SE v Council (Staff Regulations of officials and Conditions of Employment of other servants : Judgment) French Text [2018] EUECJ T-231/17 (16 January 2018)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2018/T23117.html
Cite as: [2018] EUECJ T-231/17, ECLI:EU:T:2018:3, EU:T:2018:3

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ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

16 janvier 2018 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Rémunération – Allocations familiales – Article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut – Notion d’“enfant à charge” – Notion d’“enfant à l’égard duquel le fonctionnaire a une obligation alimentaire résultant d’une décision judiciaire fondée sur la législation d’un État membre concernant la protection des mineurs” – Refus d’accorder le statut d’enfant à charge à la petite-fille du fonctionnaire »

Dans l’affaire T‑231/17,

SE, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, représenté par Me N. de Montigny, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Bauer et R. Meyer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation de la décision du Conseil, du 22 juin 2016, par laquelle l’autorité investie du pouvoir de nomination de cette institution a refusé de reconnaître que la petite-fille du requérant était un « enfant à charge » de ce dernier au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de Mme I. Pelikánová, président, MM. P. Nihoul et J. Svenningsen (rapporteur), juges,

greffier : Mme M. Marescaux, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 15 novembre 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, SE, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne [confidentiel], a cinq enfants à charge au sens de l’article 2 de l’annexe VII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), lequel se lit comme suit :

« 1. Le fonctionnaire ayant un ou plusieurs enfants à charge bénéficie, dans les conditions énumérées aux paragraphes 2 et 3, d’une allocation d’un montant de [397,29 euros] par mois pour chaque enfant à sa charge.

2. Est considéré comme enfant à charge, l’enfant légitime, naturel ou adoptif du fonctionnaire ou de son conjoint, lorsqu’il est effectivement entretenu par le fonctionnaire.

Il en est de même de l’enfant ayant fait l’objet d’une demande d’adoption et pour lequel la procédure d’adoption a été engagée.

Tout enfant à l’égard duquel le fonctionnaire a une obligation alimentaire résultant d’une décision judiciaire fondée sur la législation d’un État membre concernant la protection des mineurs est considéré comme un enfant à charge.

3. L’allocation est accordée :

a) d’office, pour l’enfant qui n’a pas encore atteint l’âge de 18 ans ;

b) sur demande motivée du fonctionnaire intéressé, pour l’enfant âgé de 18 ans à 26 ans qui reçoit une formation scolaire ou professionnelle.

4. Peut être exceptionnellement assimilée à l’enfant à charge par décision spéciale et motivée de l’autorité investie du pouvoir de nomination, prise sur la base de documents probants, toute personne à l’égard de laquelle le fonctionnaire a des obligations alimentaires légales et dont l’entretien lui impose de lourdes charges.

[…] »

2        L’un des enfants à charge du requérant, en l’occurrence sa fille alors âgée de 19 ans et étudiant en Allemagne, a eu un enfant le 27 décembre 2015.

3        Par acte du 22 janvier 2016, la fille du requérant a, au nom de son enfant mineure, demandé à l’Amtsgericht Freiburg im Breisgau – Familien Gericht (tribunal de district de Fribourg-en-Brisgau, section des affaires familiales, Allemagne) (ci-après le « tribunal de district ») de condamner le requérant, en sa qualité de grand-père, au paiement d’une allocation d’entretien pour enfant (Kindesunterhalt) à hauteur de 361 euros mensuel sur le fondement de l’article 1606 du Bürgerliches Gesetzbuch (BGB, code civil allemand) aux termes duquel :

« 1. Les descendants supportent l’obligation d’entretien avant les parents de la ligne descendante.

2. Entre les descendants et entre les parents de la ligne ascendante, les plus proches sont tenus avant les plus éloignés.

3. Plusieurs parents de même proximité sont respectivement tenus selon leur situation professionnelle et leur situation de fortune. Le père ou la mère qui a en charge un enfant mineur remplit normalement son obligation de contribuer à l’entretien de l’enfant par les soins qu’il lui donne et l’éducation qu’il lui assure. »

4        À l’appui de la demande faite au nom de la petite-fille du requérant, était invoqué le fait que le père de l’enfant ne l’avait pas reconnue et que la fille du requérant, dont cet enfant dépendait exclusivement, ne disposait pas, en tant qu’étudiante en Allemagne, de ressources financières propres. Ainsi, étant donné que, bien que bénéficiaire d’allocations familiales nationales, la mère de l’enfant ne pouvait pas subvenir aux besoins de son enfant, il aurait incombé au requérant, en sa qualité de grand-père, de supporter les coûts d’entretien de l’enfant au titre de l’article 1606 du BGB.

5        Il était également indiqué, dans la requête d’instance présentée devant le tribunal de district, d’une part, que le requérant s’était déclaré prêt à payer une pension alimentaire à sa petite-fille à la condition toutefois que cette juridiction estimât fondée la demande faite au nom de sa petite-fille et, d’autre part, que c’était finalement pour cette raison que la demande avait été présentée devant le tribunal de district.

