen de l’article 30 de la directive 2004/17. Par ailleurs, comme l’affirme la Commission, l’étude WIK 2013, produite par la requérante pendant la procédure administrative, ne considère pas non plus que les lettres avec adresse B2X national et le courrier publicitaire avec adresse appartiennent au même marché. Au demeurant, il convient de constater que l’étude ACM considère le courrier publicitaire avec adresse également comme un produit spécifique et qu’il ressort de cette étude que la tarification de la requérante diffère pour le courrier publicitaire avec adresse et pour le courrier B2X.
169 En outre, la requérante fait valoir que de nombreuses études ont démontré que le marché des services postaux de publicité avec adresse avait fortement diminué du fait de la substitution électronique. Cependant, dans la décision attaquée, la Commission n’aurait pas pris en compte les arguments et les études présentés par la requérante dans sa demande et la Commission se serait bornée à renvoyer à ses décisions antérieures qui concerneraient un autre marché géographique et ne prendraient pas en compte la dynamique de l’évolution du marché de la communication.
170 À cet égard, il y a lieu de relever que, dans la mesure où la requérante se borne, au soutien de son affirmation selon laquelle la Commission n’aurait pas pris en compte l’ensemble des éléments pertinents pour examiner la question de savoir s’il existe une substitution de la distribution électronique à la distribution postale en ce qui concerne les services de courrier publicitaire avec adresse aux niveaux national et international, à renvoyer aux arguments et aux études présentés dans sa demande, il a déjà été rappelé que le simple renvoi aux annexes ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit qui doivent figurer dans la requête, car il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir point 151 ci-dessus). Par conséquent, ce renvoi doit être rejeté comme étant irrecevable.
171 En tout état de cause, il est constant que la part de marché de la requérante pour le courrier publicitaire avec adresse en Autriche était de [confidentiel] %, ce qui ressort du considérant 54 de la décision attaquée, qui renvoie à la lettre de la requérante du 2 décembre 2013. Au vu d’un tel pourcentage et du fait que la Commission a constaté, au considérant 55 de la décision attaquée, que la libéralisation du marché postal du courrier publicitaire avec adresse depuis janvier 2011 avait, au moment de l’adoption de la décision attaquée, entraîné une augmentation de la part de marché globale pour les concurrents estimée à [confidentiel] % seulement, elle pouvait, sans commettre une erreur manifeste d’appréciation, conclure à l’absence d’exposition directe à la concurrence en Autriche des services postaux de courrier publicitaire avec adresse aux niveaux national et international. En effet, en se bornant à renvoyer, d’une manière générale, à la diminution du marché des services postaux de courrier publicitaire avec adresse, la requérante n’a pas démontré l’existence d’un élément pertinent qui aurait dû être pris en considération par la Commission pour apprécier la situation du marché en cause eu égard aux parts de marché mentionnées ci-dessus.
172 Enfin, s’agissant de l’argument selon lequel la Commission se serait bornée à renvoyer à ses décisions antérieures qui concerneraient un autre marché géographique et ne prendraient pas en compte la dynamique de l’évolution du marché de la communication, celui-ci doit également être rejeté. En effet, au considérant 52 de la décision attaquée, en plus de faire référence à sa décision 2007/564, la Commission a également constaté que la requérante n’avait fourni aucune preuve empirique au soutien de son affirmation selon laquelle le marché du courrier publicitaire avec adresse pouvait être inclus dans le marché des services postaux B2X pour les lettres avec adresse.
173 Le cinquième moyen doit donc être rejeté.
Sur le sixième moyen, tiré d’une application erronée de la directive 2004/17 et d’un défaut de motivation, relatif à l’exposition directe à la concurrence sur le marché des services postaux de courrier publicitaire non adressé aux niveaux national et international
174 La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 30 de la directive 2004/17 et commis un défaut de motivation en ce qu’elle aurait constaté, aux considérants 57 à 64 de la décision attaquée, que les services postaux de courrier publicitaire non adressé aux niveaux national et international n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche. Selon la requérante, si la Commission avait tenu compte de tous les éléments pertinents, celle-ci serait parvenue à la conclusion que la requérante détenait en 2012 une part de marché estimée de seulement [confidentiel] % sur le marché des publicités non adressées. Dans la réplique, la requérante demande l’audition, en qualité de témoin, de son expert.
