Romania v Commission (Judgment) French Text [2020] EUECJ C-498/19P (10 September 2020)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/C49819P.html
Cite as: ECLI:EU:C:2020:686, [2020] EUECJ C-498/19P, EU:C:2020:686

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ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

10 septembre 2020 (*)

« Pourvoi – Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) – Décision de la Commission européenne excluant des dépenses du financement de l’Union européenne – Notification au destinataire – Erreur d’impression de l’annexe – Publication de la décision au Journal officiel de l’Union européenne – Délai de recours – Point de départ – Tardiveté – Principe de sécurité juridique – Respect du principe du contradictoire »

Dans l’affaire C‑498/19 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 27 juin 2019,

Roumanie, représentée initialement par M. C.-R. Canţăr ainsi que par Mmes E. Gane, O.-C. Ichim et M. Chicu, puis par Mmes E. Gane, O.-C. Ichim et M. Chicu, en qualité d’agents,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par Mme J. Aquilina et M. A. Biolan, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. M. Safjan, président de chambre, MM. L. Bay Larsen et N. Jääskinen (rapporteur), juges,

avocat général : M. G. Hogan,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, la Roumanie demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 30 avril 2019, Roumanie/Commission (T‑530/18, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2019:269), par laquelle celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation partielle de la décision d’exécution (UE) 2018/873 de la Commission, du 13 juin 2018, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2018, L 152, p. 29, ci-après la « décision litigieuse »), en ce qu’elle concerne certaines dépenses effectuées par cet État membre.

 Les antécédents du litige et la décision litigieuse

2        Le 13 juin 2018, la Commission européenne a adopté la décision litigieuse, par laquelle elle a appliqué à la Roumanie une correction financière d’un montant total de 90 133 370,64 euros concernant, notamment, d’une part, la sous-mesure 1a eu égard aux mesures relevant du Système intégré de gestion et de contrôle (SIGC) dans le cadre du « Développement rural Feader » pour les exercices financiers 2015 et 2016 et, d’autre part, les sous-mesures 3a, 5a, 3b et 4b eu égard aux mesures non liées à la surface dans le cadre du « Développement rural Feader Axe 2 » pour l’exercice financier 2014.

3        L’article 2 de la décision litigieuse prévoit notamment que « la Roumanie [es]t destinataire [...] de la présente décision ».

4        Le 14 juin 2018, la décision litigieuse a été notifiée à la représentation permanente de la Roumanie auprès de l’Union européenne, sous le numéro C(2018) 3826.

5        Le 15 juin 2018, la décision litigieuse a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne.

 La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

6        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 septembre 2018, la Roumanie a introduit un recours tendant à l’annulation partielle de la décision litigieuse.

7        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 12 octobre 2018, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité du recours au titre de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Le 26 novembre 2018, la Roumanie a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission.

8        Par mesure d’organisation de la procédure du 24 janvier 2019, le Tribunal a demandé à la Commission des renseignements concernant d’éventuelles différences entre la version notifiée et la version publiée de la décision litigieuse. Par courrier du 4 février 2019, la Commission a déféré à la demande du Tribunal en fournissant les renseignements demandés.

9        Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a constaté que le recours de la Roumanie avait été introduit après l’expiration du délai prescrit et qu’il était, dès lors, tardif.

10      Le Tribunal a jugé, au point 32 de l’ordonnance attaquée, que le délai de recours contre la décision litigieuse avait commencé à courir à compter du jour de la notification de cette décision à la représentation permanente de la Roumanie, intervenue le 14 juin 2018, et non à compter de celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne. Conformément au règlement de procédure du Tribunal, le délai de recours, délai de distance inclus, avait expiré, selon le Tribunal, le 24 août 2018 à minuit.

