Van Gennip and Others (Opinion) French Text [2018] EUECJ C-137/17_O (19 April 2018)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2018/C13717_O.html
Cite as: ECLI:EU:C:2018:272, [2018] EUECJ C-137/17_O, EU:C:2018:272

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Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 19 avril 2018 (1)

Affaire C137/17

Van Gennip BVBA,

Antonius Johannes Maria ten Velde,

Original BVBA,

Antonius Cornelius Ignatius Maria van der Schoot

[demande de décision préjudicielle formée par le rechtbank van eerste aanleg te Antwerpen (tribunal de première instance d’Anvers, Belgique)]

« Renvoi préjudiciel – Directive 2006/123/CE – Directive 2007/23/CE – Directive 2013/29/UE – Mise sur le marché et libre circulation d’articles pyrotechniques – Liberté d’établissement – Mesures nationales restrictives – Ordre public – Sanctions pénales – Régime d’autorisation »






1.        Ayant pour origine des poursuites pénales engagées à l’encontre de détaillants d’articles pyrotechniques, la présente affaire offre à la Cour l’occasion de se prononcer sur le champ d’application des directives relatives aux articles pyrotechniques, sur la conformité avec le droit de l’Union d’une législation nationale restreignant la vente d’articles pyrotechniques comportant plus d’un kilogramme de composition pyrotechnique (2) et sur la conformité avec la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur (3), d’un système de double autorisation pour le stockage d’articles pyrotechniques.

I.      Le cadre juridique

A.      Le droit de l’Union

1.      La directive « services »

2.        L’article 1er, paragraphe 5, de la directive « services » énonce :

« La présente directive n’affecte pas les règles de droit pénal des États membres. Toutefois, les États membres ne peuvent restreindre la libre prestation des services en appliquant des dispositions pénales qui réglementent ou affectent de façon particulière l’accès à une activité de service ou l’exercice d’une telle activité à l’effet de contourner les règles énoncées dans la présente directive. »

3.        Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de cette directive :

« La présente directive s’applique aux services fournis par les prestataires ayant leur établissement dans un État membre. »

4.        Au chapitre III de ladite directive, intitulé « Liberté d’établissement des prestataires », l’article 9, intitulé « Régimes d’autorisation », énonce, à son paragraphe 1 :

« Les États membres ne peuvent subordonner l’accès à une activité de service et son exercice à un régime d’autorisation que si les conditions suivantes sont réunies :

a)      le régime d’autorisation n’est pas discriminatoire à l’égard du prestataire visé ;

b)      la nécessité d’un régime d’autorisation est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général ;

c)      l’objectif poursuivi ne peut pas être réalisé par une mesure moins contraignante, notamment parce qu’un contrôle a posteriori interviendrait trop tardivement pour avoir une efficacité réelle. »

5.        L’article 10 de la directive « services » indique :

« 1.      Les régimes d’autorisation doivent reposer sur des critères qui encadrent l’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités compétentes afin que celui-ci ne soit pas utilisé de manière arbitraire.

2.      Les critères visés au paragraphe 1 sont :

a)      non discriminatoires ;

b)      justifiés par une raison impérieuse d’intérêt général ;

c)      proportionnels à cet objectif d’intérêt général ;

d)      clairs et non ambigus ;

e)      objectifs ;

f)      rendus publics à l’avance ;

g)      transparents et accessibles.

[...]

7.      Le présent article ne remet pas en cause la répartition des compétences locales ou régionales des autorités de l’État membre compétentes pour délivrer les autorisations. »

2.      La directive 2007/23/CE

6.        Le considérant 4 de la directive 2007/23/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 mai 2007, relative à la mise sur le marché d’articles pyrotechniques (4), indique :

« La directive 96/82/CE du Conseil[,] du 9 décembre 1996[,] concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses [ (5)] énonce des exigences de sécurité applicables aux sites où se trouvent, parmi d’autres substances dangereuses, des explosifs, y compris des substances pyrotechniques. »

7.        L’article 1er de cette directive dispose :

« 1.      La présente directive énonce des règles visant à assurer la libre circulation des articles pyrotechniques dans le marché intérieur, tout en garantissant en même temps un niveau élevé de protection de la santé humaine et de la sûreté publique, ainsi qu’un niveau élevé de protection et de sécurité des consommateurs, et en prenant en compte les aspects pertinents de la protection de l’environnement.

2.      La présente directive énonce les exigences de sécurité essentielles auxquelles les articles pyrotechniques doivent satisfaire en vue de leur mise sur le marché.

[...] »

8.        L’article 2 de ladite directive prévoit :

« Au sens de la présente directive, on entend par :

1)      “article pyrotechnique” : tout article contenant des substances explosives ou un mélange explosif de substances conçues pour produire de la chaleur, de la lumière, des sons, des gaz, de la fumée ou une combinaison de ces effets par une réaction chimique exothermique autoentretenue ;

[...]

3)      “artifice de divertissement” : un article pyrotechnique destiné au divertissement ;

[...]

8)      “distributeur” : toute personne physique ou morale de la chaîne d’approvisionnement qui, dans le cadre de son activité économique, met à disposition un article pyrotechnique sur le marché ;

[...] »

9.        L’article 6 de la directive 2007/23 dispose :

« 1.      Les États membres s’abstiennent d’interdire, de restreindre ou d’entraver la mise sur le marché d’articles pyrotechniques qui satisfont aux exigences de la présente directive.

2.      Les dispositions de la présente directive ne font pas obstacle à la prise, par un État membre, de mesures qui visent, pour des motifs d’ordre, de sécurité ou de sûreté publics, ou de protection de l’environnement, à interdire ou à restreindre la possession, l’utilisation et/ou la vente, à des particuliers, d’artifices de divertissement des catégories 2 et 3, d’articles pyrotechniques destinés au théâtre et d’autres articles pyrotechniques.

[...] »

10.      Aux termes de l’article 20, premier alinéa, de cette directive :

« Les États membres arrêtent des règles relatives aux sanctions applicables en cas d’infraction aux dispositions de la législation nationale adoptées conformément à la présente directive et veillent à l’application de ces sanctions. Ces sanctions ont un caractère effectif, proportionné et dissuasif. »

3.      La directive 2013/29/UE

11.      L’article 45 de la directive 2013/29/UE du Parlement européen et du Conseil, du 12 juin 2013, relative à l’harmonisation des législations des États membres concernant la mise à disposition sur le marché d’articles pyrotechniques (6), énonce :

« Les États membres fixent des règles relatives aux sanctions applicables en cas d’infraction des opérateurs économiques aux dispositions de la législation nationale adoptées conformément à la présente directive et prennent toutes les dispositions nécessaires pour que ces règles soient appliquées. Ces règles peuvent comporter des sanctions pénales pour les infractions graves.

