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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Cafaro (Opinion) French Text [2019] EUECJ C-396/18_O (26 June 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/C39618_O.html Cite as: [2019] EUECJ C-396/18_O, ECLI:EU:C:2019:541, EU:C:2019:541 |
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Édition provisoire
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. MACIEJ SZPUNAR
présentées le 26 juin 2019 (1)
Affaire C‑396/18
Gennaro Cafaro
contre
DQ
[demande de décision préjudicielle formée par la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie)]
« Renvoi préjudiciel – Titulaires d’une licence de pilote ayant atteint l’âge de 60 ans – Société exerçant des activités en lien avec la protection de la sécurité nationale – Interdiction des discriminations en fonction de l’âge – Champ d’application du règlement (UE) nº 1178/2011 – Directive 2000/78/CE »
I. Introduction
1. Le principe d’interdiction des discriminations fondées sur l’âge a fait l’objet d’une jurisprudence abondante, par laquelle la Cour a notamment eu à étudier, à la lumière de ce principe, la possibilité pour un État membre d’interdire l’exercice de la profession de pilote à des personnes ayant atteint un certain âge (2).
2. Cette problématique est aujourd’hui renouvelée par les présentes questions préjudicielles, au regard des circonstances particulières de l’affaire en cause au principal. Plus particulièrement, il s’agira pour la Cour de déterminer si la nature des activités exercées par une société employant des pilotes, à savoir des activités en lien avec la protection de la sécurité nationale, peut avoir une incidence sur l’appréciation qu’il convient de porter sur l’interdiction de l’exercice de cette profession pour des pilotes ayant atteint l’âge de 60 ans.
II. Le cadre juridique
A. Le droit de l’Union
1. Le règlement (CE) nº 216/2008
3. L’article 1er, paragraphe 1, du règlement (CE) nº 216/2008 (3) dispose :
« Le présent règlement s’applique :
[...]
b) aux personnels et aux organismes participant à l’exploitation d’aéronefs ;
[...] »
4. Ainsi qu’il ressort de l’article 2, paragraphe 1, de ce règlement, « [l]’objectif principal du présent règlement est d’établir et de maintenir un niveau uniforme élevé de sécurité de l’aviation civile en Europe ».
5. L’article 7, paragraphe 2, dudit règlement prévoit :
« Sauf dans le cadre d’une formation, une personne ne peut exercer les fonctions de pilote que si elle est titulaire d’une licence et d’un certificat médical correspondant à l’opération à effectuer.
[...] »
2. Le règlement (UE) nº 1178/2011
6. L’article 1er du règlement (UE) nº 1178/2011 (4) prévoit :
« Le présent règlement fixe des règles détaillées concernant :
1) les différentes qualifications pour les licences de pilote, les conditions de délivrance, de maintien, de modification, de limitation, de suspension ou de retrait des licences, les privilèges et responsabilités des titulaires de licences, les conditions dans lesquelles les licences nationales de pilote et les licences de mécanicien navigant existantes peuvent être converties en licences de pilote, ainsi que les conditions d’acceptation des licences délivrées par les pays tiers ;
[...] »
7. L’article 2 du règlement nº 1178/2011 dispose :
« Aux fins du présent règlement, on entend par :
1) “licence ‘partie FCL’” une licence de membre d’équipage répondant aux exigences de l’annexe I ;
[...] »
8. Aux termes de l’article 12 du règlement nº 1178/2011, intitulé « Entrée en vigueur et mise en application » :
« 1. Le présent règlement entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.
Il s’applique à compter du 8 avril 2012.
1 ter. Par dérogation au paragraphe 1, les États membres peuvent décider de ne pas appliquer les dispositions des annexes I à IV jusqu’au 8 avril 2013.
[...] »
9. Le point FCL.065 de l’annexe I du règlement nº 1178/2011, intitulé « Restrictions des privilèges des titulaires d’une licence âgés de 60 ans ou plus pour le transport aérien commercial », prévoit :
« a) 60-64 ans. Avions et hélicoptères. Le titulaire d’une licence de pilote qui a atteint l’âge de 60 ans ne pourra agir en tant que pilote d’un aéronef exploité pour le transport aérien commercial que s’il :
1) fait partie d’un équipage multipilote, et
2) pour autant qu’il soit le seul pilote de l’équipage de conduite de vol qui ait atteint l’âge de 60 ans.
b) 65 ans. Le titulaire d’une licence de pilote qui a atteint l’âge de 65 ans ne pourra agir en tant que pilote d’un aéronef exploité pour le transport aérien commercial. »
3. La directive 2000/78/CE
10. Aux termes de son article 1er, la directive 2000/78/CE (5) a pour objet « d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, l’handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement ».
11. L’article 2 de la directive 2000/78, intitulé « Concept de discrimination », dispose :
« 1. Aux fins de la présente directive, on entend par “principe de l’égalité de traitement” l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er.
2. Aux fins du paragraphe 1 :
a) une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er ;
[...]
5. La présente directive ne porte pas atteinte aux mesures prévues par la législation nationale qui, dans une société démocratique, sont nécessaires à la sécurité publique, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé et à la protection des droits et libertés d’autrui. »
12. L’article 3 de la directive 2000/78, intitulé « Champ d’application », énonce, à son paragraphe 4 :
« Les États membres peuvent prévoir que la présente directive ne s’applique pas aux forces armées pour ce qui concerne les discriminations fondées sur l’handicap et l’âge. »
13. L’article 4 de la directive 2000/78, intitulé « Exigences professionnelles », dispose, à son paragraphe 1 :
« Nonobstant l’article 2, paragraphes 1 et 2, les États membres peuvent prévoir qu’une différence de traitement fondée sur une caractéristique liée à l’un des motifs visés à l’article 1er ne constitue pas une discrimination lorsque, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, pour autant que l’objectif soit légitime et que l’exigence soit proportionnée. »
14. L’article 6 de la directive 2000/78, intitulé « Justification des différences de traitement fondées sur l’âge », dispose, à son paragraphe 1 :
« Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.
[...] »
B. Le droit italien
15. La juridiction de renvoi indique que DQ, société de transport aérien exerçant une activité de couverture des services secrets (6), est une société constituée conformément à l’article 25 de la legge n. 124/2007 – Sistema di informazione per la sicurezza della republica e nuova disciplina del segreto (loi nº 124/2007 relative au système d’information pour la sécurité de la République et à la nouvelle réglementation sur la classification des données secrètes), du 3 août 2007 (GURI nº 187, du 13 août 2007) qui exerce une activité classée comme « confidentielle », à savoir une activité sans but lucratif de couverture des services secrets.
16. L’article 744, quatrième alinéa, du Codice della Navigazione (code de la navigation) assimile aux aéronefs d’État les aéronefs utilisés par des entités publiques ou privées exerçant des activités de protection de la sécurité nationale.
17. Le code de la navigation prévoit, à son article 748, premier alinéa, que ses dispositions ne s’appliquent pas aux aéronefs utilisés pour des activités de protection de la sécurité nationale.
18. L’article 748, troisième alinéa, du code de la navigation dispose que les opérations de vol effectuées par les aéronefs assimilés aux aéronefs d’État garantissent un niveau adéquat de sécurité, déterminé selon les réglementations spéciales adoptées par les administrations de l’État compétentes.
