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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Spa Monopole v EUIPO - YTL Hotels & Properties (SPA VILLAGE) (Judgment) French Text [2016] EUECJ T-625/15 (27 October 2016) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/T62515.html Cite as: EU:T:2016:631, [2016] EUECJ T-625/15, ECLI:EU:T:2016:631 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)
27 octobre 2016(*)
« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale SPA VILLAGE – Marque Benelux verbale antérieure SPA – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) n° 207/2009 »
Dans l’affaire T‑625/15,
Spa Monopole, compagnie fermière de Spa SA/NV, établie à Spa (Belgique), représentée par Mes E. Cornu et É. De Gryse, avocats,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant
YTL Hotels & Properties Sdn Bhd, établie à Kuala Lumpur (Malaisie), représentée par Me M. Edenborough, avocat,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 11 septembre 2015 (affaire R 1954/2013‑4), relative à une procédure d’opposition entre Spa Monopole, compagnie fermière de Spa, et YTL Hotels & Properties,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre),
composé de MM. S. Gervasoni, faisant fonction de président, L. Madise (rapporteur) et Z. Csehi, juges,
greffier : M. I. Dragan, administrateur,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 novembre 2015,
vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal, le 14 janvier 2016,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 février 2016,
à la suite de l’audience du 13 septembre 2016,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 14 mai 2003, l’intervenante, YTL Hotels & Properties Sdn Bhd, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal SPA VILLAGE.
3 Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 43, au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent notamment à la description suivante : « Services consistant à fournir des aliments et des boissons ; cafés-restaurants ; cafétérias ; restaurants à service rapide et permanent (snack-bars) ; restaurants libre‑service ; services hôteliers de restauration ; services de restaurants ; services de traiteurs et de banquets ; services de bar ; services de bars ; services hôteliers ».
4 La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 12/2005, du 21 mars 2005.
5 Le 13 juin 2005, la requérante, Spa Monopole, compagnie fermière de Spa SA/NV, a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée, notamment, pour les services mentionnés au point 3 ci-dessus.
6 L’opposition était fondée sur plusieurs marques verbales antérieures enregistrées au Benelux, parmi lesquelles, la marque SPA, déposée et enregistrée sous le numéro 389 230, le 21 février 1983, dûment renouvelée depuis, pour les produits relevant de la classe 32 et correspondant à la description suivante : « Eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; sirops et autres préparations pour faire des boissons ».
7 Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et à l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement.
8 Le 7 août 2013, la division d’opposition a accueilli l’opposition dans son intégralité, en estimant, notamment, qu’il existait un risque de confusion entre les signes mentionnés aux points 2 et 6 ci-dessus, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.
9 Le 4 octobre 2013, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition, pour autant que cette dernière avait accueilli l’opposition.
10 Par décision du 11 septembre 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition et rejeté l’opposition à l’enregistrement de la marque demandée.
11 Dans le cadre de l’analyse du risque de confusion au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, premièrement, au point 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, compte tenu notamment de la marque antérieure en cause, le territoire pertinent était celui des pays du Benelux et que, en raison de la nature des produits et des services en cause, le public visé était le grand public de ces pays faisant preuve d’un niveau d’attention moyen. Deuxièmement, au point 57 de la décision attaquée, elle a estimé que la requérante avait apporté la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pour les « autres boissons non alcooliques ; autres préparations [que les sirops] pour faire des boissons », l’usage sérieux de ladite marque pour les « eaux minérales et gazeuses » n’étant pas contesté. Troisièmement, s’agissant de la comparaison des produits et des services visés par les signes en conflit, ainsi qu’il ressort des points 70 et 71 de la décision attaquée, elle a exclu l’existence d’une similitude entre ceux-ci, au motif qu’ils différaient suffisamment par leur nature, fonction, origine commerciale et leur producteur ou fournisseur et a donc conclu que l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 n’était pas applicable en l’espèce.
12 Dans le cadre de son examen des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, premièrement, au point 124 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé que la marque antérieure en cause et la marque demandée étaient faiblement similaires. Deuxièmement, ainsi qu’il ressort des points 125 à 128 de la décision attaquée, elle a considéré que la requérante avait démontré que ladite marque antérieure était renommée, au moins en ce qui concernait les « eaux minérales et gazeuses ». Troisièmement, ainsi qu’il ressort des points 135 à 139 de la décision attaquée, elle a observé que, en raison du faible degré de similitude des signes en conflit et de la distance entre les produits et services en cause, il était peu probable que, malgré la renommée de la marque antérieure, le public pertinent établisse un lien entre les signes en conflit. Partant, au point 141 de la décision attaquée, elle a conclu que la requérante n’avait pas démontré que l’usage sans juste motif de la marque demandée risquait de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou que cet usage leur porterait préjudice et a donc exclu, en l’espèce, l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.
Conclusions des parties
13 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.
14 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
15 L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens ;
– dans l’alternative, condamner la requérante et l’EUIPO conjointement aux dépens.
