De Nicola v Council and Court of Justice of the European Union (Judgment) French Text [2017] EUECJ T-42/16 (08 November 2017)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/T4216.html
Cite as: EU:T:2017:791, [2017] EUECJ T-42/16, ECLI:EU:T:2017:791

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

8 novembre 2017 (*)

« Responsabilité non contractuelle – Fonction publique – Personnel de la BEI – Directives concernant les thérapies au laser – Article 47 de la charte des droits fondamentaux – Délai raisonnable – Non-respect des règles du procès équitable – Préjudice matériel – Préjudice moral – Conclusions formées par le requérant dans le cadre d’une affaire pendante devant le Tribunal de la fonction publique – Renvoi partiel de l’affaire devant le Tribunal »

Dans l’affaire T‑42/16,

Carlo De Nicola, agent de la Banque européenne d’investissement, demeurant à Strassen (Luxembourg), représenté initialement par Mes L. Isola et G. Isola, puis par Me G. Ferabecoli, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. E. Rebasti et Mme M. Veiga, en qualité d’agents,

et

Cour de justice de l’Union européenne, représentée initialement par MM. J. Inghelram, P. Giusta et Mme L. Tonini Alabiso, puis par M. Inghelram, en qualité d’agents,

parties défenderesses,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 268 TFUE et tendant à obtenir réparation des préjudices que le requérant aurait prétendument subis en raison, premièrement, de l’adoption par le législateur de l’Union de certaines directives concernant les thérapies au laser, deuxièmement, de la durée prétendument excessive des procédures devant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne et le Tribunal relatives à sa demande de remboursement des frais médicaux liés à une thérapie au laser, troisièmement, du caractère supposé inéquitable de ces procédures et, quatrièmement, de nombreux recours que le Tribunal de la fonction publique et le Tribunal l’auraient contraint à introduire,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, J. Schwarcz (rapporteur) et C. Iliopoulos, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, M. Carlo De Nicola, est, depuis 1992, membre du personnel de la Banque européenne d’investissement (BEI).

2        Depuis 2003, il souffre de maux de dos.

3        En 2007, ses douleurs s’étant aggravées, le requérant a subi des examens par résonance magnétique, qui ont mis en évidence une aggravation diffuse de la pathologie diagnostiquée en 2003. Le requérant a alors consulté, en Italie, un médecin spécialisé en chirurgie générale et en chirurgie d’urgence, pour ses problèmes de dos. Ce praticien, consulté notamment par des sportifs de renommée internationale, utilise une thérapie fondée sur l’emploi d’un laser à haute puissance de type FP3 (ci-après la « thérapie au laser FP3 »). Le requérant a pu bénéficier de cette thérapie lors de séances les 29, 30 et 31 octobre, ainsi que les 21, 22 et 23 novembre 2007. Selon une facture datée du 23 novembre 2007, ces séances lui ont coûté 3 000 euros.

4        Le 27 février 2008, la BEI, sur avis de son médecin-conseil, a rejeté la demande de remboursement des frais de la thérapie au laser FP3 introduite par le requérant, au motif qu’une telle thérapie n’était pas scientifiquement valable.

5        Le requérant a ensuite adressé plusieurs courriels à la BEI et a rencontré le médecin-conseil de cette dernière afin de recueillir de plus amples informations quant aux motifs dudit rejet. Il lui a également présenté des arguments et des documents au moyen desquels il a demandé, sans succès, que la BEI revienne sur sa décision.

6        Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne le 5 juin 2008 et enregistrée sous le numéro F‑55/08, le requérant a notamment demandé, premièrement, l’annulation de la décision du comité de recours de la BEI, du 14 décembre 2007, portant rejet de sa demande de revoir, en particulier, son rapport d’appréciation pour l’année 2006, des décisions de la BEI du 13 juillet 2007 relatives aux promotions de l’année 2006, en tant qu’elles refusaient sa promotion au titre de cette même année, et de tous les actes connexes, consécutifs et préalables, y compris le rapport d’appréciation pour l’année 2006, le cas échéant moyennant la constatation de l’illégalité de la règle en vertu de laquelle seulement 10 et 30 % des membres du personnel de la BEI pouvaient respectivement bénéficier des notes A et B +, deuxièmement, la constatation de l’existence d’un harcèlement moral à son égard ainsi que la condamnation de la BEI à y mettre un terme et à réparer les préjudices moraux et matériels subis et futurs en résultant et, troisièmement, la condamnation de la BEI à lui rembourser la somme de 3 000 euros pour les frais liés à la thérapie au laser FP3.

7        Au soutien de cette dernière demande, le requérant présentait deux moyens, tirés respectivement de l’insuffisance de motivation de la décision de refus de remboursement desdits frais médicaux et de ce que « le refus de remboursement ne serait pas justifié, la validité scientifique du traitement par laser qu’il a subi étant, selon lui, établie ».

8        Ce recours fut rejeté dans son ensemble par arrêt du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159).

9        Afin de rejeter, en particulier, la demande tendant à la condamnation de la BEI à lui rembourser les frais de la thérapie au laser FP3, le Tribunal de la fonction publique a jugé, d’une part, que le requérant a été informé des raisons pour lesquelles un refus de remboursement lui a été opposé et a été mis en mesure de contester utilement cette décision, et d’autre part, que la BEI a fait valoir à juste titre que le requérant n’a pas contesté le refus de remboursement selon les modalités prévues par ses dispositions internes en matière d’assurance maladie. En particulier, étant donné qu’il existait un désaccord entre le médecin-conseil de la BEI et le médecin traitant de l’assuré, c’est-à-dire du requérant, quant à la validité scientifique du traitement en question, il aurait appartenu à ce dernier de demander à la BEI de solliciter l’avis d’un troisième médecin, désigné par l’ordre des médecins, ce que le requérant n’a pas fait, la BEI n’ayant pas de raison de remettre en cause l’avis de son médecin-conseil.

10      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 janvier 2010, le requérant a formé un pourvoi contre l’arrêt du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159). Le requérant a notamment demandé d’annuler cet arrêt dans sa totalité et de faire droit aux conclusions en annulation et en indemnité qu’il a formulées en première instance. Il a présenté huit moyens au soutien de son pourvoi.