19. Le decreto del Presidente del Consiglio dei Ministri (décret du président du Conseil des ministres portant règlement sur les limites d’emploi du personnel navigant de DQ), du 9 septembre 2008 (ci-après le « DPCM »), a été adopté sur le fondement de l’article 748, troisième alinéa, du code de la navigation.
20. La disposition PCM-OPS 1.1136 du DPCM, intitulée « limite d’âge maximal », dispose :
« Compte tenu des finalités visées aux articles précédents, il est prévu que les pilotes de [DQ] peuvent exercer leur activité professionnelle jusqu’à l’âge de 60 ans et non au-delà. »
III. Les faits à l’origine du litige au principal, les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour
21. Le 19 janvier 2012, DQ a notifié à M. Gennaro Cafaro, employé en tant que pilote d’aéronefs par cette société, que son contrat de travail cesserait à la date du 19 septembre 2012 dans la mesure où il aurait atteint l’âge de 60 ans.
22. M. Cafaro a contesté la légalité de son licenciement devant le Tribunale di Roma (tribunal de Rome, Italie), lequel a rejeté sa demande. Cette décision a, par la suite, été confirmée par la Corte d’appello di Roma (cour d’appel de Rome, Italie), par un arrêt du 19 février 2016.
23. M. Cafaro s’est pourvu en cassation devant la juridiction de renvoi, la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie).
24. La juridiction de renvoi expose que les aéronefs de DQ sont assimilés, en vertu des dispositions de droit national, à des aéronefs d’État. À ce titre, ils effectuent des opérations de vols en lien avec la protection de la sécurité nationale, devant garantir un niveau adéquat de sécurité, ce dernier étant déterminé selon des réglementations spéciales, dont, notamment, le DPCM. La juridiction de renvoi précise à cet égard que les dispositions du DPCM prévoient que les pilotes de DQ ne sont pas autorisés à exercer leur activité au-delà de l’âge de 60 ans.
25. Or, la juridiction de renvoi observe que l’annexe I, point FCL.065, du règlement nº 1178/2011 permet aux pilotes d’aéronefs exploités pour le transport aérien commercial de continuer à exercer leur activité après 60 ans, sous certaines conditions. Plus précisément, la juridiction de renvoi souligne que cette disposition n’interdit à ces pilotes d’exercer leur activité que lorsqu’ils ont atteint l’âge de 65 ans.
26. La juridiction de renvoi se demande si l’annexe I, point FCL.065, du règlement nº 1178/2011, applicable expressément au transport aérien commercial, peut néanmoins être considérée comme une règle générale concernant l’âge des pilotes. Le cas échéant, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant au point de savoir si cette disposition s’oppose à une réglementation nationale prévoyant, pour les pilotes d’aéronefs utilisés pour des activités en lien avec la protection de la sécurité nationale, la cessation automatique de la relation de travail du pilote lorsque celui-ci atteint l’âge de 60 ans.
27. À titre subsidiaire, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si la réglementation spéciale prévoyant la cessation automatique de la relation de travail des pilotes à l’âge de 60 ans est compatible avec la directive 2000/78 et le principe de non-discrimination en fonction de l’âge qu’elle énonce, ainsi qu’avec l’article 21, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).
28. C’est dans ce contexte que la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation) a, par jugement parvenu à la Cour le 15 juin 2018, décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions suivantes :
« 1) La réglementation nationale prévue par le [DPCM] qui, par application de l’article 748, troisième alinéa, du code italien de la navigation, porte règlement sur les limites d’emploi du personnel navigant de [DQ] et qui prévoit notamment la cessation automatique de la relation de travail lorsque le travailleur atteint l’âge de 60 ans est-elle contraire au règlement nº 1178/2011, dans la mesure où il fixe à 65 ans la limite pour l’emploi des pilotes dans le transport aérien commercial, et ledit règlement est-il applicable en l’espèce, une fois écartée l’application de la réglementation nationale spéciale ?
2) À titre subsidiaire, si le règlement est considéré inapplicable ratione materiae aux circonstances de l’espèce, cette réglementation nationale est-elle contraire au principe de non-discrimination fondée sur l’âge, prévu par la directive 2000/78 et par la [Charte] (article 21, paragraphe 1) que la directive 2000/78 traduit concrètement ? »
29. Des observations écrites ont été déposées par le requérant au principal et DQ, les gouvernements italien et polonais, ainsi que par la Commission européenne.
30. Au cours de l’audience qui s’est tenue le 11 avril 2019, des observations orales ont été présentées au nom du requérant au principal, de DQ, du gouvernement italien, ainsi que de la Commission.
IV. Analyse
A. Sur la première question préjudicielle
31. Par sa première question préjudicielle, la juridiction de renvoi souhaite savoir, en substance, si l’annexe I, point FCL.065, du règlement nº 1178/2011 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal qui prévoit la cessation automatique de la relation de travail des pilotes employés par une société exploitant des aéronefs utilisés pour des activités en lien avec la protection de la sécurité nationale de l’État membre dès lors qu’ils ont atteint l’âge de 60 ans.
32. D’emblée, il me faut préciser que cette disposition n’est pas, à mon sens, applicable au litige au principal, ainsi que je m’attacherai à le démontrer.
1. L’inapplicabilité ratione temporis de l’annexe I, point FCL.065, du règlement nº 1178/2011
33. Je relève que DQ, le gouvernement italien et la Commission estiment, à titre principal, que l’annexe I, point FCL.065, du règlement nº 1178/2011 n’est pas applicable ratione temporis à la situation au principal.
34. Au contraire, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation) est d’avis que l’applicabilité ratione temporis au litige au principal de l’annexe I, point FCL.065, du règlement nº 1178/2011 ne saurait être exclue, dans la mesure où cette disposition ne figure pas parmi les dispositions dont les États membres ont la faculté de reporter l’application.
35. Je rappelle que, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, les questions préjudicielles doivent être résolues à la lumière de toutes les dispositions du traité et du droit dérivé susceptibles d’avoir une pertinence par rapport au problème posé (7). De même, en vue de fournir à la juridiction qui lui a adressé une question préjudicielle une réponse utile, la Cour peut être amenée à prendre en considération des normes de droit de l’Union auxquelles le juge national n’a pas fait référence dans la décision de renvoi (8).
36. Certes, la juridiction de renvoi n’a pas identifié, dans le règlement nº 1178/2011, de disposition permettant de reporter l’application de l’annexe I, point FCL.065, de celui-ci. Cependant, force est de constater que l’article 12, paragraphe 1ter, de ce dernier prévoit expressément cette possibilité, puisqu’aux termes de cet article, les États membres peuvent décider de ne pas appliquer les dispositions de l’annexe I, dont fait partie le point FCL.065, jusqu’au 8 avril 2013.
37. À cet égard, il ressort tant des observations écrites de la Commission et du gouvernement italien, que de celles formulées lors de l’audience par ce dernier que la République italienne a fait usage de la possibilité offerte à l’article 12, paragraphe 1ter, du règlement nº 1178/2011, de sorte que les dispositions de l’annexe I de ce règlement n’étaient pas applicables en Italie avant le 8 avril 2013.
