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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Exaa Abwicklungsstelle fur Energieprodukte v ACER (Judgment) French Text [2018] EUECJ T-123/17 (20 September 2018) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2018/T12317.html Cite as: EU:T:2018:568, ECLI:EU:T:2018:568, [2018] EUECJ T-123/17 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)
20 septembre 2018 (*)
« Énergie – Décision de la commission de recours de l’ACER – Rejet de la demande en intervention – Intérêt direct et actuel à l’issue de la procédure – Obligation de motivation – Droit d’être entendu »
Dans l’affaire T‑123/17,
Exaa Abwicklungsstelle für Energieprodukte AG, établie à Vienne (Autriche), représentée par Me B. Rajal, avocat,
partie requérante,
contre
Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), représentée par MM. P. Martinet et E. Tremmel, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
soutenue par
République de Pologne, représentée par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,
partie intervenante,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision de la commission de recours de l’ACER, du 17 février 2017, rejetant la demande en intervention de la requérante dans l’affaire A-001-2017 (consolidée),
LE TRIBUNAL (septième chambre),
composé de Mmes V. Tomljenović (rapporteur), président, A. Marcoulli et M. A. Kornezov, juges,
greffier : M. E. Coulon,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 13 novembre 2015, le réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité a publié une proposition de détermination des régions pour le calcul de la capacité de réseau (ci-après la « proposition CCR »), conformément à l’article 15 du règlement (UE) 2015/1222 de la Commission, du 24 juillet 2015, établissant une ligne directrice relative à l’allocation de la capacité et à la gestion de la congestion (JO 2015, L 197, p. 24). Le 17 novembre 2015, les gestionnaires de réseau de transport ont soumis une proposition en vue de la détermination des régions pour le calcul de la capacité aux autorités de régulation nationales pour approbation, en vertu de l’article 9, paragraphe 6, sous b), du règlement 2015/1222.
2 Le 13 mai 2016, l’autorité de régulation nationale autrichienne a demandé aux gestionnaires de réseau de transport de modifier la proposition CCR.
3 Le 17 mai 2016, le président du forum des régulateurs de l’énergie, la plateforme sur laquelle les autorités de régulation nationales se sont consultées et ont coopéré afin de parvenir à un accord sur la proposition CCR, a informé l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER) que les autorités de régulation nationales n’étaient pas parvenues à une décision unanime concernant ladite proposition et que, partant, l’ACER devait prendre une décision concernant la proposition CCR dans un délai de six mois, conformément à l’article 9, paragraphe 11, du règlement 2015/1222 et à l’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) no 713/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, instituant une agence de coopération des régulateurs de l’énergie (JO 2009, L 211, p. 1).
4 Le 17 novembre 2016, l’ACER a adopté la décision no 06/2016, relative à la détermination des régions pour le calcul de la capacité (ci-après la « décision 6/2016 »). L’article 1er et l’annexe I de la décision 6/2016 déterminent les régions pour le calcul de la capacité conformément à l’article 15 du règlement 2015/1222. Selon l’article 2 de la décision 6/2016, la définition des frontières des zones de dépôt des offres, faite à son annexe I, est sans préjudice d’une décision éventuelle, adoptée sur le fondement des articles 32 à 34 du règlement 2015/1222.
5 La décision 6/2016 a fait l’objet de plusieurs recours auprès de la commission de recours de l’ACER, dont celui introduit par Austrian Power Grid AG (ci-après « APG »), enregistré sous la référence A-003-2017.
6 Le 27 janvier 2017, la requérante, Exaa Abwicklungsstelle für Energieprodukte AG, a introduit auprès de la commission de recours de l’ACER une demande en intervention au soutien des conclusions d’APG dans l’affaire A-003-2017.
7 Le 31 janvier 2017, le président de la commission de recours de l’ACER a joint l’affaire A-003-2017 et d’autres affaires engagées contre la décision 6/2016 dans le cadre d’une seule procédure consolidée, enregistrée sous la référence A-001-2017 (consolidée).
8 Le même jour, la commission de recours de l’ACER a transmis la demande en intervention de la requérante notamment à l’« ACER » pour des observations éventuelles.