11      Le Tribunal, ayant constaté la tardivité du recours, a rejeté celui-ci comme étant irrecevable.

 Les conclusions des parties devant la Cour

12      Par son pourvoi, la Roumanie demande à la Cour :

–        de déclarer recevable le pourvoi ;

–        d’annuler l’ordonnance attaquée ;

–        de statuer à nouveau sur l’affaire T‑530/18 et d’annuler partiellement la décision litigieuse ou de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour que celui-ci annule partiellement la décision litigieuse, et

–        de condamner la Commission aux dépens.

13      La Commission demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi et

–        de condamner la Roumanie aux dépens.

 Sur le pourvoi

14      Au soutien de son pourvoi, la Roumanie  invoque deux moyens. D’une part, elle soutient que le Tribunal a violé les dispositions du droit de l’Union régissant le délai de recours contre la décision litigieuse, notamment les articles 263 et 297 TFUE ainsi que le principe de sécurité juridique. D’autre part, la Roumanie fait valoir que le Tribunal a violé le principe du contradictoire au regard de l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal en ne lui ayant pas accordé la possibilité de présenter ses observations lors d’une mesure d’organisation de la procédure adressée par celui-ci à la Commission.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 263 et 297 TFUE ainsi que du principe de sécurité juridique

15      Ce moyen se divise, en substance, en quatre branches. Premièrement, la Roumanie fait valoir que le Tribunal a commis une erreur d’appréciation en considérant que la notification de la décision litigieuse effectuée par la Commission était de nature à faire courir le délai prévu par l’article 263 TFUE. Deuxièmement, elle soutient que le Tribunal a commis une erreur dans l’interprétation des articles 263 et 297 TFUE en ce qui concerne les effets de la publication au Journal officiel de l’Union européenne de la décision litigieuse. Troisièmement, elle fait valoir que le Tribunal a méconnu le principe de sécurité juridique en estimant que les discordances entre la version notifiée et la version publiée de la décision litigieuse constituaient une erreur rédactionnelle mineure. Quatrièmement, la Roumanie soutient que le Tribunal a considéré à tort que les différences entre ces versions de la décision litigieuse visant d’autres États membres étaient dénuées de pertinence et inopérantes.

16      La Commission conclut au rejet du premier moyen.

 Sur la première branche du premier moyen, tirée de l’erreur commise par le Tribunal lorsqu’il a estimé que le délai de recours avait été déclenché par la notification de la décision litigieuse

–       Argumentation des parties

17      La  Roumanie fait valoir, tout d’abord, que le Tribunal a constaté de manière prématurée, au point 31 de l’ordonnance attaquée, « que la décision [litigieuse] a pris effet à l’égard de la Roumanie par sa notification, intervenue le 14 juin 2018 », sans avoir réalisé une analyse concrète de cette dernière. Elle rappelle à cet égard qu’une décision est dûment notifiée, au sens du traité FUE, dès lors qu’elle est communiquée à son destinataire et que celui-ci est mis en mesure d’en prendre connaissance.

18      Elle soutient, ensuite, que l’existence de toute erreur portant sur les éléments essentiels d’une décision, telle que la décision litigieuse, constitue une atteinte au principe de sécurité juridique qui exige que tout acte des institutions produisant des effets juridiques soit clair, précis et porté à la connaissance de l’intéressé. Cet impératif s’impose, selon elle, avec une rigueur particulière lorsqu’il s’agit d’un acte susceptible de comporter des conséquences financières, tel que celui en l’espèce, afin de permettre à l’intéressé de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qui lui sont imposées.

19      Selon la Roumanie, le Tribunal a considéré de manière erronée, aux points 50 et 52 à 54 de l’ordonnance attaquée, que les différences entre la version notifiée et la version publiée de la décision litigieuse étaient la conséquence d’une erreur formelle et mineure, ne l’empêchant pas de prendre connaissance du contenu et des motifs de cette décision. Elle fait valoir, en outre, que le Tribunal a réalisé cette appréciation sans disposer de repère lui permettant d’effectuer un classement entre les différentes catégories d’erreurs.