38. Or, la relation de travail de M. Cafaro a pris fin le 19 septembre 2012, ainsi que cela lui a été notifié le 19 février 2012, de sorte que l’annexe I, point FCL.065, du règlement nº 1178/2011 n’est pas applicable ratione temporis au litige au principal.
39. Par souci d’exhaustivité, je démontrerai ci-après que, en tout état de cause, le règlement nº 1178/2011 n’est pas davantage applicable ratione materiae au litige au principal.
2. L’inapplicabilité ratione materiae du règlement nº 1178/2011
40. Le règlement nº 1178/2011 est un acte d’exécution du règlement nº 216/2008, adopté, notamment, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 6, de ce règlement. Il en découle que le champ d’application matériel du règlement nº 1178/2011 ne saurait être plus large que le champ d’application matériel de l’acte de base sur lequel il est fondé (9).
41. Je me référerai donc aux dispositions du règlement nº 216/2008 définissant son champ d’application matériel afin d’identifier celui du règlement nº 1178/2011.
42. D’une part, et de façon positive, le règlement nº 216/2008 vise à établir des règles communes dans le domaine de l’aviation civile et à y maintenir un niveau uniforme de sécurité (10). Ce règlement est donc applicable aux activités qui relèvent de l’aviation civile. La même conclusion s’impose pour ce qui est du règlement nº 1178/2011, qui détermine les exigences techniques et les procédures administratives applicables au personnel navigant de l’aviation civile.
43. D’autre part, et de façon négative, l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 216/2008 prévoit une exception claire à l’application de ce règlement s’agissant des personnels et organismes affectés à des opérations militaires, de douane ou de police, ou à des opérations analogues. Cette exception vaut donc également s’agissant du règlement nº 1178/2011.
44. Sur ce point, je dois préciser la façon dont je comprends cette exception. En effet, M. Cafaro soutient que, dans la mesure où DQ est une société privée, constituée conformément aux règles du code civil, et agissant en tant qu’exploitant habilité au transport aérien commercial, elle ne saurait être considérée comme relevant de l’exclusion prévue à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 216/2008. M. Cafaro expose donc que le règlement nº 1178/2011 devrait être appliqué à DQ.
45. Certes, s’agissant d’une exception, l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 216/2008 doit être d’interprétation stricte. Cependant, je ne crois pas que cela implique de s’attacher à la forme juridique de l’entité concernée afin de déterminer si elle relève de cette disposition.
46. En premier lieu, l’interprétation littérale de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 216/2008 révèle, à mon sens, que la forme d’une entité n’est pas pertinente pour établir si elle est couverte par l’exception, dans la mesure où il n’en est fait aucune mention. Cette disposition vise en effet les personnels et organismes affectés à des opérations militaires, de douane ou de police, ou à des opérations analogues. Il est seulement fait référence à l’activité exercée par les personnels et organismes visés. Ladite disposition établit ainsi un critère fonctionnel et non formel afin de déterminer si les personnels ou les organismes qui l’exercent relèvent ou non du champ d’application du règlement nº 216/2008 et, par extension, du règlement nº 1178/2011.
47. En second lieu, l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 216/2008 proposée par M. Cafaro dans ses observations me semble contraire à l’effet utile des règlements nos 216/2008 et 1178/2011, car elle impliquerait que l’étendue du champ d’application de ces règlements soit tributaire de qualifications juridiques nationales. Si une telle interprétation de cette disposition devait être retenue, une société privée selon le droit national relèverait toujours du champ d’application desdits règlements. Faire dépendre l’application des dispositions des règlements nos 216/2008 et 1178/2011 des seuls droits nationaux et de leur variété entraînerait une grande disparité des régimes selon les États membres et empêcherait par là même la réalisation de l’objectif de ces règlements, à savoir l’établissement de règles communes dans le domaine de l’aviation civile.
48. Or, il ressort de la décision de renvoi que DQ fournit un service « de nature particulière », à savoir « une activité [...] de couverture des services secrets », exercée dans un but de protection de la sécurité nationale (11). Les activités opérées par DQ échappent ainsi au champ d’application matériel du règlement nº 216/2008, et ce à un double titre. D’une part, une activité de couverture des services secrets, exercée en lien avec la protection de la sécurité nationale, ne relève pas, à mon sens, de l’aviation civile. D’autre part, et bien plus, une telle activité particulière est couverte par l’exception de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 216/2008, en tant qu’opération analogue à une opération militaire, de douane, ou de police. Il importe peu à cet égard que DQ exerce cette activité sous une forme privée.
49. Partant, je suis d’avis que ni le règlement nº 1178/2011, en général, ni l’annexe I, point FCL.065, de celui-ci, en particulier, ne sont applicables ratione materiae à la situation d’espèce, pas plus qu’ils ne sont applicables ratione temporis.
B. Sur la seconde question préjudicielle
50. Par sa seconde question préjudicielle, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si les dispositions de la directive 2000/78 et de l’article 21, paragraphe 1, de la Charte doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal, qui prévoit la cessation automatique de la relation de travail des pilotes employés par une société exploitant des aéronefs utilisés pour des activités en lien avec la protection de la sécurité nationale de l’État membre dès lors qu’ils ont atteint l’âge de 60 ans.
51. À titre liminaire, afin d’identifier clairement les éléments de droit de l’Union dont l’interprétation est demandée, il me faut préciser qu’il n’est pas nécessaire, à mon sens, de se référer aux dispositions de la Charte pour répondre à la question préjudicielle. En effet, la Charte énonce un principe général de non-discrimination en fonction de l’âge, que concrétisent les dispositions de la directive 2000/78 dans le domaine de l’emploi et du travail (12). Il s’ensuit que, lorsqu’elle est saisie d’une question préjudicielle ayant pour objet l’interprétation du principe général de non-discrimination en fonction de l’âge, tel que consacré à l’article 21 de la Charte, ainsi que des dispositions de la directive 2000/78, la Cour n’examine la question qu’au regard de cette directive (13).
52. Aussi mon analyse se concentrera-t-elle sur l’interprétation des dispositions de la seule directive 2000/78. Je rappelle, à cet égard, que si les dispositions pertinentes de la directive 2000/78 ne sont pas formellement identifiées par la juridiction de renvoi dans ses questions préjudicielles, il ressort d’une jurisprudence constante que la Cour peut dégager du libellé des questions formulées par la juridiction de renvoi, eu égard aux données exposées par celle-ci, les éléments de droit de l’Union nécessaires pour que cette juridiction puisse résoudre le problème juridique dont elle est saisie, en conformité avec le droit de l’Union (14).
53. La lecture de la directive 2000/78 à la lumière des motifs de la décision de renvoi permet d’identifier plusieurs dispositions pertinentes pour la solution du litige au principal, à savoir l’article 2, paragraphe 5, l’article 3, paragraphe 4, l’article 4, paragraphe 1, et l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78.
54. Partant, afin de répondre à la seconde question préjudicielle, j’analyserai successivement ces articles.
55. Tout d’abord, il me faut vérifier que la réglementation en cause au principal relève du champ d’application de la directive 2000/78. J’étudierai ensuite si cette réglementation instaure une inégalité de traitement fondée sur l’âge et, enfin, le cas échéant, si cette inégalité est susceptible d’être justifiée, de sorte qu’elle ne constituerait pas une discrimination au sens de la directive 2000/78 (15).