9 Le 6 février 2017, l’« ACER » a présenté des observations sur la demande en intervention (ci-après les « observations du 6 février 2017 »). Ces observations n’ont pas été communiquées à la requérante.
10 Par décision du 17 février 2017, la commission de recours de l’ACER a rejeté la demande en intervention de la requérante dans l’affaire A-001-2017 (consolidée) (ci-après la « décision attaquée »). En substance, selon la commission de recours de l’ACER, la requérante a fait valoir qu’elle exploitait une bourse de l’électricité en Autriche et a expliqué que la décision 6/2016 avait pour conséquence qu’elle ne pouvait plus effectuer sa vente aux enchères germano-autrichienne de 10 h 15 et qu’elle était dorénavant obligée d’effectuer des ventes aux enchères séparées. En réponse à ces arguments, la commission de recours de l’ACER a considéré que la requérante n’avait pas exposé, premièrement, les raisons pour lesquelles l’augmentation des prix de l’électricité devrait être « attribuée uniquement aux conséquences de la [décision 6/2016] », ni, deuxièmement, les raisons pour lesquelles une annulation de la décision 6/2016 aurait pour résultat un changement immédiat et direct dans la position de la requérante. En outre, la requérante ne serait pas destinataire de la décision 6/2016 et elle ne serait pas juridiquement obligée de la mettre en œuvre. La commission de recours de l’ACER a enfin soutenu qu’il n’avait pas été démontré que la requérante avait « autrement » un intérêt direct et actuel à l’issue de l’affaire.
Procédure et conclusions des parties
11 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 février 2017, la requérante a introduit le présent recours.
12 Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a introduit une demande en référé, en vertu des articles 156 et suivants du règlement de procédure du Tribunal, par laquelle elle a demandé au Tribunal d’ordonner à l’ACER de suspendre la procédure de recours dans l’affaire A‑001‑2017 (consolidée), ou, éventuellement, exclusivement dans l’affaire A‑003‑2017, et d’ordonner toute mesure provisoire qui lui paraîtrait nécessaire ou appropriée. Par ordonnance du 10 avril 2017, Exaa Abwicklungsstelle für Energieprodukte/ACER (T‑123/17 R, non publiée, EU:T:2017:277), le vice-président du Tribunal a rejeté la demande en référé et les dépens ont été réservés.
13 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 14 juin 2017, la République de Pologne a introduit une demande en intervention au soutien des conclusions de l’ACER. Par décision du 13 juillet 2017, le président de la septième chambre du Tribunal a admis, en vertu de l’article 144, paragraphe 4, du règlement de procédure, l’intervention de la République de Pologne.
14 Par décision du 8 juin 2017, le Tribunal a décidé, conformément à l’article 83, paragraphe 1, du règlement de procédure, qu’un deuxième échange de mémoires n’était pas nécessaire en l’espèce. La requérante n’a présenté aucune demande afin de compléter le dossier de l’affaire au sens du paragraphe 2 du même article.
15 Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, le Tribunal a demandé à l’ACER de produire certains documents. L’ACER a répondu à cette mesure d’organisation de la procédure dans le délai imparti. La requérante a été invitée à fournir ses observations écrites sur lesdites réponses. La requérante a répondu dans le délai imparti.
16 Par lettre du greffe du Tribunal en date du 8 mai 2018, les parties ont été informées que le Tribunal avait décidé de statuer sans phase orale de la procédure, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure.
17 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner l’ACER aux dépens.
18 L’ACER conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
19 La République de Pologne conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours.
En droit
20 À l’appui du recours, la requérante invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré d’une prétendue existence d’un intérêt légitime de la requérante à l’issue de la procédure devant la commission de recours de l’ACER. Le deuxième moyen est tiré d’un défaut de motivation de la décision attaquée. Le troisième moyen est tiré d’une violation du droit d’être entendu.
