Mozzetti v EUIPO - di Lelio (Alfredo alla Scrofa) (Judgment) French Text [2016] EUECJ T-96/15 (06 July 2016)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/T9615.html
Cite as: [2016] EUECJ T-96/15, ECLI:EU:T:2016:394, EU:T:2016:394

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

6 juillet 2016 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative Alfredo alla Scrofa – Marque nationale verbale antérieure L’ORIGINALE ALFREDO – Demande de preuve d’usage – Article 57, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 207/2009 – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑96/15,

Mario Mozzetti, demeurant à Rome (Italie), représenté par Me E. Montelione, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Ines di Lelio, demeurant à Rome, représentée par Mes D. De Simone, G. Orsoni et R. Fecchio, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 2 décembre 2014 (affaire R 655/2014‑1), relative à une procédure de nullité entre Mme di Lelio et M. Mozzetti,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka (rapporteur) et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : Mme A. Lamote, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 26 février 2015,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 2 juillet 2015,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 18 juin 2015,

à la suite de l’audience du 15 mars 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 22 janvier 2009, Gestione 2000 Srl, prédécesseur en droit du requérant, M. Mario Mozzetti, a obtenu auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), l’enregistrement sous le numéro 6779151 de la marque de l’Union européenne figurative de couleur jaune, reproduite ci-après :

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2        Les produits et les services visés par la marque contestée et pertinents pour la présente affaire relèvent notamment des classes 30 et 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 30 : « Riz, préparations faites de céréales, à savoir pâtes ; pain » ;

–        classe 43 : « Restauration, à l’exclusion des cafétérias et coffee shop ; hébergement temporaire ».

3        Le 2 octobre 2012, M. Alfredo di Lelio, prédécesseur en droit de l’intervenante, Mme Ines di Lelio, a présenté à l’EUIPO une demande en nullité de la marque contestée sur le fondement notamment de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), lu en combinaison avec l’article 53, paragraphe 1, sous a), du même règlement.

4        La demande en nullité s’appuyait notamment sur la marque italienne verbale antérieure L’ORIGINALE ALFREDO, enregistrée le 18 septembre 1991 sous le numéro 550235, pour des produits et des services relevant des classes 30 et 43 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 30 : « Pâtes et préparations à base de céréales » ;

–        classe 43 : « Restauration ».

5        La demande en nullité était dirigée contre tous les produits et les services visés par la marque contestée.

6        Le 7 janvier 2014, la division d’annulation a fait droit à la demande en nullité.

7        Le 4 mars 2014, le requérant a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 2 décembre 2014 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En premier lieu, elle a considéré que la demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure était tardive et devait être rejetée. Ainsi, elle a estimé que, lors de la procédure devant la division d’annulation, le requérant avait simplement contesté les documents produits spontanément par l’intervenante sans procéder, contrairement aux exigences posées par l’article 57, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, à une demande de preuve d’usage. Elle a également relevé que, au regard des circonstances de l’espèce, la contestation ne pouvait pas être assimilée à une demande formelle de preuve d’usage, car, d’une part, les documents produits par l’intervenante étaient destinés à prouver d’autres éléments que l’usage sérieux et, d’autre part, l’intervenante n’avait pas interprété la contestation comme une demande de preuve d’usage.

9        En second lieu, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Elle a estimé que l’identité ou la similitude élevée des produits et des services en cause compensait la faible similitude des marques en conflit, que la marque antérieure avait un caractère distinctif normal et que le risque de confusion était accentué par la circonstance que le terme « alfredo », présent dans les signes en conflit, revêtait un caractère distinctif plus important que les autres éléments de ces signes.

 Conclusions des parties

10      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours et confirmer la décision attaquée ;

–        demande à ce que l’EUIPO adopte toutes les mesures nécessaires pour l’exécution de sa décision ;

–        condamner le requérant à la totalité des dépens.

13      Lors de l’audience, l’intervenante a renoncé à son deuxième chef de conclusions, ce dont le Tribunal a pris acte.

 En droit

14      À titre liminaire, il y a lieu de souligner que, lors de l’audience, l’intervenante a renoncé à soulever l’irrecevabilité du recours, ce dont le Tribunal a pris acte.