6        Par jugement du 30 mai 2016, le tribunal de district a condamné le requérant à payer à sa petite-fille une pension alimentaire de 240 euros mensuels à compter du mois de janvier 2016 (ci-après le « jugement national litigieux »).

7        Par courriel du 13 juin 2016, le requérant a demandé à l’autorité investie du pouvoir de nomination du Conseil (ci-après l’« AIPN ») de considérer sa petite-fille comme étant un « enfant à [sa] charge » au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, en ce qu’il aurait, à l’égard de cet enfant, une obligation alimentaire résultant d’une décision judiciaire fondée sur la législation d’un État membre concernant la protection des mineurs, obligation résultant en l’occurrence du jugement national litigieux.

8        Par décision du 22 juin 2016 (ci-après la « décision attaquée »), l’AIPN a rejeté cette demande en considérant que le jugement national litigieux ne constituait pas une décision judiciaire prise au titre d’une législation nationale d’un État membre relative à la protection des mineurs. Par ailleurs, sans préjuger sa position définitive sur ce point, l’AIPN a expliqué au requérant qu’elle avait examiné la possibilité d’assimiler sa petite-fille à un enfant à charge, en l’occurrence au titre de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, mais que, au regard des critères posés par l’AIPN dans la décision du Conseil du 29 avril 2004 « portant adoption des dispositions générales d’exécution en matière de personne assimilée à l’enfant à charge (article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du [s]tatut) », il apparaissait, à première vue, que la condition selon laquelle « l’assimilation ne [pourrait] être accordée que si la charge financière découlant de l’obligation alimentaire légale [était] au moins égale au montant qui résulte[rait] de l’octroi de cette assimilation » n’était pas remplie.

9        Par lettre du 19 septembre 2016, le requérant a, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation contre la décision attaquée. À l’appui de cette réclamation, il invoquait, formellement, une erreur de droit de l’AIPN, une erreur d’appréciation et d’interprétation de l’article 2 de l’annexe VII du statut de même que la violation du principe de bonne administration. À cet égard, il a notamment expliqué que, en droit allemand, il existait une obligation alimentaire d’entretien entre les ascendants et les descendants en ligne directe et que le jugement national litigieux, déclarant le requérant débiteur d’un devoir d’assistance et de secours vis-à-vis de sa petite-fille, était fondé sur le principe de la protection des mineurs. En particulier, le requérant expliquait que, selon lui, les articles 1601 et suivants du BGB étaient des dispositions qui visaient non seulement la protection des mineurs, mais également la protection de tout enfant, même majeur, qui se trouverait dans le besoin et dont la formation professionnelle ne serait pas terminée. Ainsi, le jugement national litigieux aurait revêtu un « caractère protecteur du mineur » au sens statutaire.

10      Par décision du 24 janvier 2017 (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »), le secrétaire général du Conseil a, en sa qualité d’AIPN, rejeté la réclamation en soulignant que, contrairement à ce qu’exigeait l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, l’obligation alimentaire visée aux articles 1601 et suivants du BGB ne nécessitait pas nécessairement l’intervention d’une décision judiciaire aux fins de son application et que, en tout état de cause, le jugement national litigieux n’était pas fondé sur la « législation d’un État membre concernant la protection des mineurs ».

11      En effet, selon l’AIPN, s’appuyant à cet égard sur les travaux préparatoires au règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO 2004, L 124, p. 1) ayant conduit à l’insertion d’un troisième alinéa dans l’article 2, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut, le législateur de l’Union européenne aurait entendu couvrir, sous la notion de « législation d’un État membre concernant la protection des mineurs », les seules législations nationales spécifiquement prévues en matière de protection de la jeunesse, telles que celles régissant le placement d’enfants en famille d’accueil ou la mise sous tutelle, législations sur le fondement desquelles un juge national peut être amené à prononcer, à l’égard d’un tiers, l’obligation d’entretenir un mineur qui doit être protégé. En revanche, le législateur de l’Union n’aurait pas entendu viser les dispositions nationales concernant, de manière générale, la solidarité familiale entre les membres d’une même famille en ligne directe.

12      Selon l’AIPN, l’obligation alimentaire subsidiaire envers la descendante du requérant existait de jure au titre du BGB. Elle serait certes devenue exécutoire à l’aide d’une décision d’un tribunal, en l’occurrence le jugement national litigieux. Cependant, l’adoption de ce jugement n’aurait été que le résultat des démarches judiciaires engagées au nom de la petite-fille du requérant au prétendu motif que ce dernier n’aurait volontairement pas exécuté les obligations civiles de soutien matériel qui lui auraient incombé envers sa petite-fille. En outre, le jugement national litigieux n’aurait aucunement remis en cause la responsabilité parentale à laquelle resterait entièrement tenue la mère de cette enfant.

 Procédure et conclusions des parties

13      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 avril 2017, le requérant a introduit le présent recours.

14      Le Tribunal n’ayant pas estimé qu’un second échange de mémoires était nécessaire et en l’absence de demande formulée au titre de l’article 83, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, la procédure écrite a été clôturée le 14 août 2017.

