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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Tubes Radiatori v EUIPO - Antrax It (Radiateurs) (Judgment) French Text [2017] EUECJ T-98/15 (16 February 2017) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/T9815.html Cite as: [2017] EUECJ T-98/15, EU:T:2017:91, ECLI:EU:T:2017:91 |
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Édition provisoire
DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)
16 février 2017 (*)
« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire représentant un radiateur – Dessin ou modèle antérieur – Motif de nullité – Absence de caractère individuel – Article 6 et article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002 – Exécution par l’EUIPO d’un arrêt d’annulation d’une décision de ses chambres de recours – Droit d’être entendu – Invitation à déposer des preuves et observations à la suite d’un arrêt d’annulation du Tribunal – Saturation de l’état de l’art »
Dans l’affaire T‑98/15,
Tubes Radiatori Srl, établie à Resana (Italie), représentée par Mes S. Verea, K. Muraro, M. Balestriero et P. Menapace, avocats,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par initialement MM. P. Bullock et S. Di Natale, puis par MM. Di Natale et L. Rampini, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant
Antrax It Srl, établie à Resana, représentée par Me L. Gazzola, avocat,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’EUIPO du 9 décembre 2014 (affaire R 1643/2014-3), relative à une procédure de nullité entre Antrax It et Tubes Radiatori,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre),
composé de MM. S. Gervasoni, faisant fonction de président, L. Madise et Z. Csehi (rapporteur), juges,
greffier : Mme A. Lamote, administrateur,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 25 février 2015,
vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 3 juin 2015,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 21 mai 2015,
vu la réplique déposée au greffe du Tribunal le 21 août 2015,
vu la duplique de l’EUIPO déposée au greffe du Tribunal le 23 octobre 2015,
vu la duplique de l’intervenante déposée au greffe du Tribunal le 27 octobre 2015,
à la suite de l’audience du 4 octobre 2016,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 La requérante, Tubes Radiatori Srl, est titulaire du dessin ou modèle communautaire n° 000169370-0002, déposé le 13 avril 2004 auprès du Deutsche Patent-und Markenamt (Office des brevets et des marques allemand), conformément à l’article 35, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1), transmis le 26 avril 2004 à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), publié au Bulletin des dessins et modèles communautaires le 24 août 2004 et renouvelé le 14 avril 2014.
2 Le dessin ou modèle contesté s’applique, selon les termes de la demande de dessin ou modèle, à un radiateur de chauffage et est représenté comme suit :
3 Le 3 novembre 2009, l’intervenante, Antrax It Srl, a présenté devant l’EUIPO une demande en nullité du dessin ou modèle contesté. Cette demande en nullité était fondée sur l’article 25, paragraphe 1, sous b), et les articles 4 à 9 du règlement n° 6/2002. L’intervenante a fait valoir que le dessin ou modèle communautaire contesté était dépourvu de caractère individuel au sens de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002.
4 Au soutien de sa demande en nullité, l’intervenante a invoqué, à l’encontre du dessin ou modèle contesté, les dessins ou modèles antérieurs D1 et D4, compris dans l’enregistrement multiple allemand n° DE 40110481.8, effectué au nom de la société The Heating Company BVBA, étendu à la France, à l’Italie et au Benelux en tant qu’enregistrement international multiple sous la référence DM/060899, publié au Bulletin de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) le 30 septembre 2002.
5 L’intervenante a joint à sa demande en nullité les vues suivantes :
– Vues 1.1 et 1.2 correspondant au dessin ou modèle antérieur D060899-0001 ou « D1 » :
– Vues 4.1 et 4.2 correspondant au dessin ou modèle antérieur D060899-0004 ou « D4 »:
6 L’intervenante a joint également à sa demande de nullité les agrandissements suivants des vues 1.2 et 4.2 susvisées :
7 Par décision du 7 mars 2011, la division d’annulation a déclaré la nullité du dessin ou modèle contesté, pour absence de caractère individuel au sens de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 6/2002.
8 Cette décision a fait l’objet d’un recours de la requérante formé le 4 mai 2011 (affaire R 953/2011-3).
9 Par décision du 3 avril 2012, la troisième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours (ci-après la « décision du 3 avril 2012 »).
10 La décision du 3 avril 2012 a fait l’objet d’un recours de la requérante formé le 13 juillet 2012 devant le Tribunal.
11 Par arrêt du 12 mars 2014, Tubes Radiatori/OHMI – Antrax It (Radiateur) (T‑315/12, non publié, ci-après l’« arrêt du 12 mars 2014 », EU:T:2014:115), le Tribunal a rappelé qu’une saturation de l’état de l’art, si elle ne saurait être considérée comme limitant la liberté du créateur, peut être de nature, lorsqu’elle est avérée, à rendre l’utilisateur averti plus sensible aux différences de détail des dessins ou modèles en cause, avec pour conséquence qu’un dessin ou modèle peut, en raison d’une telle saturation, avoir un caractère individuel du fait de caractéristiques qui, en l’absence de cette saturation, ne seraient pas susceptibles de susciter une différence d’impression globale sur l’utilisateur averti.