Sur le premier moyen, tiré de l’existence d’un intérêt légitime à l’issue de la procédure devant la commission de recours de l’ACER
21 Premièrement, la requérante soutient, en substance, que la persistance d’une zone de prix unique entre l’Allemagne et l’Autriche dépend de l’issue de la procédure dans l’affaire A-001-2017 (consolidée) devant la commission de recours de l’ACER. Plus spécifiquement, la requérante fait valoir qu’il existe des conséquences directes de l’introduction d’une procédure d’attribution des capacités à la frontière germano-autrichienne et de la suppression de la zone de prix unique qui en découle sur ses activités en tant que bourse de l’électricité autrichienne. Les intérêts économiques et financiers dont la commission de recours de l’ACER a fait état dans la décision attaquée n’étaient pas, selon la requérante, de nature à dénier l’existence de son intérêt légitime. En effet, la requérante aurait fondé sa demande en intervention sur la restriction directe de son activité économique du fait de la décision 6/2016.Deuxièmement, la requérante estime qu’elle a le droit de participer à toute procédure qui touche à la sphère de ses intérêts et d’être entendue dans le cadre de cette dernière, droit consacré par l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et que le rejet de la demande en intervention constitue, dès lors, une violation de cet article.
22 L’ACER, soutenue par la République de Pologne, conteste ces arguments. L’ACER estime notamment que la requérante n’a pas suffisamment prouvé l’existence d’un intérêt légitime ou des faits sous-jacents. Selon l’ACER, la requérante n’a produit aucune preuve des effets allégués de la décision 6/2016 et d’une attribution des capacités à la frontière germano-autrichienne sur son activité commerciale et sur sa vente aux enchères germano-autrichienne de 10 h 15.
23 L’article 19, paragraphe 6, du règlement no 713/2009 énonce que la commission de recours de l’ACER adopte son règlement intérieur. Sur ce fondement, la commission de recours de l’ACER a adopté la décision BoA no 1‑2011 portant sur le règlement de l’organisation et de la procédure de la commission de recours de l’ACER (ci-après la « décision 1/2011 »). L’article 11 de la décision 1/2011 prévoit des conditions dans le respect desquelles une personne physique ou morale peut demander à intervenir au cours des procédures engagées devant la chambre de recours de l’ACER.
24 Selon l’article 11, paragraphe 1, de la décision 1/2011, dans sa version applicable à partir du 19 mai 2016, qui est celle pertinente en l’espèce, toute personne qui justifie d’un intérêt à la solution d’une affaire soumise à la commission de recours de l’ACER peut intervenir dans l’affaire en cause. Le paragraphe 7 du même article prévoit que la commission de recours de l’ACER statue sur la demande en intervention.
25 À cet égard, dans ses observations sur les documents produits par l’ACER en réponse aux mesures d’organisation de la procédure, la requérante soutient, en substance, que l’article 11, paragraphe 1, de la décision 1/2011 dans sa version applicable avant le 26 novembre 2017 n’exigeait pas l’existence d’un intérêt direct et actuel, mais seulement de démontrer un « intérêt justifié ».
26 Il y a lieu de considérer que la notion d’« intérêt à la solution de l’affaire », au sens de ladite disposition, doit se définir au regard de l’objet même de l’affaire et s’entendre comme étant un intérêt direct et actuel au sort réservé aux conclusions elles-mêmes qui ont été avancées devant la commission de recours de l’ACER, et non comme un intérêt eu égard aux arguments soulevés. En effet, les termes « solution de l’affaire » renvoient à la décision finale demandée, telle qu’elle serait consacrée dans le dispositif de la décision de la commission de recours de l’ACER à intervenir. Il convient, notamment, de vérifier si l’intervenant est touché directement par l’acte attaqué et si son intérêt à la solution de l’affaire est certain. En principe, un intérêt à la solution de l’affaire ne saurait être considéré comme suffisamment direct que dans la mesure où cette solution serait de nature à modifier la position juridique du demandeur en intervention (voir, par analogie, ordonnance du 14 novembre 2016, E-Control/ACER, T‑63/16, non publiée, EU:T:2016:664, point 16 et jurisprudence citée).