Ces sanctions ont un caractère effectif, proportionné et dissuasif. »

B.      Le droit belge

12.      Aux termes de l’article 5 de la wet betreffende ontplofbare en voor de deflagratie vatbare stoffen en mengsels en de daarmede geladen tuigen (loi relative aux substances et mélanges explosibles ou susceptibles de déflagrer et aux engins qui en sont chargés) (7), du 28 mai 1956 :

« Les infractions aux dispositions prises en vertu de l’article 1er sont punies d’un emprisonnement de quinze jours à deux ans et d’une amende de cent francs à mille francs, ou d’une de ces peines seulement. »

13.      L’article 200 du koninklijk besluit houdende algemeen reglement betreffende het fabriceren, opslaan, onder zich houden, verkopen, vervoeren en gebruiken van springstoffen (arrêté royal portant règlement général sur la fabrication, l’emmagasinage, la détention, le débit, le transport et l’emploi des produits explosifs) (8), du 23 septembre 1958, dispose :

« Aucun explosif ne peut être conservé, en quantités dépassant celles que chacun peut détenir en vertu de l’article 265, que dans des magasins ou dépôts dûment autorisés. »

14.      Aux termes de l’article 257 de cet arrêté :

« La vente de tout explosif, par quantités dépassant celles que tout particulier peut posséder et indiquées à l’article 265, ne peut être réalisée que si les conditions suivantes sont remplies :

1°      l’acheteur est en possession d’une autorisation de transport telle que visée à l’article 72 ;

2°      l’acheteur est en possession d’une autorisation d’emmagasiner ou de détenir provisoirement ces produits ;

3°      l’acheteur prouve qu’il a une activité professionnelle dans le secteur des explosifs, comme fabricant, négociant ou utilisateur d’explosifs.

La condition mentionnée au point 2 s’applique uniquement si les marchandises achetées sont destinées à l’emmagasinage ou la détention provisoire sur le territoire belge.

Le vendeur vérifie et archive tous les documents remis par les acheteurs pour prouver le respect des obligations visées à l’alinéa premier. Ces documents seront, pendant trois ans au moins, tenus à la disposition des agents de la Direction générale Qualité et Sécurité du Service public fédéral Économie, P.M.E., Classes moyennes et Énergie et des autorités policières et judiciaires dans les locaux où s’effectuent les ventes. »

15.      L’article 260 de l’ARS dispose :

« Les débitants doivent toujours être titulaires d’une autorisation de dépôt ; ils ne peuvent détenir ou vendre en quantité si minime que ce soit des explosifs autres que ceux indiqués à l’article 261.

Leurs dépôts doivent être disposés et tenus comme il est dit à l’article 251. »

16.      Aux termes de l’article 261 de cet arrêté :

« La nature et les quantités d’explosifs qui peuvent être conservés par les débitants sont déterminées dans chaque cas particulier par l’arrêté d’autorisation, suivant le degré de sécurité que présente chaque dépôt.

Ces produits ne peuvent être détenus au-delà des quantités suivantes :

[...]

2°      artifices de joie et de signalisation à concurrence de cinquante kilogrammes de [CPT] y contenue ;

[...] »

17.      L’article 265 dudit arrêté indique :

« Aucune autorisation n’est requise pour détenir :

[...]

7°      une quantité d’artifices de joie et de signalisation à concurrence d’[un] kilogramme de [CPT] y contenue. »

18.      L’article 300, premier alinéa, de l’ARS prévoit :

« Les infractions aux dispositions du présent règlement, à l’exception de l’article 295, aux arrêtés pris en exécution de ces dispositions, ainsi qu’aux dispositions des arrêtés d’autorisation, sont punies des peines comminées par la loi du 28 mai 1956. »

II.    Les faits du litige au principal et les questions préjudicielles

19.      Dans le cadre du litige au principal, les prévenus sont Van Gennip BVBA, Original BVBA ainsi que MM. Antonius ten Velde et Antonius van der Schoot.

20.      Original est une entreprise dont le siège social est situé à Olen (Belgique), non loin des Pays-Bas, exerçant des activités d’importation, de commerce de gros et de distribution d’artifices de joie. À ce titre, elle dispose notamment de deux points de vente à Baerle-Duc (Belgique), une commune située partiellement dans la province du Brabant-Septentrional (Pays-Bas) et enclavée avec la commune de Baarle-Nassau (Pays-Bas), lesquels sont exploités par Van Gennip, qui a son siège social à Baerle-Duc. MM. ten Velde et van der Schoot, deux ressortissants néerlandais, sont les responsables desdits points de vente, à savoir, respectivement, Zena-Tabak-O-Tiek et Zena-De Bunker.

21.      Les quatre prévenus au principal sont, en substance, poursuivis en tant que détaillants de produits pyrotechniques pour l’entreposage d’artifices de joie dont le poids de la CPT aurait dépassé le poids maximal figurant dans les autorisations leur ayant été délivrées par les autorités belges, l’entreposage d’artifices de joie dans des endroits d’entreposage non autorisés et la vente à un particulier ne disposant pas d’une autorisation idoine d’une quantité d’artifices de joie dont le poids dépasse un kilogramme de CPT.

22.      Il ressort de la décision de renvoi que MM. ten Velde et van der Schoot ont allégué que l’incrimination des infractions telle que prévue par la législation belge est contraire à l’article 45 de la directive 2013/29 selon lequel les sanctions pénales sont réservées aux infractions graves et qu’aucun des faits qui leur sont reprochés ne constitue une infraction de cette nature.

23.      Selon la décision de renvoi, les prévenus et l’openbaar ministerie (ministère public, Belgique) s’opposent quant à la question de savoir si l’obligation de disposer à la fois d’une autorisation fédérale en matière d’explosifs et d’un permis d’environnement régional est conforme aux directives 2007/23 et 2013/29 ainsi qu’à la directive « services ». En particulier, certains prévenus soutiennent que, la législation belge étant contraire au droit de l’Union, certains des faits qui leur sont reprochés ne peuvent pas être considérés comme illicites.

24.      L’interprétation du droit de l’Union pourrait avoir une incidence sur le caractère punissable ou non des faits retenus à charge des prévenus.

25.      Dans ces conditions, le rechtbank van eerste aanleg te Antwerpen (tribunal de première instance d’Anvers, Belgique) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Les infractions suivantes à la réglementation belge en matière d’articles pyrotechniques constituent-elles des “infractions graves” au sens de l’article 45 de la directive 2013/29 :

a)      la vente d’articles pyrotechniques à concurrence de 2,666 kg de [CPT] y contenue, qui constitue une infraction à l’article 265, 7°, et à l’article 257 [de l’ARS], qui interdi[sen]t la vente d’articles pyrotechniques dans une quantité dépassant celle d’un kilogramme de CPT lorsque le consommateur ne dispose pas d’une autorisation administrative obtenue à titre individuel pour détenir des articles pyrotechniques dans une quantité supérieure ;

b)      le fait de dépasser l’entreposage maximal défini et le fait de ne pas respecter les lieux d’entreposage prévus dans une autorisation fédérale relative aux artifices, alors qu’il existait déjà un permis d’environnement régional pour l’entreposage, dans les lieux concernés, des quantités supérieures effectivement concernées ;

c)      l’emmagasinage très provisoire d’articles pyrotechniques en quantités très faibles, dans plusieurs lieux non spécifiquement autorisés pour l’entreposage, dans le périmètre d’un magasin de vente au détail d’articles pyrotechniques disposant aussi bien d’une autorisation fédérale en matière d’artifices que d’un permis d’environnement régional ?