15      À la demande du requérant formulée au titre de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure, et sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

16      Par lettre du greffe du Tribunal du 5 octobre 2017, les parties ont été invitées à déférer à des mesures d’organisation de la procédure adoptées par le Tribunal au titre de l’article 89, paragraphe 3, sous a) et d), et de l’article 90, paragraphe 1, du règlement de procédure. Elles ont répondu aux questions posées par le Tribunal à ce titre et fourni les documents qui leur étaient demandés dans les délais impartis.

17      Par lettre du greffe du Tribunal du 5 octobre 2017, la Commission européenne a pour sa part été invitée par le Tribunal, au titre de l’article 24, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 89, paragraphe 3, sous c), du règlement de procédure, à indiquer au Tribunal si l’autorité investie du pouvoir de nomination de cette institution limitait l’application de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut aux seuls cas dans lesquels le fonctionnaire ou agent produisait une décision judiciaire adoptée sur le fondement d’une législation nationale spécifiquement prévue en matière de protection de la jeunesse, telle que celles régissant le placement d’enfants en famille d’accueil ou la mise sous tutelle. Par ailleurs, la Commission était priée d’indiquer si elle avait déjà reconnu comme étant un « enfant à charge » le petit-fils ou la petite-fille d’un fonctionnaire ou d’un agent sur le fondement de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut et, dans l’affirmative, si elle avait déjà procédé à une telle assimilation sur la base d’un jugement adopté sur le fondement de la législation d’un État membre relative à la solidarité familiale entre ascendants et descendants. La Commission a déféré à cette demande d’informations dans le délai imparti.

18      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries lors de l’audience du 15 novembre 2017.

19      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et, pour autant que de besoin, la décision de rejet de la réclamation ;

–        déclarer que sa petite-fille est à sa charge, au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, depuis le 13 juin 2016 ;

–        reconnaître à sa petite-fille le bénéfice du régime commun d’assurance maladie de l’Union européenne (ci-après le « RCAM ») à compter du 13 juin 2016 ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

20      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur le premier chef de conclusions, en ce qu’il tend à l’annulation de la décision de rejet de la réclamation

21      Selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée lorsqu’elles sont, en tant que telles, dépourvues de contenu autonome (voir, en ce sens, arrêts du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, EU:C:1989:8, point 8, et du 26 mars 2015, CW/Parlement, F‑41/14, EU:F:2015:24, point 40).

22      En l’espèce, étant donné que la décision de rejet de la réclamation ne fait que confirmer le refus de l’AIPN de considérer, dans la décision attaquée, la petite-fille du requérant comme étant un « enfant à charge » au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, il y a lieu de constater que les conclusions en annulation de la décision de rejet de la réclamation sont dépourvues de contenu autonome et qu’il n’y a donc pas lieu de statuer spécifiquement sur celles-ci, même si, dans l’examen de la légalité de la décision attaquée, il conviendra de prendre en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation, cette motivation étant censée coïncider avec celle de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 9 décembre 2009, Commission/Birkhoff, T‑377/08 P, EU:T:2009:485, points 58 et 59 et jurisprudence citée).

 Sur le premier chef de conclusions, en ce qu’il tend à l’annulation de la décision attaquée

23      À l’appui des conclusions en annulation de la décision attaquée, le requérant soulève formellement trois moyens, tirés, respectivement, premièrement, d’une erreur de droit et d’une erreur d’appréciation ainsi que d’une erreur d’interprétation de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut ; deuxièmement, de la violation du principe de bonne administration et, troisièmement, de la violation de l’article 24 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

24      Lors de l’audience, le requérant a indiqué que le moyen tiré de la violation du principe de bonne administration devait être inclus dans celui tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, de sorte que le requérant ne soulève finalement que deux moyens.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur de droit, d’une erreur d’appréciation, d’une erreur d’interprétation de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut et d’une violation du principe de bonne administration

25      À l’appui du premier moyen, le requérant fait valoir que, dès lors que ce sont les articles 1601 et suivants du BGB qui lui imposent de veiller à l’entretien de sa fille et de sa petite-fille, l’AIPN ne pouvait pas contester que l’obligation financière à laquelle il était tenu vis-à-vis de sa petite-fille consistait en une obligation alimentaire légale. Dans la mesure où les articles 1601 et suivants du BGB, sur le fondement desquels a été rendu le jugement national litigieux, visent non seulement la protection des mineurs, mais également la protection de tout enfant, même majeur, qui est dans le besoin et dont la formation professionnelle n’est pas achevée, le requérant estime que l’AIPN ne pouvait pas non plus « dénier le caractère protecteur du mineur de la décision [le] condamnant […] à assumer et entretenir [sa petite-fille] ».