1. L’applicabilité de la directive 2000/78
56. La Commission relève que la situation de DQ pourrait être couverte par l’exception prévue à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2000/78, aux termes duquel les États membres peuvent prévoir que cette directive ne s’applique pas aux forces armées pour ce qui concerne les discriminations fondées sur l’âge.
57. Je suis cependant d’avis que l’exception prévue à cette disposition n’est pas pertinente en l’espèce, pour les raisons suivantes.
58. Tout d’abord, et à titre principal, le gouvernement italien a confirmé lors de l’audience que si la République italienne a prévu en droit national une exception à l’application de la directive 2000/78 s’agissant des forces armées pour ce qui concerne les discriminations fondées notamment sur l’âge, conformément à l’article 3, paragraphe 4 de cette directive, cette exception ne s’étend pas en tout état de cause à DQ.
59. Ensuite, s’agissant d’une exception, l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2000/78 doit être interprété de façon stricte. En d’autres termes, l’exception ne saurait s’étendre à toutes les sociétés qui, tout en exerçant des activités en lien avec la protection nationale, ne font pas pour autant partie des forces armées de l’État membre. Par conséquent, cette disposition ne saurait être interprétée comme pouvant viser des organismes qui ne relèvent pas des forces armées, même lorsqu’ils exercent des opérations analogues à celles menées par ces dernières.
60. En outre, on ne peut tirer de l’analyse que je propose, dans le cadre de la réponse à la première question préjudicielle, des activités de DQ en tant qu’opérations analogues à des opérations militaires au sens du règlement nº 216/2008, une quelconque conclusion s’agissant de l’applicabilité ou non de l’exception prévue à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2000/78.
61. D’une part, il ressort du libellé même de l’exception prévue à cette disposition que celle-ci a un champ d’application beaucoup plus restreint que celle de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 216/2008. Tandis que la première ne vise que les forces armées, l’application du règlement nº 216/2008 est exclue s’agissant d’opérations militaires, de douane et de police, ou d’opérations analogues. Ceci est confirmé à la lecture du considérant 18 de la directive 2000/78, dont il ressort que celle-ci a vocation à s’appliquer aux services de police, pénitentiaires et de secours. La Cour a d’ailleurs, à plusieurs reprises, admis l’application de la directive 2000/78 aux forces de police (16). Cet élément démontre, pour autant que de besoin, l’interprétation restrictive qu’il convient de donner à l’exception prévue à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2000/78.
62. D’autre part, il me faut souligner que la directive 2000/78 a un champ d’application très large, de sorte à appréhender le plus grand nombre de discriminations, sous les formes les plus diverses : elle s’applique tant pour le secteur privé que pour le secteur public, tant au stade du recrutement qu’à celui de la rupture du contrat, de même qu’elle s’applique aux conditions de travail et de rémunération (17). Il serait donc contraire à l’esprit et à l’objectif de la directive 2000/78 de permettre une exception large à son application.
63. Or, il ressort tant de la décision de renvoi que des observations soumises par le gouvernement italien et DQ au cours de la procédure et lors de l’audience que DQ, tout en exerçant des activités en lien avec la protection de la sécurité nationale, ne fait pas partie des forces armées de la République italienne. C’est d’ailleurs tout l’enjeu de la présente affaire que de déterminer si le statut particulier de DQ et la nature particulière de ses activités peuvent justifier une différence de traitement fondée sur l’âge.
64. Partant, DQ ne relève pas de l’exception de l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2000/78, de sorte que cette dernière est bien applicable au litige au principal.
2. L’identification d’une discrimination au sens de la directive 2000/78
65. Je rappelle que, conformément à l’article 1er de la directive 2000/78, celle-ci a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée notamment sur l’âge, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe d’égalité de traitement. L’article 2 de la directive 2000/78 définit le principe d’égalité de traitement comme l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée notamment sur l’âge. Plus précisément, l’article 2, paragraphe 2, sous a), de cette directive dispose qu’une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’aurait été, ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base, notamment, de son âge.
66. Afin d’établir si la réglementation en cause au principal constitue une discrimination au sens de la directive 2000/78, il est donc nécessaire, en premier lieu, de déterminer si elle entraîne une inégalité de traitement. Je vérifierai, en second lieu, si la différence de traitement peut être justifiée au regard des dispositions de la directive 2000/78, comme le soutiennent DQ ainsi que les gouvernements italien et polonais, auquel cas elle ne sera pas constitutive d’une discrimination au sens de cette directive.
a) L’existence d’une inégalité de traitement
67. L’existence d’une inégalité de traitement directement fondée sur l’âge résultant de la réglementation nationale en cause au principal ne fait, à mon sens, aucun doute et n’est d’ailleurs pas débattue par les parties.
68. En effet, le DPCM a pour effet que, dans une situation comparable, les pilotes de DQ âgés de plus de 60 ans sont traités moins favorablement que les pilotes plus jeunes de cette même société, dans la mesure où leur relation de travail avec DQ cesse automatiquement dès lors qu’ils atteignent l’âge de 60 ans, et pour cette seule raison. Une réglementation de cette nature instaure de toute évidence une inégalité de traitement directement fondée sur l’âge, au sens des dispositions combinées de l’article 1er et de l’article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive 2000/78 (18).
b) Les potentielles dérogations
69. La directive 2000/78 prévoit trois dérogations (19), en application desquelles une différence de traitement directement fondée sur l’âge ne sera toutefois pas considérée comme une discrimination au sens de cette directive.
70. Deux de ces dérogations, prévues à l’article 2, paragraphe 5, et à l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78, sont communes à tous les motifs de discrimination et ne sont pas spécifiques aux différences de traitement fondées sur l’âge. L’article 2, paragraphe 5, de cette directive prévoit ainsi qu’une mesure prévue par la législation nationale et nécessaire à la sécurité publique, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé et à la protection des droits et libertés d’autrui n’est pas une discrimination au sens de ladite directive. L’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78 dispose également qu’une différence de traitement fondée sur une caractéristique liée notamment à l’âge n’est pas une discrimination au sens de cette directive lorsque, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante.
71. La directive 2000/78 prévoit par ailleurs, en son article 6, paragraphe 1, une dérogation spécifique pour les discriminations en raison de l’âge (20), qui vise les mesures objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation.
72. Avant d’étudier la possibilité de justifier une inégalité de traitement telle que celle qui touche les pilotes de DQ, je reviendrai sur l’articulation de ces trois dérogations, afin de définir lesquelles d’entre elles peuvent permettre de justifier la mesure en cause au principal.
1) L’articulation des différentes dérogations en fonction de l’objectif poursuivi par la mesure
73. Il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il importe d’identifier l’objectif poursuivi par la mesure en cause au principal afin de déterminer les dispositions de la directive au regard desquelles l’examen de cette mesure doit être effectué (21). En d’autres termes, l’application des dérogations dépend de l’objectif poursuivi par la mesure instaurant l’inégalité de traitement.