12 Le Tribunal a estimé que, dans la mesure où, premièrement, la saturation de l’état de l’art avait été invoquée par la requérante devant la division d’annulation, deuxièmement, la division d’annulation avait procédé à certaines considérations susceptibles de suggérer qu’elle convenait de l’existence d’une certaine saturation, troisièmement, l’argument avait été réitéré par la requérante devant la troisième chambre de recours et, quatrièmement, une décision antérieure du 17 avril 2008 (affaire R 976/2007-3) de la troisième chambre de recours avait reconnu le caractère « notoirement encombré » de ce secteur, c’était à tort que la chambre de recours, dans la décision du 3 avril 2012, avait conclu à l’absence de caractère individuel du dessin ou modèle contesté sans faire aucune référence à cette question de la saturation de l’état de l’art, fût-ce pour se démarquer des appréciations portées antérieurement. Dans ce contexte, duquel il ressortait que la chambre de recours n’avait pas motivé la décision du 3 avril 2012 sur une question soulevée devant elle et pertinente pour l’appréciation du caractère individuel du dessin ou modèle contesté, le Tribunal a annulé cette décision [arrêt du 12 mars 2014, T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115, points 87, 100 et 101].
13 À la suite dudit arrêt, l’affaire R 953/2011-3 a été à nouveau attribuée, par une décision du présidium du 1er juillet 2014, à la troisième chambre de recours, sous la nouvelle référence R 1643/2014-3, aux fins de l’adoption d’une décision mettant à exécution l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115).
14 Par décision du 9 décembre 2014 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.
15 La chambre de recours a fondé son appréciation du caractère individuel du dessin ou modèle contesté sur la comparaison entre celui-ci et le dessin ou modèle antérieur D4 reproduit au point 5 ci-dessus (ci-après le « dessin ou modèle antérieur »), dans la mesure où, selon elle, des deux dessins ou modèles antérieurs, celui portant la référence numéro D4 était celui doté du « pouvoir d’annulation le plus efficace ». Elle a considéré que l’impression générale suscitée par le dessin ou modèle contesté chez l’utilisateur averti ne différait pas de manière significative de l’impression générale suscitée chez cet utilisateur par le dessin ou modèle antérieur, en raison des caractéristiques communes suivantes : un nombre élevé de tubes radiants ; des tubes présentant une même configuration rectiligne verticale ; des tubes de section quadrangulaire ; une proportion similaire en ce qui concerne les parties « pleines » et les parties « vides » ; l’absence d’ornements ou d’éléments décoratifs (points 41 à 43 de la décision attaquée). La chambre de recours a souligné que l’appréciation du caractère individuel devait être effectuée sur la base de l’impression générale et ne devait donc pas dépendre uniquement d’un certain angle de vue, mais correspondre à une synthèse de tous les angles de vue visibles lors de l’utilisation du produit. Elle a souligné, à cet égard, que, en fonction de la manière dont le produit était utilisé, certains angles étaient moins visibles que d’autres. En l’espèce, les vues moins visibles étaient, selon la chambre de recours, la vue de dessous et la vue de derrière, qui avaient moins d’importance que les vues de face, de côté et à partir d’angles intermédiaires. La chambre de recours a ensuite estimé que la différence relative à l’espace occupé, due à la différence de formes de section des tubes, carrée dans le cas du dessin ou modèle contesté et rectangulaire dans le cas du dessin ou modèle antérieur, ne pouvait être relevée que depuis le côté, sous un angle déterminé. La chambre a conclu, en substance, que l’impression synthétique des dessins ou modèles en conflit depuis les angles exposés à la vision lors de l’utilisation du produit (de face, de côté, de dessus et intermédiaires) suscitait chez l’utilisateur averti une impression générale qui ne variait pas significativement (points 45 à 46 de la décision attaquée).
