Commission v Frieberger and Others (Judgment) French Text [2017] EUECJ T-232/16 (19 January 2017)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/T23216.html
Cite as: ECLI:EU:T:2017:15, EU:T:2017:15, [2017] EUECJ T-232/16

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Édition provisoire

ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

19 janvier 2017 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Pensions – Réforme du statut – Relèvement de l’âge de la retraite – Décision refusant la revalorisation de la bonification des droits à pension – Principe ne ultra petita – Erreur de droit – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑232/16 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 2 mars 2016, Frieberger et Vallin/Commission (F‑3/15, EU:F:2016:26), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Commission européenne, représentée par MM. G. Berscheid et G. Gattinara, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant

Jürgen Frieberger, fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Woluwe-Saint-Lambert (Belgique),

Benjamin Vallin, fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Saint-Gilles (Belgique),

représentés par Mes J.-N. Louis et N. de Montigny, avocats,

parties demanderesses en première instance,

Parlement européen,

et

Conseil de l’Union européenne,

parties intervenantes en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de MM. M. Jaeger, président, S. Papasavvas (rapporteur) et G. Berardis, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 2 mars 2016, Frieberger et Vallin/Commission (F‑3/15, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:F:2016:26), par lequel celui-ci a annulé sa décision du 26 mars 2014 en ce qu’elle a rejeté la demande de M. Jürgen Frieberger tendant à obtenir un nouveau calcul de la bonification de ses droits à pension transférés au régime de pension de l’Union européenne (ci-après la « décision du 26 mars 2014 »).

 Faits à l’origine du litige

2        Les faits à l’origine du litige sont énoncés aux points 12 à 19 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 12      M. Frieberger est entré au service de l’Union européenne (alors des Communautés européennes) le 1er octobre 1997 en tant que fonctionnaire. Il a obtenu, le 21 mai 2001, le transfert des droits à pension qu’il avait constitués auprès du régime autrichien de pension vers le régime de pension de l’Union, et cela à concurrence de 1 an, 7 mois et 19 jours. Le 21 janvier 2005, le nombre d’annuités à prendre en compte dans le régime de pension de l’Union a fait l’objet d’un nouveau calcul sur la base de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut et a été fixé à 1 an, 9 mois et 15 jours.

13      L’âge du droit à la pension d’ancienneté de M. Frieberger était, en outre, fixé à 62 ans et 4 mois en application de l’article 22 de l’annexe XIII du statut dans sa version antérieure au règlement n° 1023/2013. À la suite de la modification de cet article par ledit règlement, l’âge de sa retraite est passé à 63 ans et 2 mois.

14      M. Vallin est, pour sa part, entré au service de l’Union le 1er avril 2009 en tant qu’agent contractuel auxiliaire. Il est devenu fonctionnaire le 1er mars 2012. Il n’a formé aucune demande de transfert de ses droits à pension antérieurement constitués dans un régime de pension national.

15      L’âge de la pension de M. Vallin était, en outre, fixé à 63 ans en application de l’article 52 du statut dans sa version antérieure au règlement n° 1023/2013. À la suite de la modification de cet article par ledit règlement, l’âge de sa retraite est passé à 64 ans et 6 mois.

16      Depuis leur entrée en service, les requérants contribuent chaque mois au régime de pension de l’Union.

17      Le 9 décembre 2013, M. Vallin a introduit une demande, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, visant à obtenir le remboursement d’une partie des contributions au régime de pension de l’Union prélevées sur sa rémunération. Cette demande a été rejetée par une décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination de la Commission (ci-après l’“AIPN”) datée du 13 mars 2014 (ci-après la “décision du 13 mars 2014”).