16 Lors de l’audience, la requérante a précisé, ainsi qu’il a été pris acte au procès-verbal de l’audience, qu’elle demandait l’annulation partielle de la décision attaquée, à savoir en ce qu’elle concernait les services relevant de la classe 43 mentionnés au point 3 ci‑dessus. À cet égard, elle a exposé que les « services de bar » au singulier, dont l’apparente identité aux « services de bars » au pluriel est liée à la traduction en français, langue de procédure auprès de l’EUIPO, des expressions anglaises « cocktail lounge bar » et « bar services » contenues dans la demande d’enregistrement de la marque demandée, étaient également visés par son recours.
En droit
17 En se fondant sur la marque antérieure mentionnée au point 6 ci-dessus, la requérante soulève deux moyens, le premier, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et, le second, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.
18 Il convient d’abord d’analyser le second moyen soulevé par la requérante.
19 Par son second moyen, la requérante soutient, en substance, que l’enregistrement de la marque demandée pour les services mentionnés au point 3 ci‑dessus aurait dû être refusé sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, compte tenu, premièrement, de l’importante renommée de la marque antérieure, deuxièmement, du fait que les signes en conflit sont similaires et, troisièmement, du degré de proximité entre les produits et services visés par les signes en conflit.
20 L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.
21 Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou présente des similitudes avec la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui n’ont pas de similitudes avec ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque de l’Union européenne antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’Union et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.
22 En ce qui concerne les marques enregistrées auprès de l’Office Benelux de la propriété intellectuelle, le territoire du Benelux doit être assimilé au territoire d’un État membre (voir, par analogie, arrêt du 14 septembre 1999, General Motors, C‑375/97, EU:C:1999:408, point 29).
23 En outre, pour les mêmes motifs que ceux relatifs à la condition de la renommée dans un État membre, il ne peut ainsi être exigé d’une marque Benelux que sa renommée s’étende à la totalité du territoire du Benelux. Il suffit que cette renommée existe dans une partie substantielle de celui-ci, laquelle peut correspondre, le cas échéant, à une partie de l’un des pays du Benelux (voir, par analogie, arrêt du 14 septembre 1999, General Motors, C‑375/97, EU:C:1999:408, point 29).
24 La protection élargie accordée à la marque antérieure par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 présuppose la réunion des conditions suivantes : premièrement, l’identité ou la similitude des marques en conflit, deuxièmement, l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition et, troisièmement, l’existence d’un risque que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice. Ces trois conditions sont cumulatives et l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [voir arrêt du 9 mars 2012, Ella Valley Vineyards/OHMI – HFP (ELLA VALLEY VINEYARDS), T‑32/10, EU:T:2012:118, point 18 et jurisprudence citée].
25 S’agissant, plus particulièrement, de la troisième des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, mentionnée au point 24 ci-dessus, celle-ci vise trois types de risque distincts et alternatifs, à savoir que l’usage sans juste motif de la marque demandée, premièrement, porte préjudice au caractère distinctif de la marque antérieure ou, deuxièmement, porte préjudice à la renommée de la marque antérieure ou, troisièmement, tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure. Le premier type de risque visé par cette disposition est caractérisé lorsque la marque antérieure n’est plus en mesure de susciter une association immédiate avec les produits pour lesquels elle est enregistrée et employée. Il vise la dilution de la marque antérieure à travers la dispersion de son identité et de son emprise sur l’esprit du public. Le deuxième type de risque visé est constitué lorsque les produits ou les services visés par la marque demandée peuvent être perçus par le public d’une manière telle que la force d’attraction de la marque antérieure s’en trouve diminuée. Le troisième type de risque visé est celui que l’image de la marque renommée ou les caractéristiques projetées par cette dernière soient transférées aux produits désignés par la marque demandée, de sorte que leur commercialisation puisse être facilitée par cette association avec la marque antérieure renommée. Il convient cependant de souligner que, dans aucun de ces cas, l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit n’est requise, le public pertinent devant seulement pouvoir établir un lien entre elles sans toutefois devoir forcément les confondre. Enfin, eu égard au libellé de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, il suffit qu’il existe un seul des types de risque susvisés pour que cette disposition devienne d’application [voir arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, points 36 à 42 et jurisprudence citée].
26 Afin de mieux cerner le risque visé par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, il convient de relever que la fonction première d’une marque consiste incontestablement en une « fonction d’origine ». Il n’en reste pas moins qu’une marque agit également comme moyen de transmission d’autres messages concernant, notamment, les qualités ou caractéristiques particulières des produits ou des services qu’elle désigne, ou les images et sensations qu’elle projette, tels que le luxe, le style de vie, l’exclusivité, l’aventure, la jeunesse. En ce sens, la marque possède une valeur économique intrinsèque autonome et distincte par rapport à celle des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée. Les messages en question que véhicule notamment une marque renommée ou qui lui sont associés confèrent à celle-ci une valeur importante et digne de protection, et ce d’autant plus que, dans la plupart des cas, la renommée d’une marque est le résultat d’efforts et d’investissements considérables de son titulaire. C’est ainsi que l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 assure la protection d’une marque renommée, à l’égard de toute demande de marque identique ou similaire qui pourrait porter atteinte à son image, même si les produits ou services visés par la marque demandée ne sont pas analogues à ceux pour lesquels la marque antérieure renommée a été enregistrée (arrêt du 22 mars 2007, VIPS, T‑215/03, EU:T:2007:93, point 35).