74. Selon les indications de la juridiction de renvoi, les dispositions du DPCM prévoyant la limite d’âge des pilotes de DQ ont été édictées dans le but d’assurer un niveau de sécurité adéquat des vols de DQ, dans l’intérêt de la sécurité nationale. La réglementation en cause au principal viserait ainsi un double objectif : la garantie de la sécurité aérienne et la protection de la sécurité nationale.
75. Or, l’objectif de garantie de la sécurité aérienne est rattachable à la protection de la sécurité publique au sens de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78 et peut également constituer un objectif légitime au sens de l’article 4, paragraphe 1, de cette directive, apte à justifier qu’il soit dérogé au principe d’égalité de traitement (22). La même conclusion s’impose s’agissant de la protection de la sécurité nationale, puisque les mesures qui visent à garantir le bon déroulement et la réussite de missions des services secrets de l’État sont indéniablement des mesures de nature à assurer la sécurité publique. L’article 2, paragraphe 5, et l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78 peuvent donc, en principe, être invoqués pour justifier la différence de traitement dont font l’objet les pilotes de DQ ayant atteint l’âge de 60 ans (23).
76. Cependant, s’agissant de la dérogation prévue à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78, je ne crois pas qu’elle soit pertinente en l’espèce, eu égard aux objectifs poursuivis par la réglementation en cause au principal. Cette disposition établit une liste d’objectifs devant être poursuivis par une mesure pour que celle-ci puisse bénéficier de la dérogation. Si cette liste n’est certes pas exhaustive et n’a qu’une valeur indicative (24), comme l’indique l’utilisation par le législateur de l’Union de l’adverbe « notamment », cela ne signifie pas que tout type d’objectifs puisse être invoqué aux termes de ladite disposition. La Cour a déjà jugé que les objectifs pouvant être considérés comme légitimes au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 sont des objectifs relevant de la politique sociale (25). Elle a notamment exclu que l’objectif de sécurité aérienne puisse constituer un objectif légitime au sens de cette disposition dans l’arrêt Prigge e.a. (26).
77. Or, je ne vois aucune raison de revenir sur l’interprétation donnée par la Cour de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78. Au contraire, j’estime qu’admettre des objectifs étrangers à la politique sociale comme objectifs légitimes au sens de cette disposition entraînerait une extension injustifiée d’une exception au principe d’égalité de traitement, au-delà des limites fixées par le législateur de l’Union.
78. Dès lors, la réglementation en cause au principal, en ce qu’elle poursuit un objectif de garantie de la sécurité aérienne, ainsi que cela ressort explicitement de l’arrêt Prigge e.a. (27), ne peut être justifiée sur le fondement de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78. De même, l’objectif de protection de la sécurité nationale ne relevant pas de la politique sociale, il ne peut constituer un objectif légitime au sens de cette disposition.
79. Partant, je suis d’avis que la différence de traitement résultant de la réglementation nationale ne pourrait être justifiée que sur le fondement de l’article 2, paragraphe 5, et de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78, sous réserve toutefois que leurs conditions d’application soient satisfaites.
2) Les conditions d’application des dérogations
80. J’exposerai dans un premier temps les raisons pour lesquelles je considère que l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78 ne peut être interprété comme pouvant justifier une mesure telle que celle en cause au principal. Dans un second temps, je démontrerai que, s’agissant cette fois de l’article 4, paragraphe 1, de cette directive, une dérogation au principe d’égalité de traitement pourrait être admise dans la situation d’espèce.
i) Sur l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78
81. Aux termes de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78, une mesure qui, tout en instaurant une différence de traitement directement fondée sur l’âge, est néanmoins nécessaire, dans une société démocratique, à la protection de la sécurité publique ne sera pas constitutive d’une discrimination au sens de cette directive, à la condition toutefois que cette mesure soit prévue par la législation nationale (28).
82. Je relève que l’exigence de prévision par la législation nationale est spécifique à la dérogation prévue à l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78. Ni l’article 4, paragraphe 1, ni l’article 6, paragraphe 1, de cette directive n’impose une telle condition. Par cette exigence supplémentaire, le législateur de l’Union a donc entendu soumettre l’application de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78 à des conditions plus strictes encore que les conditions d’application des autres dérogations prévues par cette directive (29). Ainsi, contrairement à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78, l’article 2, paragraphe 5, de cette directive se réfère à un instrument juridique précis (30), à savoir la législation nationale.
83. En outre, s’agissant d’une dérogation au principe de non-discrimination, la disposition de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78, en ce compris l’exigence de prévision par la législation nationale, est d’interprétation stricte. Le choix d’introduire ce type de dérogations à l’égalité de traitement en matière de conditions d’emploi et de travail, selon les conditions de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78 appartient au législateur national, et doit résulter d’une disposition législative précise.
84. Pour ces raisons, je considère que la notion de « législation nationale » au sens de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78 doit s’entendre dans un sens strict. En d’autres termes, la législation nationale au sens de cette disposition, en tant qu’exigence expresse et spécifique à l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78, est une loi au sens formel (31). Est ainsi une législation nationale au sens de cette disposition un acte législatif, adopté par un organe législatif (32).
85. Or, si la nature exacte du DPCM est débattue entre les parties, et si sa détermination appartient au juge national, il ressort tout de même des observations formulées par les parties lors de l’audience que la réglementation en cause au principal n’est en tout état de cause pas une loi au sens formel, en ce qu’elle n’est pas adoptée par un organe législatif, ce qu’il appartiendra toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier.
86. Aussi suis-je d’avis que la réglementation en cause au principal ne peut être considérée comme une mesure prévue par la législation nationale au sens de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78.
87. Partant, cette disposition ne saurait servir de fondement pour justifier l’inégalité de traitement résultant de la réglementation en cause au principal.
ii) Sur l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78
88. Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78, une différence de traitement fondée sur une caractéristique liée à l’âge ne constitue pas une discrimination lorsque, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, pour autant que l’objectif soit légitime et l’exigence proportionnée.
89. La jurisprudence interprétant cette disposition est désormais bien établie (33) : plusieurs conditions doivent être satisfaites afin que la différence de traitement ne constitue pas une discrimination au sens de ladite disposition.
90. Premièrement, la différence de traitement doit être fondée sur une caractéristique liée, notamment, à l’âge et cette caractéristique doit constituer une « exigence essentielle et déterminante ». La Cour a précisé que « c’est non pas le motif sur lequel est fondée la différence de traitement, mais une caractéristique liée à ce motif qui doit constituer une exigence professionnelle essentielle et déterminante » (34). Deuxièmement, l’objectif poursuivi doit être légitime. Troisièmement, l’exigence doit être proportionnée.
91. S’agissant de la deuxième condition, j’ai déjà exposé au point 75 des présentes conclusions que les objectifs poursuivis par la réglementation en cause au principal, à savoir la garantie de la sécurité aérienne et la protection de la sécurité nationale, pouvaient être considérés comme des objectifs légitimes au sens de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78. Il y a donc lieu d’examiner uniquement la première et la dernière de ces conditions.
92. Dans un premier temps, il convient de vérifier, d’une part, si la différence de traitement entre les pilotes de DQ âgés de moins de 60 ans et ceux âgés de plus de 60 ans est fondée sur une caractéristique liée à l’âge et, d’autre part, si cette caractéristique peut être considérée comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante. À cet égard, je crois que l’arrêt Prigge e.a. (35) fournit des indications utiles (36).