18      Le 17 décembre 2013, M. Frieberger a également introduit une demande, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, visant à obtenir le remboursement d’une partie des contributions au régime de pension prélevées sur sa rémunération ainsi que la réévaluation de la bonification du transfert des droits à pension qu’il avait acquis avant son entrée [au] service de l’Union. Cette demande a été rejetée par l’AIPN le 26 mars 2014 […]

19      M. Vallin a introduit une réclamation, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, le 11 juin 2014. M. Frieberger a fait de même le 23 juin suivant. L’AIPN a rejeté leurs réclamations respectives le 26 septembre 2014. »

 Procédure en première instance et arrêt attaqué

 Procédure devant le Tribunal de la fonction publique

3        Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 9 janvier 2015 et enregistrée sous la référence F‑3/15, MM. Frieberger et Benjamin Vallin, parties demanderesses en première instance, ont introduit un recours tendant, premièrement, à déclarer inapplicable l’article 22 de l’annexe XIII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, tel que modifié par le règlement (UE, EURATOM) n° 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013, modifiant le statut des fonctionnaires de l’Union européenne et le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (JO 2013, L 287, p. 15, ci-après le « statut »), et, deuxièmement, à annuler les décisions du 13 et du 26 mars 2014 par lesquelles la Commission aurait rejeté leurs demandes visant à obtenir, d’une part, le remboursement d’une partie de leurs contributions au régime de pension de l’Union et, d’autre part, la réévaluation de la bonification du transfert de leurs droits à pension vers le régime de l’Union, ainsi que, pour autant que de besoin, à annuler les décisions du 26 septembre 2014 rejetant leurs réclamations dirigées contre les décisions des 13 et 26 mars 2014 susmentionnées.

4        Par actes déposés au greffe du Tribunal de la fonction publique respectivement le 16 février et le 23 mars 2015, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Il a été fait droit à ces demandes par décisions, respectivement, du 6 mars et du 13 avril 2015.

5        Par acte déposé au greffe du Tribunal de la fonction publique le 6 mai 2015, MM. P. Colart, E. Kinzig et Mme S. Pirot, fonctionnaires du Parlement, ont demandé à intervenir au soutien des conclusions des parties demanderesses en première instance. Ces demandes ont été rejetées par ordonnance du 8 juin 2015, Frieberger et Vallin/Commission (F‑3/15, non publiée, EU:F:2015:57).

6        L’audience a eu lieu le 6 octobre 2015 et l’arrêt attaqué a été prononcé le 2 mars 2016.

 Arrêt attaqué

7        Par l’arrêt attaqué, tout d’abord, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le premier chef de conclusions comme étant irrecevable. Ensuite, il a délimité l’objet du deuxième chef de conclusions comme ayant eu pour effet de le saisir uniquement des conclusions aux fins d’annulation des décisions des 13 et 26 mars 2014. Enfin, s’agissant des moyens soulevés à l’appui du deuxième chef de conclusions ainsi défini, le Tribunal de la fonction publique a rejeté les trois premiers, puis a accueilli le quatrième moyen en ce qu’il avait été soulevé par M. Frieberger.

8        Le Tribunal de la fonction publique a en effet considéré que, à l’appui du deuxième chef de conclusions, les parties demanderesses en première instance invoquaient quatre moyens, tirés, le premier, de la violation de l’obligation de motivation découlant de l’article 296 TFUE, de l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et de l’article 25 du statut, le deuxième, de la violation des articles 83 et 83 bis du statut et de l’annexe XII du statut, le troisième, d’une exception d’illégalité soulevée à l’encontre de l’article 22 de l’annexe XIII du statut et, enfin, le quatrième, de la violation de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut.