16 La chambre de recours a également rejeté l’argument de la requérante selon lequel le secteur des radiateurs décoratifs était saturé de dessins ou modèles semblables, avec pour conséquence que l’utilisateur averti aurait été plus sensible à de « légères modifications », ce qui l’aurait rendu capable de noter le caractère individuel d’un dessin ou modèle de radiateur. À cet égard, la chambre de recours a observé que la requérante n’avait pas prouvé, documents à l’appui, la saturation du secteur et la similitude des dessins ou modèles sur le marché, qu’aucune preuve représentative n’avait été produite de ce qu’offrait le marché des radiateurs décoratifs à la date de dépôt du dessin ou modèle contesté, telle que, à titre d’exemple, des prospections de marché, des programmes de foires spécialisées, des propositions d’associations industrielles, professionnelles, etc. (point 51 de la décision attaquée). La chambre de recours a noté que la « légère modification » concernée en l’espèce, soit celle de la section du tube du radiateur – rectangulaire dans le dessin ou modèle antérieur et carrée dans le dessin ou modèle contesté – ne pouvait être appréciée, comme le reconnaissait d’ailleurs la requérante, que si les radiateurs étaient observés sous un angle bien précis, et qu’il était impossible de la percevoir si le radiateur était observé de face (point 52 de la décision attaquée). Elle a également estimé que si la vue de face n’était certainement pas la seule dont il fallait tenir compte aux fins de l’appréciation de l’impression générale et, partant, du caractère individuel, il s’agissait de l’une des vues pertinentes. Elle en a déduit, en substance, que, si la légère modification ne se notait pas depuis une perspective normale d’observation, elle ne pouvait constituer une source de caractère individuel pour l’utilisateur averti. La chambre de recours a conclu à l’absence de caractère individuel du dessin ou modèle contesté (points 50 à 54 de la décision attaquée).
Conclusions des parties
17 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– en conséquence, constater et déclarer la validité du dessin ou modèle contesté dans la mesure où celui-ci est nouveau et doté d’un caractère individuel ;
– condamner l’EUIPO aux dépens.
18 L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
19 La requérante fait valoir, à l’appui de sa demande d’annulation, quatre moyens, tirés, premièrement, de la violation de l’article 1er quinquies du règlement (CE) n° 216/96 de la Commission, du 5 février 1996, portant règlement de procédure des chambres de recours de [l’EUIPO] (JO 1996, L 28, p. 11), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2082/2004 de la Commission, du 6 décembre 2004, (JO 2004, L 360, p. 8) et de l’article 61, paragraphe 6, du règlement n° 6/2002, deuxièmement, de la violation du droit d’être entendu (article 62, seconde phrase, du règlement n° 6/2002), troisièmement, de la violation de l’obligation de motivation (article 62, première phrase, du règlement n° 6/2002) et, quatrièmement, de la violation de l’autorité de la chose jugée.
20 Lors de l’audience, la requérante a précisé que son deuxième moyen tiré de la violation du droit d’être entendu était formulé à titre subsidiaire par rapport à son quatrième moyen tiré de l’autorité de la chose jugée.
21 Il y a lieu d’observer que les premier et quatrième moyens doivent être examinés ensemble, car les arguments des parties se recoupent largement. Ils visent, en substance, à affirmer que l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), faisait obstacle au réexamen de l’affaire par la chambre de recours.
Sur les premier et quatrième moyens, tirés de la violation de l’article 1er quinquies du règlement n° 216/96, de l’article 61, paragraphe 6, du règlement n° 6/2002 et de l’autorité de la chose jugée
22 La requérante considère que la chambre de recours a commis une erreur en estimant que « prendre les mesures que comporte l’exécution » de l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), conformément à l’article 61, paragraphe 6, du règlement n° 6/2002, signifiait, en l’espèce, réexaminer l’affaire et adopter une nouvelle décision sur le recours qui soit exempte des vices constatés par le Tribunal. Elle considère que cette interprétation est également contraire à l’article 1er quinquies, paragraphe 1, du règlement n° 216/96. La requérante fait valoir, en substance, que, du simple fait que l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115) est devenu définitif, certains éléments d’appréciation auraient acquis autorité de la chose jugée. Dès lors, elle estime qu’il n’était pas nécessaire d’examiner à nouveau l’affaire, et que la troisième chambre aurait dû se contenter de constater que sa décision antérieure était entachée d’une erreur irrémédiable et déclarer, au vu du caractère notoirement saturé du secteur, que le dessin ou modèle contesté était doté d’un caractère individuel.
23 L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.
24 Selon une jurisprudence constante, un arrêt d’annulation, tel que l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115) opère ex tunc et a donc pour effet d’éliminer rétroactivement l’acte annulé de l’ordre juridique (arrêts du 26 avril 1988, Asteris e.a./Commission, 97/86, 99/86, 193/86 et 215/86, EU:C:1988:199, point 30 ; du 13 décembre 1995, Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, T‑481/93 et T‑484/93, EU:T:1995:209, point 46, et du 10 octobre 2001, Corus UK/Commission, T‑171/99, EU:T:2001:249, point 50).
25 Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, pour se conformer à l’arrêt d’annulation et lui donner pleine exécution, l’institution dont émane l’acte annulé est tenue de respecter non seulement le dispositif de l’arrêt, mais également les motifs qui ont amené à celui-ci et qui en constituent le soutien nécessaire, en ce sens qu’ils sont indispensables pour déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif. Ce sont, en effet, ces motifs qui, d’une part, identifient la disposition exacte considérée comme illégale et, d’autre part, font apparaître les raisons exactes de l’illégalité constatée dans le dispositif et que l’institution concernée doit prendre en considération en remplaçant l’acte annulé [voir arrêt du 25 mars 2009, Kaul/OHMI – Bayer (ARCOL), T‑402/07, EU:T:2009:85, point 22 et jurisprudence citée].