93. Dans cet arrêt, la Cour a jugé qu’il est essentiel que les pilotes de ligne possèdent des capacités physiques particulières dans la mesure où les défaillances physiques pour cette profession sont susceptibles d’avoir des conséquences importantes. En outre, il est indéniable que ces capacités physiques diminuent avec l’âge. Il en résulte que le fait de posséder des capacités physiques particulières peut être considéré comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante pour l’exercice de la profession de pilote de ligne et que la possession de telles capacités est liée à l’âge (37).
94. La même conclusion doit, à mon sens, s’appliquer pour les pilotes d’aéronefs exerçant des missions en lien avec la protection de la sécurité nationale. La particularité des missions des pilotes de DQ n’a pas d’incidence sur le constat d’une diminution des capacités physiques avec l’âge, ni sur l’importance des conséquences qu’une défaillance physique peut avoir pour cette profession (38).
95. Ainsi, la différence de traitement instaurée par la réglementation en cause au principal doit être considérée comme fondée sur une caractéristique liée à l’âge constituant une exigence professionnelle essentielle et déterminante au sens de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78.
96. S’agissant, dans un second temps, de l’exigence de proportionnalité, le considérant 23 de la directive 2000/78 expose, certes, que ce n’est que dans des « circonstances très limitées » qu’une différence de traitement peut être justifiée lorsqu’une caractéristique liée, notamment, à l’âge, constitue une exigence professionnelle et déterminante (39). Ce considérant traduit d’ailleurs le principe selon lequel, s’agissant d’une dérogation au principe de non-discrimination, l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78 est d’interprétation stricte (40). En outre, dans les affaires Petersen et Prigge e.a., relatives à une cessation automatique de la relation de travail en raison de l’âge, avant que la personne concernée n’ait atteint l’âge de départ à la retraite généralement prévu en droit national (41), la Cour a jugé que la mesure ne satisfaisait pas à l’exigence de proportionnalité (42).
97. Néanmoins, il ne me semble pas que, dans les circonstances en cause au principal, la disproportion de la limite d’âge visant les pilotes de DQ et de ses conséquences s’impose avec évidence. J’exposerai ci-après, d’une part, les raisons pour lesquelles je crois que la solution retenue dans les arrêts Petersen (43) et Prigge e.a. (44) relative à la proportionnalité de la mesure ne peut être transposée au cas présent. D’autre part, j’expliquerai en quoi j’estime que la réglementation nationale telle que celle en cause au principal, qui fixe à 60 ans la limite d’âge maximale pour l’exercice des fonctions de pilote dans la société DQ, pourrait être proportionnée, ce qu’il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier.
98. S’agissant de la solution retenue dans les arrêts Petersen (45) et Prigge e.a. (46), à savoir la disproportion de la mesure imposant la cessation automatique de la relation de travail au-delà d’un certain âge, je considère qu’elle s’explique avant tout par le manque de cohérence de la mesure. Ainsi, dans l’arrêt Prigge e.a. (47), la Cour a jugé que la fixation « à 60 ans [de] l’âge limite à compter duquel les pilotes de ligne [...] seraient considérés comme ne possédant plus les capacités physiques pour exercer leur activité professionnelle, alors que les réglementations nationale et internationale autorisent l’exercice de cette activité, sous certaines conditions, jusqu’à l’âge de 65 ans » constitue une exigence disproportionnée. De même, dans l’arrêt Petersen (48), la Cour relève que la « mesure présente des incohérences en raison de l’existence d’[une] exception » et que, dans ce cas, « la limite d’âge imposée [...] n’est pas nécessaire à la protection de la santé ». En d’autres termes, dans ces deux arrêts, les réglementations en cause ont été jugées disproportionnées, car elles ne répondaient pas véritablement au souci d’atteindre l’objectif de manière cohérente et systématique (49), dans la mesure où la même profession pouvait encore être exercée dans d’autres entités passé l’âge maximal fixé dans ces réglementations.
99. Or, la réglementation en cause au principal ne manque pas, à mon sens, de cohérence, de sorte qu’elle ne répondrait pas au souci d’atteindre les objectifs de garantie de la sécurité aérienne et de protection de la sécurité nationale de façon cohérente et systématique. D’une part, à la différence du domaine de l’aviation commerciale, il n’existe pas de normes de référence en droit national, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, ou en droit international, à ma connaissance, qui viendrait remettre en cause la cohérence de la décision de fixer l’âge maximal des pilotes exerçant au sein de DQ des activités en lien avec la sécurité nationale à 60 ans. Il ne ressort pas non plus de la décision de renvoi qu’il existerait des exceptions à la règle en cause, de nature à contester sa cohérence, ce qu’il appartiendra toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier.
100. Dès lors, je crois que la solution dégagée par la Cour dans les arrêts Petersen (50) et Prigge e.a. (51) ne peut pas être transposée à la réglementation en cause au principal sans autre forme d’analyse.
101. Il y a donc lieu d’examiner si cette réglementation est proportionnée. Pour ce faire, il convient d’examiner si cette limite d’âge maximal est appropriée pour atteindre l’objectif poursuivi et si elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre (52).
102. À cet égard, il me faut préciser qu’il appartient bien en dernier lieu au juge national, qui est seul compétent pour apprécier les faits et interpréter la législation nationale, de déterminer si et dans quelle mesure la réglementation en cause au principal est conforme à ces exigences. Néanmoins, afin de fournir au juge national une réponse utile, la Cour est compétente pour donner des indications, tirées du dossier de l’affaire au principal ainsi que des observations écrites et orales qui lui ont été soumises, de nature à permettre à ce même juge de statuer dans le litige concret dont il est saisi (53). J’aborderai donc ce point dans les développements qui suivent.
103. La reconnaissance du caractère approprié de la réglementation ne me paraît pas être source de controverses. Ainsi que je l’ai identifié, les capacités physiques des pilotes diminuant avec l’âge, la fixation d’un âge maximal au-delà duquel les pilotes de DQ ne peuvent plus exercer leur activité est appropriée pour atteindre les objectifs de garantie de la sécurité aérienne et de protection de la sécurité nationale.
104. La question est plus saillante s’agissant du point de savoir si cette mesure ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces deux objectifs. Ce point est d’ailleurs débattu entre les parties, M. Cafaro estimant qu’une simple restriction des conditions d’exercice de ses missions aurait été à même d’atteindre les objectifs que vise la réglementation en cause, de sorte qu’une cessation automatique de sa relation de travail serait disproportionnée. M. Cafaro évoque notamment la possibilité de faire partie d’un équipage multipilote, dont l’un des deux pilotes seulement pourrait être âgé de plus de 60 ans.
105. Cependant, je considère qu’une mesure moins restrictive ne permettrait pas d’atteindre les objectifs de garantie de la sécurité aérienne et de protection de la sécurité publique de la même façon que la cessation automatique de la relation de travail.