27 C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 n’étaient pas remplies en l’espèce.
28 À titre liminaire, il est constant, ainsi qu’il a été indiqué au point 47 de la décision attaquée, que le territoire pertinent est celui de pays du Benelux et que le public ciblé par les produits et services visés par les signes en conflit est le même, à savoir le grand public desdits pays. Eu égard aux produits concernés, à savoir des biens de consommation courante et des services contestés qui constituent des services quotidiens, le public visé est constitué du consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [voir, en ce sens, arrêt du 16 janvier 2014, Message Management/OHMI – Absacker (ABSACKER of Germany), T‑304/12, non publié, EU:T:2014:5, point 28 et jurisprudence citée].
Sur la renommée de la marque antérieure
29 Selon la jurisprudence, pour satisfaire à la condition relative à la renommée, une marque nationale antérieure doit être connue d’une partie significative du public concerné par les produits ou services couverts par elle [arrêt du 13 décembre 2004, El Corte Inglés/OHMI – Pucci (EMILIO PUCCI), T‑8/03, EU:T:2004:358, point 67 ; voir également, par analogie, arrêt du 14 septembre 1999, General Motors, C‑375/97, EU:C:1999:408, point 31].
30 En l’espèce, il convient d’entériner les appréciations de la chambre de recours, contenues aux points 125 à 128 de la décision attaquée, qui ne sont, au demeurant, pas contestées par les parties, selon lesquelles la requérante a apporté la preuve de la grande renommée de la marque antérieure, auprès du public pertinent, au regard au moins des « eaux minérales et gazeuses », en raison de son usage « long et intensif » et de sa « position leader sur le marché ».
31 D’ailleurs, ainsi que l’a souligné la chambre de recours au point 127 de la décision attaquée, la renommée de cette marque antérieure a été admise à plusieurs reprises par le Tribunal [arrêts du 19 juin 2008, Mülhens/OHMI – Spa Monopole (MINERAL SPA), T‑93/06, non publié, EU:T:2008:215, point 36 ; du 12 novembre 2009, Spa Monopole/OHMI – De Francesco Import (SpagO), T‑438/07, EU:T:2009:434, point 19, et du 17 mars 2015, Spa Monopole/OHMI – South Pacific Management (Manea Spa), T‑611/11, non publié, EU:T:2015:152, points 85 et 86]. Aucun élément nouveau permettant de remettre en cause cette appréciation n’a été présenté, en l’espèce, devant le Tribunal.
Sur la similitude des signes en conflit
32 La chambre de recours a indiqué, au point 124 de la décision attaquée, que la similitude des signes en conflit était faible. À cet égard, elle a renvoyé à la comparaison, effectuée aux points 82 à 95 de la décision attaquée au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, de la marque demandée à une autre marque antérieure de la requérante, identique à celle en cause en l’espèce. Dans le cadre de cette analyse, la chambre de recours a considéré que le mot « village » de la marque demandée était l’élément le plus distinctif et dominant de cette marque, tandis que le terme « spa » était descriptif et générique, et a conclu que les signes en conflit étaient visuellement, phonétiquement et conceptuellement similaires à un faible degré.
33 La requérante conteste ces appréciations et fait valoir que la marque antérieure garde une position distinctive autonome au sein de la marque demandée et représente l’« élément d’attaque » de cette dernière, qui ne disposerait pas d’une signification différente de la simple juxtaposition des mots la composant.
34 Il ressort de la jurisprudence que, afin de satisfaire à la condition tenant à l’existence d’une identité ou d’une similitude entre les signes en conflit, posée par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, il n’est pas nécessaire de démontrer qu’il existe, dans l’esprit du public concerné, un risque de confusion entre la marque antérieure jouissant d’une renommée et la marque demandée. Il suffit que le degré de similitude entre ces deux marques ait pour effet que le public concerné établisse un lien entre elles. À cet égard, plus les marques en conflit sont similaires, plus il est vraisemblable que la marque demandée évoquera, dans l’esprit du public pertinent, la marque antérieure renommée (voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2012, ELLA VALLEY VINEYARDS, T‑32/10, EU:T:2012:118, point 37).