26 En l’espèce, à la suite de l’annulation de la décision du 3 avril 2012 et afin de se conformer à son obligation, découlant de l’article 61, paragraphe 6, du règlement n° 6/2002, de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), l’EUIPO devait faire en sorte que le recours aboutisse à une nouvelle décision d’une chambre de recours. Tel a été effectivement le cas, dès lors que l’affaire a été renvoyée devant la troisième chambre de recours, qui a adopté la décision attaquée [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 13 avril 2011, Safariland/OHMI – DEF-TEC Defense Technology (FIRST DEFENSE AEROSOL PEPPER PROJECTOR), T‑262/09, EU:T:2011:171, point 42].
27 Concernant l’exécution et l’autorité de l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), la requérante concentre son argumentation sur le fait que, selon elle, la chambre de recours aurait dû se contenter de constater que certains éléments avaient acquis force de chose jugée à la suite dudit arrêt, en particulier le caractère « notoirement encombré » du secteur des radiateurs de chauffage et la tardiveté de la motivation de la chambre de recours relative à l’insuffisance des preuves de la saturation du secteur.
28 À cet égard et en premier lieu, il convient de rappeler que l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115, points 100 et 101), a annulé la décision du 3 avril 2012 aux motifs suivants :
« Dans la mesure où, premièrement, la saturation de l’état de l’art était invoquée par la requérante devant la division d’annulation, deuxièmement, la division d’annulation avait procédé à certaines considérations susceptibles de suggérer qu’elle convenait de l’existence d’une certaine saturation, troisièmement, l’argument était réitéré par la requérante devant la chambre de recours et, quatrièmement, une décision antérieure de la chambre de recours [du 17 avril 2008] avait invoqué le caractère « notoirement encombré » du secteur des radiateurs de chauffage, c’est à tort que la chambre de recours, dans la décision attaquée, a conclu à l’absence de caractère individuel du dessin ou modèle contesté sans faire aucune référence à cette question, fût-ce pour se démarquer des appréciations opérées antérieurement. Dans ce contexte, duquel il ressort que la chambre de recours n’a pas motivé la décision attaquée sur une question soulevée devant elle et pertinente pour l’appréciation du caractère individuel du dessin ou modèle contesté, il convient d’annuler la décision attaquée, le recours étant, eu égard aux motifs d’annulation, rejeté pour le surplus. »
29 Il ne ressort pas de cette formulation que le Tribunal a constaté l’existence d’une saturation de l’état de l’art ou d’un caractère individuel du dessin ou modèle contesté. Si le Tribunal a effectivement mentionné le fait qu’une décision antérieure de la troisième chambre de recours du 17 avril 2008 (R 976/2007-3) avait invoqué le caractère « notoirement » saturé (ou encombré) du secteur des radiateurs de chauffage, il y a lieu de relever que ces considérations n’étaient faites par le Tribunal que pour justifier l’obligation de motivation relative à la question de la saturation de l’état de l’art incombant à la chambre de recours. La précision, au point 100 de l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), selon laquelle la chambre de recours aurait dû faire référence à la saturation de l’état de l’art « fût-ce pour se démarquer des appréciations opérées antérieurement » confirme, s’il était besoin, que l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), laissait la chambre de recours libre de son appréciation sur ce point.
30 Partant, ainsi que l’a à juste titre affirmé la chambre de recours au point 16 de la décision attaquée, il incombait à cette dernière de reprendre l’examen du caractère individuel du dessin ou modèle contesté en motivant particulièrement sa décision en ce qui concerne la saturation de l’état de l’art, sans pour autant être tenue par un prétendu constat quant à l’existence d’une telle saturation.
31 En deuxième lieu, concernant le fait que le Tribunal, au point 95 de l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115) a rejeté comme irrecevable la motivation tardive de l’EUIPO relative à l’insuffisance des preuves de la requérante, il suffit de rappeler, comme il ressort d’une jurisprudence constante, que la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que l’acte lui faisant grief, son absence ne pouvant pas être régularisée par le fait que l’intéressé apprend les motifs de l’acte au cours de la procédure devant le juge de l’Union européenne (voir arrêt du 13 juin 2013, Versalis/Commission, C‑511/11 P, EU:C:2013:386, point 141 et jurisprudence). Toutefois, ceci ne fait pas obstacle à ce que, dans le cadre du réexamen de l’affaire après annulation par le Tribunal, la chambre de recours remédie à ce défaut en communiquant cette fois ladite motivation en même temps que l’acte lui faisant grief.