175 Il ressort des considérants 57 à 64 de la décision attaquée que la Commission a conclu que les services postaux de courrier publicitaire non adressé aux niveaux national et international n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche et que, par conséquent, l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 ne s’appliquait pas aux contrats destinés à permettre la poursuite de ces activités en Autriche. Pour parvenir à cette conclusion, la Commission a constaté, au considérant 57 de la décision attaquée, que le courrier publicitaire non adressé était caractérisé par l’absence d’adresse de destination précise et qu’il s’agissait du courrier publicitaire non sollicité, qui répondait à certains critères, comme un poids, un format, un contenu et une présentation uniformes en vue de la distribution à un groupe de destinataires. Au considérant 58 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que la requérante avait défini le marché du courrier publicitaire non adressé comme comprenant la publicité sur d’autres supports, comme les publicités dans les quotidiens, ainsi que dans les journaux hebdomadaires régionaux. Le point de départ du raisonnement de la requérante était, selon la Commission, une décision du tribunal autrichien chargé de la répression des ententes illicites qui aurait admis en 2009 que tant la publicité directe que la publicité non adressée pouvaient être considérées comme faisant partie du même marché en cause pour les journaux distribués gratuitement. Ce tribunal n’aurait cependant reconnu la substituabilité que pour les grands clients et aurait établi plusieurs distinctions eu égard au marché géographique en cause. Au considérant 59 de la décision attaquée, la Commission a constaté que la requérante avait étendu cette conclusion à l’ensemble des journaux et laissé entendre que la distribution de courrier gratuit non adressé était en concurrence avec la publicité dans les journaux en général. La requérante aurait également effectué un test-MH dont la Commission aurait dûment examiné les résultats. Selon la Commission, la large interprétation par la requérante de la décision du tribunal autrichien en cause ne correspondait cependant pas à ses précédents, selon lesquels les différents types de supports étaient davantage complémentaires qu’interchangeables. Selon le considérant 60 de la décision attaquée, sur invitation de la Commission à donner leur point de vue en ce qui concerne la définition proposée du marché du courrier publicitaire non adressé, en prenant dûment en considération la décision du tribunal autrichien en cause et la situation juridique et factuelle en Autriche, les autorités autrichiennes n’auraient pas pu fournir d’informations complémentaires pour appuyer les affirmations de la requérante. Au considérant 61 de la décision attaquée, la Commission a donc constaté que les informations dont elle disposait n’étaient pas suffisamment concluantes pour appuyer la définition du marché proposée par la requérante. Selon les considérants 62 et 63 de la décision attaquée, le marché de produits en cause a été défini comme étant le marché des services postaux de courrier publicitaire non adressé sur lequel la requérante disposait d’une part de marché de [confidentiel] %.
176 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler (voir points 38 à 41 ci-dessus), d’une part, que, afin de définir le marché en cause, la Commission disposait d’un large pouvoir d’appréciation qui ne saurait faire l’objet que d’un contrôle restreint de la part du juge de l’Union et, d’autre part, que la charge de la preuve pour définir le marché en cause incombe à la requérante. Contrairement à ce qu’allègue la requérante, la Commission n’était donc pas obligée d’effectuer ses propres analyses, ainsi qu’il a déjà été constaté (voir point 125 ci-dessus). En outre, il a également déjà été constaté (voir points 56 et 57 ci-dessus) qu’un marché de produits en cause comprend tous les produits ou les services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables en raison de leurs caractéristiques, de leurs prix et de l’usage auquel ils sont destinés.
177 En premier lieu, la requérante fait valoir, en faisant référence à l’étude de la société de consultants E., intitulée « Austrian print advertising market » (Marché autrichien de la publicité imprimée), datant de septembre 2013 (ci-après l’étude « APAM »), annexée à sa demande relative à l’application de l’article 30 de la directive 2004/17, que la Commission n’a pas tenu compte du fait que tant les envois publicitaires non adressés et le publipostage que les annonces dans les journaux gratuits ont, aux yeux des demandeurs, les mêmes caractéristiques et la même destination et que, dès lors, le marché en cause englobait tant les envois publicitaires non adressés et le publipostage que les annonces dans les journaux gratuits. Selon la requérante, du point de vue de la demande, le publipostage et les annonces dans des journaux gratuits sont substituables en tant que forme de publicité, puisque tant le prix de cette forme de publicité que l’accessibilité à des clients potentiels seraient sensiblement les mêmes. S’agissant de l’accessibilité, la requérante estime avoir démontré que, en plus des deux grands journaux publiés en Autriche, il existait depuis 2009 une coopération entre des hebdomadaires gratuits en Autriche qui, ensemble, couvraient la plus grande partie du territoire autrichien. Selon la requérante, la publicité au travers des journaux gratuits pouvait donc déjà avoir une grande portée. En ce qui concerne le prix, la requérante affirme que les prix du millier de contact pour les formes de publicité en cause se situaient dans une fourchette allant de [confidentiel] euros pour les annonces dans les suppléments de quotidiens à [confidentiel] euros pour les envois publicitaires non adressés et le publipostage. La différence de prix entre publicités dans les quotidiens ([confidentiel] euros) et publicités non adressées sous forme de brochure ([confidentiel] euros) ne serait que d’environ quatre euros. Selon l’étude APAM, la seule chose qui importe est que les informations publicitaires contenues dans le publipostage ou dans l’annonce parviennent aux ménages.