11      Par arrêt du 27 avril 2012, De Nicola/BEI (T‑37/10 P, EU:T:2012:205), le Tribunal a annulé partiellement l’arrêt du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159), mais il a rejeté comme irrecevable le sixième moyen du pourvoi, qui portait sur la décision de la BEI du 27 février 2008 de ne pas rembourser au requérant les frais de la thérapie au laser FP3.

12      Par courriel du 5 mai 2009, le requérant, en se référant à un argument soulevé par la BEI dans le mémoire en défense déposé dans le cadre de l’affaire F‑55/08 (voir point 9 ci-dessus), a demandé au directeur des ressources humaines de la BEI que l’avis d’un troisième médecin soit sollicité.

13      Par courriel du 24 mars 2010 (ci-après la « décision de rejet de la demande de désignation d’un troisième médecin »), une responsable de la BEI chargée de l’assurance maladie a indiqué au requérant, tout d’abord, qu’elle n’avait pas réagi plus tôt à la demande de désignation d’un troisième médecin afin de ne pas interférer dans le litige porté devant le Tribunal de la fonction publique (affaire F‑55/08), ensuite, que la demande de remboursement avait déjà été rejetée par décision du 27 février 2008, confirmée lors d’une réunion tenue le 11 mars 2008, et que le requérant n’avait pas demandé avant le 5 mai 2009 la désignation d’un troisième médecin, enfin, que la réclamation du requérant était manifestement tardive et, dès lors, irrecevable. Elle précisait que, si la réglementation de la BEI ne fixait aucun délai pour introduire une telle réclamation, le Tribunal aurait jugé, dans le silence des textes, qu’un délai de trois mois devait être considéré comme raisonnable, délai que le requérant n’aurait, en l’espèce, pas respecté.

14      Par lettre du 7 mai 2010, qui aurait été communiquée au requérant par courriel du 11 mai 2010, le directeur des ressources humaines de la BEI a rejeté la demande du requérant, en date du 27 avril 2010, d’ouvrir une procédure de conciliation conformément à l’article 41 du règlement du personnel de la BEI. Dans cette lettre, il était indiqué au requérant que sa demande du 5 mai 2009 tendant à la désignation d’un troisième médecin était manifestement tardive et donc irrecevable et que la décision de rejet de la demande de désignation d’un troisième médecin était un acte confirmatif, qui ne faisait pas grief au requérant et avait pour seul objet d’expliquer à ce dernier l’erreur procédurale qu’il avait commise en ne demandant pas, en 2008, la désignation d’un troisième médecin. Le directeur des ressources humaines précisait, à la fin de cette lettre, que la demande de conciliation aurait dû être adressée au président de la BEI dans un délai de trois mois après l’adoption de la décision négative sur le fondement de l’avis d’un troisième médecin. Cette dernière décision n’étant pas intervenue, la demande de conciliation ne serait pas recevable.

15      Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 24 juin 2010, le requérant a demandé, notamment, d’une part, l’annulation de la décision de rejet de la demande de conciliation et, d’autre part, la condamnation de la BEI à lui rembourser la somme de 3 000 euros, majorée d’intérêts, au titre des frais médicaux encourus pour la thérapie au laser FP3.

16      Le Tribunal de la fonction publique a rejeté ce recours par arrêt du 28 juin 2011, De Nicola/BEI (F‑49/10, EU:F:2011:93).

17      Aux points 40 à 45 de cet arrêt, le Tribunal de la fonction publique a précisé la portée des conclusions du requérant. Il a jugé que les conclusions dirigées contre la décision du 7 mai 2010 de rejet de la demande de conciliation (point 14 ci-dessus) avaient pour effet de saisir ledit Tribunal de conclusions visant la décision de rejet de la demande de désignation d’un troisième médecin. Ensuite, aux points 52 à 58 de ce même arrêt, le Tribunal de la fonction publique a accueilli des fins de non-recevoir soulevées par la BEI, concernant le deuxième chef de conclusions du requérant, tendant à la condamnation de la BEI à lui rembourser la somme de 3 000 euros, exposée pour la thérapie au laser FP3 administrée en 2007, et tirées de ce que cette partie du recours se heurterait à une exception de litispendance et n’aurait pas été précédée de la procédure médicale interne. Aux termes des points 61 à 83 dudit arrêt, le Tribunal de la fonction publique a finalement rejeté les conclusions tendant à l’annulation de la décision de rejet de la demande de désignation d’un troisième médecin en raison de sa tardiveté. Il a jugé que ladite demande n’avait pas respecté le délai de trois mois à compter de l’information du requérant du rejet définitif de sa demande de remboursement des frais médicaux en question, datée du 8 avril 2008, sans qu’une erreur excusable ait pu justifier ledit retard.

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 août 2011, le requérant a introduit un pourvoi contre l’arrêt du 28 juin 2011, De Nicola/BEI (F‑49/10, EU:F:2011:93).

19      Au soutien de ce pourvoi, le requérant a invoqué essentiellement quatre moyens. Premièrement, il a reproché au Tribunal de la fonction publique d’avoir commis une erreur de droit en jugeant tardive sa demande de désignation d’un troisième médecin pour donner un avis sur sa demande de remboursement des frais médicaux encourus pour la thérapie au laser FP3. Deuxièmement, le requérant a fait grief au Tribunal de la fonction publique d’avoir omis de se prononcer sur sa demande d’annulation de la décision de refus d’ouvrir la procédure de conciliation au titre de l’article 41 du règlement du personnel. Troisièmement, le requérant a reproché au Tribunal de la fonction publique d’avoir omis de se prononcer sur le refus implicite de la BEI de lui verser la somme de 3 000 euros au titre de remboursement de frais médicaux. Quatrièmement, le requérant a fait grief au Tribunal de la fonction publique d’avoir rejeté à tort comme irrecevable sa demande de condamnation au remboursement des frais médicaux pour cause de litispendance.