20      Plus particulièrement, en ce qui concerne le point 53 de l’ordonnance attaquée, la Roumanie conteste l’appréciation du Tribunal selon laquelle elle aurait pu déduire facilement du texte de la décision litigieuse que le mot « montant », figurant dans la version notifiée de celle-ci, faisait en réalité référence à l’expression « montant estimé », employée dans la version publiée, car seuls quatre types de correction auraient pu être mentionnés, sous les dénominations « ponctuelle », « forfaitaire », « extrapolée » et « montant estimé ». Cette appréciation est erronée, selon elle, en raison du fait que les dispositions applicables en la matière prévoient uniquement trois types de correction possibles, sous les appellations « calculées », « extrapolées » et « forfaitaires ». Elle soutient à cet égard que la référence « montant », ne correspondant pas aux trois corrections existantes dans la réglementation de l’Union, ne lui a pas permis de comprendre de manière complète et précise le contenu de la décision litigieuse.

21      Enfin, la Roumanie conclut que le Tribunal, en n’ayant pas correctement apprécié le caractère complet et précis de la décision litigieuse telle qu’elle a été notifiée, a considéré à tort que la notification de la décision litigieuse a déclenché le délai de recours prévu à l’article 263 TFUE. Selon elle, c’est à la date de la publication de cette décision au Journal officiel de l’Union européenne qu’elle en a connu le contenu et les motifs de manière complète et que, par conséquent, c’est la publication de la décision litigieuse qui a fait courir le délai pour introduire un recours.

22      La Commission conteste les allégations de la Roumanie et soutient que celles-ci, relevant de l’appréciation factuelle du Tribunal, ne sauraient être contestées par cet État.

–       Appréciation de la Cour

23      Il importe de rappeler, en premier lieu, qu’il résulte de l’article 256 TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. Lorsque le Tribunal a constaté ou apprécié les faits, la Cour est compétente pour exercer, en vertu de l’article 256 TFUE, un contrôle sur la qualification juridique de ces faits et les conséquences de droit qui en ont été tirées par le Tribunal. La Cour n’est donc pas compétente pour constater les faits ni, en principe, pour examiner les preuves que le Tribunal a retenues à l’appui de ces faits. Cette appréciation ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation de ces éléments, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (voir, notamment, arrêt du 19 mars 2009, Archer Daniels Midland/Commission, C‑510/06 P, EU:C:2009:166, point 105).

24      En l’occurrence, le Tribunal a qualifié juridiquement des faits ayant une incidence directe sur la détermination du point de départ du délai de recours prévu à l’article 263 TFUE, en estimant que la notification de la décision litigieuse présentait un caractère précis et clair. La remise en cause d’une telle qualification juridique des faits relève, donc, d’une question de droit qui peut être, en tant que telle, invoquée dans le cadre du présent pourvoi.

25      Il convient cependant de relever que la Roumanie conteste également dans son pourvoi des appréciations factuelles opérées par le Tribunal, aux points 52 à 54 de l’ordonnance attaquée. En particulier, l’affirmation opérée par le Tribunal selon laquelle elle aurait pu déduire aisément du texte de la décision litigieuse que le terme « montant », figurant à la cinquième colonne du tableau de l’annexe de la version notifiée de la décision litigieuse, à titre de dénomination de l’un des quatre types de correction qui y sont mentionnés, résultait d’une erreur d’impression de ce tableau et correspondait en réalité à l’intitulé de la correction dénommée « montant estimé ». Or, le Tribunal étant seul compétent pour apprécier les éléments de preuve, l’appréciation de ces éléments ne constitue pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi. Aucune dénaturation des éléments de preuve n’ayant été alléguée ni démontrée par la Roumanie, les griefs dirigés contre les appréciations factuelles réalisées aux points 52 à 54 de cette ordonnance doivent être rejetés comme étant manifestement irrecevables.

26      En second lieu, quant au bien-fondé de la présente branche, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant, au point 59 de l’ordonnance attaquée, que le délai de recours contre la décision litigieuse avait commencé à courir à compter du jour de la notification de celle-ci à la représentation permanente de la Roumanie.