178 Cette argumentation ne démontre pas que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en constatant, au considérant 61 de la décision attaquée, qu’elle ne disposait pas d’informations suffisamment concluantes pour appuyer la définition du marché proposée par la requérante. En effet, ainsi que l’affirme la Commission, il ressort de l’étude APAM qu’il existe des différences importantes au niveau des caractéristiques entre, d’une part, les imprimés publicitaires non adressés et, d’autre part, la publicité dans les journaux.
179 Premièrement, contrairement à ce qu’allègue la requérante, il ne ressort pas de l’étude APAM que la seule chose qui importe est que les informations publicitaires contenues dans le publipostage ou dans l’annonce parviennent aux ménages. Ainsi que l’affirme la Commission, selon le point 2.2.2 de cette étude, les critères les plus importants pour la publicité sont l’utilité, la crédibilité et la question de savoir si la publicité est informative. S’il est vrai que, dans ce passage de l’étude APAM, il n’est pas fait de comparaison entre l’envoi publicitaire non adressé et les suppléments publicitaires des journaux ou les annonces publicitaires dans les journaux, ainsi que l’affirme la requérante, il n’en demeure pas moins que ces critères concernent les caractéristiques des différentes formes de publicité. Il ressort de ladite étude que c’est exactement au niveau de ces caractéristiques qu’il existe des différences entre les services postaux de courrier publicitaire non adressé et la publicité dans les journaux. Ainsi, selon le point 2.2.1 de l’étude APAM, le problème principal du publipostage est l’absence de contexte et de connexion avec un support comme un journal, la publicité non adressée étant souvent vécue comme un invité indésirable dans la maison. Selon le point 2.2.1 de cette étude, en résumé, tandis que [confidentiel] % des destinataires de journaux emmènent les journaux incluant les feuilles de publicité chez eux, seulement [confidentiel] % des destinataires de publicité non adressée font de même. L’étude APAM conclut donc qu’il est moins probable que la publicité non adressée soit lue que la publicité dans les journaux. Ainsi que l’affirme la Commission, l’étude APAM indique également que la publicité dans les journaux bénéficie d’une confiance élevée chez les lecteurs et que la crédibilité est un élément assez important pour la publicité.
180 Deuxièmement, s’agissant de l’argument selon lequel les prix du publipostage et des annonces dans des journaux gratuits sont sensiblement les mêmes, il y a lieu de constater que celui-ci est fondé sur les constatations relatives aux prix du millier de contacts figurant dans l’étude APAM. Selon le point 1.2 de cette étude, dans chacun des 4,3 millions de ménages en Autriche, 2,3 personnes en moyenne lisent les envois publicitaires. Or, étant donné que la population autrichienne s’élevait en janvier 2013 à environ 8,51 millions d’habitants, ainsi que l’affirme la Commission, ce que la requérante n’a pas contesté lors de l’audience en réponse à une question posée par le Tribunal, il ne saurait être conclu que la requérante pouvait se fonder sur le fait que chacun des 4,3 millions de ménages en Autriche comprend en moyenne 2,3 personnes. Il y a également lieu de constater que, selon le point 2.2.1 de l’étude APAM, le courrier publicitaire non adressé est jeté par [confidentiel] % des destinataires.
181 En outre, la Commission indique à juste titre que la requérante a fondé son calcul sur son tarif le plus faible parmi les trois tarifs applicables, ainsi qu’il ressort du point 1.2 de l’étude APAM. Dans la mesure où la requérante justifie le choix de ce tarif par le fait que, selon elle, la plupart des publipostages sont distribués dans les zones de concentration urbaine dans lesquelles le tarif choisi s’applique, il convient de constater que, selon le point 2.2.1 de l’étude APAM, le destinataire moyen d’un publipostage habite dans une région rurale. De plus, il y a lieu de constater, ainsi que l’affirme la Commission, qu’il ressort du point 1.2 de cette étude que la requérante a choisi le prix pour la classe de poids la plus basse sans expliquer pourquoi celle-ci serait précisément pertinente. Par ailleurs, il est constant, ainsi que l’affirme la Commission, que les prix pris en compte par la requérante n’incluaient pas l’impression du matériel publicitaire à la différence du prix du millier de contacts des annonces publicitaires dans les journaux.