9        Dans le cadre de son appréciation relative au quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut (arrêt attaqué, points 90 à 105) et seul pertinent pour l’examen du présent pourvoi (voir point 19 ci-après), le Tribunal de la fonction publique a tout d’abord relevé que M. Vallin n’avait pas demandé le transfert de ses droits à pension vers le régime de pension de l’Union et que, a fortiori, la Commission ne s’était pas prononcée sur cette question dans sa décision du 13 mars 2014, rejetant la demande par laquelle celui-ci visait à obtenir le remboursement d’une partie des contributions audit régime prélevées sur sa rémunération. Par conséquent, le Tribunal de la fonction publique a jugé que les conclusions imputables à ce dernier tendant à l’annulation de ladite décision, en ce qu’elle aurait prétendument rejeté sa demande en ce sens, étaient dépourvues d’objet et en a déduit qu’il n’y avait pas lieu d’examiner le quatrième moyen en tant qu’il était invoqué par celui-ci. Ensuite, le Tribunal de la fonction publique a relevé que, bien que M. Frieberger ait fait grief à l’autorité investie du pouvoir de nomination de la Commission (ci-après l’« AIPN ») d’avoir rejeté sa demande de revalorisation de la bonification de ses droits à pension acquis avant son entrée en service sans motiver sa décision, son argumentation aurait été explicitement fondée sur l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut. À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a considéré que cette référence à la motivation de la décision du 26 mars 2014 n’était qu’une « digression » que l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique avait pour objet de proscrire et qu’il convenait, ainsi, d’examiner le quatrième moyen du recours exclusivement en tant qu’il visait à contester la légalité interne de la décision du 26 mars 2014.

10      Par suite, le Tribunal de la fonction publique a examiné la portée de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut, pour conclure que ni le libellé ni même le caractère transitoire de cette disposition ne s’opposaient à ce que, après une première revalorisation de la bonification de ses droits à pension consécutive à la réforme statutaire de 2004, un fonctionnaire obtienne une seconde revalorisation tenant compte de la modification de l’article 22 de l’annexe XIII du statut par le règlement n° 1023/2013, qui a relevé de nouveau l’âge légal de la retraite. Ainsi, il a fait droit au quatrième moyen et a annulé la décision du 6 mars 2014.

 Sur le pourvoi

 Procédure

11      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 12 mai 2016, la Commission a introduit le présent pourvoi.

12      Le 16 août 2016, M. Frieberger et M. Vallin ont déposé un mémoire en réponse.

13      Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement le 13 juillet et le 19 septembre 2016, le Parlement et le Conseil ont renoncé au dépôt d’un mémoire en réponse.

14      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 28 septembre 2016, la Commission a demandé de pouvoir déposer une réplique. Par décision du 7 octobre 2016, le président de la chambre des pourvois a rejeté cette demande et la phase écrite de la procédure a été, par conséquent, clôturée.

15      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 28 octobre 2016, la Commission a demandé la tenue d’une audience, en vertu de l’article 207, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Les parties demanderesses en première instance n’ont pas présenté une telle demande dans le délai imparti.

16      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois), s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a décidé de statuer sur le pourvoi sans phase orale de la procédure, conformément à l’article 207, paragraphe 2, du règlement de procédure.

 Conclusions des parties

17      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’arrêt attaqué en tant que le Tribunal de la fonction publique a considéré comme fondé le quatrième moyen du recours ;

–        en ce qui concerne la procédure en première instance, dans la mesure où le Tribunal considérerait l’affaire en état d’être jugée, rejeter le recours comme non fondé et condamner les parties demanderesses en première instance à supporter les dépens ;

–        en ce qui concerne la procédure de pourvoi, condamner chaque partie à supporter ses propres dépens.

18      M. Frieberger et M. Vallin concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi ;

–        condamner la Commission à supporter les dépens.

 En droit

19      À l’appui de son pourvoi, dirigé uniquement contre les points 90 à 105 de l’arrêt attaqué, la Commission soulève cinq moyens, tirés, le premier, d’une dénaturation du contenu de la requête et d’une violation de l’interdiction de statuer ultra petita, le deuxième, d’une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut, le troisième, d’une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de transfert des droits à pension au titre de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, le quatrième, d’une violation de l’obligation de motivation et, le cinquième, d’une violation du principe d’égalité de traitement.