106. DQ n’emploie qu’un nombre très restreint de pilotes et ne dispose que d’un nombre plus restreint encore d’aéronefs. DQ et le gouvernement italien ont insisté sur les modalités d’exercice particulières des missions de DQ, qui ne sont pas comparables aux opérations de vol de l’aviation civile. Dans ces conditions, dont il appartiendra toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier l’exactitude, imposer à DQ de continuer à employer des pilotes de plus de 60 ans exerçant des missions accompagnés d’un pilote de moins de 60 ans impliquerait non seulement que DQ serait contrainte dans l’exercice de ses missions par la formation imposée des équipages, mais également que l’exercice de ses missions pourrait être rendu plus difficile. Ainsi, tant l’objectif de garantie de la sécurité aérienne que celui de protection de la sécurité nationale seraient mis à mal.
107. En outre, le fait que la mesure implique qu’il soit automatiquement mis un terme au contrat de travail d’un pilote de DQ au motif qu’il a atteint l’âge de 60 ans ne signifie pas pour autant que cette mesure va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis (54). Il est ressorti des observations formulées lors de l’audience par les parties que la structure de DQ rendait impossible la réintégration de M. Cafaro a un poste différent que celui de pilote au sein de cette société, ce qu’il appartiendra toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier.
108. Dans la mesure où des réglementations moins restrictives ne permettraient pas d’atteindre les objectifs poursuivis, je suis d’avis que la réglementation en cause au principal ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs de garantie de la sécurité aérienne et de protection de la sécurité nationale.
109. Dès lors, il apparaît qu’une réglementation nationale telle que celle en cause au principal, qui fixe à 60 ans la limite d’âge maximal pour l’exercice des fonctions de pilote au sein d’une société exerçant des activités en lien avec la protection de la sécurité nationale, peut être considérée, d’une part, comme étant appropriée à l’objectif consistant à garantir la sécurité aérienne et à assurer la protection de la sécurité nationale et, d’autre part, comme n’allant pas au-delà de ce qui est nécessaire à la réalisation de cet objectif, en raison notamment des ressources limitées de cette société, ce qu’il appartiendra toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier.
V. Conclusion
110. Au vu de tout ce qui précède, je propose de répondre comme suit aux questions préjudicielles posées par la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie) :
1) Le règlement (UE) nº 1178/2011 de la Commission, du 3 novembre 2011, déterminant les exigences techniques et les procédures administratives applicables au personnel navigant de l’aviation civile conformément au règlement (CE) nº 216/2008 du Parlement européen et du Conseil, tel que modifié par le règlement (UE) nº 290/2012 de la Commission, du 30 mars 2012, n’est pas applicable à la situation en cause au principal.
2) L’article 4, paragraphe 1 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation telle que celle en cause en principal, qui prévoit la cessation automatique de la relation de travail des pilotes employés par une société exploitant des aéronefs utilisés pour des activités en lien avec la protection de la sécurité nationale de l’État membre dès lors qu’ils ont atteint l’âge de 60 ans, lorsque, en raison des ressources limitées de cette société, des mesures moins restrictives ne permettraient pas d’atteindre les objectifs poursuivis par cette réglementation, ce qu’il incombera toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier.
1 Langue originale : le français.
2 Arrêts du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573), et du 5 juillet 2017, Fries (C‑190/16, EU:C:2017:513).
3 Règlement du Parlement européen et du Conseil du 20 février 2008 concernant des règles communes dans le domaine de l’aviation civile et instituant une Agence européenne de la sécurité aérienne, et abrogeant la directive 91/670/CEE du Conseil, le règlement (CE) nº 1592/2002 et la directive 2004/36/CE (JO 2008, L 79, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) nº 1108/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009 (JO 2009, L 309, p. 51) (ci-après le « règlement nº 216/2008 »).
4 Règlement de la Commission du 3 novembre 2011 déterminant les exigences techniques et les procédures administratives applicables au personnel navigant de l’aviation civile conformément au règlement (CE) nº 216/2008 du Parlement européen et du Conseil (JO 2011, L 311, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) nº 290/2012 de la Commission, du 30 mars 2012 (JO 2012, L 100, p. 1) (ci-après le « règlement nº 1178/2011 »).
5 Directive du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO 2000, L 303, p. 16).
6 Il ressort des observations écrites des parties et de celles formulées lors de l’audience que la société DQ n’exerce cependant pas cette activité de couverture de services secrets de façon exclusive.
7 Voir, arrêt du 29 octobre 2015, Nagy (C‑583/14, EU:C:2015:737, point 21 et jurisprudence citée).
8 Voir, pour les plus récents, arrêts du 21 mars 2019, Mobit et Autolinee Toscane (C‑350/17 et C‑351/17, EU:C:2019:237, point 35), et du 11 avril 2019, Repsol Butano et DISA Gas (C‑473/17 et C‑546/17, EU:C:2019:308, point 38).
9 Voir, par analogie, arrêt du 14 novembre 1989, Espagne et France/Commission (6/88 et 7/88, EU:C:1989:420), dans lequel la Cour a annulé les mesures d’exécution adoptées par la Commission dans la mesure où elles n’entraient pas dans le champ d’application du règlement de base.
10 Article 2, paragraphe 1, du règlement nº 216/2008.
11 Même si certaines activités exercées par DQ sont, selon les observations des parties, étrangères à cet objectif.
12 Arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 48 et jurisprudence citée). À l’exception des cas où la Cour doit précisément examiner la compatibilité d’une disposition du droit dérivé avec la Charte, ou interpréter celle‑ci conformément à la Charte.
13 Arrêt du 13 novembre 2014, Vital Pérez (C‑416/13, EU:C:2014:2371, point 25 et jurisprudence citée).
14 Voir arrêts du 9 juillet 1969, Völk (5/69, EU:C:1969:35, point 2), du 17 juillet 2008, ASM Brescia (C‑347/06, EU:C:2008:416, point 25), et du 8 novembre 2012, Gülbahce (C‑268/11, EU:C:2012:695, point 32).
15 Voir, notamment, arrêts du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 37) ; du 13 novembre 2014, Vital Pérez (C‑416/13, EU:C:2014:2371, point 27), ainsi que du 15 novembre 2016, Salaberria Sorondo (C‑258/15, EU:C:2016:873, points 24, 30 et 31). Cette approche en trois étapes est d’ailleurs décrite comme « traditionnelle » dans la doctrine : voir, notamment, Tobler, C., « EU Age Discrimination Law and Older and Younger Workers: Court of Justice of the EU Case Law Development », dans Numhauser-Henning, A., Rönnmar, M. (éd.), Age Discrimination and Labour Law, Comparative and Conceptual Perspectives in the EU and Beyond, Wolters Kluwer, Alphen aan den Rijn, 2015.
16 Arrêts du 13 novembre 2014, Vital Pérez (C‑416/13, EU:C:2014:2371), et du 15 novembre 2016, Salaberria Sorondo (C‑258/15, EU:C:2016:873).
17 Article 3 de la directive 2000/78. Sur l’étendue du champ d’application de la directive 2000/78, voir Bailly, P., Lhernould, J.-P., « Discrimination en raison de l’âge : sources européennes et mise en œuvre en droit interne », Revue de droit social, 2012, p. 223, et Tobler, C., op. cit.