182 Dans la mesure où la requérante a fait valoir, lors de l’audience, que la Commission n’avait pas contesté, dans sa décision d’exécution 2014/299, l’existence d’un marché commun comprenant tant les envois publicitaires non adressés que les annonces dans les journaux gratuits, il convient de constater que cette décision concernait le secteur postal sur le marché hongrois. S’il est vrai que, au considérant 16 de ladite décision, la Commission a défini le marché en cause comme celui des services de distribution de publicités non adressées fournis par des opérateurs postaux, il n’en demeure pas moins que cette définition était précisément fondée sur les informations relatives au marché hongrois mentionnées aux considérants 11 à 15 de la décision d’exécution 2014/299. La requérante n’a ni affirmé ni établi que la situation sur le marché autrichien et celle sur le marché hongrois qui avait été examinée par la Commission dans la décision d’exécution 2014/299 étaient comparables. Cette argumentation doit donc être rejetée.
183 En second lieu, la requérante fait valoir que, conformément à la communication sur la définition du marché, elle a étudié la substituabilité au niveau de la demande et au niveau de l’offre et qu’elle a procédé, dans l’étude APAM, à un test-MH qui aurait confirmé qu’il existait en Autriche un marché commun du publipostage non adressé et des annonces ou des suppléments de journaux dans les journaux gratuits. La requérante affirme que, selon le test-MH effectué auprès de 248 entreprises et non de 248 personnes, ainsi qu’il ressortirait de la décision attaquée, une augmentation de prix de 5 % conduirait à un recul des publicités par publipostage de [confidentiel] %. Cette baisse de demande serait si forte qu’une telle augmentation de prix ne serait pas rentable pour la requérante. La requérante affirme que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas suffisamment tenu compte de son argumentation et des résultats de l’étude APAM, et notamment de la structure du marché autrichien de la publicité et du test-MH. Il résulterait de l’étude APAM que, du point de vue des demandeurs, le publipostage et les annonces dans les journaux sont interchangeables. Selon la requérante, la décision du tribunal autrichien mentionnée au considérant 58 de la décision attaquée ne constituait qu’un point de départ pour la délimitation du marché exposée par la requérante et ne visait pas à remplacer les analyses et les études produites. En outre, dans la mesure où la Commission se serait bornée, au considérant 61 de la décision attaquée, à indiquer que les informations dont elle disposait n’étaient pas suffisamment concluantes pour appuyer la délimitation du marché exposée par la requérante, elle aurait violé son obligation de motivation. De plus, en n’examinant pas les arguments et les preuves produits par la requérante, la Commission aurait également violé le droit d’être entendu de la requérante.
184 Premièrement, s’agissant de l’argumentation selon laquelle l’appréciation de la Commission est entachée d’une erreur manifeste en raison du fait qu’un test-MH aurait établi qu’il existait en Autriche un marché commun du publipostage non adressé et des annonces ou des suppléments de journaux dans les journaux gratuits, celle-ci ne saurait être accueillie. En effet, la Commission pouvait, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, constater aux considérants 59 et 61 de la décision attaquée que, après avoir dûment examiné les résultats de ce test dont les questionnaires lui avaient été transmis par la requérante par lettre du 2 décembre 2013, elle ne disposait pas d’informations suffisamment concluantes pour appuyer la définition du marché proposée par la requérante.
185 D’une part, eu égard au fait qu’il ressort des statistiques autrichiennes produites par la Commission qu’il y avait en Autriche en 2011 environ 311 000 entreprises et que le nombre d’entreprises interrogées était limité à 248, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir émis des doutes quant à la représentativité de l’enquête menée. D’autre part, il convient de relever qu’il ressort du tableau 52 de l’étude APAM que la répartition selon la taille des entreprises retenues pour l’enquête en cause ne respectait pas la répartition des entreprises dans l’économie autrichienne. Concernant l’argument selon lequel ce sont avant tout les entreprises de commerce de détail ayant souvent plus de 250 collaborateurs qui utilisent les prospectus comme forme de publicité, il y a lieu de constater que la requérante ne fournit aucun élément de preuve permettant de démontrer que son choix était représentatif, d’autant plus que, selon la requérante, le choix des 248 entreprises parmi ses clients ayant les chiffres d’affaires les plus importants dépendait seulement de leur disponibilité.