20      Par arrêt du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI (T‑418/11 P, EU:T:2013:478), le Tribunal a annulé non seulement l’arrêt du 28 juin 2011, De Nicola/BEI (F‑49/10, EU:F:2011:93), en tant qu’il rejetait les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision de désignation d’un troisième médecin, mais également cette même décision. À cet égard, le Tribunal a jugé aux points 28 à 47 de cet arrêt que le Tribunal de la fonction publique avait commis une erreur de droit en concluant que la demande du requérant de désigner un troisième médecin, au titre du point III, second alinéa, de l’annexe II des dispositions internes en matière d’assurance maladie, était tardive. Le pourvoi a été rejeté pour le surplus. Le Tribunal a jugé en particulier, aux points 56 à 60 de cet arrêt, que le Tribunal de la fonction publique avait déjà été saisi de la question de la légalité du refus du remboursement des frais médicaux en cause dans le cadre de la procédure dans l’affaire F‑55/08 et avait rejeté les moyens et griefs avancés par le requérant à cet égard dans l’arrêt du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159), qui a été définitivement confirmé sur ce point par l’arrêt du 27 avril 2012, De Nicola/BEI (T‑37/10 P, EU:T:2012:205), si bien que ce refus de remboursement des frais médicaux n’était plus susceptible d’être remis en cause par le requérant devant le juge de l’Union européenne.

21      Par note du 4 décembre 2014, la BEI a indiqué au requérant que, à la lumière de l’avis rendu par le troisième médecin, désigné à la demande du requérant, et après réexamen de son dossier médical, il ne pouvait être fait droit à sa demande de remboursement pour la thérapie au laser FP3.

 Procédure et conclusions des parties

22      Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 26 mai 2015 et enregistrée sous le numéro F-82/15, le requérant a introduit le présent recours.

23       Il a, en substance, conclu, d’une part, à l’annulation de la décision contenue dans la note du 4 décembre 2014 (point 21 ci-dessus), ainsi que de « tous les actes connexes, consécutifs et préalables » et, d’autre part, à la condamnation de la BEI et de l’Union européenne à l’indemnisation des préjudices qu’il aurait subis.

24      Par lettre du 25 novembre 2015, le Tribunal de la fonction publique a interrogé le requérant, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure, sur l’étendue de sa compétence pour connaître de ses demandes indemnitaires visant à faire constater la responsabilité non contractuelle de l’Union et l’a invité à préciser les institutions contre lesquelles il entendait diriger ces demandes. Le requérant a répondu dans le délai imparti en indiquant, notamment, qu’en cherchant à engager la responsabilité non contractuelle de l’Union il entendait diriger ses demandes indemnitaires contre le Conseil de l’Union européenne et la Cour de justice de l’Union européenne.

25      Par ordonnance du 29 janvier 2016, De Nicola/BEI e.a. (F‑82/15, ci-après l’« ordonnance de renvoi », EU:F:2016:8), le Tribunal de la fonction publique a constaté qu’il était incompétent pour connaître des demandes en indemnisation des préjudices introduites par le requérant dans le cadre du présent recours à l’encontre de l’Union, représentée respectivement par le Conseil et la Cour de justice de l’Union européenne, et a renvoyé la partie du recours afférente à ces demandes au Tribunal. Les dépens ont été réservés.

26      Par lettre du 18 février 2016, le Tribunal (cinquième chambre) a invité les parties à présenter, jusqu’au 21 mars 2016, leurs observations sur ladite ordonnance.

27      Par lettre du 11 mars 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a informé le Tribunal qu’elle n’avait pas d’observations sur l’ordonnance de renvoi.

28      Sur demande du Conseil, le Tribunal a, le 14 mars 2016, prorogé le délai pour le dépôt des observations sur cette ordonnance jusqu’au 21 avril 2016.

29      Par lettre du 19 avril 2016, le Conseil a informé le Tribunal qu’il n’avait pas d’observations sur l’ordonnance de renvoi.

30      Par lettre du 11 mai 2016, la Cour de justice de l’Union européenne a souhaité présenter des observations complémentaires sur l’ordonnance de renvoi. Par décision du président de la cinquième chambre du 7 juin 2016, ce document n’a pas été versé au dossier.

31      Le requérant n’a pas déposé d’observations sur ladite ordonnance.

32      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la quatrième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

33      Dans le cadre de la partie du recours qui a été renvoyée devant le Tribunal, le requérant demande, en substance, à ce qu’il plaise à ce dernier :

–        condamner le Conseil « en remplacement de la BEI ou à titre solidaire avec celle-ci », au paiement d’un montant de 3 000 euros au titre du préjudice matériel prétendument subi en conséquence des dispositions équivoques adoptées par le Conseil ;

–        condamner la Cour de justice de l’Union européenne à l’indemniser pour le préjudice qu’il aurait subi en raison de la durée prétendument excessive de la procédure, devant le Tribunal de la fonction publique et le Tribunal, relative à sa demande de remboursement des frais médicaux de la thérapie au laser FP3 ;

–        condamner la Cour de justice de l’Union européenne à l’indemniser pour le préjudice qu’il aurait subi en raison du caractère supposé inéquitable de cette procédure ;

–        condamner la Cour de justice de l’Union européenne à l’indemniser pour le préjudice moral qu’il aurait subi en raison de nombreux recours que le Tribunal de la fonction publique et le Tribunal l’auraient contraint à introduire ;

–        majorer les sommes reconnues des intérêts et de la compensation de l’érosion monétaire ;

–        condamner le Conseil et la Cour de justice de l’Union européenne aux dépens.

34      Le Conseil demande à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme manifestement irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme manifestement non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

35      La Cour de justice de l’Union européenne demande à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, rejeter le recours comme irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

36      Par arrêt du 21 juillet 2016, De Nicola/BEI (F‑82/15, EU:F:2016:166), le Tribunal de la fonction publique a accueilli les conclusions en annulation du requérant, mais il a rejeté ses conclusions indemnitaires formulées à l’encontre de la BEI.