20      Il convient d’examiner d’abord le premier moyen, lequel comporte deux branches.

21      Par la première branche, la Commission fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a dénaturé le contenu de la requête en partant de la prémisse erronée selon laquelle M. Frieberger aurait soutenu avoir demandé et obtenu une nouvelle bonification de ses droits à pension, alors que cette circonstance ne découlerait ni de l’exposé des faits ni des moyens soulevés dans ledit mémoire.

22      Par la seconde branche, qu’il convient d’examiner en premier lieu, la Commission estime que, par le quatrième moyen de la requête en première instance, M. Frieberger s’est limité à faire valoir un défaut de motivation de la décision du 26 mars 2014 quant à la non-applicabilité de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut, sans pour autant soulever une violation de cette disposition, de sorte que le Tribunal de la fonction publique aurait statué ultra petita en examinant ledit moyen au fond.

23      En ce qui concerne la seconde branche, la Commission fait valoir que le Tribunal de la fonction publique s’est prononcé sur des griefs que M. Frieberger n’avait pas soulevés et, notamment, sur la prétendue contestation de la légalité interne de la décision du 26 mars 2014 sous l’angle de la violation de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut. De plus, elle affirme que, sous prétexte de vouloir corriger le contenu du quatrième moyen de la requête, en invoquant l’article 50 de son règlement de procédure, le Tribunal de la fonction publique a soulevé d’office un grief qui n’avait pas été soulevé par M. Frieberger, en violation de l’interdiction de statuer ultra petita.

24      M. Frieberger soutient que, ainsi qu’il ressortirait des points 64 à 71 de la requête, il aurait invoqué le moyen tiré du refus de procéder à un nouveau calcul de la bonification de ses droits à pension transférés dans le régime de pension de l’Union en violation de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut. À cet égard, il affirme avoir demandé, en application de cette disposition, une revalorisation de la bonification de ses droits à pension transférés avant le 1er mai 2004 et que la Commission aurait parfaitement compris la portée de sa demande et sa base juridique.

25      Il convient, tout d’abord, de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que l’examen d’un grief tiré de la violation de l’interdiction de statuer ultra petita amène le juge du pourvoi à vérifier si les motifs litigieux de l’arrêt attaqué constituent un développement du raisonnement du Tribunal de la fonction publique se rapportant à des moyens invoqués en première instance ou s’ils se rapportent à des moyens distincts (voir arrêt du 21 mai 2014, Commission/Macchia, T‑368/12 P, non publié, EU:T:2014:266, point 18 et jurisprudence citée).

26      En l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a énoncé les arguments des parties demanderesses en première instance, soulevés à l’appui du quatrième moyen, comme suit :

« 90      Les [parties demanderesses en première instance] exposent, pour commencer, que les droits à pension qu’ils avaient acquis avant leur entrée au service des institutions ont été transférés et convertis en annuités de pension dans le régime de pension de l’Union sur la base de paramètres tenant compte de l’âge légal de la retraite tel qu’il était fixé avant l’entrée en vigueur, le 1er mai 2004, du règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut […] ainsi que le régime applicable aux autres agents de[s] Communautés [européennes] (JO L 124, p. 1, ci-après la “réforme de 2004”). Ils exposent également avoir obtenu un nouveau calcul de la bonification de leurs droits à pension ainsi transférés en application de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut au vu du relèvement de l’âge de la retraite opéré par cette réforme. Ils font ensuite valoir qu’en relevant encore l’âge légal de la retraite par la modification apportée à l’article 22 de l’annexe XIII du statut, le règlement n° 1023/2013 aurait de nouveau modifié les paramètres pris en compte pour la bonification des droits à pension transférés, avec cette conséquence que leurs droits à pension bonifiés avant [l’entrée en vigueur du]dit règlement l’auraient été sur une base moins avantageuse que celle à laquelle ils pourraient prétendre sur la base du nouvel âge légal de la retraite. Les [parties demanderesses en première instance] estiment dès lors qu’en refusant de procéder à une nouvelle revalorisation de la bonification des droits à pension qu’ils avaient acquis avant leur entrée en service auprès des institutions et qu’ils avaient transférés au régime de pension de l’Union, sans motiver ce refus, l’AIPN aurait méconnu l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut, car celui-ci offrirait précisément à tout fonctionnaire ayant procédé, avant le 1er mai 2004, à un transfert de ses droits à pension la possibilité de demander et d’obtenir une revalorisation tenant compte des nouveaux paramètres en la matière. »