186 Par ailleurs, dans la mesure où la requérante fait valoir que, contrairement à ce qu’a constaté la Commission au considérant 59 de la décision attaquée, des entreprises ont été interrogées et non des personnes, il suffit de relever que le terme « personnes » inclut tant la personne physique que la personne morale. L’utilisation du terme « personne » ne démontre donc pas une inexactitude commise par la Commission.
187 Deuxièmement, la requérante fait valoir que la Commission a violé son obligation de motivation en ce que celle-ci se serait bornée à constater, au considérant 61 de la décision attaquée, que les informations dont elle disposait n’auraient pas été suffisamment concluantes pour appuyer la délimitation du marché exposée par la requérante. Selon la requérante, cette considération est exposée sans qu’il soit précisé si elle repose seulement sur les enquêtes menées par elle ou aussi sur les informations complémentaires recueillies auprès des autorités autrichiennes. Cette argumentation doit être rejetée. En effet, il ressort des termes « dès lors » utilisés au considérant 61 de la décision attaquée que la constatation effectuée dans ce considérant contient une conclusion qui est fondée sur les considérants 57 à 60 de cette décision, qui incluent tant l’appréciation des enquêtes menées par la requérante que la réponse des autorités autrichiennes.
188 Troisièmement, dans la mesure où la requérante affirme que son droit d’être entendue garanti par l’article 6 TFUE et par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne a été violé en raison du fait que la Commission n’aurait pas analysé les arguments et les preuves qu’elle avait produits, il convient de rappeler que l’article 41 de la charte des droits fondamentaux, intitulé « Droit à une bonne administration », dispose, au paragraphe 1, que « [t]oute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l’Union ». D’après l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux, ce droit comporte notamment le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son égard. Selon la jurisprudence relative au principe de bonne administration, dans les cas où les institutions de l’Union disposent d’un pouvoir d’appréciation, le respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives revêt une importance d’autant plus fondamentale. Parmi ces garanties figure, notamment, l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce (arrêt du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, Rec, EU:C:1991:438, point 14). Ainsi qu’il résulte des points 176 à 187 ci-dessus, la Commission n’a pas violé cette obligation.
189 Le sixième moyen doit donc être rejeté.
190 S’agissant de la demande d’audition, en qualité de témoin, de l’expert de la requérante (voir point 174 ci-dessus), celui-ci doit, selon cette dernière, être entendu aux fins d’expliquer l’étude APAM et les critères relatifs à l’accessibilité et aux prix du millier de contacts ainsi que les résultats prouvant la substituabilité des envois publicitaires non adressées et des annonces dans les journaux gratuits. À cet égard, force est de constater que cette demande ayant été faite au stade de la réplique sans aucune justification concernant le retard, elle doit être rejetée comme étant irrecevable, en vertu de l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure du 2 mai 1991. En tout état de cause, au vu de ce qui précède, sur la base des pièces des dossiers et en raison des réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé et donc en mesure de comprendre toutes les questions économiques concernées afin de décider si l’appréciation de la Commission était entachée d’une erreur manifeste. Par conséquent, il n’y a pas lieu de donner suite à cette demande pour autant qu’elle concerne le présent moyen.
Sur le septième moyen, tiré d’un défaut de motivation et d’une violation de l’obligation de motivation, relatif à l’exposition directe à la concurrence sur le marché des services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés
191 La requérante fait valoir que la Commission a commis un défaut de motivation et violé son obligation de motivation en ce qu’elle aurait constaté, aux considérants 65 à 69 de la décision attaquée, que les services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche. Selon la requérante, si la Commission avait tenu compte de tous les éléments pertinents, celle-ci serait parvenue à la conclusion qu’il existait un marché commun de la distribution standard de quotidiens, d’hebdomadaires et de mensuels et que la requérante était directement exposée à la concurrence sur ce marché. Ainsi, la Commission aurait également violé son droit d’être entendue. Afin d’étayer son argumentation et d’expliquer l’étude de la société de consultants E., intitulée « Austrian delivery market for newspapers » (Marché autrichien de la distribution de journaux), datant de septembre 2013 (ci-après l’étude « ADMN »), la requérante demande l’audition, en qualité de témoin, de son expert, qui est l’auteur de l’étude ADMN.
192 Il ressort des considérants 65 à 69 de la décision attaquée que la Commission a conclu que les services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche et que, par conséquent, l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 ne s’appliquait pas aux contrats destinés à permettre la poursuite de ces activités en Autriche. Pour parvenir à cette conclusion, la Commission a constaté, au considérant 65 de la décision attaquée, que la décision 2007/564 établissait une distinction entre la distribution matinale de journaux et la distribution standard. Selon le considérant 66 de la décision attaquée, la requérante ne pratiquait pas la distribution matinale de journaux, mais bien la distribution standard de journaux. Aux considérants 67 et 68 de la décision attaquée, la Commission a constaté que le marché de produits en cause était le marché des services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés et que la requérante détenait [confidentiel] % de ce marché. Les principaux concurrents seraient les réseaux nationaux ou régionaux organisés par les éditeurs, qui distribueraient des journaux avec adresse et non adressés aux ménages. Ces concurrents détiendraient cependant globalement une part de marché cumulée de [confidentiel] % seulement.