37      Par son pourvoi introduit le 21 septembre 2016 et enregistré sous la référence T‑669/16 P, le requérant a demandé l’annulation de ce dernier arrêt. Par ordonnance du 3 juillet 2017, De Nicola/BEI (T‑669/16 P, non publiée, EU:T:2017:473), le Tribunal a rejeté le pourvoi.

 En droit

 Observations liminaires

38      En vertu de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, en matière de responsabilité non contractuelle, l’Union doit réparer, conformément aux principes généraux communs aux droits des États membres, les dommages causés par ses institutions ou par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions.

39      Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, au sens de la disposition susmentionnée, pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (voir arrêt du 16 octobre 2014, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑297/12, non publié, EU:T:2014:888, point 28 et jurisprudence citée).

40      Tout d’abord, s’agissant de la condition relative au comportement illégal reproché à l’institution ou à l’organe concerné, la jurisprudence exige que soit établie une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers. Pour ce qui est de l’exigence, selon laquelle la violation doit être suffisamment caractérisée, le critère décisif permettant de considérer qu’elle est remplie est celui de la méconnaissance manifeste et grave, par l’institution ou l’organe de l’Union concerné, des limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation. Lorsque cette institution ou cet organe ne dispose que d’une marge d’appréciation considérablement réduite, voire inexistante, la simple infraction au droit de l’Union peut suffire pour établir l’existence d’une violation suffisamment caractérisée (voir arrêt du 16 octobre 2014, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑297/12, non publié, EU:T:2014:888, point 29 et jurisprudence citée).

41      Ensuite, s’agissant de la condition relative à la réalité du dommage, la responsabilité de l’Union ne saurait être engagée que si le requérant a effectivement subi un préjudice « réel et certain ». Il incombe au requérant d’apporter des éléments de preuve au juge de l’Union afin d’établir l’existence et l’ampleur d’un tel préjudice (voir arrêt du 16 octobre 2014, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑297/12, non publié, EU:T:2014:888, point 30 et jurisprudence citée).

42      En ce qui concerne plus particulièrement le préjudice immatériel, si la présentation d’une offre de preuve n’est pas nécessairement considérée comme une condition de la reconnaissance d’un tel préjudice, il incombe tout au moins à la partie requérante d’établir que le comportement reproché à l’institution concernée était de nature à lui causer un tel préjudice (voir arrêt du 16 octobre 2014, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑297/12, non publié, EU:T:2014:888, point 31 et jurisprudence citée).

43      Enfin, s’agissant de la condition relative à l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué, ledit préjudice doit découler de façon suffisamment directe du comportement reproché, ce dernier devant constituer la cause déterminante du préjudice, alors qu’il n’y a pas d’obligation de réparer toute conséquence préjudiciable, même éloignée, d’une situation illégale. Il appartient au requérant d’apporter la preuve de l’existence d’un lien de causalité entre le comportement reproché et le préjudice invoqué (voir arrêt du 16 octobre 2014, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑297/12, non publié, EU:T:2014:888, point 32 et jurisprudence citée).

44      Dès lors que l’une des trois conditions d’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union n’est pas remplie, les prétentions indemnitaires doivent être rejetées, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si les deux autres conditions sont réunies. Par ailleurs, le juge de l’Union n’est pas tenu d’examiner ces conditions dans un ordre déterminé (voir arrêt du 16 octobre 2014, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑297/12, non publié, EU:T:2014:888, point 33 et jurisprudence citée).

45      Il convient de rappeler également que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, lu conjointement avec l’article 53, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 44, sous c), du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, toute requête doit contenir l’indication de l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels se fonde celui-ci ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même. Plus particulièrement, pour satisfaire à ces exigences, et eu égard aux conditions pour engager la responsabilité non contractuelle de l’Union, telles que rappelées aux points 39 à 43 ci-dessus, une requête visant à la réparation de dommages prétendument causés par une institution de l’Union doit contenir les éléments qui permettent d’identifier le comportement que le requérant reproche à l’institution, les raisons pour lesquelles il estime qu’un lien de causalité existe entre le comportement et le préjudice qu’il prétend avoir subi, ainsi que le caractère et l’étendue de ce préjudice (voir arrêts du 2 mars 2010, Arcelor/Parlement et Conseil, T‑16/04, EU:T:2010:54, point 132 et jurisprudence citée, et du 17 mai 2017, PG/Frontex, T‑583/16, non publié, EU:T:2017:344, points 90 et 91 et jurisprudence citée).

46      Par ailleurs, la requête introductive d’instance doit encore contenir les conclusions de la partie requérante. Les conclusions doivent être exposées de manière précise et non équivoque, puisque, à défaut, le Tribunal risquerait de statuer infra ou ultra petita et les droits de la partie défenderesse risqueraient de se trouver méconnus. Ainsi, et sous réserve des circonstances prévues à l’article 86 du règlement de procédure, seules les conclusions exposées dans la requête introductive d’instance peuvent être prises en considération et le bien-fondé du recours doit être examiné uniquement au regard des conclusions contenues dans la requête introductive d’instance [voir arrêt du 21 octobre 2015, Petco Animal Supplies Stores/OHMI – Gutiérrez Ariza (PETCO), T‑664/13, EU:T:2015:791, points 24 et 25 et jurisprudence citée].

 Sur le premier chef de conclusions, tendant à condamner le Conseil « en remplacement de la BEI ou à titre solidaire avec celle-ci », au paiement d’un montant de 3 000 euros au titre du prétendu préjudice matériel subi en conséquence des dispositions équivoques adoptées par le Conseil

47      Le requérant fait, en substance, grief au Conseil d’avoir adopté des directives laissant croire aux citoyens de l’Union que les appareils laser étaient des instruments médicaux, que les professionnels qui les utilisent étaient des médecins exerçant une activité médicale et que, partant, le traitement au laser était un soin médical, de sorte qu’il aurait suivi ce traitement en croyant que sa caisse de maladie procéderait au remboursement des coûts exposés. Cependant, le requérant aurait été surpris de découvrir que, nonobstant l’existence de ces directives, les thérapies au laser, en particulier la thérapie au laser FP3, ne pouvaient pas être remboursées par la caisse de maladie de la BEI au motif que leur validité scientifique ne serait pas démontrée.