27 De plus, il convient d’établir une distinction entre les demandeurs en intervention, justifiant d’un intérêt direct au sort réservé à l’acte spécifique dont l’annulation est demandée, et ceux qui ne justifient que d’un intérêt indirect à la solution de l’affaire, en raison de similarités entre leur situation et celle d’une des parties (voir, par analogie, ordonnance du 14 novembre 2016, E-Control/ACER, T‑63/16, non publiée, EU:T:2016:664, point 17 et jurisprudence citée).
28 Par ailleurs, il incombe au demandeur en intervention d’apporter les éléments nécessaires pour prouver qu’il satisfait aux conditions exposées au point 26 ci-dessus (voir, par analogie, ordonnance du 14 novembre 2016, E-Control/ACER, T‑63/16, non publiée, EU:T:2016:664, point 18 et jurisprudence citée).
29 Il y a lieu de constater que la commission de recours de l’ACER a fondé la décision attaquée sur le constat qu’il incombait à la requérante d’apporter les éléments nécessaires pour prouver son intérêt direct et actuel à la solution de l’affaire A-001-2017 (consolidée) devant la commission de recours de l’ACER et qu’elle n’avait pas démontré que l’annulation de la décision 6/2016 aurait abouti à une modification directe de sa « position ». Elle a donc considéré que la requérante n’avait pas apporté la preuve de son intérêt à la solution de l’affaire A-001-2017 (consolidée) en ce qui concerne les conclusions d’APG.
30 En effet, il convient de constater que les seules annexes fournies par la requérante dans le cadre de la demande en intervention devant la commission de recours de l’ACER étaient un mandat de ses représentants et un extrait du registre commercial autrichien (Firmenbuchauszug). Ce dernier n’a été présenté qu’aux fins de prouver l’existence juridique de la requérante. Cet extrait du registre commercial autrichien ne figure pas dans le dossier devant le Tribunal et rien dans ce dossier n’indique que ces documents auraient contenu une quelconque information susceptible de démontrer un intérêt direct et actuel de la requérante à la solution de l’affaire A-001-2017 (consolidée) devant la commission de recours de l’ACER.
31 Par ailleurs, il y a lieu de faire observer que la requérante a fourni au Tribunal un extrait du registre commercial autrichien qui concerne sa situation entre le 28 juin 2016 et le 27 février 2017. La seule indication potentiellement pertinente, en l’espèce, dans ce document est la référence au nom de la société, contenant l’ajout « Abwicklungsstelle für Energieprodukte », qui indique que l’activité économique de la requérante concerne notamment le règlement et la compensation des produits d’énergie. Toutefois, cette indication ne démontre pas que la requérante était active sur les marchés autrichien et allemand ou que son activité était de nature transfrontalière au sein de la zone germano-autrichienne de dépôt d’offres. Par conséquent, cet extrait ne contient pas non plus d’information susceptible de démontrer un intérêt direct et actuel de la requérante à la solution de l’affaire A-001-2017 (consolidée) devant la commission de recours de l’ACER.
32 Dès lors, aucun des éléments de preuve figurant au dossier devant le Tribunal ne démontre que la requérante ait justifié un quelconque intérêt à la solution de l’affaire A-001-2017 (consolidée) devant la commission de recours de l’ACER.
33 Il s’ensuit que la requérante a fait valoir dans sa demande en intervention devant la commission de recours de l’ACER qu’elle avait un intérêt à la solution de l’affaire sans pourtant fournir une quelconque preuve à l’appui de ses affirmations. S’agissant des affirmations faites dans le cadre de la requête dans la présente affaire, la requérante n’a notamment pas apporté d’éléments de preuve qui indiquent qu’elle exploitait une bourse de l’électricité dont le modèle commercial était fondé sur un marché unique de l’électricité formé par l’Autriche et l’Allemagne, qu’elle organisait des ventes aux enchères intégrées ou que ses produits boursiers étaient adaptés à un marché commun de l’électricité.
34 De plus, dans la mesure où la requérante invoque la violation de son droit à participer à toute procédure qui touche à la sphère de ses intérêts et de son droit d’être entendue dans le cadre de cette dernière, il suffit de constater que ces droits ne sont pas absolus et qu’ils ne remettent donc pas en cause le fait que, comme en l’espèce, la requérante est tenue de prouver l’existence d’un intérêt direct et actuel à la solution de l’affaire devant la commission de recours de l’ACER avant que ne lui soit accordé le droit de participer à la procédure en tant qu’intervenante.