15      À l’appui de son recours, le requérant soulève deux moyens, tirés, respectivement, d’un vice de procédure et de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 53, paragraphe 1, sous a), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré d’un vice de procédure

16      Le requérant fait valoir que la chambre de recours a considéré à tort que sa demande de preuve de l’usage de la marque antérieure était tardive. Il soutient qu’il a formulé cette demande, dans ses observations devant la division d’annulation, lorsqu’il a contesté les preuves présentées par l’intervenante dans sa demande en nullité. Il ajoute qu’il ne l’a fait qu’à ce stade parce qu’il ressortait des documents présentés par l’intervenante, relatifs à la marque antérieure, qu’ils ne provenaient pas de l’intervenante, mais d’une entreprise tierce, et qu’ils ne démontraient pas de lien entre l’intervenante et la marque antérieure. Par conséquent, l’intervenante aurait dû (et devrait encore) présenter la preuve d’un rapport entre elle-même et cette entreprise tierce. En l’absence de cette preuve, le droit d’exclusivité de l’intervenante ne saurait être considéré comme valable, la marque antérieure étant utilisée par un tiers et non par l’intervenante. Enfin, il relève que, l’intervenante n’ayant pas présenté de preuve de l’usage de la marque antérieure, il a été privé de sa faculté de présenter ses observations relatives à l’usage de cette marque.

17      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que, dans ses observations devant la division d’annulation, le requérant n’avait formulé aucune « demande » de preuve d’usage, contrairement à ce qu’exige l’article 57, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, mais avait contesté, de façon générale, les documents produits spontanément par l’intervenante. La chambre de recours a estimé que la division d’annulation avait considéré à bon droit qu’elle n’était pas tenue d’inviter l’intervenante à produire des preuves de l’usage de la marque antérieure et a conclu que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure formulée devant elle était tardive et devait être rejetée.

18      À cet égard, il convient de souligner que, en vertu de l’article 57, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, sur requête du titulaire de la marque de l’Union européenne contestée, le titulaire d’une marque antérieure, partie à la procédure de nullité, apporte la preuve de son usage pour les produits et les services pour lesquels cette marque antérieure est utilisée.

19      Selon la jurisprudence, une telle requête doit être formulée expressément et en temps utile devant l’EUIPO. L’expression « en temps utile », en l’occurrence, ne concerne pas seulement le respect d’un éventuel délai imparti, mais implique également l’exigence de présenter cette requête devant la division d’opposition ou d’annulation, le cas échéant, et non pour la première fois devant la chambre de recours [voir arrêt du 8 mars 2013, Mayer Naman/OHMI – Daniel e Mayer (David Mayer), T‑498/10, non publié, EU:T:2013:117, point 34 et jurisprudence citée].

20      En l’espèce, il y a lieu de relever que, devant la division d’annulation, le requérant n’a pas formulé de demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure. Il a seulement affirmé, dans ses observations, que les preuves présentées par l’intervenante ne démontraient pas l’usage de la marque antérieure par son titulaire et n’étaient donc pas suffisantes pour prouver l’usage effectif de cette marque, et il a contesté la pertinence de ces preuves.

21      Or, force est de constater, d’une part, que les preuves présentées par l’intervenante et contestées par le requérant ne visaient pas à prouver l’usage de la marque antérieure, mais son caractère distinctif élevé et sa renommée. D’autre part, dans ses observations devant la division d’annulation, l’intervenante a souligné que le requérant n’avait pas présenté de demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure et qu’il convenait donc de rejeter son argumentation selon laquelle les preuves présentées n’étaient pas suffisantes pour prouver l’usage de la marque antérieure.

22      Ainsi, ce n’est que dans son recours devant la chambre de recours que le requérant a formulé expressément une demande de preuve de l’usage de la marque antérieure.

23      Dès lors, au vu de la jurisprudence citée au point 19 ci-dessus, la chambre de recours a considéré, à juste titre, que cette demande était tardive.

24      Par ailleurs, le Tribunal a, certes, dans l’arrêt du 12 juin 2009, Harwin International/OHMI – Cuadrado (Pickwick COLOUR GROUP) (T‑450/07, EU:T:2009:202), assimilé une contestation des preuves produites par le demandeur en nullité à une demande de preuve de l’usage de la marque antérieure. Toutefois, il ressort de cet arrêt que la contestation des preuves produites par le demandeur en nullité ne peut être assimilée à une demande de preuve de l’usage de la marque antérieure que si deux conditions sont réunies. D’une part, les preuves présentées spontanément par le demandeur en nullité doivent avoir pour objet de prouver l’usage de la marque antérieure. D’autre part, la contestation de ces preuves doit être interprétée par le demandeur en nullité comme une demande de preuve d’usage, de sorte qu’un débat contradictoire relatif à l’usage de la marque antérieure ait lieu entre le demandeur en nullité et le titulaire de la marque contestée.