48      Le Conseil conteste ces allégations.

49      À cet égard, et en premier lieu, ainsi que le relève à juste titre le Conseil, le grief formulé par le requérant à son égard manque de précision. Ainsi, dans la partie de la requête, relative à la demande indemnitaire, le requérant se borne à renvoyer aux directives adoptées par l’Union, sans préciser de quelles directives il s’agit exactement. À d’autres endroits de son mémoire introductif d’instance, il fait référence, d’une part, à la directive 93/42/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, relative aux dispositifs médicaux (JO 1993, L 169, p. 1), qui aurait été transposée dans le droit italien par deux décrets-loi, selon lesquels les lasers seraient des dispositifs médicaux, et d’autre part, à « la norme CEI 76‑6‑CT 76 Publication 5928: “Guide aux utilisateurs d’appareils lasers en médecine” et les normes ultérieures CEI 76‑2 (1995), CEI 76 Publication 1284 G (1989) et CEI EN 60601‑2‑22 Publication 3495 (1997) ». Le requérant n’identifie pas de disposition concrète qui serait à la base de son prétendu préjudice. Or, il n’appartient pas au Tribunal de se substituer sur ce point au requérant. Ensuite, le requérant ne précise pas en quoi devrait exactement consister l’illégalité commise par l’auteur de ces actes au moment de leur adoption. Il semblerait plutôt que le requérant approuve l’adoption desdites normes par le Conseil. Enfin, la requête ne contient pas d’explication du lien de causalité entre une éventuelle illégalité commise par le Conseil en adoptant lesdites normes, et le refus de la BEI de rembourser les frais médicaux litigieux. Partant, il y a lieu de conclure que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels ce chef de conclusions est fondé ne ressortent pas d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même.

50      Ainsi, ce chef de conclusions doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur le deuxième chef de conclusions, tendant à condamner la Cour de justice de l’Union européenne à indemniser le requérant pour le préjudice matériel qu’il aurait subi en raison de la durée prétendument excessive de la procédure devant le Tribunal de la fonction publique et le Tribunal relative à sa demande de remboursement des frais médicaux de la thérapie au laser FP3

51      Dans son mémoire introductif d’instance, le requérant soutient, en substance, que la Cour de justice de l’Union européenne n’a pas respecté les règles du procès équitable. Ainsi qu’il a été constaté dans l’ordonnance de renvoi, cette allégation comprend, en réalité, deux griefs. L’un, qui est tiré de la violation de la durée raisonnable des procédures devant le juge de l’Union, fait l’objet du deuxième chef de conclusions, et l’autre, qui est tiré de la violation des règles de procès équitable, fait l’objet du troisième chef de conclusions.

52      Dans le cadre du deuxième chef de conclusions, le requérant fait grief à la Cour de justice de l’Union européenne de n’avoir pas encore rendu de décision sur le fond en dépit de trois instances, dont un pourvoi, et huit années qui se sont écoulées à la suite des faits. Il ressort des points 144 et 145 du mémoire introductif d’instance que le requérant se réfère aux affaires F-55/08, F-49/10 et T-418/11 P.

53      Dans la réplique, le requérant fait valoir, en substance, tout d’abord, que face à l’écoulement d’un laps de temps tel que celui en l’espèce, sans que l’affaire ait été tranchée, il ne lui appartient plus de démontrer que la durée de la procédure a été excessive, mais qu’il revient plutôt à la juridiction saisie de préciser quels aspects d’une complexité particulière l’ont empêché de rendre une décision définitive, ce que la Cour de justice de l’Union européenne n’aurait pas fait. La durée totale des procédures en question dépasserait même celle qui était en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 juillet 2009, Der Grüne Punkt – Duales System Deutschland/Commission (C‑385/07 P, EU:C:2009:456), à savoir 5 ans et 10 mois, et à propos de laquelle il aurait été jugé qu’elle ne pouvait être justifiée par aucune des circonstances propres à l’affaire. Il ajoute, ensuite, que, en l’espèce, l’objet du litige, consistant en une demande de remboursement de frais médicaux, il serait évident que l’affaire ne présente aucun élément de complexité et qu’il n’a pas été à l’origine de pratiques dilatoires. Enfin, le requérant soutient que le droit à la réparation du dommage, qui est in re ipsa en raison de la durée excessive de la procédure, découle de la démonstration de l’illicéité du comportement de la partie défenderesse consistant dans la durée excessive de la procédure, et peut être liquidé, y compris en équité, en tenant compte par exemple des principes affirmés par la Cour européenne des droits de l’homme dans le cadre de l’interprétation et de l’application de l’article 6, paragraphe 2, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950.

54      La Cour de justice de l’Union européenne conteste ces allégations.

55      À cet égard, en premier lieu, contrairement à l’obligation qui découle pour le requérant de la jurisprudence citée aux points 45 et 46 ci-dessus, il y a lieu de constater que, ainsi que le fait valoir, en substance, la Cour de justice de l’Union européenne, la requête, qui n’est pas exempte de difficultés de compréhension en ce qui concerne ce chef de conclusions, ne contient pas d’éléments permettant d’identifier le caractère et l’étendue du préjudice qui découlerait pour le requérant du dépassement de la durée raisonnable des procédures judiciaires en question ainsi que le montant de l’indemnisation qu’il souhaite recevoir.

56      En effet, il résulte de la présentation des arguments avancés dans la requête au soutien des demandes indemnitaires que le requérant mentionne uniquement deux préjudices qu’il aurait subis.

57      D’une part, il s’agit du préjudice matériel chiffré à 3 000 euros, subi en raison du non-remboursement des frais médicaux. Ce préjudice allégué, mentionné sous le titre « B2) Sur la demande de condamnation de l’Union européenne » (ci-après le « titre B2 »), concerne clairement le premier chef de conclusions.