35 C’est donc à bon droit que la commission de recours de l’ACER a constaté dans la décision attaquée que la requérante n’avait pas démontré de la façon requise par la jurisprudence exposée au point 28 ci-dessus qu’elle disposait d’un intérêt à la solution de l’affaire A-001-2017 (consolidée) en ce qui concerne les conclusions d’APG.
36 Ce constat suffit à lui seul pour conclure que le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé, sans qu’il soit utile d’examiner les autres arguments soulevés par la requérante dans le cadre de ce moyen.
Sur le deuxième moyen, tiré d’un défaut de motivation
37 En substance, dans le cadre du deuxième moyen, la requérante estime que la motivation de la décision attaquée est « tellement erronée » que cela peut être assimilé à un défaut de motivation.
38 L’ACER conteste ces arguments.
39 En vertu de l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la charte des droits fondamentaux, il incombe à l’administration de motiver ses décisions.
40 Il ressort d’une jurisprudence constante que la motivation, exigée également par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 29 juin 2017, E-Control/ACER, T‑63/16, non publié, EU:T:2017:456, point 68 et jurisprudence citée).
41 Toutefois, il ne saurait être exigé d’une commission de recours qu’elle fournisse un exposé qui suivrait exhaustivement un par un tous les raisonnements présentés par les parties devant elle. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la commission de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir arrêt du 29 juin 2017, E-Control/ACER, T‑63/16, non publié, EU:T:2017:456, point 69 et jurisprudence citée).
42 D’ailleurs, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (voir arrêt du 22 mai 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑17/09, non publié, EU:T:2012:243, point 40 et jurisprudence citée).
43 En l’espèce, s’il est certainement regrettable que la motivation de la décision se limite à des affirmations de nature plutôt générale, il en découle néanmoins de façon suffisamment cohérente que la commission de recours de l’ACER a fondé sa décision sur le constat qu’il incombait à la requérante d’apporter les éléments nécessaires pour prouver son intérêt direct et actuel à la solution de l’affaire A-001-2017 (consolidée) devant la commission de recours de l’ACER et qu’elle n’avait pas démontré que l’annulation de la décision 6/2016 aurait abouti à une modification directe de sa « position ». Ce constat permettait à la requérante de connaître les raisons pour lesquelles, par la décision attaquée, la commission de recours de l’ACER avait rejeté sa demande en intervention et au Tribunal d’exercer son contrôle. Ainsi qu’il a été exposé aux points 35 et 36 ci-dessus, ce constat, en soi, suffisait pour rejeter la demande en intervention de la requérante dans le cadre de l’affaire A-001-2017 (consolidée).
44 Ce constat ne peut être remis en cause par le fait que la requérante conteste le bien-fondé de certains motifs exposés dans la décision attaquée. En effet, l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (voir arrêt du 22 mai 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑17/09, non publié, EU:T:2012:243, point 40 et jurisprudence citée). Il convient donc de rejeter l’argument de la requérante selon lequel la commission de recours de l’ACER avait cité, en tant qu’activité commerciale pertinente, l’achat d’électricité sur le marché de l’électricité, alors que son activité commerciale ne consistait pas en l’achat d’énergie sur le marché de l’électricité. De plus, la requérante ne démontre aucun défaut de motivation de la décision attaquée par son argument selon lequel la commission de recours de l’ACER aurait également fondé sa motivation sur des arguments qui, selon elle, n’avaient pas été soulevés en tant que tels dans sa demande en intervention, à savoir, notamment, le constat selon lequel des prix plus élevés et des intérêts financiers n’étaient pas suffisants pour étayer l’existence d’un intérêt légitime à l’issue de la procédure.
45 Dans la mesure où la requérante soutient que la motivation de la décision attaquée est en contradiction avec l’argumentation faite dans la demande en intervention, il suffit de rappeler que le seul fait qu’il n’a pas été fait droit aux demandes de la requérante ne signifie pas que ses observations n’ont pas été examinées par la commission de recours de l’ACER.