25      En l’espèce, il ressort des circonstances mises en évidence au point 21 ci-dessus que ces conditions ne sont pas réunies et que, dès lors, la contestation par le requérant, devant la division d’annulation, des preuves présentées par l’intervenante ne saurait être assimilée à une demande de preuve de l’usage de la marque antérieure.

26      En outre, il convient de relever que la question de savoir si c’est le titulaire et non un tiers qui a fait un usage sérieux de la marque antérieure ne peut être soulevée que dans le cadre d’une demande de preuve de l’usage sérieux de cette marque.

27      Le requérant n’ayant pas formulé de demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, il ne saurait faire valoir que l’intervenante devait présenter la preuve d’un rapport entre elle-même et l’entreprise tierce ayant fait usage de la marque antérieure.

28      Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 53, paragraphe 1, sous a), du même règlement

29      Le requérant fait valoir que la chambre de recours a conclu à tort à l’existence d’un risque de confusion. Il soutient que la chambre de recours a commis des erreurs s’agissant, premièrement, du caractère distinctif du terme « alfredo », deuxièmement, de l’appréciation de la similitude des marques en conflit et, troisièmement, de l’appréciation globale du risque de confusion.

30      En vertu de l’article 53, paragraphe 1, sous a), lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la marque de l’Union européenne est déclarée nulle, sur demande du titulaire d’une marque antérieure, lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

31      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs caractérisant le cas d’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

32      De plus, il convient de tenir compte de la circonstance selon laquelle le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il garde en mémoire (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26).

33      Enfin, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

34      En l’espèce, il est constant, d’une part, que la marque antérieure étant une marque italienne, le public pertinent est le public italien et, d’autre part, que, les produits et les services en cause étant des produits alimentaires de consommation courante et des services de restauration, le public pertinent est le grand public faisant preuve d’un degré d’attention moyen.

35      Il est également constant que les produits et les services visés par la marque contestée et les produits et les services couverts par la marque antérieure sont identiques ou très similaires.

36      Les marques en conflit sont la marque de l’Union européenne figurative contestée Alfredo alla Scrofa et la marque italienne verbale antérieure L’ORIGINALE ALFREDO.

37      Premièrement, s’agissant du caractère distinctif du terme « alfredo », le requérant fait valoir que l’utilisation de ce terme, commun aux marques en conflit, s’est généralisée dans le secteur des produits et des services en cause. Tout d’abord, le terme « alfredo » serait associé aux « fettuccine », un certain type de pâtes, en raison de l’existence d’un plat appelé « fettuccine alfredo », ainsi que cela ressort de l’extrait du site Internet Wikipedia reproduit dans la requête. Ensuite, il ressortirait d’une recherche, effectuée sur le moteur de recherche Google et dont le résultat a été produit en annexe de la requête, que l’utilisation de l’expression « fettuccine alfredo » se serait généralisée. Enfin, de nombreuses marques comportant le terme « alfredo » seraient enregistrées dans des pays de l’Union européenne pour des services relevant de la classe 43.

38      À cet égard, d’une part, il y a lieu de relever que l’argument faisant référence à l’extrait du site Internet Wikipedia relatif à l’expression « fettuccine alfredo » doit être écarté. En effet, il est de jurisprudence constante qu’un extrait de Wikipedia constitue une information incertaine dès lors qu’il est tiré d’une encyclopédie collective établie sur Internet, dont le contenu est modifiable à tout moment et, dans certains cas, par tout visiteur, même anonyme [voir arrêt du 16 octobre 2014, Novartis/OHMI – Tenimenti Angelini (LINEX), T‑444/12, non publié, EU:T:2014:886, point 47 et jurisprudence citée]. En outre, force est de constater que, cet extrait du site Internet Wikipedia et la liste des résultats de la recherche sur Google portant exclusivement sur l’expression « fettuccine alfredo » et non sur le terme « alfredo » seul, ils ne démontrent ni que ce terme s’est généralisé dans le secteur des produits et des services en cause ni qu’il sera perçu, sans l’ajout du terme « fettuccine », comme faisant référence à des pâtes.