35 L’appréciation de la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants (voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2012, ELLA VALLEY VINEYARDS, T‑32/10, EU:T:2012:118, point 38 et jurisprudence citée). En outre, il ressort de la jurisprudence que deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [voir arrêt du 14 avril 2011, Lancôme/OHMI – Focus Magazin Verlag (ACNO FOCUS), T‑466/08, EU:T:2011:182, point 52 et jurisprudence citée]. Sur le plan conceptuel, des signes en conflit sont assez proches dès lors qu’ils évoquent la même idée [voir, en ce sens, arrêts du 16 mai 2007, Merant/OHMI – Focus Magazin verlag (FOCUS), T‑491/04, non publié, EU:T:2007:141, point 57, et du 11 décembre 2008, Tomorrow Focus/OHMI – Information Builders (Tomorrow Focus), T‑90/06, non publié, EU:T:2008:567, point 35].
36 En l’espèce, les signes à comparer sont, d’une part, la marque antérieure composée du seul élément verbal « spa », et, d’autre part, la marque demandée composée de deux éléments verbaux « spa » et « village ».
37 À cet égard, sur les plans visuel et phonétique, la marque antérieure est le premier composant de la marque demandée et est détachée de l’élément « village », de sorte que, ainsi que le fait valoir à juste titre la requérante, elle est facilement reconnaissable au sein de la marque demandée. De plus, compte tenu de sa longueur réduite, la marque antérieure est susceptible d’être facilement gardée en mémoire par le public pertinent qui, d’une part, accorde normalement plus d’importance au début de la marque et, d’autre part, doit se fier à l’image imparfaite de celle-ci qu’il garde en mémoire [voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26, et, également, arrêt du 4 mai 2005, Reemark/OHMI – Bluenet (Westlife), T‑22/04, EU:T:2005:160, point 34].
38 La chambre de recours a considéré que le degré de similitude des signes en conflit était faible au motif que, selon elle, le terme « village » était l’élément distinctif et dominant de la marque demandée et le terme « spa » était descriptif et générique ainsi qu’il a été indiqué au point 32 ci-dessus. Or, il importe de souligner que, ainsi qu’il a été confirmé par la partie défenderesse lors de l’audience, une telle considération a été effectuée au regard d’autres services visés par la marque demandée, différents de ceux en cause en l’espèce, à savoir les services relevant de la classe 44 et correspondant à la description suivante : « Installations publiques de bains ; services de santé et de beauté ; services d’assistance en beauté et produits cosmétiques ; services de traitement de beauté et par produits cosmétiques ; conseils liés à tous les services précités ; instituts de beauté ; salons de coiffure ; massage ; services de manucure ; composition florale ». Cette considération n’est pas transposable en l’espèce à l’égard des services mentionnés au point 3 ci‑dessus, pour lesquels, d’une part, le terme « spa » n’est ni descriptif ni générique et, d’autre part, comme l’a admis la partie défenderesse lors de l’audience, le terme « village », accolé au terme « spa » au sein de la marque demandée, garde une position secondaire pour le consommateur visé ne permettant pas de le considérer comme élément dominant. De surcroît, comme d’ailleurs l’avait estimé la division d’opposition dans sa décision du 7 août 2013, il y a lieu de considérer que, le terme « village » étant « allusif » pour les services en cause, le terme « spa » est l’élément le plus distinctif au regard de ces services.
39 Il s’ensuit qu’il convient de reconnaître qu’il existe une similitude entre les signes en conflit sur les plans visuel et phonétique et que cette similitude est, à tout le moins, moyenne, compte tenu de l’identité du terme « spa » les composant et du placement en seconde position du terme « village » au sein de la marque demandée.
40 Sur le plan conceptuel, ainsi que le fait valoir à juste titre la requérante, la marque demandée n’est pas constituée d’un mot nouveau disposant d’une signification autonome différente de celle de la simple juxtaposition des éléments « spa » et « village » qui la composent. En outre, s’il convient d’admettre, ainsi que l’a indiqué la chambre de recours aux points 85 et 135 de la décision attaquée, que le terme « spa » peut revêtir une variété de significations renvoyant, selon le contexte, à la ville thermale belge de Spa, au circuit automobile de Spa‑Francorchamps, à un centre d’hydrothérapie dédié aux soins et à la relaxation ou à la marque d’eau minérale commercialisée par la requérante, cette appréciation vaut tant pour la marque antérieure que pour la marque demandée, le terme « village » n’étant pas de nature à altérer ou à modifier ces différents significations. Le constat de la chambre de recours, selon lequel les signes sont différents au motif que le terme « village », présent uniquement au sein de la marque demandée, renvoie à l’idée d’une « agglomération rurale », n’est pas de nature à infirmer la considération que, prise dans son ensemble, la marque demandée présente le même contenu sémantique propre à la marque antérieure. En effet, le terme « village » au sein de la marque demandée ne fait que préciser les idées auxquelles peut renvoyer le terme « spa ». Dès lors, la conclusion quant au faible degré de la similitude conceptuelle n’est pas justifiée en l’espèce et, à la différence de la chambre de recours, il convient de considérer que les signes en conflit sont, du point de vue conceptuel, fortement similaires.