26      Le requérant conteste le constat de l’AIPN selon lequel l’obligation alimentaire à laquelle il a été condamné par le tribunal de district ne « résult[erait pas] d’une décision judiciaire » au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut. S’il reconnaît qu’un fonctionnaire est légalement tenu d’entretenir son enfant ou ses petits-enfants, il fait toutefois valoir que, du vivant des parents, une obligation alimentaire à l’égard des petits-enfants n’est pas automatiquement constatée par le juge en vertu du droit allemand et doit, au contraire, être soumise au juge afin que ce dernier évalue l’état de besoin réel du petit-fils ou de la petite-fille. En définitive, selon le requérant, « toute procédure judiciaire visant l’octroi de pensions alimentaires est nécessairement basée sur une disposition légale préexistante imposant l’obligation dans le chef d’une partie de subvenir aux besoins de l’autre ».

27      Dans ce contexte, le requérant souligne que, dans les faits, le montant de l’obligation financière à laquelle il est soumis irait au-delà du montant qu’il est tenu, en application du jugement national litigieux, d’acquitter mensuellement à sa fille qui assume la gestion des finances de sa petite-fille jusqu’à sa majorité. En effet, certaines dépenses ne seraient pas couvertes par le montant de cette pension alimentaire et, globalement, il subviendrait à tous les besoins de sa fille et de sa petite-fille, notamment les frais d’entretien, de nourriture, de lessive, de voyage ainsi que les soins de santé et d’assurance maladie. Dans ces conditions, il devrait être reconnu que sa petite-fille est à sa charge au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut.

28      S’agissant de la position de l’AIPN selon laquelle l’obligation alimentaire en cause ne résulterait pas d’une décision judiciaire « fondée sur la législation d’un État membre concernant la protection des mineurs », le requérant fait valoir que l’interprétation proposée par le Conseil de cette notion statutaire contrevient à l’esprit et à la lettre de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut. En effet, rien n’indiquerait dans le statut que cette notion ne viserait que les décisions judiciaires de placement sous tutelle ou de placement dans une famille d’accueil. Si telle avait été l’intention du législateur de l’Union, il aurait expressément limité la portée de cette notion à ces seules situations en exigeant que le fonctionnaire ait la « garde » de l’enfant ou l’« autorité sur l’enfant » plutôt que de recourir, dans le libellé de cette disposition, à la notion d’« enfant à charge ». En tout état de cause, l’objectif de cette disposition serait « [d’]assurer que l’enfant dans le besoin soit effectivement assumé par le fonctionnaire qui en a la charge légale automatique en tant que parent et, s’il n’en est pas le parent, que cette charge ait été consacrée par décision judiciaire ». Cette disposition n’exigerait toutefois pas que le fonctionnaire concerné exerce exclusivement la responsabilité de l’entretien de l’enfant ni même l’autorité parentale. Le requérant en tient pour preuve, tel qu’il l’a évoqué lors de l’audience, le fait que, nonobstant la formulation de la proposition originale relative à l’ajout du troisième alinéa à l’article 2, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut et la circonstance que le verbe « confier » soit utilisé à l’article 2, paragraphe 7, de l’annexe VII du statut, le législateur de l’Union n’a pas souhaité exiger, dans le libellé du troisième alinéa de cet article 2, paragraphe 2, que la garde de l’enfant soit « confiée » au fonctionnaire ou agent.

29      En tout état de cause, dans les faits, le requérant assumerait une tutelle financière sur sa petite-fille et il prétend, sans invoquer un moyen spécifique à cet égard, que, conformément à la conclusion no 223/04 révisée, du 30 janvier 2013, du collège des chefs d’administration de l’Union, sa petite-fille ne percevrait pas de revenus et, partant, ne percevrait aucun revenu supérieur au plafond fixé dans ladite conclusion.

30      Le Conseil conclut au rejet de l’argumentation du requérant comme étant non fondée.

31      À titre liminaire, il convient de constater que, dans la situation de l’espèce, le traitement du premier moyen soulevé par le requérant implique, d’une part, de déterminer si l’AIPN a commis une erreur de droit en refusant de considérer, au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, que l’obligation alimentaire à laquelle était tenu le requérant, telle qu’elle a été déterminée dans le jugement national litigieux, constituait une obligation alimentaire « résultant d’une décision judiciaire » et, d’autre part, le cas échéant, d’apprécier si le jugement national litigieux est « fondé sur une législation d’un État membre concernant la protection des mineurs ».

32      Selon le requérant, en exigeant que l’obligation alimentaire « découle d’une décision judiciaire », le libellé de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut pourrait être interprété, de manière large, comme visant une situation, telle que celle de l’espèce, dans laquelle, en vertu de la législation d’un État membre, un fonctionnaire est tenu à une obligation de solidarité familiale, laquelle a été constatée par une décision judiciaire nationale, telle que le jugement national litigieux. De la même manière, l’exigence, figurant dans cette disposition, selon laquelle la décision judiciaire, dont résulte l’obligation alimentaire, doit être fondée sur la législation d’un État membre concernant la protection des mineurs pourrait être interprétée, de manière large, comme couvrant également des décisions judiciaires fondées sur des dispositions générales d’un État membre, telles que celles du BGB.