193 En premier lieu, s’agissant de l’argumentation selon laquelle la Commission a violé son obligation de motivation, la requérante fait valoir que le renvoi global à une décision antérieure au considérant 65 de la décision attaquée ne constituait pas une motivation suffisante. Selon elle, cette décision antérieure traite du marché de la distribution en Finlande et la Commission n’a pas donné de raison pour laquelle il existerait un rapport entre la situation sur le marché finlandais et la situation de marché particulière en Autriche, et aucune raison justifiant que la Commission ait opéré une distinction entre la distribution matinale de journaux et la distribution standard ne se trouve dans cette décision. La requérante affirme que, étant donné que les structures des marchés des différents États membres étaient en partie considérablement différentes, la Commission aurait dû démontrer une ressemblance entre les marchés finlandais et autrichien de la distribution de journaux pour rendre compréhensible sa décision. La Commission aurait également dû analyser la situation concrète du marché en Autriche et motiver sa décision en conséquence.
194 À cet égard, il convient de relever que, s’il est vrai que la décision attaquée ne contient aucune raison substantielle justifiant que la Commission ait établi une distinction entre la distribution matinale de journaux et la distribution standard, il n’en demeure pas moins que cette décision fait référence à la pratique de cette dernière telle que reflétée dans la décision 2007/564, par laquelle elle a exempté certains services du secteur postal en Finlande de l’application de la directive 2004/17. Il ressort des considérants 13 et 14 de la décision 2007/564 que, dans sa pratique, la Commission a opéré une distinction entre la distribution matinale de journaux et la distribution standard de journaux. Il a déjà été constaté que la requérante avait été étroitement impliquée dans la procédure administrative et que la Commission avait même envoyé le projet de décision à l’expert engagé par la requérante et qu’elle en avait discuté avec celui-ci lors d’une réunion qui s’est tenue le 28 mars 2014 (voir point 83 ci-dessus). Le projet de décision examiné lors de cette réunion comportait déjà le texte du considérant 65 de la décision attaquée.
195 En outre, il ressort de la lettre de la Commission du 28 novembre 2013 à la requérante et de celle de la Commission du 5 décembre 2013 à la République d’Autriche que celle-ci a informé la requérante et cet État membre du fait que, dans sa pratique antérieure, elle établissait une distinction entre la distribution matinale de journaux et la distribution standard. Dans sa lettre du 13 janvier 2014 à l’expert engagé par la requérante, la Commission a explicitement mentionné ladite distinction.
196 De plus, il convient de constater que, au point 3.1.6 de sa demande, qui concerne le marché des services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés, la requérante s’est bornée en substance à affirmer que le marché de produits en cause englobait la distribution en Autriche de journaux quotidiens, d’hebdomadaires et de mensuels, adressés et non adressés en renvoyant, de manière globale, à l’étude ADMN. Ce faisant, elle n’a indiqué aucune raison pour laquelle la distinction effectuée par la Commission dans sa pratique entre la distribution matinale de journaux et la distribution standard serait erronée. Dans la mesure où la requérante fait valoir qu’elle a établi des paramètres de définition du marché à une page précise de l’étude ADMN, il y a lieu de constater que le passage indiqué par elle à cet égard contient uniquement une description des conclusions de l’avocat général Jacobs dans l’affaire Bronner (C‑7/97, Rec, EU:C:1998:264). Or, il ressort du point 31 de ces conclusions que la question de la définition précise du marché avait été laissée ouverte dans cette affaire. Dans son arrêt du 26 novembre 1998, Bronner (C‑7/97, Rec, EU:C:1998:569, point 34), la Cour a laissé à la juridiction nationale le soin d’examiner la question de la délimitation du marché.
197 Par conséquent, étant donné que la requérante était informée de la pratique de la Commission, que, ainsi que l’affirme également la Commission, elle n’a pas fourni de raisons substantielles pour appliquer une définition différente au marché en cause et que la Commission n’était pas tenue d’anticiper des objections potentielles (voir point 46 ci-dessus), il ne saurait être conclu que la Commission a méconnu les exigences de l’obligation de motivation mentionnées aux points 20 et 46 ci-dessus (voir, en ce sens, arrêt du 1er juillet 2010, AstraZeneca/Commission, T‑321/05, Rec, EU:T:2010:266, point 81 et jurisprudence citée).