27      En effet, en ce qui concerne la régularité de la notification des actes de l’Union, la Cour a eu l’occasion de préciser qu’une décision est dûment notifiée dès lors qu’elle est communiquée à son destinataire et que celui-ci est mis en mesure d’en prendre connaissance (ordonnance du 2 octobre 2014, Page Protective Services/SEAE, C‑501/13 P, non publiée, EU:C:2014:2259, point 30, et arrêt du 17 mai 2017, Portugal/Commission, C‑337/16 P, EU:C:2017:381, point 47).

28      À cet égard, le Tribunal a considéré à juste titre, au point 58 de l’ordonnance attaquée, que les différences entre la version notifiée et la version publiée de la décision litigieuse n’ont pas empêché la Roumanie de prendre connaissance du contenu de cette décision, de comprendre les motifs sur lesquels elle repose ainsi que d’introduire un recours contre elle dans le délai prescrit.

29      S’agissant, premièrement, des différences entre la version notifiée et la version publiée de la décision litigieuse, il convient de constater que l’omission du terme « estimé » dans la version notifiée de cette décision n’a pas empêché la Roumanie de comprendre et, d’ailleurs, de contester, ainsi qu’il ressort de l’ordonnance attaquée, ladite décision ainsi que les motifs sur lesquels elle repose.

30      En effet, d’une part, il ressort du point 53 de l’ordonnance attaquée que, dans la cinquième colonne du tableau figurant à l’annexe de la décision litigieuse, seuls pouvaient être mentionnés quatre types de correction, présentés sous des dénominations différentes, à savoir « ponctuelle » (punctuală ou calculată en langue roumaine), « forfaitaire » (rată forfetară en langue roumaine), « montant estimé » (sumă estimată en langue roumaine) et, enfin, « extrapolée » (extrapolate en langue roumaine). C’est dès lors à bon droit que le Tribunal en a déduit que, alors que les trois autres types de correction portaient des noms différents en langue roumaine du mot sumă (montant), ce dernier ne pouvait correspondre qu’au type de correction dénommé sumă estimată (montant estimé).

31      D’autre part, ainsi qu’il ressort du point 50 de l’ordonnance attaquée, une erreur purement formelle ou une omission qui, même si elle n’est pas de nature purement formelle, n’empêche pas le destinataire de la décision notifiée de prendre connaissance du contenu et des motifs de celle-ci n’a pas d’incidence sur l’application du délai de recours prévu à l’article 263, sixième alinéa, TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 17 mai 2017, Portugal/Commission, C‑337/16 P, EU:C:2017:381, points 48 à 50, ainsi que du 21 mars 2019, Eco-Bat Technologies e.a./Commission, C‑312/18 P, non publié, EU:C:2019:235, point 27). Par conséquent, le Tribunal a pu considérer à bon droit que l’omission du terme « estimé », dans l’intitulé de la correction dénommée « montant estimé », figurant à la cinquième colonne du tableau de l’annexe de la décision litigieuse telle que notifiée, n’a pas empêché la Roumaine de prendre connaissance du contenu et des motifs de cette décision telle que notifiée.

32      Par ailleurs, l’argument de la Roumanie, selon lequel cette dernière appréciation du Tribunal est erronée en raison du fait que les dispositions applicables en la matière prévoient uniquement trois types de correction possibles, sous les appellations « calculées », « extrapolées » et « forfaitaires », à supposer qu’il puisse être regardé comme n’étant pas un argument nouveau au stade du pourvoi, doit être rejeté comme étant inopérant. En effet, la version notifiée et la version publiée de la décision litigieuse font état des mêmes types de correction, quand bien même le terme « estimé » a été omis de l’intitulé de la correction « montant estimé » dans la version notifiée de cette décision, lesquels diffèrent sensiblement de ceux invoqués par cet État membre. Dès lors, le fait que la Commission aurait dû recourir à d’autres dénominations s’agissant des types de correction figurant dans des décisions, telles que la décision litigieuse, écartant du financement de l’Union certaines dépenses effectuées par les États membres, est sans incidence sur l’appréciation de la date à laquelle le délai de recours contre cette décision a commencé à courir.