33      À cet égard, il y a lieu de constater que les différentes versions linguistiques de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut présentent des divergences. En effet, tandis que la version allemande de cette disposition utilise le terme « Unterhalt » (obligation d’entretien), la version anglaise recourt aux termes « responsability to maintain » (obligation d’entretenir l’enfant), alors que la version française se réfère à une « obligation alimentaire ».

34      Or, dans une telle situation de divergences entre les différentes versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union, celle-ci doit être interprétée, non seulement au regard des termes de celle-ci, mais également en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément (voir arrêt du 29 avril 2004, Plato Plastik Robert Frank, C‑341/01, EU:C:2004:254, point 64 et jurisprudence citée) ainsi qu’en fonction tant de la volonté réelle de son auteur que du but poursuivi par ce dernier (arrêts du 12 novembre 1969, Stauder, 29/69, EU:C:1969:57, point 3, et du 7 juillet 1988, Moksel/BALM, 55/87, EU:C:1988:377, point 15).

35      Ainsi, l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut doit être interprété en fonction tant de la finalité que de l’économie générale de la réglementation concernant l’assimilation d’une personne à un « enfant à charge », en l’occurrence l’article 2 dans son entièreté (arrêt du 21 novembre 1974, Moulijn/Commission, 6/74, EU:C:1974:129, point 11).

36      Par ailleurs, il y a également lieu de tenir compte du fait que les dispositions du droit de l’Union qui donnent droit à des prestations financières doivent être interprétées strictement (arrêt du 8 mars 1990, Schwedler/Parlement, T‑41/89, EU:T:1990:19, point 23, confirmé par arrêt du 28 novembre 1991, Schwedler/Parlement, C‑132/90 P, EU:C:1991:452, point 27, ainsi que arrêts du 30 novembre 1994, Dornonville de la Cour/Commission, T‑498/93, EU:T:1994:278, point 38, et du 16 décembre 2004, Pappas/Commission, T‑11/02, EU:T:2004:368, point 53) et que tel doit également être le cas de l’assimilation d’une personne à un « enfant à charge » au sens du statut (voir, par analogie, arrêt du 21 novembre 1974, Moulijn/Commission, 6/74, EU:C:1974:129, point 13).

37      À cet égard, il convient de relever que l’article 2, paragraphe 2, premier et troisième alinéas, et l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut visent, respectivement, trois groupes distincts d’enfants ou de personnes pouvant être reconnus comme étant des « enfants à charge » au sens du statut.

38      En effet, premièrement, les enfants légitimes, naturels, adoptifs ou en cours d’adoption d’un fonctionnaire ou de son conjoint sont considérés comme des « enfants à charge » à la condition qu’ils soient « effectivement entretenu[s] par le fonctionnaire » au titre de l’article 2, paragraphe 2, premier alinéa, de l’annexe VII du statut. Deuxièmement, sont également considérés comme des « enfants à charge », au titre de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, les enfants à l’égard desquels, bien que n’étant pas les enfants légitimes, naturels ou adoptifs du fonctionnaire ou de son conjoint, le fonctionnaire a « une obligation alimentaire résultant d’une décision judiciaire fondée sur la législation d’un État membre concernant la protection des mineurs ». Enfin, troisièmement, à titre exceptionnel et sur décision motivée de l’autorité investie du pouvoir de nomination de l’institution, de l’organe ou de l’organisme de l’Union concerné, toute personne, y compris des personnes majeures et des membres de la famille du fonctionnaire, autres que ses enfants légitimes, naturels ou adoptifs ou ceux de son conjoint, peut être considérée, au titre de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, comme étant un « enfant à charge » lorsque le fonctionnaire a des « obligations alimentaires légales » à l’égard de cette personne et que « l’entretien [de celle-ci] lui impose de lourdes charges ».

39      Si ces trois catégories sont distinctes, il convient de noter que, s’agissant des deuxième et troisième catégories, elles prévoient toutes les deux l’exigence d’une « obligation alimentaire ». Or, le Tribunal considère que, en recourant, à l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, et à l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, à deux notions distinctes d’obligation alimentaire, l’une « résultant d’une décision judiciaire » et l’autre « légale », le législateur de l’Union a entendu viser deux situations différentes.

40      S’agissant de l’obligation alimentaire « légale » visée au paragraphe 4 de l’article 2 de l’annexe VII du statut, le Tribunal a déjà jugé que cette notion puise son inspiration dans les ordres juridiques des États membres, qui, en vertu de la loi, font peser sur les parents ou sur les alliés d’un degré plus ou moins éloigné une obligation mutuelle de secours alimentaire et que, ainsi, en recourant dans cette disposition à la notion d’obligation alimentaire légale, le statut vise exclusivement l’obligation alimentaire imposée au fonctionnaire par l’effet d’une source de droit indépendante de la volonté des parties et qu’il exclut, par conséquent, la prise en considération d’obligations alimentaires à caractère conventionnel, naturel ou indemnitaire (arrêt du 18 décembre 1992, Khouri/Commission, T‑85/91, EU:T:1992:121, point 31).