41 En appréciant la similitude des signes en conflit globalement, il convient de considérer que, compte tenu de leur similitude moyenne sur les plans visuel et phonétique ainsi que de leur forte similitude du point de vue conceptuel, ceux-ci présentent, contrairement aux conclusions de la chambre de recours, un degré de similitude globalement moyen, voire fort, et que la première des conditions visées par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 et mentionnées au point 21 ci-dessus est remplie en l’espèce.
Sur le risque que l’usage de la marque demandée tire indûment profit de la renommée de la marque antérieure
42 Il ressort de la jurisprudence que le but de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 n’est pas d’empêcher l’enregistrement de toute marque identique à une marque renommée ou présentant une similitude avec celle-ci. L’objectif de cette disposition est, notamment, de permettre au titulaire d’une marque nationale antérieure renommée de s’opposer à l’enregistrement de marques susceptibles soit de porter préjudice à la renommée ou au caractère distinctif de la marque antérieure, soit de tirer indûment profit de cette renommée ou de ce caractère distinctif [arrêt du 25 mai 2005, Spa Monopole/OHMI – Spa-Finders Travel Arrangements (SPA-FINDERS), T‑67/04, EU:T:2005:179, point 40].
Sur l’existence d’un lien entre les signes en conflit
43 Aux points 132 à 135 et 138 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le public pertinent n’aurait établi aucun lien entre les signes en conflit en raison, notamment, de la distance entre les produits et services en cause et du fait que la marque antérieure, au vu des associations multiples que le public pertinent pouvait faire avec le terme « spa », avait perdu son « caractère unique ».
44 La requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur manifeste d’appréciation en excluant que le public pertinent établisse un lien entre les signes en conflit. Elle soutient que, compte tenu de la proximité des produits et des services visés par les signes en conflit, de la similitude entre ces derniers et de la grande renommée de la marque antérieure, le public pertinent associe plus facilement les services contestés aux eaux minérales visées par la marque antérieure qu’à des centres d’hydrothérapie, de sorte que la marque demandée est susceptible d’être comprise comme la marque désignant les services par le biais desquels les produits visés par la marque antérieure sont vendus.
45 L’existence d’un lien entre la marque demandée et la marque antérieure est une condition essentielle d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009. En effet, les atteintes visées par cette disposition, lorsqu’elles se produisent, sont la conséquence d’un certain degré de similitude entre la marque demandée et la marque antérieure, en raison de laquelle le public concerné effectue un rapprochement entre les deux, c’est-à-dire établit un lien entre celles‑ci, alors même qu’il ne les confond pas (voir arrêt du 25 mai 2005, SPA‑FINDERS, T‑67/04, EU:T:2005:179, point 41 et jurisprudence citée ; arrêt du 12 novembre 2009, SpagO, T‑438/07, EU:T:2009:434, point 15 ; voir également, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 30 et jurisprudence citée).
46 Le fait que la marque demandée évoque la marque antérieure renommée dans l’esprit du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, équivaut à l’existence d’un lien entre les marques en conflit au sens de la jurisprudence de l’Union (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, points 60 et 63).
47 L’existence, dans l’esprit du public concerné, d’un lien entre les marques en conflit doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (arrêt du 9 mars 2012, ELLA VALLEY VINEYARDS, T‑32/10, EU:T:2012:118, point 20).
48 Le juge de l’Union a précisé les facteurs qui pouvaient être pertinents dans l’appréciation globale visant à établir l’existence dudit lien entre les signes en conflit. Ainsi, parmi ces facteurs, le juge de l’Union a cité, premièrement, le degré de similitude entre les marques en conflit, deuxièmement, la nature des produits ou des services pour lesquels les marques en conflit sont respectivement enregistrées, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou de ces services ainsi que le public concerné, troisièmement, l’intensité de la renommée de la marque antérieure, quatrièmement, le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure et, cinquièmement, l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public (voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2012, ELLA VALLEY VINEYARDS, T‑32/10, EU:T:2012:118, point 21 et jurisprudence citée).
49 En l’espèce, au regard de la jurisprudence mentionnée au point 48 ci‑dessus, il convient d’examiner si les produits et services visés par les signes en conflit présentent un certain degré de proximité.
50 À cet égard, en premier lieu, il importe de préciser que l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 n’implique pas que les produits et services visés par les signes en conflit soient identiques ou similaires (voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, VIPS, T‑215/03, EU:T:2007:93, point 33). En effet, ainsi que cela a été indiqué au point 21 ci‑dessus, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement, sur le fondement de cette disposition, si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services « qui n’ont pas de similitudes » avec ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée.
51 En second lieu, il convient de souligner que l’existence d’une certaine proximité entre les produits et services en cause peut être le résultat d’une pratique habituelle, en vertu de laquelle les produits sont fournis à l’occasion des services et, inversement, les services s’accompagnent habituellement de la fourniture des produits en cause.