32 En troisième lieu, concernant la prétendue violation de l’article 1er quinquies, paragraphe 1, du règlement n° 216/96, il y a lieu de rappeler que celui-ci prévoit que « si, […] les mesures que comporte l’exécution d’un arrêt de la Cour de justice [de l’Union européenne] annulant en tout ou en partie la décision d’une chambre de recours […] incluent un nouvel examen par les chambres de recours de l’affaire qui a fait l’objet de cette décision », le présidium renvoie l’affaire à une chambre. En l’espèce, il y a lieu de constater que l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115) exigeait bien un nouvel examen de la chambre de recours, puisqu’il lui imposait de motiver son analyse de la question de la saturation de l’état de l’art, qui a un impact sur l’appréciation du caractère individuel du dessin ou modèle contesté et, partant, un renvoi à une chambre de recours devant effectuer un tel examen.
33 Il ressort de ce qui précède qu’il n’y a pas lieu de constater une violation de l’article 61, paragraphe 6, du règlement n° 6/2002, de l’article 1er quinquies du règlement n° 216/96 ou de l’autorité de la chose jugée.
34 Partant, il y a lieu d’écarter les premier et quatrième moyens.
Sur le deuxième moyen, formulé à titre subsidiaire, tiré de la violation du droit d’être entendu (article 62, seconde phrase, du règlement n° 6/2002)
35 La requérante fait valoir, en substance, que, en ne l’invitant pas à présenter des observations et des preuves sur la question soulevée par l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), relative à l’existence ou à l’absence d’une saturation de l’état de l’art dans le secteur concerné, la troisième chambre de recours a méconnu le principe du contradictoire, c’est-à-dire son droit d’être entendue.
36 L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.
37 Il ressort de la jurisprudence que l’article 62, seconde phrase, du règlement n° 6/2002, selon lequel les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position, consacre, dans le cadre du droit des dessins ou modèles communautaires, le principe général de protection des droits de la défense en vertu duquel les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue (voir, par analogie, ordonnance du 4 mars 2010, Kaul/OHMI, C‑193/09 P, non publiée, EU:C:2010:121, point 58). Le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel et non à la position finale que l’administration entend adopter (voir arrêt du 13 avril 2011, FIRST DEFENSE AEROSOL PEPPER PROJECTOR, T‑262/09, EU:T:2011:171, point 80 et jurisprudence citée).
38 Toutefois, le non-respect de l’article 62, seconde phrase, du règlement n° 6/2002 n’est susceptible de vicier la procédure administrative que s’il est établi que celle-ci aurait pu aboutir à un résultat différent en l’absence de sa méconnaissance [voir, par analogie, arrêt du 15 juillet 2015, Australian Gold/OHMI – Effect Management & Holding (HOT), T‑611/13, EU:T:2015:492, point 18 et jurisprudence citée].
39 Il y a lieu de relever qu’aucune procédure particulière n’est prévue devant les chambres de recours, ni par le règlement n° 6/2002 ni par le règlement n° 2245/2002 de la Commission, du 21 octobre 2002, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil sur les dessins ou modèles communautaire (JO 2002, L 3, p. 1), tel que modifié, ni par le règlement n° 216/96, dans l’hypothèse où une décision est annulée par le Tribunal et renvoyée devant la chambre de recours. L’obligation d’entendre les parties en cause à nouveau ne pourrait par conséquent résulter que du principe général du droit de l’Union du respect des droits de la défense, consacré à l’article 62, seconde phrase, du règlement n° 6/2002 (voir, par analogie, arrêt du 13 avril 2011, FIRST DEFENSE AEROSOL PEPPER PROJECTOR, T‑262/09, EU:T:2011:171, point 83).
40 Il ressort également de la jurisprudence que l’article 62, seconde phrase, du règlement n° 6/2002, n’exige pas que, à la suite de la reprise de la procédure devant l’EUIPO, subséquente à une annulation de la décision d’une chambre de recours par le Tribunal, la partie requérante soit à nouveau invitée à présenter ses observations sur des points de droit et de fait sur lesquels elle avait déjà eu tout loisir de s’exprimer dans le cadre de la procédure écrite antérieurement menée, le dossier étant à cet égard repris en l’état par la chambre de recours concernée (voir, en ce sens et par analogie, ordonnance du 4 mars 2010, Kaul/OHMI, C‑193/09 P, non publiée, EU:C:2010:121, point 60, et arrêt du 13 avril 2011, FIRST DEFENSE AEROSOL PEPPER PROJECTOR, T‑262/09, EU:T:2011:171, point 84).
41 En l’espèce, la chambre de recours a relevé, au point 51 de la décision attaquée, que la requérante n’avait pas prouvé, documents à l’appui, la saturation du secteur et la similitude des dessins ou modèles sur le marché et qu’aucune preuve représentative de ce qu’offre le marché des radiateurs décoratifs à la date de dépôt du dessin ou modèle contesté n’avait été produite, telle que, par exemple, des prospections de marché, des programmes de foires spécialisées, des propositions d’associations industrielles, professionnelles, etc.