58      D’autre part, sous le titre « B3) Sur la demande de condamnation de toutes les parties défenderesses » (ci-après le « titre B3 »), le requérant allègue avoir souffert de « graves préjudices moraux » découlant de l’anxiété et de l’incertitude qu’il éprouve. Ce dernier préjudice allégué, qualifié de moral, n’a pas été attribué d’une manière compréhensible dans la requête à la prétendue durée excessive des procédures, auxquelles le requérant aurait été partie devant le juge de l’Union, mentionnée d’ailleurs sous le titre B2, et qui est le fondement de son deuxième chef de conclusions, mais, contrairement à ce qu’insinue le requérant dans la réplique, au nombre des recours que la BEI, le Tribunal de la fonction publique et le Tribunal l’auraient contraint d’engager devant le juge de l’Union. À cet égard, le requérant se réfère aux affaires F‑55/08 RENV, F‑59/09 RENV (De Nicola/BEI) et F‑52/11 (De Nicola/BEI).

59      Cette conclusion est corroborée par la première phrase du titre B3, dans laquelle le requérant demande de condamner « en tout état de cause », les deux parties défenderesses, à savoir la BEI et la Cour de justice de l’Union européenne, à l’indemnisation des graves préjudices moraux découlant de son anxiété et de son incertitude. Il s’ensuit que, au titre B3, le requérant se réfère à un préjudice autre que celui qui pourrait découler des circonstances décrites sous le titre B2.

60      Partant, ce chef de conclusions doit être rejeté comme irrecevable.

61      En second lieu et en tout état de cause, il doit être rejeté comme non fondé.

62      En ce qui concerne la condition tenant à l’illégalité, il convient de souligner que l’article 47, deuxième alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dispose notamment que « [t]oute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi ».

63      Le caractère raisonnable du délai de jugement doit être apprécié en fonction des circonstances propres de chaque affaire et, notamment, de l’enjeu du litige pour l’intéressé, de la complexité de l’affaire, du comportement des parties au litige, dont le requérant et de celui des autorités compétentes, ou encore de la survenance des incidents procéduraux (voir arrêt du 1er février 2017, Aalberts Industries/Union européenne, T‑725/14, EU:T:2017:47, points 35 et 36 et jurisprudence citée).

64      La liste des critères pertinents n’est pas exhaustive et l’appréciation du caractère raisonnable dudit délai n’exige pas un examen systématique des circonstances de la cause au regard de chacun d’eux lorsque la durée de la procédure apparaît justifiée au regard d’un seul d’entre eux (voir arrêt du 1er février 2017, Aalberts Industries/Union européenne, T‑725/14, EU:T:2017:47, point 37 et jurisprudence citée).

65      Il en résulte que le caractère raisonnable d’un délai ne saurait être examiné par référence à une limite maximale précise, déterminée de manière abstraite, mais qu’il doit être apprécié dans chaque cas d’espèce en fonction des circonstances de la cause (voir arrêt du 1er février 2017, Aalberts Industries/Union européenne, T‑725/14, EU:T:2017:47, point 38 et jurisprudence citée).

66      En l’espèce, il suffit de constater que, en se bornant à soutenir que malgré le déroulement de trois instances, dont un pourvoi, et l’écoulement de huit années à la suite des faits, sans qu’aucune décision sur le fond ait été rendue, alors que la Cour a jugé qu’un délai de jugement en première instance de 5 ans et 10 mois dans le domaine de la concurrence n’avait pas été susceptible de justification par aucune des circonstances de l’affaire en question, le requérant n’a pas démontré le caractère excessif du délai dans lequel le juge de l’Union a traité les recours en question.

67      En effet, et en premier lieu, son argumentation ne s’appuie pas sur les circonstances propres des affaires mentionnées auxquelles il a été partie, mais tente plutôt d’établir le caractère excessif du délai dans lequel le juge de l’Union a traité ses recours au regard d’une limite maximale précise, déterminée de manière abstraite. Il s’est même abstenu d’identifier des phases concrètes de procédures qui seraient entachées d’une durée excessive ou de périodes d’inactivité injustifiée.

68      En second lieu, le requérant opère une confusion entre le délai de jugement ou de procédure, qui peut se comprendre comme le temps nécessaire pour juger définitivement des demandes contenues dans une requête introduite devant le juge de première instance, d’une part, et le temps nécessaire aux fins de traitement de ses demandes, tendant, en fin de compte au remboursement des frais médicaux qu’il a exposés. Or, il n’a présenté aucune analyse de la circonstance que la durée des procédures dont il alléguait le caractère excessif comprenait justement non une procédure, mais deux procédures introduites par deux requêtes distinctes.

69      Au demeurant, la première demande, formulée le 5 juin 2008 dans l’affaire F‑55/08 (point 6 ci-dessus), a été définitivement rejetée par arrêt du 27 avril 2012, De Nicola/BEI (T‑37/10 P, EU:T:2012:205) (point 11 ci-dessus), confirmant sur ce point l’arrêt du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159) (point 8 ci-dessus). Si le jugement définitif de ladite demande est intervenu après quatre années de procédure, il convient de constater que cette dernière a été menée devant deux degrés de juridiction. En l’absence d’autres précisions de la part du requérant sur ce sujet, il n’est aucunement possible d’affirmer que ces délais de jugement seraient excessifs. En revanche, le Tribunal est en mesure de relever que le requérant a lui-même contribué au rallongement de traitement de sa demande de remboursement. Premièrement, la requête dans l’affaire F‑55/08 comprenait également d’autres chefs de conclusions non liés au remboursement des frais médicaux en question (voir point 6 ci-dessus). Deuxièmement, il a été constaté au point 252 de l’arrêt du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159), que la longueur et la structure de la requête ont rendu difficile la bonne compréhension de ses conclusions indemnitaires, et partant le traitement de l’ensemble de l’affaire.