52 À cet égard, il convient d’observer que des produits, tels que ceux visés par la marque antérieure, peuvent être vendus à l’occasion de la fourniture des services tels que ceux visés par la marque demandée. En effet, il ressort de la pratique habituelle du secteur commercial propre aux services en cause que les hôtels, restaurants, bars, cafétérias ou encore les prestataires des services de traiteur et de banquet fournissent des boissons non alcooliques, et notamment de l’eau minérale à l’occasion de la prestation des services en cause. De surcroît, ainsi que le fait valoir à juste titre la requérante, il est notoire qu’il existe des contrats de distribution liant les fournisseurs des services du type de ceux visés par la marque demandée aux fabricants des produits du type de ceux visés par la marque antérieure. Ainsi, compte tenu du fait que les eaux minérales et gazeuses sont normalement vendues dans les mêmes endroits où les services contestés sont prestés, c’est-à-dire qu’elles partagent les mêmes canaux de distribution, il convient de reconnaître qu’il existe entre celles-ci et les services contestés une certaine proximité [voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2016, Future Enterprises/EUIPO – McDonald’s International Property (MACCOFFEE), T‑518/13, EU:T:2016:389, point 80 et jurisprudence citée]. De plus, contrairement à ce qu’a indiqué la chambre de recours au point 60 de la décision attaquée, la clientèle ne diffère pas et, ainsi que l’a admis la partie défenderesse lors de l’audience, le public visé par ces produits et services est le même.
53 La proximité entre produits et services est, comme le fait valoir à juste titre la requérante, en l’espèce, renforcée par l’existence d’un lien de complémentarité entre ceux-ci.
54 À ce titre, il convient de noter que, contrairement à ce qu’indique la chambre de recours au point 65 de la décision attaquée, les produits visés par la marque antérieure, et notamment l’eau minérale et gazeuse, s’avèrent très importants, voire indispensables dans le cadre de la fourniture des « Services consistant à fournir des aliments et des boissons ; cafés-restaurants ; cafétérias ; restaurants à service rapide et permanent (snack-bars) ; restaurants libre‑service ; services hôteliers de restauration ; services de restaurants ; services de traiteurs et de banquets ; services de bar ; services de bars », et, inversement, ces services revêtent, du point de vue du consommateur pertinent, un rôle important lorsqu’il procède à l’achat des produits en cause. Ainsi, il y a lieu d’admettre un certain degré de proximité, renforcé par l’existence d’un lien de complémentarité entre ces services et les produits visés par la marque antérieure. L’argument de l’intervenante, selon lequel la prestation des services contestés peut intervenir sans la fourniture de produits tels que ceux visés par la marque antérieure, ne saurait prospérer.
55 De plus, il importe de souligner que, contrairement à ce que prétend l’EUIPO, la jurisprudence a admis à plusieurs reprises l’existence d’un lien de complémentarité entre notamment les boissons non alcooliques et les services de restauration et de bars [voir arrêt du 15 février 2011, Yorma’s/OHMI – Norma Lebensmittelfilialbetrieb (YORMA’S), T‑213/09, non publié, EU:T:2011:37, point 46 et jurisprudence citée ; arrêts du 16 janvier 2014, ABSACKER of Germany, T‑304/12, non publié, EU:T:2014:5, point 29, et du 17 mars 2015, Manea Spa, T‑611/11, non publié, EU:T:2015:152, point 52], et cela tout en soulignant que ces produits et services demeurent différents par leur nature, leur destination ou leur utilisation [voir, en ce sens, arrêt du 4 juin 2015, Yoo Holdings/OHMI – Eckes-Granini Group (YOO), T‑562/14, non publié, EU:T:2015:363, points 24 à 28].
56 Il s’ensuit que le constat de leur nature et fonction différentes, effectué au point 134 de la décision attaquée et souligné, en substance, par l’EUIPO et l’intervenante, n’exclut pas la possibilité de reconnaître que les produits et services en cause présentent une certaine proximité, au sens de la jurisprudence citée au point 48 ci-dessus, selon le cas, en raison de leur complémentarité, du fait qu’il est de pratique habituelle du secteur commercial concerné que les produits soient offerts à l’occasion de la fourniture des services ou, également, que les produits et services en cause sont susceptibles de partager les mêmes canaux de distribution.
57 Au regard de tout ce qui précède, contrairement à ce que prétend l’EUIPO, une certaine proximité entre les produits et services en cause doit être reconnue à l’égard de tous les services contestés, au motif que les considérations exposées aux points 51 à 52 ci-dessus sont applicables à la totalité desdits services.
58 Partant, dans la mesure où, premièrement, le public visé par les signes en conflit est le même, deuxièmement, la marque antérieure dispose d’une grande renommée, troisièmement, le degré de similitude entre les signes en conflit est moyen, voire fort et, quatrièmement, les produits et services visés par ceux-ci présentent, à tout le moins, une certaine proximité, c’est à tort que, aux points 137 à 141 de la décision attaquée, la chambre de recours a exclu que le public pertinent était susceptible d’établir un lien entre les signes en conflit (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 54).