27      Ensuite, au point 92 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a relevé que M. Frieberger avait fondé explicitement son quatrième moyen sur l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut et que les développements afférents à celui-ci reposaient sur cette disposition. À cet égard, après avoir admis que, au terme de ces développements, M. Frieberger soutenait que « [l]’AIPN a[vait] […] rejeté [sa] demande en violation de l’article 26[, paragraphe] 5, de l’annexe XIII du statut sans motiver sa décision », le Tribunal de la fonction publique a constaté qu’il y avait toutefois lieu de considérer que « cette référence à la motivation de cette décision n’[était] qu’une digression que l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure [du Tribunal de la fonction publique] a[vait] pour objet de proscrire ». Ainsi, il a estimé que, contrairement à ce qu’avait soutenu la Commission, il convenait d’examiner le quatrième moyen exclusivement en tant qu’il visait à contester la légalité interne de la décision du 26 mars 2014.

28      Après avoir ainsi défini l’objet du quatrième moyen, le Tribunal de la fonction publique s’est livré, aux points 93 à 105 de l’arrêt attaqué, à une interprétation de la portée et de l’économie de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut, en procédant par réfutation des arguments présentés par la Commission, à titre subsidiaire, dans son mémoire en réponse, pour conclure à la violation de ladite disposition et annuler la décision du 26 mars 2014.

29      Il y a donc lieu d’examiner si, ce faisant, le Tribunal de la fonction publique a outrepassé les limites objectives du litige pendant devant lui, comme le fait valoir, en substance, la Commission. En effet, le juge de l’Union ne pouvant statuer ultra petita, l’annulation qu’il prononce ne saurait excéder celle sollicitée par le requérant (voir arrêt du 5 octobre 2009, de Brito Sequeira Carvalho et Commission/Commission et de Brito Sequera Carvalho, T‑40/07 P et T‑62/07 P, EU:T:2009:382, point 187 et jurisprudence citée).

30      À cet égard, en premier lieu, il importe de constater qu’il ressort de la lecture du quatrième moyen soulevé dans la requête que, premièrement, les parties demanderesses en première instance demandaient que l’AIPN procédât à un nouveau calcul de la bonification de leurs droits à pension acquis avant leur entrée en service et transférés au régime de pension de l’Union, tout en rappelant le contexte réglementaire dans lequel était intervenu ledit transfert. Deuxièmement, elles soutenaient que leurs droits à pension avaient été bonifiés sur la base d’anciens critères, moins avantageux que ceux qui résulteraient de l’entrée en vigueur du règlement n° 1023/2013. Troisièmement, après avoir cité le libellé de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut, elles indiquaient avoir demandé une nouvelle bonification de leurs droits à pension au titre de cette disposition et des nouveaux paramètres qui découleraient de l’article 22 de ladite annexe, mais que l’AIPN avait rejeté leur demande « en violation de l’article 26, paragraphe 5, de [cette] annexe […], sans motiver sa décision ». Estimant que cette décision était illégale, elles demandaient son annulation.

31      Il s’ensuit que, ainsi que le fait valoir à bon droit la Commission, le seul grief soulevé à l’égard de la décision du 26 mars 2014 dans le contexte du quatrième moyen était celui tiré d’une prétendue violation de l’obligation de motivation par l’AIPN.