41      Or, l’obligation alimentaire à laquelle est tenue le requérant au titre des articles 1601 et suivants du BGB s’apparente clairement à une obligation mutuelle de secours alimentaire au sens de la jurisprudence mentionnée au point précédent du présent arrêt et, partant, cette obligation alimentaire « légale » doit en principe constituer le fondement d’une demande d’assimilation de la personne bénéficiaire de cette allocation d’entretien à un « enfant à charge » au titre exclusivement de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut.

42      Nonobstant cette considération, le requérant fait valoir que l’obligation alimentaire à laquelle il est tenu pourrait également être considérée, au sens du troisième alinéa du paragraphe 2 de l’article 2 de l’annexe VII du statut, comme résultant du jugement national litigieux et que ce jugement se fonderait sur une législation nationale, en l’occurrence la législation allemande, concernant la protection des mineurs.

43      À cet égard, même si le jugement national litigieux utilise le terme « Kindesunterhalt » (soutien à l’enfant), lequel terme, contenant le mot « Unterhalt », pourrait laisser entendre qu’il vise une obligation d’entretien analogue à celle résultant de la notion de « responsability to maintain », visée dans la version anglaise de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, ou à celle d’obligation d’entretien visée dans le libellé en version allemande de cette disposition (« zu dessen Unterhalt ein Beamter aufgrund einer gerichtlichen Verfügung verpflichtet ist »), il n’en demeure pas moins que l’origine de cette obligation, quelle que soit son étendue, est « légale » au sens de l’article 2, paragraphe 4, de ladite annexe, caractéristique essentielle retenue par le Tribunal, au point 31 de l’arrêt du 18 décembre 1992, Khouri/Commission (T‑85/91, EU:T:1992:121), afin de déterminer si une telle obligation relève de cette disposition.

44      En effet, en vertu du droit allemand, l’obligation d’entretien du requérant vis-à-vis de sa petite-fille préexiste indépendamment de l’intervention d’une décision judiciaire qui ne ferait, à l’instar du jugement national litigieux, que constater, de manière déclaratoire, l’existence de cette obligation légale et d’en définir son quantum. Or, ainsi que le souligne le Conseil, s’agissant des décisions de placement en famille d’accueil ou de tutelle que le législateur de l’Union a entendu viser par l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, l’obligation alimentaire ou d’entretien vis-à-vis de l’enfant faisant l’objet de cette mesure ne préexiste pas à la décision judiciaire, puisque c’est précisément par cette décision judiciaire que ladite obligation est créée et définie de sorte qu’elle « résulte » de cette décision du juge au sens de cette disposition.

45      Il résulte de ce qui précède que l’obligation à laquelle le requérant est tenu au titre du droit allemand, laquelle a fait l’objet du jugement national litigieux, a une origine légale de sorte qu’elle peut certes constituer le fondement d’une demande d’assimilation de la personne, bénéficiaire de cette allocation d’entretien prévue en droit allemand, à un « enfant à charge » au titre de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, mais ne saurait être considérée comme une obligation alimentaire « résultant » d’une décision judiciaire au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut.

46      En tout état de cause, s’agissant de la seconde condition, visée à l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, selon laquelle la décision judiciaire dont résulte l’obligation alimentaire doit être fondée sur une législation nationale sur la protection des mineurs, ainsi que l’a soutenu le Conseil, il ressort de manière claire des travaux préparatoires afférents à l’insertion, par le règlement no 723/2004, du troisième alinéa à l’article 2, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut, que le législateur de l’Union n’a pas entendu viser une obligation alimentaire fondée sur une législation générale, telle que des dispositions du BGB, qui prévoit une obligation de solidarité familiale.

47      En effet, il ressort des documents fournis par le Conseil que le troisième alinéa a été inséré dans l’article 2, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut à la demande des organisations syndicales ou professionnelles (ci-après « OSP »). Or, ainsi que cela ressort de la liste des revendications, préparée dans le cadre de la procédure législative par la section « Conseil » de l’OSP « Union syndicale – Service public européen – Bruxelles », leur proposition visait à combler une lacune du statut « lorsqu’un enfant [était] confié à un fonctionnaire en vertu d’une décision judiciaire [relative au placement en famille d’accueil] » et qu’il n’y avait « pas d’obligation [alimentaire] légale », puisque, à l’époque, dans ce type de situation, le fonctionnaire était privé de la possibilité de demander la reconnaissance de l’existence d’un enfant à charge lui ouvrant le droit aux allocations familiales, mais surtout à l’affiliation au RCAM. Ce texte précisait que, « [d]ans certains cas, l’enfant p[ouvai]t rester couvert par la sécurité sociale de sa famille d’origine, mais il arriv[ait], notamment en cas de placement de longue durée en famille d’accueil, que ce n[e fût] pas possible ».