2)      Le principe de la libre circulation d’articles pyrotechniques, tel que prévu à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2007/23 (devenu l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2013/29), lu, le cas échéant, conjointement avec l’article 10 de la directive [“services”], s’oppose‑t‑il à des règles nationales qui subordonnent les dépôts d’articles pyrotechniques conformes à la directive [2007/23], liés au commerce de détail, à la double exigence de disposer, d’une part, d’une autorisation délivrée dans le cadre de la législation relative à la fabrication, l’emmagasinage, la détention, le débit, le transport et l’emploi des produits explosifs et, d’autre part, d’une autorisation délivrée dans le cadre de la législation relative aux établissements incommodes, alors que les deux régimes d’autorisation poursuivent essentiellement le même objectif (la prévention des risques pour la sécurité) et que l’un de ces deux régimes d’autorisation (en l’espèce celui portant sur les produits explosifs) fixe un plafond maximal (très) bas pour l’entreposage d’artifices de joie (à concurrence de 50 kg de CPT, c’est‑à‑dire de matière active) ?

3)      Le principe de la libre circulation d’articles pyrotechniques, tel que prévu à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2013/29 [...] et à l’article 6, paragraphe [1], de la directive 2007/23 [...] (lus, le cas échéant, conjointement avec les articles 34, 35 et 36 TFUE), combiné au principe de proportionnalité, s’oppose‑t‑il à des règles nationales qui interdisent la détention ou l’utilisation par les consommateurs et la vente à ceux-ci d’artifices de joie (artifices des catégories 2 et 3 au sens de la directive 2007/23) contenant plus d’un kilogramme de CPT ? »

III. Notre analyse

A.      Sur la première question préjudicielle

26.      Par sa première question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande à la Cour si les infractions pour lesquelles les prévenus au principal sont poursuivis constituent des infractions graves au sens de l’article 45 de la directive 2013/29.

27.      À cet égard, comme l’ont souligné plusieurs parties lors de l’audience, les faits pour lesquels les prévenus au principal sont poursuivis se sont déroulés entre le 22 novembre 2010 et le 27 janvier 2013 et sont, par conséquent, antérieurs à l’adoption et à l’entrée en vigueur de la directive 2013/29 (9).

28.      En outre, contrairement à l’article 45 de la directive 2013/29, l’article 20 de la directive 2007/23 n’indique pas que les États membres peuvent prévoir des sanctions pénales pour les infractions graves, mais se limite à énoncer que ces derniers arrêtent des règles relatives aux sanctions applicables en cas d’infraction aux dispositions de la législation nationale adoptées conformément à cette directive et que ces sanctions doivent revêtir un caractère effectif, proportionné et dissuasif.

29.      Dans ces conditions, nous considérons qu’il n’y a pas lieu d’interpréter la notion d’« infractions graves » figurant uniquement dans la directive 2013/29 car cette directive n’est pas applicable ratione temporis au litige au principal.

30.      Par ailleurs, à supposer qu’il soit allégué que l’article 45 de la directive 2013/29 est une lex melior devant s’appliquer de façon rétroactive car, contrairement à l’article 20 de la directive 2007/23, il autorise les États membres à prévoir des sanctions pénales uniquement pour les infractions graves, cette allégation ne pourrait, selon nous, être suivie.

31.      À titre liminaire, il convient de souligner qu’il ressort de chacune de ces dispositions que non seulement les États membres ont l’obligation de prévoir des sanctions applicables en cas d’infraction aux dispositions de la législation nationale adoptées conformément aux directives 2007/23 et 2013/29, mais également que ces sanctions doivent être effectives, proportionnées et dissuasives (10).

32.      Cette obligation des États membres découle des spécificités liées à la mise en œuvre et à l’exécution du droit de l’Union. En effet, ces dernières incombent en grande partie aux États membres (11) et, afin de garantir l’efficacité de la réglementation relative aux articles pyrotechniques, celle-ci doit être assortie d’un régime de sanctions qu’il appartient aux États membres de déterminer (12).

33.      De ce fait, des dispositions telles que l’article 20 de la directive 2007/23 ou l’article 45 de la directive 2013/29 sont classiques (13) en droit de l’Union car elles ne sont jamais que le reflet de la nature sui generis de la mise en œuvre et de l’exécution du droit de l’Union (14).

34.      Or, l’interprétation de ces dispositions proposée par les prévenus au principal tend à leur donner une portée qui n’est pas la leur.

35.      En effet, force est de constater que ces dispositions ne déterminent ni les incriminations ni les sanctions applicables (15), mais qu’elles se limitent à indiquer que les États membres ont l’obligation de prévoir ces dernières.

36.      À cet égard, il convient de souligner que les directives 2007/23 et 2013/29 sont respectivement fondées sur l’article 95 CE (devenu l’article 114 TFUE) et sur l’article 114 TFUE, et non sur l’article 83 TFUE. Dès lors, contrairement aux textes fondés sur cette dernière disposition, les directives 2007/23 et 2013/29 énoncent des règles visant à assurer la libre circulation des articles pyrotechniques dans le marché intérieur et non des règles visant à établir des règles minimales en matière de sanctions pénales applicables à certains faits ou comportements (16).

37.      Par ailleurs, dès lors que l’article 20 de la directive 2007/23 ne précise pas la nature des sanctions que les États membres peuvent adopter, le libellé de cette disposition les autorise indubitablement à déterminer la nature des sanctions et, par conséquent, à imposer des sanctions pénales en cas d’infraction aux dispositions nationales adoptées conformément à la directive 2007/23 (17).

38.      Enfin, cette interprétation n’est pas, selon nous, remise en cause par le changement de libellé opéré par le législateur lors de la rédaction de l’article 45 de la directive 2013/29 car ce libellé ne saurait avoir pour effet de restreindre la marge d’appréciation des États membres quant à la nature des sanctions adoptées au titre de l’article 20 de la directive 2007/23 (18).

39.      En revanche, il y a lieu de rappeler que la circonstance qu’une juridiction nationale a, sur un plan formel, formulé une question préjudicielle en se référant à certaines dispositions du droit de l’Union ne fait pas obstacle à ce que la Cour fournisse à cette juridiction tous les éléments d’interprétation qui peuvent être utiles au jugement de l’affaire dont elle est saisie, qu’elle y ait fait ou non référence dans l’énoncé de ses questions. Il appartient, à cet égard, à la Cour d’extraire de l’ensemble des éléments fournis par la juridiction nationale, et notamment de la motivation de la décision de renvoi, les éléments de droit de l’Union qui appellent une interprétation compte tenu de l’objet du litige (19).

40.      À cet égard, premièrement, force est de constater que, les faits pour lesquels les prévenus au principal sont poursuivis s’étant déroulés entre le 22 novembre 2010 et le 27 janvier 2013, ils relèvent ratione temporis de la directive 2007/23. Par conséquent, nous estimons qu’il convient, afin de fournir une réponse utile au juge de renvoi, de reformuler la question préjudicielle aux fins d’établir si l’article 20 de cette directive permet aux États membres d’imposer des sanctions pénales.