32      En second lieu, il convient de relever que, en dépit d’une référence à une prétendue violation de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut dans l’intitulé du quatrième moyen, l’examen du contenu de celui-ci ne permet pas de conclure qu’il comporte un grief ou un argument quelconques au soutien de ladite violation, mettant en cause la légalité interne de la décision du 26 mars 2014. En effet, compte tenu du caractère vague et confus des arguments soulevés à l’appui du quatrième moyen du recours en première instance et des références éparses à certaines dispositions du statut, le Tribunal de la fonction publique ne pouvait pas valablement considérer qu’il était saisi d’une demande visant à contrôler la légalité interne de la décision du 26 mars 2014 à l’aune de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut.

33      Il suffit de rappeler à cet égard que, si le juge de l’Union a admis que l’énonciation des moyens du recours n’est pas liée à la terminologie et à l’énumération du règlement de procédure et que la présentation de ces moyens, par leur substance plutôt que par leur qualification légale, peut suffire, c’est à la condition toutefois que lesdits moyens se dégagent de la requête avec suffisamment de netteté (voir arrêt du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 33 et jurisprudence citée).

34      Par ailleurs, il découle d’une jurisprudence constante que la requête doit expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé (voir arrêt du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI, T‑618/11 P, non publié, EU:T:2013:479, point 57 et jurisprudence citée). Cette jurisprudence exige ainsi que la requête expose les griefs et les éléments de fait à l’appui des moyens de manière suffisamment cohérente et intelligible pour ne pas entraver ou empêcher l’exercice du contrôle de légalité par le juge de l’Union. En outre, l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique consacre à cet égard une exigence encore plus précise que celle énoncée à l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 76, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure en ce qu’il prévoit que la requête contient « les moyens et les arguments de fait et de droit invoqués » (arrêt du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI, T‑618/11 P, non publié, EU:T:2013:479, point 58).

35      Il s’ensuit que c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique a constaté, au point 92 de l’arrêt attaqué, que M. Frieberger avait fondé « explicitement » son moyen sur l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut et que les développements de celui-ci reposaient sur cette disposition. En effet, le Tribunal de la fonction publique aurait dû considérer que la violation de cette disposition n’avait pas été valablement invoquée ou, à tout le moins, rejeter le quatrième moyen comme étant irrecevable pour autant que celle-ci était visée et se limiter à examiner la violation de l’obligation de motivation par l’AIPN. Partant, force est de constater que, contrairement à ce que le Tribunal de la fonction publique a considéré au point 92 de l’arrêt attaqué, seule était invoquée devant celui-ci la violation d’une forme substantielle et non un moyen de légalité au fond qui aurait eu trait à une erreur manifeste d’appréciation dont serait entachée la décision du 26 mars 2014.

36      Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que le Tribunal de la fonction publique ne pouvait, ainsi qu’il l’a fait au point 92 de l’arrêt attaqué, requalifier l’objet du quatrième moyen du recours en première instance comme visant à contester exclusivement la légalité interne de la décision du 26 mars 2014, dès lors que seule la légalité externe de cette décision était mise en cause. Au demeurant, il importe de relever que le Tribunal de la fonction publique n’a pas examiné le prétendu défaut de motivation de ladite décision qui était pourtant invoqué devant lui et qu’il lui incombait, en tout état de cause, d’examiner d’office. C’est donc à bon droit que la Commission soutient que le Tribunal de la fonction publique a statué ultra petita en procédant, en l’espèce, à l’annulation de la décision du 26 mars 2014, après avoir examiné la portée de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut et constaté sa violation.

37      Au vu de ce qui précède, la seconde branche du premier moyen du pourvoi doit être accueillie. Il y a lieu, par suite, d’annuler l’arrêt attaqué, sans qu’il soit besoin d’examiner la première branche du premier moyen ni les autres moyens du pourvoi, qui ont trait à l’interprétation, par le Tribunal de la fonction publique, de l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut.