39      D’autre part, la simple présence de marques contenant un certain terme dans le registre des marques de l’Union européenne sans aucune référence à leur utilisation sur le marché et à l’éventuelle contestation de ces marques en raison de l’existence d’un risque de confusion ne permet pas de conclure à un affaiblissement du caractère distinctif de ce terme par rapport aux produits et aux services pour lesquels ces marques sont enregistrées [voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 2012, Basile et I Marchi Italiani/OHMI – Osra (B. Antonio Basile 1952), T‑134/09, non publié, EU:T:2012:328, point 47].

40      En outre, il convient de relever, ainsi que l’a fait la chambre de recours, que le nom « alfredo » est l’élément des marques en conflit auquel le consommateur accordera le plus d’attention. En effet, étant donné que le nom « alfredo » est placé au-dessus et qu’il est écrit avec des lettres d’une taille supérieure à celle de l’expression l’accompagnant (« alla scrofa »), le consommateur lui accordera plus d’attention. Dans la marque antérieure, le nom « alfredo » est également l’élément auquel le consommateur accordera le plus d’attention, le terme « originale » étant perçu comme un simple adjectif venant qualifier ce nom.

41      Il s’ensuit que l’argument du requérant selon lequel le terme « alfredo » a un faible caractère distinctif doit être rejeté.

42      Deuxièmement, s’agissant de la comparaison des marques en conflit, le requérant fait valoir qu’elles sont différentes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel et qu’elles produisent une impression d’ensemble complètement différente.

43      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêts du 23 octobre 2002, Matrazen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRAZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30, et du 10 décembre 2008, MIP Metro/OHMI – Metronia (METRONIA), T‑290/07, non publié, EU:T:2008:562, point 41].

44      S’agissant de la comparaison sur le plan visuel, la chambre de recours a estimé qu’il existait une similitude en raison de la présence du terme « alfredo », commun aux marques en conflit. Cependant, elle a considéré que cette similitude n’était pas élevée, ce terme étant associé dans chacune des marques en conflit à des termes différents, la marque contestée présentant des éléments figuratifs ne la caractérisant pas particulièrement et les lettres de la marque contestée étant légèrement stylisées. Elle a conclu que la similitude sur le plan visuel était moyenne.

45      Le requérant soutient que la chambre de recours a accordé une trop grande importance au terme « alfredo ». La chambre de recours se serait limitée à prendre en compte ce terme, aurait négligé les aspects graphique et visuel des marques en conflit et aurait conclu à tort qu’elles présentaient un degré de similitude élevé. En outre, les marques en conflit seraient, dans l’ensemble, totalement différentes sur le plan visuel étant donné qu’elles sont composées de caractères typographiques et de mots différents.

46      L’argument du requérant selon lequel la chambre de recours se serait limitée à prendre en compte le terme « alfredo » repose sur une lecture erronée de la décision attaquée. Il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a tenu compte lors de la comparaison des marques en conflit des différences résultant de la présence de l’expression « alla scrofa » et d’éléments graphiques dans la marque contestée et de l’expression « l’originale » dans la marque antérieure. En outre, contrairement à ce que soutient le requérant, la chambre de recours a conclu que les marques en conflit ne présentaient pas un degré de similitude élevé mais moyen sur le plan visuel.

47      Le requérant soutient également à tort que les marques en conflit sont totalement différentes sur le plan visuel, car cet argument ne tient pas compte de l’élément « alfredo », commun aux marques en conflit.

48      S’agissant de la comparaison sur le plan phonétique, la chambre de recours a estimé que la similitude entre les marques en conflit était moyenne, car l’élément commun « alfredo » était accompagné d’expressions créant des sonorités différentes.

49      Le requérant fait valoir que les marques en conflit sont substantiellement différentes étant donné que la marque contestée commence par le terme « alfredo » alors que la marque antérieure commence par l’expression « l’originale » et que la marque contestée comprend l’expression « alla scrofa ».

50      À cet égard, il suffit de constater que la circonstance que les marques en conflit commencent par des termes différents n’est toutefois pas suffisante pour remettre en cause leur similitude résultant de la présence de l’élément « alfredo », commun aux marques en conflit.

51      S’agissant de la comparaison sur le plan conceptuel, la chambre de recours a estimé que les marques en conflit étaient similaires dans la mesure où elles évoquaient une personne ayant le même nom (Alfredo). Cependant, elle a considéré que cette similitude n’était pas élevée dans la mesure où ce nom était associé dans chaque marque à des concepts différents, à savoir le concept d’authenticité par la présence de l’expression « l’originale » dans la marque antérieure et un concept toponymique par la présence de l’expression « alla scrofa » dans la marque contestée.