41.      Or, ainsi que nous l’avons souligné au point 37 des présentes conclusions, la réponse à cette question est, sans conteste, affirmative. Cependant, il appartient au juge de renvoi de vérifier que les sanctions prévues sont effectives, proportionnées et dissuasives.

42.      Deuxièmement, il ressort la deuxième question préjudicielle que le juge de renvoi n’exclut pas que le système belge de double autorisation pour le stockage d’articles pyrotechniques en vue de leur vente relève de la directive « services ». En outre, deux infractions visées dans la première question préjudicielle sont des infractions aux autorisations délivrées au titre de ce système de double autorisation. Par conséquent, il convient de déterminer si les États membres peuvent prévoir des sanctions pénales en cas de violation de la législation nationale réglementant l’accès ou l’exercice des activités de services.

43.      Or, l’article 1er, paragraphe 5, de la directive « services » disposant que celle-ci n’affecte pas les règles de droit pénal des États membres à condition qu’elles n’aient pas pour effet de contourner les règles énoncées dans cette directive, la réponse à cette question est affirmative.

44.      Eu égard à l’ensemble de ces considérations, nous estimons qu’il y a lieu de répondre à la première question préjudicielle que, sans qu’il soit nécessaire de déterminer si les infractions en cause sont des infractions graves, l’article 20 de la directive 2007/23 et l’article 1er, paragraphe 5, de la directive « services » doivent être interprétés en ce sens que les États membres peuvent prévoir des sanctions pénales à condition que, s’agissant de la directive 2007/23, ces sanctions soient effectives, proportionnées et dissuasives, et que, s’agissant de la directive « services », les dispositions nationales n’aient pas pour effet de contourner les règles de cette directive, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

B.      Sur la deuxième question préjudicielle

45.      Par sa deuxième question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande à la Cour si le principe de la libre circulation d’articles pyrotechniques, prévu à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2007/23, lu, le cas échéant, conjointement avec l’article 10 de la directive « services », s’oppose à des règles nationales qui subordonnent les dépôts d’articles pyrotechniques conformes à la directive 2007/23, liés au commerce de détail, à la détention d’une double autorisation supposant, d’une part, une autorisation délivrée dans le cadre de la législation relative à la fabrication, l’emmagasinage, la détention, le débit, le transport ainsi que l’emploi des produits explosifs et, d’autre part, une autorisation délivrée au titre de la législation relative aux établissements incommodes, ces deux régimes d’autorisation poursuivant le même objectif, à savoir la prévention des risques pour la sécurité, et un de ces deux régimes d’autorisation fixant un plafond maximal bas pour l’entreposage d’artifices de joie.

46.      À cet égard, si le juge de renvoi mentionne la directive 2007/23 ainsi que la directive « services », nous pensons que la législation nationale en cause ne relève pas du champ d’application de la première.

47.      En effet, la directive 2007/23 réglemente le traitement des articles pyrotechniques préalablement à leur mise sur le marché ainsi que leur mise sur le marché. En revanche, elle réglemente le stockage pour autant que celui-ci a une incidence directe sur les caractéristiques et la sécurité de ces articles. Ainsi, il découle notamment du considérant 4 de la directive 2007/23 (20) et de l’article 14, paragraphes 1 et 2, de cette directive que le stockage ne relève de ce texte qu’en ce que les conditions de stockage ne doivent pas compromettre la conformité du produit pyrotechnique avec les exigences essentielles de sécurité énoncées dans ladite directive.

48.      Or, la législation nationale porte sur le stockage des articles pyrotechniques conformes aux exigences de la directive 2007/23 et destinés à être vendus dans le cadre du commerce de détail.

49.      En outre, s’il est vrai que le système de double autorisation mentionné au point 23 des présentes conclusions porte formellement sur le stockage des articles pyrotechniques et non sur l’accès ou l’exercice de l’activité de commerce de détail de ces articles, laquelle constitue un « service » aux fins de l’application de la directive « services » (21), le stockage des articles pyrotechniques destinés à être vendus constitue un préalable indispensable à cette activité de commerce de détail.

50.      En effet, d’une part, il ressort du dossier soumis à la Cour que les dispositions de l’ARS en cause visent les « débitants » et, par conséquent, le stockage en vue de la vente. D’autre part, soumettre à autorisation la quantité d’articles pyrotechniques pouvant être stockée dans le cadre d’une activité de commerce au détail a indéniablement un effet tant sur l’accès à cette activité que sur son exercice. Ainsi, l’absence d’autorisation de stockage ou une autorisation très basse peuvent de facto restreindre l’accès à cette activité ou son exercice.

51.      Par conséquent, nous estimons que c’est à l’aune de la directive « services » et, en particulier, de son article 10 (22) qu’il convient de répondre à la deuxième question préjudicielle.

52.      Nous remarquons également que la portée de la question posée par le juge de renvoi est, in fine, limitée dès lors que celui-ci s’interroge sur la compatibilité du système belge de double autorisation avec le droit de l’Union et non sur la compatibilité des systèmes régional et fédéral avec le droit de l’Union.

53.      À cet égard, l’argumentation des prévenus au principal selon laquelle les deux régimes d’autorisation poursuivent le même objectif repose sur une prémisse erronée.

54.      En effet, il ressort des explications fournies par le gouvernement belge lors de l’audience que, en ce qui concerne les prévenus au principal, le stockage d’articles pyrotechniques en vue de la vente de ces articles requiert l’obtention de deux autorisations. D’une part, il appartient aux autorités locales, lesquelles sont en charge de la protection de l’environnement, de délivrer un permis environnemental autorisant le stockage d’un certain quota d’articles pyrotechniques contenant un certain quota de CPT. D’autre part, les autorités fédérales étant responsables de la sécurité et de la santé de la population, il leur incombe de délivrer une autorisation de stockage d’un certain quota d’articles pyrotechniques contenant un certain quota de CPT.

55.      Par conséquent, contrairement à ce qu’ont fait valoir les prévenus au principal, ces régimes d’autorisation poursuivent nécessairement des objectifs différents et l’obtention de chacune des autorisations est subordonnée à des critères différents. À cet égard, s’il est certes vrai que les quotas autorisés au titre de ces autorisations peuvent différer, ces régimes ne sont pas pour autant contradictoires dès lors que le respect de l’autorisation déterminant le quota le plus bas emporte nécessairement le respect de l’autre autorisation.

56.      S’agissant de la conformité du système de double autorisation en cause avec l’article 10 de la directive « services », le paragraphe 1 de cette disposition exige que les régimes d’autorisation « reposent sur des critères qui encadrent l’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités compétentes afin que celui-ci ne soit pas utilisé de manière arbitraire », tandis que le paragraphe 2 énonce ces critères.

57.      Nous pensons que le système belge respecte ces critères.

58.      En effet, premièrement, au regard des informations dont dispose la Cour, les critères sur lesquels repose le système belge sont, à nos yeux, justifiés par une raison impérieuse d’intérêt général, à savoir la protection de la sécurité publique et de l’environnement, et sont, du fait de la publication des législations fédérales et régionales, rendus publics à l’avance, transparents et accessibles.