 Sur le recours introduit en première instance

38      En vertu de l’article 4 du règlement (UE, Euratom) 2016/1192 du Parlement européen et du Conseil, du 6 juillet 2016, relatif au transfert au Tribunal de la compétence pour statuer, en première instance, sur les litiges entre l’Union européenne et ses agents (JO 2016, L 200, p. 137), lorsque le Tribunal annule une décision du Tribunal de la fonction publique tout en considérant que le litige est en état d’être jugé, la chambre qui statue sur le pourvoi statue elle-même sur le litige.

39      En l’espèce, le Tribunal de la fonction publique ayant, d’une part, rejeté les trois premiers moyens du recours sans que les parties au pourvoi en aient contesté l’appréciation et, d’autre part, statué sur le quatrième moyen en annulant la décision du 26 mars 2014 sur le fond, le Tribunal dispose de tous les éléments nécessaires pour pouvoir statuer sur la question du prétendu défaut de motivation de ladite décision invoquée à l’appui du quatrième moyen, laquelle a été débattue par les parties en première instance. Le litige est donc en état d’être jugé. Ainsi, il y a lieu pour le Tribunal de statuer définitivement sur le recours initialement introduit devant le Tribunal de la fonction publique par M. Frieberger et par M. Vallin en se prononçant sur le quatrième moyen de celui-ci, dont la substance a été définie aux points 31 et 32 ci-dessus comme visant essentiellement à contester la motivation de la décision du 26 mars 2014.

40      À cet égard, il convient de rappeler que l’obligation de motivation prescrite par l’article 25, deuxième alinéa, du statut, qui ne constitue que la reprise de l’obligation générale édictée par l’article 296 TFUE, a pour objet, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l’acte lui faisant grief et l’opportunité d’introduire un recours devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de l’acte (voir arrêt du 13 septembre 2016, Pohjanmäki/Conseil, T‑410/15 P, non publié, EU:T:2016:465, point 77 et jurisprudence citée).

41      Le caractère suffisant de la motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi du contexte factuel et juridique dans lequel s’inscrit l’adoption de l’acte attaqué (voir, en ce sens, arrêt du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C‑350/88, EU:C:1990:71, point 16).

42      En l’espèce, dans la décision du 26 mars 2014, l’AIPN a tout d’abord relevé que la circonstance que l’article 26, paragraphe 5, de l’annexe XIII du statut n’a pas été modifié lors de la réforme statutaire de 2013 a pu donner l’impression que les fonctionnaires ayant accepté de transférer leurs droits à pension avant le 1er mai 2004 pourraient bénéficier d’une seconde bonification des droits transférés. L’AIPN a ensuite rappelé que, toutefois, la disposition en cause devait être considérée comme une « référence statique » aux mesures transitoires adoptées en 2004 et qu’elle visait indubitablement la situation des fonctionnaires ayant accepté de transférer leurs droits à pension avant le 1er mai 2004. L’AIPN a ainsi estimé que cette disposition particulière ne saurait être interprétée au sens large, ce qui serait confirmé par l’interprétation restrictive qu’il convenait de conférer à l’annexe XIII du statut, en tant que mesure transitoire. Elle a ensuite précisé qu’une interprétation contraire ne couvrirait pas les membres du personnel ayant accepté un transfert de leurs droits à pension entre le 1er mai 2004 et le 31 décembre 2013 ou les personnes ayant contribué directement au régime de pension de l’Union et ayant acquis des droits à pension en travaillant pour les institutions de l’Union, également concernés par les mesures transitoires, de sorte qu’une telle différence de traitement méconnaîtrait le principe d’égalité de traitement. Elle a en outre rappelé que, afin de préserver l’équilibre dudit régime et de prendre en compte les retombées de la nouvelle hausse de l’âge de départ à la retraite décidée en 2013, le législateur avait prévu des mesures compensatoires. L’AIPN a, par conséquent, rejeté la demande de nouveau calcul de la bonification de ses droits à pension présentée par M. Frieberger.