46 Partant, il convient de rejeter le deuxième moyen comme étant non fondé.
Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du droit d’être entendu
47 La requérante fait valoir que, dans le cadre de la procédure devant la chambre de recours, l’ACER a présenté les observations du 6 février 2017 sur sa demande en intervention et que le fait que celles-ci n’ont pas été portées à sa connaissance violerait son droit d’être entendue. La requérante considère que, en l’absence de cette violation, elle aurait pu réfuter les arguments invoqués par des contre-arguments correspondants, ce qui aurait amené la commission de recours de l’ACER à faire droit à sa demande en intervention.
48 L’ACER conteste ces arguments.
49 Force est de constater que l’article 11, paragraphe 6, de la décision 1/2011 prévoyait, dans sa version applicable à partir du 19 mai 2016, qui est celle pertinente en l’espèce, que le greffier de la commission de recours de l’ACER était tenu de communiquer, sans délai, une éventuelle demande en intervention aux parties au litige.
50 À cet égard, il convient de préciser que la décision 1/2011 ne prévoyait pas que la commission de recours de l’ACER était obligée d’inviter une partie ou un autre service de l’ACER à fournir des observations ou de communiquer de telles observations éventuelles au demandeur en intervention, ni que ce dernier pouvait présenter des remarques sur les observations éventuelles soumises par les autres parties au litige sur sa demande en intervention.
51 Toutefois, l’article 41, paragraphe 2, sous a) et b), de la charte des droits fondamentaux énonce que le droit à une bonne administration comporte notamment le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre et le droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne, dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires.
52 Or, il y a lieu de constater que, s’agissant de l’absence de communication d’un document du dossier administratif, il incombe à la requérante d’établir que sa non-divulgation a pu influencer, à son détriment, le déroulement de la procédure et le contenu de la décision de la commission de recours de l’ACER (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2017, Intel/Commission, C‑413/14 P, EU:C:2017:632, point 96 et jurisprudence citée).
53 En l’espèce, sans qu’il soit nécessaire de trancher la question de savoir si la commission de recours de l’ACER était obligée, au titre de l’accès au dossier, de communiquer les observations du 6 février 2017 à la requérante, il suffit de constater que, dans les motifs de la décision attaquée, la commission de recours de l’ACER n’a pas utilisé lesdites observations. En effet, dans les motifs de la décision attaquée, la chambre de recours de l’ACER ne s’est appuyée que sur des affirmations faites, selon elle, par la requérante dans le cadre de sa demande en intervention.
54 Étant donné que, dans la décision attaquée, les observations du 6 février 2017 n’ont donc pas servi de base pour le rejet de la demande en intervention de la requérante, le seul fait que cette dernière considérait qu’elle aurait pu réfuter les arguments invoqués dans lesdites observations par des contre-arguments correspondants n’est pas susceptible de démontrer que la non-divulgation desdites observations ait pu influencer, au détriment de la requérante, le déroulement de la procédure et le contenu de la décision de la commission de recours de l’ACER.
55 Dans de telles circonstances, il ne peut pas être reproché à la commission de recours de l’ACER d’avoir méconnu le droit d’accès au dossier de la requérante en n’ayant pas communiqué les observations du 6 février 2017 à celle-ci avant l’adoption de la décision attaquée. De même, le droit d’être entendu de la requérante n’a pas été enfreint, puisqu’elle était en mesure de faire valoir tous les éléments utiles afin de démontrer son intérêt à la solution de l’affaire lors de l’introduction de sa demande en intervention et a donc été entendue par la commission de recours de l’ACER en ses arguments.
56 Il s’ensuit qu’il convient de rejeter également le troisième moyen et, par conséquent, le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
57 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il convient de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de l’ACER, conformément aux conclusions de cette dernière, y compris ceux afférents à la procédure en référé.
58 Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, la République de Pologne supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Exaa Abwicklungsstelle für Energieprodukte AG supportera ses propres dépens, ainsi que ceux de l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), y compris ceux afférents à la procédure en référé.
3) La République de Pologne supportera ses propres dépens.
Tomljenović | Marcoulli | Kornezov |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 septembre 2018.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.
© European Union
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