18 Voir, par analogie, arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, points 44 et 45).
19 Pour une typologie des dérogations potentielles, voir Bribosia, E., Bombois, T., « Interdiction de la discrimination en fonction de l’âge : du principe, de ses exceptions, et de quelques hésitations ... », RTD Eur., 2011, p. 41, ou encore Tobler, C., op. cit.
20 Sur les raisons de l’existence d’une dérogation spécifique pour les discriminations en fonction de l’âge, voir O’Cinneide, C., « Constitutional and Fundamental Rights Aspects of Age Discrimination », dans Numhauser-Henning, A., Rönnmar, M., op. cit.
21 Arrêt du 12 janvier 2010, Petersen (C‑341/08, EU:C:2010:4, point 37).
22 Arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, points 58 et 69).
23 À cet égard, il convient de relever que les champs d’application des deux dispositions peuvent coïncider, de sorte qu’elles seront appliquées simultanément. Voir, notamment, arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573). Leur application est toutefois soumise à des conditions différentes.
24 Arrêt du 5 mars 2009, Age Concern England (C‑388/07, EU:C:2009:128, point 43).
25 Arrêt du 5 mars 2009, Age Concern England (C‑388/07, EU:C:2009:128, point 46).
26 Arrêt du 13 septembre 2011 (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 82).
27 Arrêt du 13 septembre 2011 (C‑447/09, EU:C:2011:573).
28 Peu d’arrêts ont été rendus s’agissant de la notion de « législation » au sens de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78. L’arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573) doit être signalé à cet égard, quand bien même il n’apporte pas d’éléments d’interprétation permettant de déterminer si la mesure en cause au principal est une mesure prévue par la législation nationale. Dans cet arrêt, la Cour a jugé qu’une mesure édictée par des partenaires sociaux pouvait satisfaire à la condition de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78, si toutefois ces partenaires sociaux ont été habilités par l’État membre, en vertu de règles d’habilitation précises, à adopter des mesures au sens de cette disposition.
29 Sur ce point, voir conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:321, point 51).
30 Arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 59).
31 Si la Cour a admis un certain tempérament à ce principe dans l’arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, points 60 et 61), s’agissant d’accords collectifs adoptés par les partenaires sociaux, ce tempérament est soumis à des conditions précises. Ainsi, les États membres ne peuvent autoriser les partenaires sociaux à adopter des mesures au sens de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2000/78 par des règles d’habilitation que si ces règles d’habilitation sont suffisamment précises afin de garantir que lesdites mesures respectent les exigences énoncées à cette disposition. Je ne crois pas que ce tempérament, relatif à la situation très particulière des partenaires sociaux exerçant leur droit de négocier et de conclure des conventions collectives, devrait être entendu comme permettant en toute hypothèse de s’affranchir de l’exigence de prévision par la législation nationale, sauf à étendre excessivement le champ d’application d’une dérogation au principe d’égalité de traitement, que le législateur de l’Union a pourtant expressément conçue comme particulièrement restrictive.
32 Voir, par analogie, sur cette définition, conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Parlement/Commission (C‑286/14, EU:C:2015:645, point 1).
33 Voir, notamment, arrêts du 12 janvier 2010, Wolf (C‑229/08, EU:C:2010:3) ; du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573) ; du 13 novembre 2014, Vital Pérez (C‑416/13, EU:C:2014:2371) ; du 15 novembre 2016, Salaberria Sorondo (C‑258/15, EU:C:2016:873), ainsi que du 14 mars 2017, Bougnaoui et ADDH (C‑188/15, EU:C:2017:204), ce dernier étant relatif à une différence de traitement fondée sur la religion. Voir, également, conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire Bougnaoui et ADDH (C‑188/15, EU:C:2016:553, points 90 et suiv.).
34 Pour le plus récent, arrêt du 14 mars 2017, Bougnaoui et ADDH (C‑188/15, EU:C:2017:204, point 37 et jurisprudence citée).
35 Arrêt du 13 septembre 2011 (C‑447/09, EU:C:2011:573).
36 Et ce quand bien même, dans cet arrêt, il s’agissait non pas de pilotes exerçant des activités en lien avec la sécurité nationale, mais de pilotes opérant des vols de nature commerciale.
37 Arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 67). Voir également, en ce sens, Maliszewska-Nienartowicz, J., « Orzecznictwo Trybunału Sprawiedliwości dotyczące wyjątku od zakazu dyskryminacji ze względu na istotny i determinujący wymóg zawodowy », Europejski Przegląd Sądowy, 2018, nº 8, p. 32.
38 Au contraire, je serais même d’avis que la spécificité des conditions d’exercice des missions de DQ renforce la nécessité que les pilotes possèdent des conditions physiques particulières.
39 Voir également arrêts du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 71), et du 14 mars 2017, Bougnaoui et ADDH (C‑188/15, EU:C:2017:204, point 38).
40 Arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 72).
41 Et international dans le cas de l’arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 75).
42 Arrêt du 13 septembre 2011, Prigge e.a. (C‑447/09, EU:C:2011:573). Voir également, par analogie, arrêt du 12 janvier 2010, Petersen (C‑341/08, EU:C:2010:4), où la Cour a constaté le caractère disproportionné d’une cessation automatique de la relation de travail, sur le fondement de l’article 2, paragraphe 5, de la directive, toutefois. Sur ce point, voir Schiek, D., « Proportionality in Age Discrimination Cases: Towards a Model Suitable for Socially Embedded Rights », dans Numhauser-Henning, A., Rönnmar, M., op. cit.
43 Arrêt du 12 janvier 2010 (C‑341/08, EU:C:2010:4).
44 Arrêt du 13 septembre 2011 (C‑447/09, EU:C:2011:573).
45 Arrêt du 12 janvier 2010 (C‑341/08, EU:C:2010:4).
46 Arrêt du 13 septembre 2011 (C‑447/09, EU:C:2011:573).
47 Arrêt du 13 septembre 2011 (C‑447/09, EU:C:2011:573, point 75). Je souligne.
48 Arrêt du 12 janvier 2010 (C‑341/08, EU:C:2010:4, point 62).
49 Arrêt du 12 janvier 2010, Petersen (C‑341/08, EU:C:2010:4, point 53). Sur le test de cohérence, voir Bailly, P., Lhernoud, J.-P., op. cit. Voir, également, Domańska, M. « Zakaz dyskryminacji ze względu na wiek w orzecznictwie TS », Europejski Przegląd Sądowy, 2011, nº 4, p. 36.
50 Arrêt du 12 janvier 2010 (C‑341/08, EU:C:2010:4).
51 Arrêt du 13 septembre 2011 (C‑447/09, EU:C:2011:573).
52 Arrêt du 12 janvier 2010, Wolf (C‑229/08, EU:C:2010:3, point 42). Sur le test de proportionnalité, voir, également, Schiek, D., op. cit.
53 Arrêt du 14 mars 2017, G4S Secure Solutions (C‑157/15, EU:C:2017:203, point 36).
54 Voir arrêt du 5 juillet 2017, Fries (C‑190/16, EU:C:2017:513, point 66), par lequel la Cour a jugé que le fait qu’une limite d’âge n’impliquait pas qu’il soit mis automatiquement un terme au contrat de travail d’un salarié au motif que celui-ci a atteint ladite limite était un indice de la proportionnalité de la mesure.
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