42 La requérante fait valoir qu’il ne lui a pas été possible de se défendre sur la question de la saturation de l’état de l’art, puisqu’elle n’a pas été invitée à déposer des observations et des preuves à ce sujet après l’annulation de la décision du 3 avril 2012 par le Tribunal, alors même que la chambre de recours a traité cette question ex novo dans la décision attaquée. La requérante explique, en substance, qu’elle n’avait pas cru nécessaire de soumettre des preuves particulières relatives à la saturation de l’état de l’art lors de la précédente procédure devant l’EUIPO, étant donné qu’il existait notamment une décision antérieure de la troisième chambre de recours du 17 avril 2008 dans l’affaire R 976/2007-3, dans laquelle celle-ci avait considéré que le marché des radiateurs de chauffage était « notoirement saturé ». La requérante fait ainsi valoir, en substance, que la chambre de recours s’est écartée de sa décision antérieure du 17 avril 2008 dans l’affaire R 976/2007-3, dans laquelle elle avait considéré que le marché des radiateurs de chauffage était « notoirement saturé », sans lui avoir donné la possibilité de contester ce point. La requérante précise également, au point 14 de la réplique, que, à l’opposé de la présente espèce, le principe du contradictoire a été respecté lors de procédures très similaires.
43 L’EUIPO et l’intervenante contestent toute violation principe du contradictoire.
44 Premièrement, l’EUIPO souligne qu’il n’existe aucune règle obligeant la chambre de recours à accorder, à la suite d’une annulation d’une de ses décisions par le Tribunal, la possibilité de présenter d’autres éléments de preuve que ceux produits en temps utile, soit avant la conclusion de la phase contradictoire de la procédure précédente. Deuxièmement, l’EUIPO souligne que la requérante a eu amplement la possibilité de déposer des preuves concernant la saturation de l’état de l’art au cours de la procédure ayant mené à la décision du 3 avril 2012. Troisièmement, l’EUIPO et l’intervenante considèrent que c’est la requérante qui a choisi de se fonder uniquement sur une simple présomption selon laquelle le secteur des radiateurs de chauffage était « notoirement » saturé, présomption fondée sur la décision antérieure de la troisième chambre de recours du 17 avril 2008 (R 976/2007-3, point 37), et que c’est la requérante qui a décidé de ne pas présenter d’éléments de preuve sur ce point pendant la première procédure (R 953/2011-3). Quatrièmement, l’EUIPO rétorque que, aux termes d’une jurisprudence constante, la chambre de recours n’est pas liée par sa pratique décisionnelle antérieure. Cinquièmement, l’EUIPO explique également que cette décision antérieure du 17 avril 2008 n’a pas pu être suivie en l’espèce, dans la mesure où elle se fondait sur un fait dit « notoire », tandis que l’arrêt du Tribunal du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115) aurait imposé à la chambre de recours de démontrer le caractère saturé ou non du secteur sur la base de preuves. En outre, l’EUIPO soutient devant le Tribunal que les documents déposés dans le cadre de la procédure R 976/2007-3 n’indiquaient pas « sans équivoque », en réalité, l’existence d’une saturation du secteur des radiateurs de chauffage.
45 L’intervenante ajoute que la requérante aurait tout à fait pu produire de nouvelles observations et preuves selon les modalités habituelles de la procédure devant l’EUIPO, étant entendu qu’une telle production n’est qu’éventuelle, conformément à l’article 59, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002.
46 En premier lieu, il y a lieu de constater que la requérante n’avait effectivement pas présenté de preuves de la saturation de l’état de l’art à l’appui de son affirmation selon laquelle le secteur était saturé dans le cadre de la procédure écrite antérieurement menée.
47 À cet égard, il y a lieu de noter, premièrement, que la division d’annulation s’était exprimée en des termes suggérant plutôt l’admission de sa part d’une certaine saturation de l’état de l’art, ainsi que cela a été relevé par le Tribunal lui-même aux points 89 et 100 de l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), et, deuxièmement, qu’il existait une décision antérieure de la chambre de recours du 17 avril 2008, d’ailleurs mentionnée dans l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), selon laquelle la saturation de l’état de l’art dans le secteur des radiateurs était un fait « notoire », c’est-à-dire « un fait [susceptible] d’être conn[u] par toute personne ou qui p[eut] être conn[u] par des sources généralement accessibles » [voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 2004, Ruiz-Picasso e.a./OHMI – DaimlerChrysler (PICARO), T‑185/02, EU:T:2004:189, point 29]. Dans ces circonstances, la requérante a pu légitimement estimer, durant la première procédure ayant abouti à la décision du 3 avril 2012, qu’il n’était pas nécessaire de soumettre des preuves matérielles de la saturation de l’état de l’art.