43      Force est de constater que, eu égard au contexte factuel et juridique ayant entouré l’adoption de la décision du 26 mars 2014, les indications figurant dans cette dernière, dont la substance a été rappelée au point 42 ci-dessus, ont été suffisantes pour permettre aux parties demanderesses en première instance et, en particulier, à M. Frieberger d’apprécier son bien-fondé et l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal de la fonction publique tendant à en contester la légalité ainsi qu’au Tribunal de la fonction publique d’en contrôler le bien-fondé.

44      Par ailleurs, il convient de relever que, dans la mesure où la situation de M. Frieberger n’a pas fait l’objet d’un réexamen à la suite de la réclamation introduite par celui-ci contre la décision du 26 mars 2014 et que la réponse à cette réclamation n’a pas modifié le dispositif de ladite décision, la motivation de la décision portant rejet de la réclamation, dépourvue de contenu autonome, coïncide avec la décision du 26 mars 2014 (voir, en ce sens, arrêts du 9 décembre 2009, Commission/Birkhoff, T‑377/08 P, EU:T:2009:485, point 55, et du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission, T‑325/09 P, EU:T:2011:506, point 32). À cet égard, il suffit de rappeler que le Tribunal de la fonction publique lui-même a constaté, au point 34 de l’arrêt attaqué, que, ainsi que l’avaient relevé les parties demanderesses en première instance, les décisions portant rejet de leurs réclamations étaient en tous points semblables aux décisions des 13 et 26 mars 2014. Ainsi, en application d’une jurisprudence constante, il a considéré que les décisions portant rejet des réclamations étaient purement confirmatives et qu’elles ne constituaient pas, par conséquent, des actes faisant grief, susceptibles de recours.

45      Il en résulte que le quatrième moyen du recours en première instance doit être rejeté comme étant dépourvu de tout fondement en droit.

46      Partant, il convient de rejeter le recours en première instance dans son ensemble.

 Sur les dépens

47      Conformément à l’article 211, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé ou lorsque le pourvoi est fondé et que le Tribunal juge lui-même le litige, il statue sur les dépens. Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 211 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Par ailleurs, il ressort de l’article 211, paragraphe 3, du règlement de procédure que, dans les pourvois formés par les institutions, les frais exposés par celles-ci restent à leur charge, sans préjudice des dispositions de l’article 135, paragraphe 2, du même règlement. Enfin, en application de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 211 du même règlement, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens.

48      En l’espèce, il y a lieu, d’une part, dans le cadre de la procédure de pourvoi, de condamner M. Frieberger et M. Vallin à supporter leurs propres dépens et, d’autre part, de constater que les autres parties supporteront leurs propres dépens. En ce qui concerne la procédure en première instance, M. Frieberger et M. Vallin ayant entièrement succombé en leurs conclusions et la Commission ayant conclu à leur condamnation aux dépens, il convient de les condamner aux dépens. Le Conseil et le Parlement supporteront leurs propres dépens liés à l’intervention.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 2 mars 2016, Frieberger et Vallin/Commission (F‑3/15), est annulé.

2)      Le recours introduit par M. Jürgen Frieberger et par M. Benjamin Vallin devant le Tribunal de la fonction publique dans l’affaire F‑3/15 est rejeté.

3)      Chaque partie supportera ses propres dépens afférents à la procédure de pourvoi.

4)      M. Frieberger et M. Vallin sont condamnés à supporter les dépens afférents à l’instance devant le Tribunal de la fonction publique, en ce compris les dépens de la Commission européenne.



5)      Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne supporteront leurs propres dépens afférents tant à l’instance devant le Tribunal de la fonction publique qu’à la présente instance.




Jaeger

Papasavvas

Berardis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 janvier 2017.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

G. Berardis


* Langue de procédure : le français.

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