59 Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’observation effectuée par la chambre de recours au point 135 de la décision attaquée, selon laquelle la marque antérieure, en raison de la polysémie du terme « spa » la composant, aurait perdu « son caractère unique », de sorte que le public pertinent confronté à ce terme ferait plus facilement référence à des centres d’hydrothérapie qu’à la marque renommée. En effet, il convient d’observer que, si l’absence de polysémie est un facteur permettant de reconnaître le fort caractère distinctif d’une marque (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 56), la polysémie d’une marque n’est pas, à elle seule, susceptible d’affecter le caractère distinctif fort d’une marque, acquis par l’usage et par la grande renommée liée aux investissements publicitaires effectués par le titulaire de la marque sur le territoire pertinent. De plus, il importe de souligner que, afin d’apprécier, au sens de la jurisprudence mentionnée aux points 45 à 48, l’existence d’un lien, dans l’esprit du public, entre les signes en conflit, il n’est pas nécessaire d’établir que ce lien soit le seul possible dans l’esprit dudit public.
60 Cela étant précisé, il convient d’examiner si, compte tenu de l’existence, dans l’esprit du public pertinent, d’un lien entre les signes en conflit, il existe un risque de transfert parasitaire des efforts publicitaires déployés par le titulaire de la marque antérieure au profit de l’intervenante, de sorte que le message et l’image véhiculés par la marque antérieure s’appliquent également à la marque demandée.
Sur le risque d’exploitation de l’image et du message véhiculé par la marque antérieure
61 À cet égard, il importe de préciser que, ainsi qu’il ressort du point 25 ci‑dessus, la notion de profit indûment tiré de la renommée de la marque antérieure, désignée sous le terme de « parasitisme », ne s’attache pas au préjudice subi par celle-ci, mais à l’avantage tiré par le tiers de l’usage sans juste motif du signe similaire ou identique à celle-ci. Elle englobe notamment les cas où, grâce à un transfert de l’image de la marque ou des caractéristiques projetées par celle-ci vers les produits désignés par le signe identique ou similaire, il existe une exploitation manifeste dans le sillage de la marque renommée (voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2008, MINERAL SPA, T‑93/06, non publié, EU:T:2008:215, point 40 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt du 22 septembre 2011, Interflora et Interflora British Unit, C‑323/09, EU:C:2011:604, point 74).
62 Le risque qu’un profit puisse être indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure se produit lorsque le public concerné, sans nécessairement confondre l’origine commerciale du produit ou du service en cause, est attiré par la marque demandée elle‑même et achètera le produit ou le service visé par celle-ci au motif qu’il porte cette marque semblable à une marque antérieure renommée (voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, VIPS, T‑215/03, EU:T:2007:93, point 42).
63 La Cour a précisé que, plus l’évocation de la marque antérieure par la marque postérieure est immédiate et forte, plus est important le risque que l’utilisation actuelle ou future de la marque postérieure tire un profit indu du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porte préjudice (voir, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 67). En outre, plus le caractère distinctif et la renommée de la marque antérieure sont importants, plus l’existence d’une atteinte sera aisément admise (voir, par analogie, arrêt du 14 septembre 1999, General Motors, C‑375/97, EU:C:1999:408, point 30). Le Tribunal, quant à lui, a précisé qu’il était possible, notamment dans le cas d’une opposition fondée sur une marque bénéficiant d’une renommée exceptionnellement élevée, que la probabilité d’un risque futur non hypothétique de préjudice ou de profit indûment tiré par la marque demandée soit tellement évidente que l’opposant n’ait pas besoin d’invoquer, ni d’avancer la preuve d’un autre élément factuel à cette fin (voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, VIPS, T‑215/03, EU:T:2007:93, point 48). Il a également indiqué que le titulaire de la marque antérieure n’était pas tenu de démontrer l’existence d’une atteinte effective et actuelle à sa marque et qu’il devait uniquement apporter des éléments permettant de conclure prima facie à un risque futur non hypothétique de profit indu ou de préjudice (voir, en ce sens, arrêt du 25 mai 2005, SPA-FINDERS, T‑67/04, EU:T:2005:179, point 40).