48      Par ailleurs, dans ce document, il était exposé, pour mémoire et à titre illustratif, s’agissant de la législation applicable en Belgique concernant la protection des mineurs, lieu d’affectation de la majorité des fonctionnaires et agents de l’Union, le contenu de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse (Moniteur belge du 15 avril 1965, p. 4014). Or, les articles 1601 et suivants du BGB sont des dispositions de portée générale concernant la solidarité familiale entre ascendants et descendants en ligne directe et ne régissent pas exclusivement la protection des personnes mineures. Elles visent, au contraire, indifféremment, tant les personnes majeures que celles mineures. Partant, ces dispositions du BGB ne s’apparentent nullement à celles de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse, ayant clairement inspiré le libellé final du troisième alinéa de l’article 2, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut, lesquelles dispositions concernent le placement d’enfants mineurs et l’adoption par le tribunal de la jeunesse, instance spécialisée dans la protection des mineurs, de mesures de garde, de préservation et d’éducation.

49      De la même manière, il ressort d’un rapport produit par le Conseil que le groupe de travail restreint, chargé, dans le cadre de la réforme statutaire de 2004, de discuter de cette proposition et composé des représentants des OSP, des États membres ainsi que des institutions, avait expressément indiqué, que « [l]es OSP [avaie]nt précisé que cette demande couvr[ait] la situation des familles qui, à la suite d’une décision judiciaire, accueill[ai]ent un enfant dont les parents [étaie]nt temporairement incapables d’en assumer la charge [et que, s]ous réserve d’inventaire, les États membres [avaie]nt indiqué pouvoir faire preuve d’ouverture sur cette mesure, étant entendu qu[e, ]en tout état de cause, il faudra[it] éviter des cumuls avec les systèmes nationaux ».

50      Enfin, s’agissant du fait que le législateur de l’Union n’a pas, dans le libellé de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, utilisé le terme « confié », terme qui avait été utilisé par les OSP dans la liste de leurs revendications dans laquelle elles entendaient viser la situation dans laquelle « un enfant est confié à un fonctionnaire en vertu d’une décision judiciaire (placement en famille d’accueil) », cela ne saurait être interprété comme une volonté du législateur de l’Union de couvrir, par cette nouvelle disposition, les « obligation[s] alimentaire[s] légale[s] », déjà couvertes au titre de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. En effet, force est de relever que l’objectif de la revendication des OSP, ayant donné lieu à la modification statutaire en cause, était de combler une lacune dans le statut en visant des situations qui n’étaient pas couvertes par cette dernière disposition et non de donner une possibilité supplémentaire, pour les fonctionnaires et agents ayant des obligations alimentaires légales au sens de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, de bénéficier de l’allocation familiale lorsqu’ils ne remplissaient pas les autres conditions de cette disposition.

51      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est sans commettre d’erreur d’interprétation ni d’application de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut que l’AIPN a, dans la décision attaquée, refusé de reconnaître la petite-fille du requérant comme étant un « enfant à charge » au sens de cette disposition, nonobstant la production par le requérant du jugement national litigieux.

52      Cette conclusion n’est pas remise en cause par la circonstance que le seuil de revenus visé dans la conclusion no 223/04 révisée, du 30 janvier 2013, du collège des chefs d’administration de l’Union ne serait pas atteint dans le cas de la petite-fille du requérant. En effet, force est de constater que ce texte vise à déterminer dans quel cas un « enfant à charge » ayant des revenus propres cesse d’être considéré comme étant un « enfant à charge » du fait que ces revenus dépassent un certain seuil. L’application à un cas d’espèce de l’un des seuils arrêtés dans ledit texte présuppose toutefois que ce cas relève de l’une des trois hypothèses, prévues par le statut, relatives à la reconnaissance d’un « enfant à charge ». Or, en l’espèce et à ce stade, la petite-fille du requérant n’a obtenu cette reconnaissance ni au titre de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, ni au titre de l’article 2, paragraphe 4, de la même annexe. Par ailleurs, contrairement à ce que le requérant a prétendu au point 15 de la requête, sa fille dispose de revenus propres, en l’occurrence d’allocations familiales versées par un organisme allemand.

53      Partant, l’argumentation du requérant relative à la conclusion no 223/04 révisée, du 30 janvier 2013, du collège des chefs d’administration de l’Union doit être rejetée comme étant, en tout état de cause, inopérante.

54      Enfin, quant à la violation du principe de bonne administration alléguée par le requérant, celle-ci n’est nullement étayée dans la requête et doit, partant, être rejetée comme étant manifestement irrecevable pour non-respect de l’exigence de précision formulée à l’article 76, sous d), du règlement de procédure. En tout état de cause, le Tribunal constate que, dans la décision attaquée, l’AIPN, par sollicitude vis-à-vis du requérant, a, au-delà du strict contenu de la demande de l’intéressé, exploré la possibilité de reconnaître sa petite-fille comme étant un « enfant à charge » au titre de l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut. Ainsi, le présent grief doit, en tout état de cause, être rejeté comme étant non fondé.