70      Quant aux demandes aux fins de remboursement contenues dans le mémoire introductif d’instance de l’affaire F‑49/10, déposé au greffe du Tribunal de la fonction publique le 24 juin 2010 (point 15 ci-dessus), elles ont été définitivement jugées par arrêt du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI (T‑418/11 P, EU:T:2013:478) (point 20 ci-dessus), soit au terme d’une procédure de trois ans et presque trois mois, mais impliquant, à nouveau, l’intervention de deux degrés de juridiction. En l’absence d’autres précisions de la part du requérant sur ce sujet, il n’est aucunement possible d’affirmer que ces délais sont excessifs. En revanche, il convient de relever que le requérant a contribué au rallongement du temps de traitement de la requête. En particulier, il a contesté dans ladite requête la légalité du refus du remboursement des frais médicaux en cause dans le cadre de la procédure dans l’affaire F‑55/08, contestation qui devait être rejetée pour cause de litispendance (point 17 ci-dessus). Ce rejet devait ensuite être confirmé sur demande du requérant par le juge de pourvoi (point 20 ci-dessus). Il est probable que, si le juge de l’Union n’avait pas dû répondre auxdites demandes, le reste des demandes contenues dans la requête de l’affaire F‑49/10 aurait été traité en un temps moindre.

71      Il s’ensuit que rien dans le dossier de la présente affaire n’est de nature à soutenir les allégations du requérant à propos de la durée excessive des procédures devant le juge de l’Union auxquelles il était partie. La condition tenant à l’illégalité n’étant pas remplie, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres conditions de l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union.

72      Il y a donc lieu de rejeter le deuxième chef de conclusions.

 Sur le troisième chef de conclusions, tendant à la condamnation de la Cour de justice de l’Union européenne à indemniser le requérant pour le préjudice qu’il aurait subi en raison du caractère supposé inéquitable des procédures auxquelles il était partie

73      Le requérant estime que la procédure est équitable lorsqu’elle résout le litige avec sollicitude et fixe les dépens dans un esprit de justice.

74      En se référant au point 213 de l’arrêt du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159), et au point 81 de l’arrêt du 28 juin 2011, De Nicola/BEI (F‑49/10, EU:F:2011:93), le requérant estime que le Tribunal de la fonction publique a rejeté à deux reprises sa demande de remboursement en vertu des « exceptions préalables », si bien qu’il a écarté l’analyse au fond de l’affaire. Le requérant ajoute que, si l’arrêt du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI (T‑418/11 P, EU:T:2013:478), a annulé celui du 28 juin 2011, De Nicola/BEI (F‑49/10, EU:F:2011:93), il n’a pas non plus tranché le fond, car il aurait également pu condamner la BEI aux dépens, compte tenu de l’illégalité de son refus, mais il aurait également créé les conditions relatives à la « compensation intégrale des deux degrés de juridiction », ce qui mettrait en évidence sa partialité et inviterait implicitement la partie la plus faible à se plier à la volonté de la BEI, ne pouvant compter sur la justice de l’Union.

75      La Cour de justice de l’Union européenne conteste ces allégations.

76      À cet égard, il y a lieu de constater, en premier lieu, que ce chef de conclusions doit être rejeté comme irrecevable pour des motifs analogues à ceux exposés aux points 55 à 59 ci-dessus. La requête ne contient pas d’éléments qui permettent d’identifier le caractère et l’étendue du préjudice qui découlerait pour le requérant des violations alléguées, ainsi que le montant de l’indemnisation qu’il souhaite recevoir.

77      En second lieu, afin de rejeter le présent chef de conclusions, il suffit également de constater que les allégations présentées à son soutien manquent en fait.

78      À titre liminaire, il apparaît que le requérant n’a aucunement étayé son argument, selon lequel, en substance, le rejet d’un recours au moyen d’une « exception préalable » équivalait à un déni de justice. Il convient donc de le rejeter.

79      Toutefois, d’une part, force est de constater que tant dans l’affaire F‑55/08 que dans l’affaire F‑49/10, le requérant a obtenu, au terme des procédures sur pourvoi, une décision définitive sur le fond de ses demandes relatives au remboursement des frais médicaux.

80      En effet, premièrement, le recours introduit dans la première affaire fut rejeté par arrêt du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159). Afin de débouter le requérant, notamment de sa demande tendant à la condamnation de la BEI à lui rembourser les frais de la thérapie au laser FP3, le Tribunal de la fonction publique a jugé, d’une part, que le requérant a été informé des raisons pour lesquelles un refus de remboursement lui a été opposé et mis en mesure de contester utilement cette décision, et d’autre part, que la BEI a fait valoir à juste titre que le requérant n’a pas contesté le refus de remboursement selon les modalités prévues par les dispositions internes de la BEI en matière d’assurance maladie. Il aurait, en particulier, appartenu à ce dernier de demander à la BEI de solliciter l’avis d’un troisième médecin, désigné par l’ordre des médecins, ce que le requérant n’a pas fait. C’est donc au terme d’un examen du fond de l’affaire que le Tribunal de la fonction publique a par ledit arrêt rejeté la demande du requérant. En outre, c’est le pourvoi à l’encontre de cette conclusion, qui a été rejeté par le Tribunal comme irrecevable dans l’arrêt du 27 avril 2012, De Nicola/BEI (T‑37/10 P, EU:T:2012:205). Au point 90 de ce dernier arrêt, le Tribunal a jugé ce qui suit :

« Force est de constater que, dans le cadre du présent moyen, le requérant se limite à remettre en cause l’appréciation des faits et des preuves par le Tribunal de la fonction publique et à réitérer les griefs et arguments déjà soulevés en première instance à cet égard […] sans pour autant identifier une erreur de droit, susceptible d’un pourvoi, dans le cadre de l’appréciation desdits griefs et moyens dans les points 206 à 215 de l’arrêt attaqué. Par ailleurs, dans ce contexte, le requérant ne reproche pas au Tribunal de la fonction publique d’avoir dénaturé des éléments de fait ou de preuve. Enfin, contrairement à ce que prétend le requérant, il ne ressort pas des points 206 à 211 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique aurait considéré, à cet égard, qu’il aurait dû suivre la procédure interne au titre de l’article 41 du règlement du personnel de la BEI comme condition préalable à la recevabilité du recours en première instance. »

81      Deuxièmement, aux termes des points 61 à 83 de l’arrêt du 28 juin 2011, De Nicola/BEI (F‑49/10, EU:F:2011:93), le Tribunal de la fonction publique a rejeté les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision de rejet de la demande de désignation d’un troisième médecin en raison de sa tardiveté. Cette solution, qui a concerné le bien-fondé du recours devant le juge de l’Union et non sa recevabilité a été annulée par arrêt du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI (T‑418/11 P, EU:T:2013:478). Le Tribunal a ensuite annulé la décision de la BEI refusant de désigner un troisième médecin pour se prononcer sur la validité de la thérapie au laser FP3, ainsi que cette même décision (point 20 ci-dessus).