59.      Deuxièmement, ces critères sont, à notre sens, clairs et non ambigus. À cet égard, comme nous l’avons déjà souligné, les deux systèmes d’autorisation ne font pas double emploi et tendent à protéger des intérêts publics différents, partant, il ne saurait être soutenu que l’intervention des autorités fédérales et régionales remet en cause cette appréciation. En outre, l’obligation de disposer à la fois d’une autorisation fédérale et d’une autorisation régionale ne peut en elle-même constituer un motif d’incompatibilité avec la directive « services », dès lors que le législateur de l’Union a explicitement indiqué à l’article 10, paragraphe 7, de cette directive que cet article « ne remet pas en cause la répartition des compétences locales ou régionales des autorités de l’État membre compétentes pour délivrer les autorisations ».

60.      Troisièmement, les éléments dont dispose la Cour ne nous permettent pas d’évaluer le caractère non discriminatoire, proportionnel et objectif de ces critères, ce qu’il appartient, par conséquent, à la juridiction de renvoi de vérifier.

61.      Eu égard à l’ensemble de ces considérations, nous estimons que le système belge de double autorisation pour le stockage d’articles pyrotechniques n’est pas incompatible avec l’article 10 de la directive « services », sous réserve du caractère non discriminatoire, proportionnel et objectif des critères encadrant l’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités compétentes, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

C.      Sur la troisième question préjudicielle

62.      Par sa troisième question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande à la Cour si le principe de la libre circulation d’articles pyrotechniques résultant des directives 2007/23 et 2013/29, lues, le cas échéant, conjointement avec les articles 34, 35 et 36 TFUE, combiné au principe de proportionnalité, s’oppose à des règles nationales interdisant la détention ou l’utilisation par les consommateurs et la vente à ces derniers d’artifices de joie contenant plus d’un kilogramme de CPT.

63.      En premier lieu, il a été soutenu, lors de la procédure devant la Cour, que la législation belge constitue une règle technique au sens de la directive 98/34/CE (23) et que, en l’absence de notification à la Commission européenne, cette législation est inapplicable (24).

64.      Lors de l’audience, le gouvernement belge a fait valoir que, la législation nationale étant une mesure « nécessaire pour assurer la protection des personnes et, en particulier, des travailleurs lors de l’utilisation de produits » visée à l’article 1er de la directive 98/34, cette dernière ne serait pas applicable.

65.      Nous ne sommes pas convaincu par cette argumentation.

66.      En effet, s’il est évident, ainsi que nous le démontrerons, que la législation belge tend à protéger la sécurité publique et la sécurité des personnes, cette législation porte non pas sur l’utilisation des produits, mais sur la vente de ces derniers.

67.      Le gouvernement belge a également soutenu que, dans la mesure où la législation antérieure subordonnait la vente d’articles pyrotechniques au fait que l’acheteur dispose d’une autorisation dès lors que le produit en cause comportait 500 g de CPT, la législation en cause en l’espèce constituerait un assouplissement d’une mesure antérieure dont la notification ne serait pas obligatoire.

68.      À cet égard, la Cour a jugé que des modifications apportées à un projet de règle technique déjà notifié à la Commission, conformément à l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 98/34, qui ne comportent, par rapport au projet notifié, qu’un assouplissement des conditions d’utilisation du produit concerné et qui, partant, réduisent l’impact éventuel de la règle technique sur les échanges commerciaux, ne constituent pas un changement significatif du projet et ne sont donc pas soumises à l’obligation de notification préalable (25).

69.      Or, en l’espèce, les éléments soumis à la Cour ne nous permettent pas d’établir avec certitude si la législation antérieure plus restrictive avait été notifiée à la Commission au titre de la directive 98/34.

70.      Dans ces conditions, nous considérons qu’il incombe à la juridiction de renvoi de déterminer si tel avait été le cas et si, par conséquent, le gouvernement belge pouvait ne pas notifier la nouvelle législation.

71.      En tout état de cause, la réglementation belge ne constitue pas, à nos yeux, une règle technique au sens de l’article 1, point 11, de la directive 98/34.

72.      Selon la Cour, la notion de « règle technique » recouvre quatre catégories de mesures, à savoir, premièrement, la « spécification technique », au sens de l’article 1er, point 3, de la directive 98/34, deuxièmement, l’« autre exigence », telle que définie à l’article 1er, point 4, de cette directive, troisièmement, la « règle relative aux services », visée à l’article 1er, point 5, de ladite directive, et, quatrièmement, les « dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres interdisant la fabrication, l’importation, la commercialisation ou l’utilisation d’un produit ou interdisant de fournir ou d’utiliser un service ou de s’établir comme prestataire de services », au sens de l’article 1er, point 11, de la même directive (26).

73.      À cet égard, premièrement, nous estimons que la réglementation en cause ne relève pas de la catégorie des règles relatives aux services, dès lors qu’elle ne concerne pas des services de la société de l’information, au sens de l’article 1er, point 2, de cette directive.

74.      Deuxièmement, la notion de « spécification technique » désigne la spécification qui figure dans un document définissant les caractéristiques requises d’un produit, telles que la dénomination de vente, l’emballage, l’étiquetage, ainsi que les procédures d’évaluation de la conformité. Pour la Cour, cette notion présuppose que la mesure nationale se réfère nécessairement au produit ou à son emballage en tant que tels et fixe, dès lors, l’une des caractéristiques requises d’un produit (27). Or, la législation belge ne se réfère pas au produit ou à son emballage en tant que tels, de sorte que, comme l’a fait valoir la Commission lors de l’audience, cette législation ne fixe pas l’une des caractéristiques requises d’un produit.

75.      Troisièmement, la Cour a déjà précisé que, afin de pouvoir être qualifiées d’« autres exigences », les mesures nationales concernées doivent constituer des conditions pouvant influencer de manière significative la composition, la nature ou la commercialisation du produit concerné (28).

76.      La réglementation en cause, subordonnant la vente d’articles pyrotechniques dont la teneur en CPT est supérieure à un kilogramme à la détention d’une autorisation, constitue non pas une exigence imposée au produit en lui-même, mais une exigence imposée aux opérateurs économiques et ne peut, dès lors, être qualifiée d’« autre exigence » au sens de la directive 98/34 (29).

77.      Quatrièmement, s’agissant de la catégorie visée à l’article 1er, point 11, de la directive 98/34, à savoir l’interdiction de fabrication, d’importation, de commercialisation ou d’utilisation d’un produit, il ressort de la jurisprudence que cette catégorie de règles techniques suppose que les dispositions nationales en cause aient une portée qui aille clairement au-delà d’une limitation à certains usages possibles du produit en cause et ne se limitent pas à une simple restriction de l’utilisation de celui-ci. En effet, cette catégorie vise plus particulièrement des mesures nationales qui ne laissent place à aucune utilisation autre que purement marginale pouvant raisonnablement être attendue du produit concerné (30).