64 En l’espèce, ainsi que le fait valoir la requérante et contrairement à ce que soutient l’EUIPO, l’image de santé à laquelle renvoie la marque antérieure est susceptible de s’appliquer aux services contestés visés par la marque demandée. Ainsi qu’il a été admis par le Tribunal, l’image de la marque antérieure en cause et le message qu’elle véhicule renvoient à la santé, à la beauté, à la pureté et à la richesse en minéraux (arrêt du 19 juin 2008, MINERAL SPA, T‑93/06, non publié, EU:T:2008:215, point 43). Or, l’image de santé et, au sens plus large, celle de bien‑être du corps, projetées par la marque antérieure renommée, peuvent également s’appliquer aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé par l’intervenante, car ceux-ci peuvent contribuer à préserver et à améliorer la santé et, au sens plus large, le bien-être corporel des destinataires desdits services. Dès lors, l’usage de la marque demandée sur le territoire pertinent pourrait permettre à l’intervenante de tirer un profit indu de l’exploitation du sillage de la marque antérieure et des messages véhiculés par celle-ci, en ce que les services visés par la marque demandée seraient perçus par le public pertinent comme porteurs de santé et de bien-être.
65 Il y a lieu de conclure que les éléments mentionnés au point 58 ci‑dessus, auxquels s’ajoute le partage des messages véhiculés par les signes en conflit, permettent de conclure, prima facie, à un risque futur non hypothétique de parasitisme de la marque antérieure, selon les principes rappelés aux points 25 et 26 ci-dessus, sans que la requérante ait besoin de prouver matériellement les bénéfices que la marque demandée peut tirer de l’exploitation du sillage de la marque antérieure renommée (voir, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 38).
66 L’argument de l’EUIPO selon lequel la marque antérieure véhicule une image de pureté étrangère à certains services contestés, n’est pas susceptible d’infirmer la conclusion formulée ci‑dessus. En effet, les marques peuvent véhiculer plusieurs messages ou images différents et, en l’espèce, ainsi qu’il a été admis par la partie défenderesse lors de l’audience, il ne s’agit pas d’apprécier si tous les messages véhiculés par la marque antérieure s’appliquent à la marque demandée, un seul message et une seule image étant suffisants pour que la commercialisation des services visés par la marque demandée puisse être facilitée par leur association avec la marque antérieure renommée.
67 Étant donné qu’il ressort de la jurisprudence mentionnée au point 25 ci‑dessus qu’un seul type de risque, visé à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, suffit pour que cette disposition soit applicable, il n’est pas nécessaire de vérifier si l’usage de la marque demandée risque de porter préjudice au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure, ni de répondre aux arguments de l’intervenante visant à faire valoir que la marque demandée n’étant pas destinée à être utilisée concernant des produits ou des services de nature abusive ou immorale, cette dernière ne serait pas susceptible d’engendrer une mauvaise réputation de la marque antérieure.
Sur l’existence éventuelle d’un juste motif d’usage de la marque demandée
68 Lorsque le titulaire de la marque antérieure est parvenu à démontrer l’existence soit d’une atteinte effective et actuelle à sa marque au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, soit, à défaut, d’un risque sérieux qu’une telle atteinte se produise dans le futur, il appartient au titulaire de la marque demandée d’établir que l’usage de cette marque a un juste motif (voir, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 39).
69 En l’espèce, aucun juste motif n’a été mentionné dans la décision attaquée, ni soulevé par l’intervenante devant le Tribunal pour admettre l’usage de la marque demandée.
70 Ainsi, contrairement à ce qu’a conclu la chambre de recours dans la décision attaquée, les conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 sont réunies en l’espèce.
71 Dans ces conditions et, dans la mesure où il suffit qu’un seul motif relatif de refus s’oppose à l’enregistrement de la marque demandée, il convient d’accueillir le second moyen soulevé par la requérante et ainsi le recours dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le premier moyen soulevé par la requérante. Il y a donc lieu d’annuler partiellement la décision attaquée pour autant qu’elle rejette l’opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour viser les services mentionnés au point 3 ci-dessus.
Sur les dépens
72 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’EUIPO et l’intervenante ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 11 septembre 2015 (affaire R 1954/2013‑4), relative à une procédure d’opposition entre Spa Monopole, compagnie fermière de Spa SA/NV et YTL Hotels & Properties Sdn Bhd, est annulée en ce qu’elle rejette l’opposition à l’enregistrement de la marque de l’Union européenne verbale SPA VILLAGE, pour les « services consistant à fournir des aliments et des boissons ; cafés‑restaurants ; cafétérias ; restaurants à services rapide et permanent (snack-bars) ; restaurants libre-service ; services hôteliers de restauration ; services de restaurants ; services de traiteurs et de banquets ; services de bar ; services de bars ; services hôteliers », relevant de la classe 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.
2) L’EUIPO et YTL Hotels & Properties sont condamnés aux dépens.
Gervasoni | Madise | Csehi |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 octobre 2016.
Signatures
Table des matières
Antécédents du litige
Conclusions des parties
En droit
Sur la renommée de la marque antérieure
Sur la similitude des signes en conflit
Sur le risque que l’usage de la marque demandée tire indûment profit de la renommée de la marque antérieure
Sur l’existence d’un lien entre les signes en conflit
Sur le risque d’exploitation de l’image et du message véhiculé par la marque antérieure
Sur l’existence éventuelle d’un juste motif d’usage de la marque demandée
Sur les dépens
* Langue de procédure : le français.
© European Union
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