33      S’agissant, deuxièmement, de l’argument selon lequel le Tribunal a considéré de manière prématurée, au point 31 de l’ordonnance attaquée, que la décision litigieuse avait pris effet à l’égard de la Roumanie par sa notification, alors qu’il n’avait pas réalisé une analyse concrète de cette dernière, celui-ci doit être rejeté comme étant non fondé. En effet, le constat figurant au point 31 de l’ordonnance attaquée, de même que le motif figurant au point 32 de cette ordonnance et selon lequel le délai de recours contre la décision litigieuse a commencé à courir à compter de la notification de cette décision à la représentation permanente de la Roumanie, et non à compter de la publication de celle-ci au Journal officiel de l’Union européenne, s’appuient notamment sur les motifs exposés aux points 49 à 57 de l’ordonnance attaquée dans lesquels le Tribunal a recherché si, en dépit de l’erreur figurant dans la version notifiée de celle-ci, la Roumanie avait néanmoins pu prendre connaissance du contenu de cette décision ainsi que des motifs sur lesquels elle repose.

34      S’agissant, troisièmement, de l’argument soulevé par la Roumanie, selon lequel le Tribunal a qualifié à tort, de manière arbitraire, les erreurs commises comme étant mineures sans disposer de repère lui permettant d’effectuer un tel classement, il convient de relever, en tout état de cause, qu’une telle qualification ressort nécessairement des constats figurant aux points 28, 29 et 31 du présent arrêt. Il y a lieu, dès lors, d’écarter cette argumentation.

35      Enfin, en ce qui concerne l’argument de la Roumanie selon lequel les erreurs commises par la Commission concernaient des éléments essentiels de la décision litigieuse qui compromettaient sa notification ainsi que le principe de sécurité juridique, il convient de constater que cette argumentation est fondée sur la prémisse erronée selon laquelle la Roumanie n’avait pu prendre valablement connaissance de la décision litigieuse telle qu’elle a été notifiée. Or, si le type de correction est un élément important de la décision litigieuse, il n’en reste pas moins, ainsi qu’il ressort de l’ordonnance attaquée, que la Roumanie a pu comprendre la décision litigieuse ainsi que les motifs sur lesquels celle-ci a été fondée, dès lors qu’elle a pu, en tout état de cause, contester le type de correction au motif qu’il n’aurait pas été approprié.

36      Par ailleurs, il y a lieu de relever que le fait de permettre à la Roumanie de retarder le point de départ du délai de recours en se prévalant de la prise de connaissance effective ou complète ultérieure de la décision litigieuse par la publication de cette dernière pourrait porter atteinte à la finalité même du délai de recours, qui consiste à sauvegarder la sécurité juridique en évitant la remise en cause indéfinie des actes de l’Union entraînant des effets de droit (voir, notamment, arrêts du 30 janvier 1997, Wiljo, C‑178/95, EU:C:1997:46, point 19, et du 22 octobre 2002, National Farmers’ Union, C‑241/01, EU:C:2002:604, point 34, ainsi qu’ordonnance du 15 novembre 2012, Städter/BCE, C‑102/12 P, non publiée, EU:C:2012:723, point 12). Partant, la Roumanie ne saurait alléguer que le Tribunal a méconnu le principe de sécurité juridique en considérant que la date de notification de la décision litigieuse constituait le point de départ du délai de recours.

37      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la première branche du premier moyen comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, non fondée.

 Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de l’interprétation erronée du Tribunal des articles 263 et 297 TFUE quant aux effets de la publication au Journal officiel de l’Union européenne de la décision litigieuse

–       Argumentation des parties

38      La  Roumanie fait valoir, tout d’abord, que, contrairement à ce que le Tribunal a indiqué au point 18 de l’ordonnance attaquée, elle considère que l’article 297 TFUE ne s’oppose pas à ce que le point de départ du délai pour l’introduction d’un recours en annulation contre un acte de l’Union corresponde à la date de l’entrée en vigueur de cet acte ou de celle à laquelle ledit acte a produit des effets juridiques.

39      Par ailleurs, elle soutient que le Tribunal n’a pas correctement apprécié, aux points 38 à 41 de l’ordonnance attaquée, la jurisprudence invoquée dans le cadre de son recours en annulation. Elle maintient à cet égard qu’elle a fait référence à cette jurisprudence non pas au motif que les faits évoqués étaient semblables à ceux du cas de l’espèce, mais pour illustrer une question de principe, à savoir celle selon laquelle il existe de nombreux cas dans lesquels, pour déterminer le point de départ du délai pour l’introduction d’un recours en annulation, une priorité a été accordée à la date à laquelle le destinataire a été informé effectivement du contenu de l’acte en cause au détriment de la date à laquelle cet acte a produit des effets juridiques.

40      La Roumanie soutient, ensuite, que le Tribunal a considéré de manière erronée, aux points 52 et 58 de l’ordonnance attaquée, que l’erreur entachant la décision litigieuse était mineure au motif qu’elle était le résultat d’un problème d’impression. Selon elle, les causes de l’erreur ne sont pas déterminantes dans l’appréciation du caractère mineur ou majeur de celle-ci. Seuls importeraient à cet égard les effets que cette erreur produit sur la prise de connaissance effective de la décision litigieuse. Elle fait valoir que, s’agissant de l’erreur relative au caractère incomplet d’un élément essentiel de la décision litigieuse, le respect du principe de sécurité juridique s’impose avec une rigueur particulière.

41      En outre, la Roumanie considère que le fait que le Tribunal a demandé des renseignements concernant la décision litigieuse à la Commission démontre que l’erreur commise par celle-ci n’était pas si évidente.

42      De plus, le fait de retenir le jour de la notification de la décision litigieuse comme point de départ du délai pour l’introduction du recours en annulation priverait la Roumanie du droit à un recours effectif.

43      Enfin, cet État membre conclut que la prise de connaissance effective et complète de la décision litigieuse a eu lieu par la publication de celle-ci et que, par conséquent, son recours a été introduit dans le délai prescrit par l’article 263 TFUE.

44      La Commission réfute ces allégations.

–       Appréciation de la Cour

45      Il convient de constater, en premier lieu, que le Tribunal a formulé de manière erronée, au point 18 de l’ordonnance attaquée, l’argumentation présentée par la Roumanie dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité du recours. Audit point, le Tribunal a exposé que la Roumanie considère que l’article 263, sixième alinéa, TFUE ne saurait être interprété en ce sens que « le point de départ du délai de deux mois pour l’introduction d’un recours en annulation contre un acte de l’Union [...] serait, automatiquement et de manière générale, le moment de l’entrée en vigueur ou de la prise d’effets juridiques de cet acte », au motif que l’article 297 TFUE s’oppose à une telle interprétation. Or, la Roumanie avait indiqué, dans ses écritures, que l’article 297 TFUE ne s’opposait pas à une telle interprétation. Toutefois, la Roumanie ne soutient pas que cette erreur a conduit le Tribunal à commettre, dans l’ordonnance attaquée, une erreur de droit ou à dénaturer des faits. Par conséquent, cette erreur est sans incidence sur l’ordonnance attaquée.