48 Il convient également de relever que ce n’est que lors de son recours à l’encontre de la décision du 3 avril 2012 devant le Tribunal que la requérante a eu connaissance du fait que l’EUIPO considérait que le caractère « notoire » de la saturation du secteur n’était pas applicable en l’espèce, dans la mesure où l’EUIPO a expliqué devant le Tribunal que la requérante n’avait pas prouvé l’existence d’autres dessins ou modèles du même type que le dessin ou modèle contesté (arrêt du 12 mars 2014, T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115, point 94).
49 En deuxième lieu, il ne ressort pas du dossier de l’EUIPO que les parties à la procédure aient été invitées à présenter des observations et preuves sur la saturation de l’état de l’art à la suite de l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115) et du renvoi de l’affaire à la troisième chambre de recours par décision du présidium le 1er juillet 2014. Par lettre du 19 décembre 2014, l’EUIPO a communiqué la décision attaquée aux parties à la procédure, sans qu’un échange préalable ait eu lieu entre la chambre de recours et celles-ci.
50 Partant, en l’espèce, il y a lieu de constater que la requérante n’a pas eu « tout loisir de s’exprimer », au sens de l’arrêt du 13 avril 2011, FIRST DEFENSE AEROSOL PEPPER PROJECTOR (T‑262/09, EU:T:2011:171), sur la saturation de l’état de l’art dans le cadre de la procédure écrite antérieure, contrairement à ce qu’allègue l’EUIPO.
51 En troisième lieu, c’est certes à juste titre que l’EUIPO souligne que la chambre de recours n’était pas tenue par sa pratique décisionnelle [voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65, et du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 71] et pouvait changer de position concernant un point factuel comme celui du caractère « notoire » de la saturation de l’état de l’art, ainsi que l’avait d’ailleurs souligné le Tribunal dans l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115). Toutefois, au vu des circonstances particulières rappelées aux points 46 à 48 ci-dessus, qui distinguent la présente espèce de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 13 avril 2011, FIRST DEFENSE AEROSOL PEPPER PROJECTOR (T‑262/09, EU:T:2011:171), la chambre de recours, dans l’hypothèse où elle souhaitait s’écarter d’un tel constat factuel « notoire » antérieur, dûment souligné dans l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), avait l’obligation de permettre à tout le moins à la requérante de présenter des preuves et des observations sur ce point, en lui fixant un nouveau délai en ce sens, eu égard au principe général du respect des droits de la défense en droit de l’Union et en vertu l’article 62, seconde phrase, du règlement n° 6/2002.
52 À titre surabondant, il y a lieu d’observer, ainsi que le note la requérante dans la réplique, que, dans des affaires similaires et antérieures, le rapporteur de la même chambre de recours avait fixé un nouveau délai aux parties pour déposer des observations et des preuves sur la saturation de l’état de l’art dans le même secteur, à la suite d’une annulation par le Tribunal de décisions d’une chambre de recours en raison d’un défaut de motivation analogue concernant la saturation de l’état de l’art [décisions de la troisième chambre de recours du 10 octobre 2014, affaires R 1272/2013-3 et R 1273/2013-3, point 10, adoptées à la suite de l’arrêt du 13 novembre 2012, Antrax It/OHMI – THC (Radiateurs de chauffage), T‑83/11 et T‑84/11, EU:T:2012:592]. À cet égard, il y a lieu de rejeter comme non fondée la justification présentée par l’EUIPO lors de l’audience, selon laquelle les faits en cause étaient différents, car, dans lesdites affaires, la partie requérante avait déjà présenté des éléments de preuve relatifs à la saturation de l’état de l’art lors de la première procédure devant l’EUIPO, ce qui n’était pas le cas de la requérante dans la présente espèce. En effet, une telle argumentation n’est pas de nature à justifier le fait que l’EUIPO n’ait pas permis à la requérante d’apporter des preuves de la saturation de l’état de l’art, alors qu’il estime, depuis la procédure ayant donné lieu à l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), que c’est un fait qui doit désormais être démontré.
53 Dès lors, dans de telles circonstances, il y a lieu de constater une violation du droit d’être entendu de la requérante.
54 Les autres arguments de l’EUIPO et de l’intervenante ne permettent pas d’infirmer ce constat.
55 Premièrement, l’argument tiré de ce que l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115) aurait posé une exigence de démonstration de l’état de saturation à l’aide de preuves et aurait interdit de le considérer comme un fait « notoire » n’est pas de nature, en tout état de cause, à justifier pourquoi la chambre de recours n’a pas invité la requérante à déposer des preuves relatives à la saturation de l’état de l’art, surtout dans la mesure où elle estimait qu’il s’agissait d’une question qu’il fallait désormais prouver.