55      Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de rejeter le premier moyen comme étant non fondé.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 24 de la charte des droits fondamentaux

56      À l’appui du second moyen, le requérant soutient que, si l’AIPN devait refuser de reconnaître sa petite-fille comme étant un enfant à sa charge au titre de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, cela signifierait que cette enfant « ne pourra[it] jamais être couverte par la caisse d’assurance maladie de l’[i]nstitution, contrairement à sa mère qui l[e serait] au travers du requérant ». Étant entendu que, aux termes de l’article 24 de la charte des droits fondamentaux, « [l]es enfants ont droit à la protection et aux soins nécessaires à leur bien-être », le requérant estime que l’interprétation de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, retenue par le Conseil dans la décision attaquée, aurait pour conséquence que sa petite-fille « ne serait pas couverte, d’un point de vue de l’assurance maladie ni par [lui-même] ni par sa mère [et qu’e]lle ne serait donc pas protégée », puisque cette interprétation « impliquerait l’absence de couverture médicale [de] la petite-fille du requérant », et ce, en méconnaissance dudit article 24 de la charte des droits fondamentaux. Or, selon lui, sa petite-fille devrait, à l’instar de l’ensemble des membres de sa famille, y compris de la fille du requérant, être affiliée au RCAM.

57      À cet égard, le Tribunal considère que l’article 24 de la charte des droits fondamentaux ne saurait être interprété comme imposant aux institutions, aux organes et aux organismes de l’Union de couvrir les risques maladie de l’ensemble des personnes ou des enfants qui présentent un lien de parenté avec l’un de leurs fonctionnaires ou agents et, partant, ne saurait constituer le fondement d’une interprétation extensive de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, telle que celle proposée par le requérant, laquelle irait en outre à l’encontre de la jurisprudence, rappelée au point 36 du présent arrêt, selon laquelle les dispositions statutaires donnant droit à des prestations financières sont d’interprétation stricte.

58      En tout état de cause, le requérant ne saurait soutenir que le refus de l’AIPN de reconnaître sa petite-fille comme étant un « enfant à charge » au titre de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut aurait pour conséquence de priver cette enfant de toute couverture d’assurance maladie et, partant, d’un accès aux soins et aux prestations de santé.

59      En effet, ainsi que l’a finalement indiqué le requérant dans sa réponse écrite, du 18 octobre 2017, aux questions du Tribunal, il apparaît que, contrairement à ce qu’il avait soutenu dans la requête, tant sa fille que sa petite-fille sont affiliées au régime belge d’assurance maladie, en l’occurrence à la Fédération des mutualités socialistes du Brabant, par le truchement de l’épouse du requérant, respectivement mère et grand-mère de celles-ci, laquelle est affiliée audit régime en raison de la perception d’assurances au titre du chômage en Belgique. Ainsi, à ce titre, la petite-fille du requérant a accès à des soins et à des prestations de santé, même si le requérant prétend désormais, sans fournir de preuve à l’appui, que, lorsqu’ils sont dispensés en Allemagne, lieu de résidence de cette enfant et de la fille du requérant, étudiante dans cet État membre, leur remboursement serait limité aux seuls soins d’urgence.

60      D’ailleurs, à cet égard, le Conseil a fait valoir, sans être contredit sur ce point par le requérant, d’une part, que, en application des dispositions du règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2004, L 166, p. 1), le remboursement, par l’organisme belge, des soins dispensés en Allemagne à la petite-fille du requérant n’était pas limité aux seuls soins d’urgence. D’autre part, selon le Conseil, la fille de ce dernier et, par voie de conséquence, sa petite-fille, pourraient également bénéficier, en Allemagne, du régime d’assurance maladie des étudiants, moyennant, le cas échéant, une contribution financière.

61      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le second moyen doit être rejeté et que, par conséquent, les conclusions en annulation de la décision attaquée doivent être rejetées.

 Sur les deuxième et troisième chefs de conclusions

62      Par ses deuxième et troisième chefs de conclusions, le requérant demande au Tribunal de déclarer que sa petite-fille est à sa charge, au sens de l’article 2, paragraphe 2, troisième alinéa, de l’annexe VII du statut, depuis le 13 juin 2016, de même que de reconnaître à celle-ci le droit au bénéfice du RCAM à compter du 13 juin 2016.

63      À cet égard, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le Tribunal n’est, d’une manière générale, pas compétent pour prononcer des arrêts déclaratoires dans le cadre de recours formés au titre des articles 263 ou 270 TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2005, Infront WM/Commission, T‑33/01, EU:T:2005:461, point 171, et ordonnance du 16 décembre 2016, Groupement pastoral de Oust e.a./Commission, T‑663/16, non publiée, EU:T:2016:759, point 13) et, s’agissant du contrôle de légalité fondé sur l’article 91 du statut, il n’est pas non plus compétent pour adresser des injonctions à l’administration (arrêts du 13 décembre 1989, Oyowe et Traore/Commission, C‑100/88, EU:C:1989:638, point 19, et du 6 novembre 2014, DH/Parlement, F‑4/14, EU:F:2014:241, point 41).

64      Par conséquent, les deuxième et troisième chefs de conclusions doivent être rejetés en raison de l’incompétence du Tribunal à en connaître.

65      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le recours.

 Sur les dépens

66      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Conseil.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      SE est condamné aux dépens.

Pelikánová

Nihoul

Svenningsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 janvier 2018.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon


*      Langue de procédure : le français.

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