46      En deuxième lieu, en ce qui concerne la prétendue erreur de droit commise par le Tribunal aux points 38 à 41 de l’ordonnance attaquée, il importe de relever que, au point 38 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a considéré, tout d’abord, que l’argumentation développée par la Roumanie aux fins de contester la pertinence de l’application en l’espèce, en tant que point de départ du délai de recours, de la date de notification de la décision litigieuse au détriment de celle de la publication de cet acte était inopérante. Il s’est déterminé ainsi au motif que les décisions sur lesquelles cette argumentation se fondait ne retenaient comme point de départ du délai de recours la date de la publication de l’acte de l’Union concerné qu’en raison de l’absence de notification de cet acte à la partie requérante dans les affaires ayant donné lieu à ces décisions. Or, le Tribunal a, à juste titre, observé que, en l’espèce, la Roumanie, en tant que destinataire de la décision litigieuse, a reçu notification de celle-ci et que, partant, la date de cette notification constituait pour elle le point de départ du délai de recours.

47      Le Tribunal a ainsi, aux points 39 à 41 de l’ordonnance attaquée, procédé à l’examen de trois décisions invoquées par la Roumanie. Il a constaté que, dans l’arrêt du 10 mars 1998, Allemagne/Conseil (C‑122/95, EU:C:1998:94), le recours était dirigé contre un acte de portée générale adressé à tous les États membres et que, dans l’ordonnance du 21 novembre 2005, Tramarin/Commission (T‑426/04, EU:T:2005:405), le recours avait été formé par un tiers intéressé contre un acte adressé à un seul État membre. Il en a déduit que, eu égard à ces éléments, le délai de recours en cause dans ces deux affaires ne pouvait commencer à courir qu’à compter de la date de publication de l’acte concerné. Il a également relevé, dans l’arrêt du 23 avril 2013, Gbagbo e.a./Conseil (C‑478/11 P à C‑482/11 P, EU:C:2013:258), que, eu égard aux faits de cette affaire, le délai de recours contre les actes en cause ne commençait à courir qu’à compter de la date de notification de ces actes aux personnes concernées, alors même que la publication desdits actes, qui avait été effectuée antérieurement, en déterminait l’entrée en vigueur.

48      C’est à bon droit que le Tribunal a rejeté l’argumentation soulevée par la Roumanie aux fins d’obtenir l’application en l’espèce de ces trois décisions. En effet, il ne ressort pas desdites décisions que la date de la connaissance effective du contenu de l’acte en cause devait être retenue comme point de départ du délai pour l’introduction d’un recours en annulation au détriment de la date à laquelle cet acte a produit des effets juridiques. En effet, dans les deux premières affaires, le point de départ du délai de recours commence à courir à partir de la publication de l’acte en cause et non pas à partir de la connaissance effective de ce dernier. En revanche, dans la troisième affaire, si le délai de recours a commencé à courir à partir de la communication individuelle des mesures restrictives en cause, il n’en reste pas moins que c’est la notification de ces mesures et non pas leur publication qui a fait courir le délai de recours. Dans ces conditions, l’argumentation de la Roumanie ne saurait prospérer et doit être rejetée comme étant non fondée.

49      En troisième lieu, s’agissant de l’argument de la Roumanie résumé au point 40 du présent arrêt, il convient de relever que la Roumanie a interprété de manière erronée l’ordonnance attaquée. En effet, le Tribunal a constaté, au point 53 de cette ordonnance, que « ce problème d’impression ne saurait pas nuire à la compréhension des informations contenues dans l’annexe ». Il en a déduit, au point 58 de ladite ordonnance, que « de telles différences mineures entre le texte notifié et le texte publié, résultant d’un problème d’impression [...], ainsi qu’une erreur rédactionnelle mineure commune à ces deux textes [...], n’étaient pas susceptibles d’empêcher la Roumanie de prendre connaissance du contenu de cette décision ». En statuant ainsi, il a estimé que les erreurs commises étaient mineures eu égard à leurs effets sur la prise de connaissance effective, par la Roumanie, de la décision litigieuse. Le Tribunal n’a donc pas considéré que les erreurs étaient mineures au motif qu’elles résultaient d’une erreur d’impression ou d’une erreur rédactionnelle. Il y a dès lors lieu de rejeter cette argumentation comme étant non fondée.