56 Deuxièmement, il y a également lieu de rejeter l’argument de l’intervenante selon lequel il incombait en tout état de cause à la requérante d’intervenir selon les modalités habituelles de la procédure devant l’EUIPO. En effet, en vertu de l’article 59, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002 « au cours de l’examen du recours, la chambre de recours invite les parties, aussi souvent qu’il est nécessaire, à présenter, dans le délai qu’elle leur impartit, leurs observations sur les communications qui émanent des autres parties ou qu’elle leur a adressées ». Eu égard aux circonstances rappelées aux points 46 à 48 ci-dessus, il était nécessaire que la chambre de recours invite explicitement les parties à déposer des observations et des preuves, d’autant que la seule signification par le greffe des chambres de recours de l’attribution de l’affaire à la troisième chambre de recours, pour autant que cette signification ait été régulièrement effectuée à l’égard de la requérante, ne signifiait pas que la chambre de recours entendait prendre sa décision sur la seule base du dossier existant, ce qui aurait pu inciter la requérante à déposer spontanément des observations ou des preuves nouvelles.
57 Troisièmement, il y a lieu d’observer que, si la requérante avait eu l’opportunité de déposer de nouvelles preuves de la saturation du marché, la procédure aurait pu aboutir à un résultat différent, ce qui justifie l’annulation de la décision attaquée, conformément à la jurisprudence rappelée au point 38 ci-dessus. En effet, une saturation de l’état de l’art, si elle ne saurait être considérée comme limitant la liberté du créateur, peut être de nature, lorsqu’elle est avérée, à rendre l’utilisateur averti plus sensible aux différences de détail des dessins ou modèles en cause (voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2012, Radiateurs de chauffage, T‑83/11 et T‑84/11, EU:T:2012:592, point 81), avec pour conséquence qu’un dessin ou modèle peut, du fait d’une saturation de l’état de l’art, avoir un caractère individuel du fait de caractéristiques qui, en l’absence d’une telle saturation, ne seraient pas susceptibles de susciter une différence d’impression globale sur l’utilisateur averti.
58 À cet égard, dans l’hypothèse où il faudrait interpréter le point 52 de la décision attaquée comme signifiant que, même à supposer qu’une saturation de l’état de l’art pouvait être établie en l’espèce, les différences existant entre les dessins ou modèles en conflit sont si peu perceptibles qu’elles ne seraient pas susceptibles de susciter une différence d’impression globale sur l’utilisateur averti, ce raisonnement doit être rejeté, dans la mesure où il va à l’encontre du constat opéré par l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), selon lequel la question de la saturation de l’état de l’art était pertinente pour apprécier le caractère individuel du dessin ou modèle contesté.
59 Dès lors, il y a lieu d’accueillir le deuxième moyen. Par suite, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la recevabilité des annexes 17 à 19 de la requête et sans qu’il soit nécessaire d’examiner le troisième moyen, de même que le grief, soulevé lors de l’audience, tiré de l’absence de notification aux représentants de la requérante de la décision de renvoi de l’affaire à la troisième chambre de recours à la suite de l’arrêt du 12 mars 2014 (T‑315/12, non publié, EU:T:2014:115), la décision attaquée doit être annulée.
60 En ce qui concerne le chef de conclusions de la requérante visant à ce que le Tribunal réforme la décision attaquée et déclare la validité du dessin ou modèle contesté dans la mesure où celui-ci est nouveau et doté d’un caractère individuel, il y a lieu de rappeler que le pouvoir de réformation, reconnu au Tribunal en vertu de l’article 61, paragraphe 3, du règlement n° 6/2002, n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de procéder à une appréciation sur laquelle la chambre de recours n’a pas encore pris position. L’exercice du pouvoir de réformation doit, par conséquent, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par la chambre de recours, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (voir, par analogie, arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 72).
61 À cet égard, il ressort des points 41 à 58 ci-dessus que la chambre de recours n’a pas fait reposer son analyse sur des observations et des preuves que la requérante aurait pu fournir, et que l’examen par la chambre de recours de ces observations et de ces preuves que la requérante pourrait soumettre est susceptible d’aboutir à un résultat différent. Par conséquent, le Tribunal ne saurait apprécier directement ces éléments.
62 Ce chef de conclusions doit donc être rejeté.
Sur les dépens
63 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
64 En l’espèce, l’EUIPO ayant succombé et la requérante n’ayant pas conclu à la condamnation de l’intervenante aux dépens, il y a lieu de condamner l’EUIPO à supporter ses propres dépens, ainsi que ceux de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.
65 Par ailleurs, l’intervenante, qui a succombé en ses conclusions, supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision de la troisième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), du 9 décembre 2014 (affaire R 1643/2014-3) est annulée.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Tubes Radiatori Srl.
4) Antrax It Srl supportera ses propres dépens.
Gervasoni | Madise | Csehi |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 février 2017.
Signatures
* Langue de procédure : l’italien.
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