78.      Or, force est de constater que la réglementation nationale en cause n’interdit pas la vente d’articles pyrotechniques contenant plus d’un kilogramme de CPT, mais la subordonne à la possession par l’acheteur d’une autorisation. Par conséquent, de tels produits peuvent être vendus à des consommateurs disposant d’une telle autorisation ainsi qu’à des professionnels de sorte que, selon nous, cette réglementation laisse place à une commercialisation autre que purement marginale.

79.      En second lieu, afin de répondre aux interrogations du juge de renvoi, il y a lieu de déterminer si le principe de la libre circulation d’articles pyrotechniques résultant des directives 2007/23 et 2013/29, lues, le cas échéant, conjointement avec les articles 34, 35 et 36 TFUE, combiné au principe de proportionnalité, s’oppose à des règles nationales interdisant la détention ou l’utilisation par les consommateurs et la vente à ces derniers d’artifices de joie contenant plus d’un kilogramme de CPT.

80.      À cet égard, premièrement, il convient de rappeler que M. van der Schoot est poursuivi pour avoir notamment vendu des artifices de joie et de signalisation à concurrence de plus d’un kilogramme de CPT y contenue à un particulier ne disposant pas de l’autorisation nécessaire à cet effet, que, l’infraction pour laquelle ce prévenu est poursuivi ayant eu lieu le 23 décembre 2012, la directive 2007/23 est applicable ratione temporis et que, selon la décision de renvoi, les artifices de joie en cause sont des artifices des catégories 2 et 3 au sens de la directive 2007/23 ayant été mis à disposition sur le marché.

81.      Deuxièmement, la directive 2007/23 ayant procédé à une harmonisation exhaustive des conditions, tant matérielles que procédurales, que doivent satisfaire les articles pyrotechniques aux fins de leur mise sur le marché et l’article 6, paragraphe 1, de cette directive garantissant non pas uniquement la première mise à disposition sur le marché, mais la libre circulation des articles pyrotechniques (31), la mesure belge y relative doit être appréciée au regard des dispositions de ladite directive et non au regard du droit primaire (32).

82.      Troisièmement, il ne fait aucun doute que la législation en cause, par sa nature même, restreint, au sens de l’article 6 de la directive 2007/23, la possession, l’utilisation et/ou la vente, à des particuliers, d’artifices de divertissement contenant plus d’un kilogramme de CPT. Toutefois, nous estimons que cette législation tend, comme l’a fait valoir le gouvernement belge, à protéger les intérêts essentiels mentionnés au paragraphe 2 de cette disposition et, en particulier, l’ordre, la sécurité ou la sûreté publics (33).

83.      En ce qui concerne l’aptitude de la législation à protéger l’ordre, la sécurité et la sûreté publics, nous estimons que la mesure en cause est propre à garantir la réalisation de ces objectifs (34).

84.      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu des articles 4 TUE et 72 TFUE, les États membres restent responsables du maintien de l’ordre public sur leur territoire. Ainsi, ces derniers restent libres de déterminer les mesures qui sont de nature à maintenir celui-ci (35) ou à protéger la sécurité publique (36), conformément à leurs besoins nationaux et en fonction des circonstances spécifiques de temps et de lieu.

85.      Néanmoins, l’invocation de l’exception d’ordre, de sécurité ou de sûreté publics constitue une dérogation au principe fondamental de la libre circulation, devant être entendue strictement et dont la portée ne saurait être déterminée unilatéralement par les États membres (37). La marge d’appréciation dont disposent les États membres doit, par conséquent, s’exercer dans les limites imposées par le droit de l’Union (38).

86.      À cet égard, il convient de rappeler que la Cour a déjà jugé que, pour pouvoir invoquer l’ordre et la sécurité publics comme justification, il doit exister une menace réelle et suffisamment grave affectant un intérêt fondamental de la société (39).

87.      En l’espèce, il ne fait aucun doute que le fait de subordonner la vente aux particuliers d’articles pyrotechniques comportant plus d’un kilogramme de CPT à l’obtention d’une autorisation est de nature à prévenir les atteintes à l’ordre et à la sécurité publics.

88.      En effet, les articles pyrotechniques « [étant] par nature dangereux » (40), ils peuvent, compte tenu de leur composition, notamment pour les articles comportant plus d’un kilogramme de CPT, porter atteinte à la sécurité des personnes. De plus, du fait de leur nature même et en fonction des circonstances dans lesquelles ils sont utilisés, ces articles peuvent troubler l’ordre public.

89.      En outre, la protection de l’ordre, de la sécurité et de la sûreté publics étant, ainsi que cela ressort du point 84 des présentes conclusions, fondamentalement liée aux circonstances de temps et de lieu, nous ne saurions occulter le fait que la dangerosité intrinsèque des articles pyrotechniques contenant plus d’un kilogramme de CPT est exacerbée dans le contexte actuel marqué par la menace terroriste.

90.      Dans ces circonstances, il est légitime, selon nous, que les États membres soumettent à une autorisation l’achat par des particuliers d’articles dont la teneur en CPT dépasse un certain plafond car, d’une part, il n’est pas exclu que ces articles soient, seuls ou en combinaison avec d’autres produits, détournés à des fins non festives et, d’autre part, la simple utilisation d’articles pyrotechniques à forte teneur en CPT peut, dans le contexte actuel, donner lieu à des mouvements de foule et de panique.

91.      Or, la législation nationale en cause est, sans conteste, propre à protéger l’ordre, la sécurité et la sûreté publics en ce qu’elle permet de contrôler et, le cas échéant, de limiter la quantité de CPT en possession d’une personne.

92.      En ce qui concerne la nécessité de la législation nationale en cause, compte tenu du caractère lacunaire du renvoi préjudiciel, du fait qu’il appartient au juge de renvoi de déterminer si, et, le cas échéant, dans quelle mesure, la législation nationale est proportionnée à l’objectif d’intérêt public poursuivi (41), mais que la Cour peut lui donner des indications tirées du dossier (42), nous nous limiterons à lui fournir un cadre d’analyse à l’aune duquel il lui appartiendra d’apprécier si la législation va au-delà de ce qui est nécessaire aux fins de protéger l’ordre, la sécurité et la sûreté publics.

93.      Premièrement, l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2007/23 est ainsi rédigé qu’il confère aux États membres une importante marge d’appréciation quant aux mesures visées par cette disposition.

94.      En effet, le champ d’application de cette disposition est très large en ce que les objectifs éventuellement poursuivis par les États membres sont divers. Les mesures peuvent être non seulement des mesures d’interdiction, mais également des mesures de restriction et elles peuvent porter tant sur la possession que sur l’utilisation et la vente de certains produits pyrotechniques.

95.      Cette interprétation est, à notre sens, renforcée par le fait que le considérant 10 de la directive 2007/23 établit une relation de cause à effet entre, d’une part, le fait que l’utilisation d’articles pyrotechniques, et notamment d’artifices de divertissement, est régie par des coutumes et des traditions culturelles largement divergentes selon les États membres et, d’autre part, la nécessité de permettre aux États membres d’adopter des mesures nationales en vue de limiter, pour des raisons d’ordre ou de sécurité publics, l’utilisation ou la vente aux particuliers de certaines catégories d’artifices de divertissement.