198 En second lieu, dans la mesure où la requérante fait valoir un défaut de motivation ainsi qu’une violation de son droit d’être entendue (voir à cet égard point 188 ci‑dessus), elle affirme en substance que la Commission n’a pas suffisamment examiné son argumentation et l’étude ADMN qu’elle avait produite lors de la procédure administrative. Selon la requérante, dans sa demande relative à l’application de l’article 30 de la directive 2004/17, elle a exposé de manière détaillée le fait que le marché de produits en cause englobait la distribution en Autriche de journaux et d’hebdomadaires paraissant quotidiennement, hebdomadairement et mensuellement, adressés et non adressés. En faisant référence à l’étude ADMN, elle affirme que, en plus d’elle, deux réseaux faisaient partie des fournisseurs de distribution de journaux et de magazines à l’échelle de tout le pays. En outre, dans sa demande, elle aurait exposé que tout concurrent avait librement accès à la distribution de journaux et de magazines et que, dans le secteur des quotidiens, sa part de marché était de [confidentiel] %. Même en intégrant la distribution de journaux et de magazines paraissant hebdomadairement ou mensuellement, la requérante serait, avec une part de marché de [confidentiel] %, directement exposée à la concurrence avec d’autres distributeurs. Selon la requérante, eu égard à l’étude ADMN, la Commission aurait, en tout état de cause, dû effectuer une délimitation exacte du marché en cause, contrairement à ce qu’elle aurait fait au considérant 6 de la décision attaquée et conformément à ce qui serait prévu au point 41 de la communication sur la définition du marché. De plus, selon elle, les réseaux de ses concurrents existaient déjà en Autriche et ces derniers pouvaient à tout moment entrer sur le marché.
199 Premièrement, il y a lieu de relever que cette argumentation ne démontre pas que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en définissant, au considérant 67 de la décision attaquée, le marché de produits en cause comme celui des services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés et en excluant les services de distribution matinale de journaux. En effet, il a déjà été constaté (voir point 196 ci-dessus) que, dans ses argumentations figurant dans sa demande et dans l’étude ADMN auxquelles elle fait référence devant le Tribunal, la requérante n’indique aucune raison pour laquelle la distinction effectuée par la Commission dans sa pratique et dans la décision attaquée entre la distribution matinale de journaux et la distribution standard serait erronée.
200 En outre, s’agissant du renvoi de la requérante de manière générale à sa demande et à l’étude ADMN, il a déjà été rappelé qu’un simple renvoi aux annexes ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit qui doivent figurer dans la requête, car il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir point 151 ci-dessus). Ce renvoi doit donc être rejeté comme étant irrecevable. En tout état de cause, contrairement à ce qu’allègue la requérante, il convient de relever que l’étude ADMN contient également des considérations selon lesquelles, pour la définition du marché de produits en cause, il y a lieu de distinguer la distribution matinale de journaux et la distribution standard de journaux. En effet, selon le point 1 de cette étude, la distribution de journaux se fait à des heures différentes et constitue un élément de qualité. Toujours selon ledit point de la même étude, les journaux quotidiens doivent être dans la boîte aux lettres le matin avant que les gens ne quittent leurs maisons, tandis que les journaux hebdomadaires et régionaux qui sont principalement financés par la publicité sont distribués pendant la journée, puisqu’ils ne sont pas sensibles au facteur temps.
201 Deuxièmement, il convient de constater que la requérante n’a pas contesté la constatation de la Commission, figurant aux considérants 66 et 68 de la décision attaquée, selon laquelle elle ne pratiquait pas la distribution matinale de journaux et selon laquelle elle détenait une part de marché de [confidentiel] % sur le marché des services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés.
202 Troisièmement, la requérante fait valoir que, eu égard à l’étude ADMN, la Commission aurait, en tout état de cause, dû effectuer une délimitation exacte du marché en ce qui concerne les services postaux de distribution de journaux avec adresse et non adressés. Les considérations figurant au considérant 6 de la décision attaquée, selon lesquelles une définition précise du marché en cause pouvait être laissée ouverte, seraient inexactes. Selon la requérante, une délimitation exacte du marché, conforme aux méthodes prescrites par la jurisprudence et au point 41 de la communication sur la définition du marché, était indispensable.