82      D’autre part, contrairement à ce que fait, en substance, valoir le requérant, l’arrêt du 16 septembre 2013, De Nicola/BEI (T‑418/11 P, EU:T:2013:478), n’a pas créé les conditions relatives à la « compensation intégrale des dépens des deux degrés de juridiction » au profit de la BEI. Les parties ont été condamnées à supporter chacune leurs propres dépens afférents à la première instance et au pourvoi. En effet, aux points 68 et 69 de cet arrêt, le Tribunal a jugé ce qui suit :

« 68      Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure [du 2 mai 1991], applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de ce règlement, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs.

69      En l’espèce, la BEI ayant succombé quant au premier chef de conclusions du recours de première instance et au premier moyen de pourvoi et le requérant ayant succombé quant au deuxième chef de conclusions dudit recours et aux troisième et quatrième moyens de pourvoi, les parties supporteront chacune leurs propres dépens afférents tant à l’instance devant le Tribunal de la fonction publique qu’à la présente instance. »

83      En tout état de cause, le requérant ne présente aucun argument de nature à démontrer que ladite décision sur les dépens, prise en application du règlement de procédure du 2 mai 1991, est entachée de partialité ou violerait l’équité.

84      Il s’ensuit que le troisième chef de conclusions doit être rejeté.

 Sur le quatrième chef de conclusions tendant à condamner la Cour de justice de l’Union européenne à indemniser le requérant pour le préjudice moral qu’il aurait subi en raison de nombreux recours que le Tribunal de la fonction publique et le Tribunal l’auraient contraint d’introduire

85      Le requérant allègue qu’il convient de condamner la Cour de justice à l’indemniser des graves préjudices moraux subis du fait de son anxiété et de son incertitude. Cet état serait « particulièrement grave en raison des nombreux recours auxquels la BEI, le [Tribunal de la fonction publique et le Tribunal l’auraient] contraint, et qui [auraient] déjà provoqué une forme grave de gastrite, l’obligeant même à subir une intervention chirurgicale afin de procéder à l’ablation et l’analyse des polypes formés dans son estomac ».

86      Afin d’illustrer cette allégation, il renvoie aux arrêts du 11 novembre 2014, De Nicola/BEI (F‑55/08 RENV, EU:F:2014:244), et du 18 novembre 2014, De Nicola/BEI (F‑59/09 RENV, EU:F:2014:248), par lesquels le Tribunal de la fonction publique aurait omis de statuer sur le fond, au motif que, pour des raisons d’économie de procédure et dans l’intérêt des parties, il aurait été préférable de statuer sur l’affaire F‑52/11, De Nicola/BEI, qui comprendrait les mêmes questions de fait, serait mieux structurée et étayée et, surtout, qui aurait déjà fait l’objet d’un rejet en raison de son caractère « prématuré ».

87      La Cour de justice de l’Union européenne conteste ces allégations.

88      En premier lieu, il y a lieu de constater que le requérant n’a fait état d’aucun élément de contrainte de la part de la Cour de justice de l’Union européenne, afin qu’il introduise un quelconque recours devant le juge de l’Union. Ce chef de conclusions ayant été fondé sur l’existence de cette contrainte, il doit déjà être rejeté pour cette raison.

89      En second lieu, quant à l’allégation du requérant rapportée au point 86 ci-dessus, elle est rédigée de telle manière que le Tribunal n’est pas en mesure d’entrevoir clairement sur son fondement, et en l’absence d’autres précisions, quelle est l’illégalité reprochée à la Cour de justice de l’Union européenne. Si cette allégation est censée développer l’argument relatif à la contrainte exercée par la Cour de justice de l’Union européenne sur le requérant, cet élément ne ressort alors pas distinctement. Au demeurant, il convient de rappeler que, si le requérant avait souhaité exprimer son désaccord envers les arrêts citées au point 86 ci-dessus, il lui appartenait de le faire dans le cadre d’un pourvoi contre ces derniers, ce qu’il a fait. Par ordonnances du 21 septembre 2015, De Nicola/BEI (T‑849/14 P, EU:T:2015:712), et du 21 septembre 2015, De Nicola/BEI (T‑848/14 P, EU:T:2015:719), le Tribunal a rejeté les pourvois du requérant contre les arrêts du 11 novembre 2014, De Nicola/BEI (F‑55/08 RENV, EU:F:2014:244), et du 18 novembre 2014, De Nicola/BEI (F‑59/09 RENV, EU:F:2014:248), lesquels sont donc devenus définitifs et ne peuvent plus être remis en cause.

90      Partant, en ce qui concerne ce chef de conclusions, la requête ne respecte pas les obligations minimales, telles que rappelées au point 45 ci-dessus, si bien qu’elle est irrecevable.

91      En tout état de cause, le quatrième chef de conclusions est également non fondé.

92      Il suffit d’observer que la simple contiguïté dans le temps des affaires mentionnées au point 86 ci-dessus et de l’état d’anxiété et d’incertitude dont aurait souffert le requérant, de même que la forme grave de gastrite qui en aurait découlé, ne suffit pas à établir l’existence d’un lien de causalité entre ces éléments. En effet, beaucoup d’autres circonstances pourraient avoir occasionné ces états psychologique et physiologique.

93      Il s’ensuit que ce chef de conclusions doit être rejeté, de même que le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

94      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

95      Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, les dépens du Conseil et de la Cour de justice de l’Union européenne, afférents à la présente instance tant devant le Tribunal que devant le Tribunal de la fonction publique, conformément à leurs conclusions.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Carlo De Nicola est condamné aux dépens afférents à la présente instance tant devant le Tribunal de l’Union européenne que devant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne.

Kanninen

Schwarcz

Iliopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 novembre 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.

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