96.      Deuxièmement, la législation nationale en cause, n’édictant aucune interdiction absolue de vente, mais soumettant cette vente au fait que le consommateur dispose d’une autorisation préalable, vise à restreindre la vente de certains produits au consommateur. En outre, cette mesure restrictive s’applique non pas à tous les produits pyrotechniques, mais uniquement aux produits contenant un certain grammage de cette composition dangereuse qu’est la CPT.

97.      Troisièmement, dans le contexte actuel, des mesures moins restrictives, comme l’enregistrement à la suite de l’achat de produits contenant un certain poids de CPT, ne sont pas, selon nous, aussi efficaces pour protéger les intérêts fondamentaux en cause. En effet, si une telle formalité permet de déterminer la quantité de CPT acquise par un consommateur, elle ne permet pas de restreindre une telle quantité ni, par conséquent, de lutter efficacement contre les atteintes aux intérêts fondamentaux invoqués par le gouvernement belge.

98.      Au vu de l’ensemble de ces considérations, nous estimons, d’une part, que la législation belge ne constitue pas une règle technique au sens de la directive 98/34 et, d’autre part, que cette législation restreint, au sens de l’article 6 de la directive 2007/23, la libre circulation des artifices de joie, mais qu’elle a été adoptée pour des motifs d’ordre, de sécurité et de sûreté publics, et qu’elle ne pas va pas au-delà de ce qui est nécessaire aux fins de protéger ces intérêts, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

IV.    Conclusion

99.      Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le rechtbank van eerste aanleg te Antwerpen (tribunal de première instance d’Anvers, Belgique) de la manière suivante :

1)      L’article 20 de la directive 2007/23/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 mai 2007, relative à la mise sur le marché d’articles pyrotechniques, et l’article 1er, paragraphe 5, de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur, doivent être interprétés en ce sens que les États membres peuvent prévoir des sanctions pénales à condition que ces sanctions soient effectives, proportionnées et dissuasives, et que les dispositions nationales n’aient pas pour effet de contourner les règles de cette dernière directive, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

2)      Le système de double autorisation en cause au principal pour le stockage d’articles pyrotechniques n’est pas incompatible avec l’article 10 de la directive 2006/123, sous réserve du caractère non discriminatoire, proportionnel et objectif des critères encadrant l’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités compétentes, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

3)      La législation subordonnant la vente d’articles pyrotechniques contenant plus d’un kilogramme de composition pyrotechnique à la possession par l’acheteur d’une autorisation ne constitue pas une règle technique au sens de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information, telle que modifiée par la directive 98/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 juillet 1998. Cette législation restreint la libre circulation des artifices de joie au sens de l’article 6 de la directive 2007/23, mais vise à protéger l’ordre, la sécurité et la sûreté publics, et ne pas va pas au-delà de ce qui est nécessaire aux fins de protéger ces intérêts, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.


1      Langue originale : le français.


2      Ci-après la « CPT ».


3      JO 2006, L 376, p. 36, ci-après la « directive “services” ».


4      JO 2007, L 154, p. 1.


5      JO 1997, L 10, p. 13.


6      JO 2013, L 178, p. 27.


7      Belgisch Staatsblad, 9 juin 1956, p. 3990.


8      Belgisch Staatsblad, 22 décembre 1958, p. 9075 (ci-après l’« ARS »).


9      À cet égard, nous rappelons que la directive 2013/29 a été adoptée le 12 juin 2013, qu’elle est, aux termes de son article 49, entrée en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne et que, aux termes de son article 48, la directive 2007/23 a été abrogée avec effet au 1er juillet 2015.


10      Sur le caractère effectif, proportionné et dissuasif des sanctions que les États membres doivent adopter conformément au droit de l’Union, voir Hagueneau-Moizard, C., « Sanction nationale du droit communautaire : “Sanctions effectives, proportionnées et dissuasives” », L’exécution du droit de l’Union, entre mécanismes communautaires et droits nationaux, Bruylant, Bruxelles, 2009, p. 205 à 223.


11      Voir, à cet égard, déclaration n° 43, annexée à l’acte final du traité d’Amsterdam, selon laquelle « la mise en œuvre, sur le plan administratif, du droit [de l’Union] incombe par principe aux États membres conformément à leur régime constitutionnel » (JO 1997, C 340, p. 140). Comme l’a souligné Jean-Paul Jacqué, « [l]a mise en œuvre du droit [de l’Union] par les États membres revêt une importance capitale. En effet, [l’Union] ne dispose pas des compétences nécessaires à la mise en œuvre directe du droit [de l’Union] au sein des États membres » (Jacqué, J.-P., Droit institutionnel de l’Union européenne, 5e édition, Dalloz, Paris, 2009, p. 601).


12      Selon Catherine Hagueneau-Moizard, « [l]’effet réel du droit [de l’Union] dépend de son application par les États » (Hagueneau-Moizard, C., « Sanction nationale du droit communautaire : “Sanctions effectives, proportionnées et dissuasives” », L’exécution du droit de l’Union, entre mécanismes communautaires et droits nationaux, Bruylant, Bruxelles, 2009, p. 205 à 223, en particulier p. 207). Cette obligation pesant sur les États membres est par ailleurs renforcée par le principe de coopération loyale dès lors que ce principe requiert que les États membres prennent toute mesure propre à garantir la portée et l’efficacité de la législation de l’Union [voir arrêt du 21 septembre 1989, Commission/Grèce (68/88, EU:C:1989:339, points 23 et 24)].


13      À titre d’exemple, voir article 15 de la directive 2000/43/CE du Conseil, du 29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique (JO 2000, L 180, p. 22).


14      Une disposition d’une directive prévoyant que les sanctions soient effectives, proportionnées et dissuasives est ainsi qualifiée de « disposition standard » par Catherine Hagueneau-Moizard (Hagueneau-Moizard, C., « Sanction nationale du droit communautaire : “Sanctions effectives, proportionnées et dissuasives” », L’exécution du droit de l’Union, entre mécanismes communautaires et droits nationaux, Bruylant, Bruxelles, 2009, p. 205 à 223, en particulier p. 210).


15      Le terme de « sanction » est ici entendu très largement en ce qu’il englobe les sanctions de toutes natures.


16      Voir, notamment, directive 2014/57/UE du Parlement européen et du Conseil, du 16 avril 2014, relative aux sanctions pénales applicables aux abus de marché (JO 2014, L 173, p. 179), dont l’article 1er, paragraphe 1, dispose : « La présente directive établit des règles minimales en matière de sanctions pénales applicables aux opérations d’initié, à la divulgation illicite d’informations privilégiées et aux manipulations de marché, afin de garantir l’intégrité des marchés financiers de l’Union et de renforcer la protection des investisseurs et leur confiance dans ces marchés. »


17      Voir, par analogie, arrêt du 10 juillet 2008, Feryn (C‑54/07, EU:C:2008:397, point 37).


18      À cet égard, il est notable que la reconnaissance explicite de la possibilité pour les États membres d’adopter des sanctions pénales en cas d’infraction grave ait d’abord été prévue à l’article 41 du règlement (CE) n° 765/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 9 juillet 2008, fixant les prescriptions relatives à l’accréditation et à la surveillance du marché pour la commercialisation des produits et abrogeant le règlement (CEE) n° 339/93 du Conseil (JO 2008, L 218, p. 30), et que, depuis, de très nombreuses directives « nouvelle approche en matière d’harmonisation technique et de normalisation » comportent des dispositions dont le libellé est analogue à celui de l’article 45 de la directive 2013/29, à savoir, notamment, l’article 42 de la directive 2014/31/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, relative à l’harmonisation des législations des États membres concernant la mise à disposition sur le marché des instruments de pesage à fonctionnement non automatique (JO 2014, L 96, p. 107), l’article 46 de la directive 2014/53/UE du Parlement européen et du Conseil, du 16 avril 2014, relative à l’harmonisation des législations des États membres concernant la mise à disposition sur le marché d’équipements radioélectriques et abrogeant la directive 1999/5/CE (JO 2014, L 153, p. 62), ou l’article 47 de la directive 2014/68/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, relative à l’harmonisation des législations des États membres concernant la mise à disposition sur le marché des équipements sous pression (JO 2014, L 189, p. 164).