52      Le requérant fait valoir que le terme « alfredo » est associé aux « fettuccine », un certain type de pâtes, en raison de l’existence d’un plat appelé « fettuccine alfredo » servi pour la première fois dans le restaurant de la via della Scrofa et il reproche à la chambre de recours d’avoir ignoré la généralisation de l’association entre le nom Alfredo et les pâtes « fettuccine alfredo ». En outre, selon le requérant, la chambre de recours aurait ignoré la dimension toponymique du nom Alfredo résultant de son association avec l’expression « alla scrofa », alors que cet élément aurait une influence sur la perception des signes.

53      Il y a lieu d’observer que le requérant a déjà invoqué l’argument selon lequel le terme « alfredo » se serait généralisé afin de démontrer le faible caractère distinctif de ce terme. Or, il ressort du point 38 ci-dessus que le requérant n’a pas établi que le terme « alfredo » utilisé seul était perçu comme une référence aux pâtes « fettuccine alfredo », de sorte qu’il ne saurait donc faire valoir que le terme « alfredo » fait conceptuellement référence aux pâtes « fettuccine alfredo ».

54      S’agissant de l’argument du requérant selon lequel la chambre de recours aurait omis de prendre en compte l’expression « alla scrofa » et la dimension toponymique de la marque contestée, force est de constater qu’il repose sur une lecture incomplète de la décision attaquée. En effet, la chambre de recours a relevé que, l’expression « alla scrofa » étant comprise par le public italien comme une indication de lieu, le nom Alfredo serait, dans la marque contestée, associé au lieu-dit la Scrofa.

55      Il s’ensuit que les arguments du requérant ne sont pas susceptibles de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours concernant la comparaison des marques en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel ainsi que sa conclusion selon laquelle les marques en conflit sont globalement faiblement similaires.

56      Troisièmement, s’agissant du risque de confusion, le requérant reproche à la chambre de recours d’avoir, d’une part, omis de prendre en considération la coexistence pacifique des marques en conflit et le fait qu’elles ont la même origine, à savoir le contrat de vente du restaurant Alfredo situé via della Scrofa à Rome (Italie), et, d’autre part, commis une erreur dans l’appréciation globale du risque de confusion, car les différences visuelles, graphiques et phonétiques importantes entre les marques en conflit écarteraient tout risque de confusion.

57      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a écarté les arguments du requérant fondés sur la coexistence des restaurants et des marques en conflit au motif que la coexistence n’était pas invoquée pour une partie significative du territoire pertinent. Elle a écarté l’argument fondé sur le contrat conclu en 1943 par les aïeux du requérant et de l’intervenante portant sur la vente du restaurant Alfredo situé via della Scrofa à Rome au motif que ce contrat n’était pas pertinent. En prenant en compte le fait que l’identité ou la similitude élevée des produits et des services en cause compensait la faible similitude des marques en conflit, que le terme « alfredo », commun aux signes en conflit, revêtait un caractère distinctif plus important que les autres éléments de ces marques et que la marque antérieure avait un caractère distinctif normal, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

58      Les arguments du requérant ne sont pas susceptibles de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours.

59      Force est de constater que le premier argument résulte d’une lecture erronée de la décision attaquée. En effet, la chambre de recours a relevé que la coexistence des marques en conflit dans un quartier du centre de Rome n’avait pas d’étendue territoriale suffisante et que la coexistence ne pouvait pas être prise en compte, car elle n’avait pas été démontrée pour une partie significative du territoire italien. En outre, elle a souligné que la coexistence n’était alléguée que pour les restaurants et non pour les produits alimentaires visés par les marques en conflit. La chambre de recours a également considéré que le contrat conclu en 1943 par les aïeux du requérant et de l’intervenante n’était pas pertinent, car le risque de confusion devait être apprécié au regard des circonstances de fait actuelles et notamment de la similitude des marques ainsi que des produits et des services en cause.

60      Quant au second argument, il suffit de rappeler que, le requérant n’ayant invoqué aucun argument susceptible de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les marques en conflit sont moyennement similaires sur les plans visuel et phonétique (voir points 44 et 48 ci-dessus), il ne saurait donc prétendre qu’elles sont différentes sur ces plans.

61      Il s’ensuit que le second moyen doit être rejeté et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

62      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Mario Mozzetti est condamné aux dépens.

Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 juillet 2016.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.

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