203 Cette argumentation ne saurait être accueillie. En effet, dans la mesure où la requérante fait référence à l’étude ADMN pour définir le marché de produits en cause, son argumentation a déjà été rejetée (voir point 200 ci-dessus). Ensuite, pour autant que la requérante se réfère au considérant 6 de la décision attaquée, il convient de relever que, selon celui-ci, qui figure dans la partie relative au cadre juridique de la décision attaquée, bien que des définitions plus étroites du marché puissent être envisagées dans certains cas, la définition précise du marché en cause pouvait être laissée ouverte aux fins de la décision attaquée, dans la mesure où le résultat de l’analyse demeurait inchangé, qu’une définition étroite ou une définition large soit prise en considération. En l’espèce, tandis que la question de la définition précise du marché en cause a été laissée ouverte par la Commission en ce qui concerne notamment les services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau national, ainsi qu’il ressort du considérant 29 de la décision attaquée, tel n’était cependant pas le cas des services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés.
204 En outre, s’agissant de l’argument selon lequel la Commission aurait dû effectuer une délimitation exacte du marché selon les méthodes prescrites par la jurisprudence et par le point 41 de la communication sur la définition du marché selon lequel le critère de préférences des consommateurs constitue un élément pertinent pour apprécier la substituabilité de deux produits au niveau de la demande, il convient de rappeler que la charge de la preuve relative au fait que les conditions prévues à l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2004/17 sont satisfaites incombe au demandeur et à l’État membre concerné, la Commission ne disposant en l’espèce, par rapport aux vastes pouvoirs d’enquête conférés dans le cadre de l’application du droit de la concurrence de l’Union par le règlement n° 1/2003 et par le règlement n° 139/2004, que de pouvoirs limités (voir point 41 ci-dessus). En l’espèce, il incombait donc à la requérante de fournir suffisamment d’éléments pour définir le marché de produits en cause.
205 Quatrièmement, en ce qui concerne l’argument selon lequel les réseaux des concurrents existaient déjà en Autriche et selon lequel ces derniers pouvaient à tout moment entrer sur le marché, puisqu’il n’y aurait pas eu d’obstacle à l’entrée, il y a lieu de constater que, au vu des parts de marché très élevées de la requérante tant sur le marché de la distribution standard de journaux avec adresse et non adressés, à savoir [confidentiel] %, que sur les marchés des services postaux de lettres avec adresse B2X et C2X au niveau national, à savoir respectivement [confidentiel] % (voir points 99 et 139 ci-dessus), il ne saurait être conclu que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant que les services postaux de distribution standard de journaux avec adresse et non adressés n’étaient pas directement exposés à la concurrence en Autriche.
206 Le septième moyen doit donc être rejeté.
207 S’agissant de la demande d’audition, en qualité de témoin, de l’expert de la requérante (voir point 191 ci-dessus), au vu de ce qui précède, sur la base des pièces des dossiers et en raison des réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé et donc en mesure de comprendre toutes les questions économiques concernées afin de décider si l’appréciation de la Commission était entachée d’une erreur manifeste. Par conséquent, il n’y a pas lieu de donner suite à cette demande pour autant qu’elle concerne le présent moyen.
208 Au vu de tout ce qui précède, le recours doit être partiellement accueilli dans la mesure où il concerne les services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau international (voir point 163 ci-dessus). Par conséquent, la décision attaquée doit être annulée dans la mesure où elle indique que la directive 2004/17 continue à avoir vocation à s’appliquer au marché des services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau international en Autriche. Le recours doit être rejeté pour le surplus.
Sur les dépens
209 Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.
210 En l’espèce, il convient de relever qu’il y a lieu de faire droit aux conclusions de la requérante en ce qu’elles visent à l’annulation de la décision attaquée dans la mesure où la directive 2004/17 continue à avoir vocation à s’appliquer au marché des services postaux de lettres avec adresse B2X au niveau international en Autriche. En revanche, le recours doit être rejeté dans la mesure où il concerne les autres marchés de services postaux en cause. Il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que la requérante supportera ses propres dépens ainsi que huit dixièmes de ceux exposés par la Commission. La Commission supportera deux dixièmes de ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision d’exécution 2014/184/UE de la Commission, du 2 avril 2014, exemptant certains services du secteur postal, en Autriche, de l’application de la directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux, est annulée dans la mesure où elle indique que cette directive continue à avoir vocation à s’appliquer au marché des services postaux de lettres avec adresse entre clients professionnels et entre clients professionnels et clients particuliers au niveau international en Autriche.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) Österreichische Post AG supportera ses propres dépens ainsi que huit dixièmes de ceux exposés par la Commission européenne.
4) La Commission supportera deux dixièmes de ses propres dépens.
Dittrich | Schwarcz | Tomljenović |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 avril 2016.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.
1 Données confidentielles occultées.
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