19      Voir nos conclusions dans l’affaire Essent Energie Productie (C‑91/13, EU:C:2014:312, point 35).


20      Le considérant 7 de la directive 2013/29 est encore plus explicite en ce qu’il indique que « [l]a sécurité durant le stockage est régie par la directive 96/82 [...], qui énonce des exigences de sécurité applicables aux sites où se trouvent des explosifs, y compris des substances pyrotechniques ».


21      Arrêt du 30 janvier 2018, X et Visser (C‑360/15 et C‑31/16, EU:C:2018:44, points 84 à 97).


22      À cet égard, la législation nationale en cause, soumettant le stockage à une autorisation, relève de cette disposition et ne constitue pas une exigence visée au considérant 9 de la directive « services » [voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2018, X et Visser (C‑360/15 et C‑31/16, EU:C:2018:44, points 113 à 123)]. En outre, quand bien même il serait soutenu que tous les éléments de l’affaire au principal se cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre, la Cour a jugé qu’une telle circonstance ne remettait pas en cause l’applicabilité du chapitre III de la directive « services » [voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2018, X et Visser (C‑360/15 et C‑31/16, EU:C:2018:44, point 110)].


23      Directive du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information (JO 1998, L 204, p. 37), telle que modifiée par la directive 98/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 juillet 1998 (JO 1998, L 217, p. 18) (ci-après la « directive 98/34 »).


24      Arrêt du 8 novembre 2007, Schwibbert (C‑20/05, EU:C:2007:652, points 38 à 42). Voir, également, arrêt du 10 juillet 2014, Ivansson e.a. (C‑307/13, EU:C:2014:2058, point 48).


25      Arrêt du 15 avril 2010, Sandström (C‑433/05, EU:C:2010:184, point 47).


26      Arrêt du 1er février 2017, Município de Palmela (C‑144/16, EU:C:2017:76, point 25 et jurisprudence citée).


27      Arrêt du 10 juillet 2014, Ivansson e.a. (C‑307/13, EU:C:2014:2058, point 19 et jurisprudence citée).


28      Arrêt du 27 octobre 2016, James Elliott Construction (C‑613/14, EU:C:2016:821, point 69 et jurisprudence citée).


29      Voir, en ce sens, arrêts du 21 avril 2005, Lindberg (C‑267/03, EU:C:2005:246, point 87), ainsi que du 13 octobre 2016, M. et S. (C‑303/15, EU:C:2016:771, points 29 et 30).


30      Arrêts du 21 avril 2005, Lindberg (C‑267/03, EU:C:2005:246, points 76 et 77), ainsi que du 19 juillet 2012, Fortuna e.a. (C‑213/11, C‑214/11 et C‑217/11, EU:C:2012:495, points 31 et 32).


31      Cela découle, à notre sens, de l’arrêt du 27 octobre 2016, Commission/Allemagne (C‑220/15, EU:C:2016:815, points 35 à 47), et, en particulier, de l’interprétation donnée de la portée de l’article 2, point 2, et de l’article 6 de la directive 2007/23. Nous soulignons également que, à cet effet, la Cour a rejeté l’argumentation allemande selon laquelle « les États membres auraient compétence pour réglementer toutes les étapes ultérieures de [la] distribution [des articles pyrotechniques], jusqu’à la vente au détail au consommateur final ».


32      Arrêt du 10 septembre 2014, Vilniaus energija (C‑423/13, EU:C:2014:2186, point 39).


33      En droit de l’Union, il est rarement fait usage de la notion de « sûreté publique ». En outre, cette notion n’est pas, comme l’a souligné le législateur de l’Union au considérant 41 de la directive « services » en indiquant que « la notion de “sécurité publique” comprend les questions de sûreté publique », clairement distinguée de la notion de « sécurité publique ».


34      Nous considérons qu’il y a lieu de vérifier que la mesure nationale est propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi et qu’elle ne va pas au‑delà de ce qui est nécessaire pour que ce dernier soit atteint, et ce même si l’exigence de proportionnalité n’est pas énoncée stricto sensu à l’article 6 de la directive 2007/23. En effet, compte tenu du fait que le principe de proportionnalité irrigue, en tant que principe général du droit, l’intégralité du droit de l’Union et que les mesures des États membres restreignant les libertés de circulation protégées par le traité font l’objet d’un contrôle de proportionnalité, nous pensons que les mesures adoptées au titre de l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2007/23 doivent en tant qu’exceptions faire l’objet d’un tel contrôle.


35      Voir, à cet égard, nos conclusions dans l’affaire Josemans (C‑137/09, EU:C:2010:433, point 116 ainsi que note en bas de page 61).


36      Les considérations développées par l’avocat général Mayras dans ses conclusions dans l’affaire van Duyn (41/74, non publiées, EU:C:1974:123, p. 1358), et selon lesquelles « les États jouissent seuls, sous les réserves qu’appellent précisément certaines dispositions [de l’Union] [...] du pouvoir de prendre les mesures qu’impose la protection de la sécurité publique sur leur territoire et d’apprécier en quoi cette sécurité pourrait être mise en péril », de sorte que la sécurité publique « demeure, actuellement du moins, nationale et cela est conforme à la réalité des choses dans la mesure où les exigences de la sécurité publique varient, dans le temps et dans l’espace, d’un État à un autre », sont, selon nous, pleinement d’actualité.


37      Voir, par analogie, arrêt du 31 janvier 2006, Commission/Espagne (C‑503/03, EU:C:2006:74, point 45).


38      Voir, par analogie, arrêt du 4 décembre 1974, van Duyn (41/74, EU:C:1974:133, point 18).


39      Voir, par analogie, arrêt du 29 octobre 1998, Commission/Espagne (C‑114/97, EU:C:1998:519, point 46).


40      Conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Commission/Allemagne (C‑220/15, EU:C:2016:534, point 50).


41      Voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2003, Schönheit et Becker (C‑4/02 et C‑5/02, EU:C:2003:583, point 82).


42      Voir arrêt du 13 avril 2010, Bressol e.a. (C‑73/08, EU:C:2010:181, point 65 et jurisprudence citée).

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