50      En quatrième lieu, il convient de rappeler qu’il résulte de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169 du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi (voir, notamment, arrêt du 5 mars 2015, Ezz e.a./Conseil, C‑220/14 P, EU:C:2015:147, point 111, ainsi qu’ordonnance du 19 septembre 2019, Renew Consorzio Energie Rinnovabili/Commission et Italie, C‑325/19 P, non publiée, EU:C:2019:768, point 19).

51      En l’espèce, il suffit de relever que, par son argumentation reproduite au point 41 du présent arrêt, la Roumanie se borne à observer que l’erreur commise par la Commission n’était pas si évidente, mais ne critique à cet égard aucun point des motifs de l’ordonnance attaquée. Il y a donc lieu de rejeter ces arguments comme étant irrecevables.

52      En cinquième lieu, quant à l’argument tiré de la violation du droit à un recours effectif, il ne saurait être accueilli.

53      En effet, le droit à un recours effectif consacré à l’article 47, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne saurait, en tout état de cause, être invoqué pour contester l’application d’un délai de recours de deux mois qui court à compter de la notification de l’acte en cause au requérant, dès lors qu’il ressort des termes mêmes de l’article 263, sixième alinéa, TFUE qu’un tel recours doit être formé dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte, de sa notification au requérant ou, à défaut, du jour où celui-ci en a eu connaissance.

54      Par conséquent, le Tribunal a pu constater à bon droit, au point 38 de l’ordonnance attaquée, que la décision litigieuse avait été dûment notifiée à la Roumanie et que c’est cette notification qui constituait pour elle le point de départ du délai de recours.

55      Dans ces conditions, aucun des arguments soulevés par la Roumanie dans le cadre de la présente branche ne pouvant prospérer, il convient de rejeter la deuxième branche du premier moyen comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondée.

 Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de la violation du principe de sécurité juridique

–       Argumentation des parties

56      La Roumanie soutient que le Tribunal, aux points 56 à 58 de l’ordonnance attaquée, a méconnu le principe de sécurité juridique en considérant que l’une des discordances relative au type de correction, deux corrections ayant été classées par erreur sous la dénomination sumă estimată (montant estimé) au lieu de la dénomination rată forfetară (forfaitaire), constituait une erreur rédactionnelle mineure, ne générant aucune confusion en ce qui concerne la nature de la correction.

57      Elle fait valoir à cet égard que le Tribunal a justifié de manière erronée la conduite de la Commission en précisant que l’erreur concernant le type de correction, d’une part, apparaissait à la fois dans le texte de la décision litigieuse telle que notifiée et dans celui de cette décision telle que publiée au Journal officiel de l’Union européenne et, d’autre part, n’aurait pas été commise dans le cadre de la procédure administrative. Selon la Roumanie, le caractère répétitif de l’erreur ne peut qu’accentuer l’incertitude portant sur la nature des corrections et, par conséquent, sur l’étendue des obligations de l’État, au mépris du principe de sécurité juridique. Cette constatation ne saurait être démentie par le fait que le Tribunal a précisé, au point 57 de l’ordonnance attaquée, que les erreurs n’auraient pas été commises dans le cadre de la procédure administrative.

58      La Commission conteste ces allégations.

–       Appréciation de la Cour

59      À titre liminaire, il y a lieu de relever que la partie de l’argumentation développée par la Roumanie à l’appui de la présente branche ne satisfait pas aux exigences rappelées au point 23 du présent arrêt. En effet, les critiques afférentes à une prétendue violation du principe de sécurité juridique renvoient, dans une large mesure, notamment en ce qui concerne les points 56 et 57 de l’ordonnance attaquée, à l’appréciation des faits, appréciation dont il convient de rappeler qu’elle ne saurait, sauf dénaturation desdits faits, relever du contrôle que la Cour est appelée à exercer lors d’un pourvoi.

60      Par ailleurs, s’agissant de l’argumentation relative à la prétendue méconnaissance du principe de sécurité juridique par le Tribunal, il y a lieu de relever que cette argumentation est imprécise et dépourvue de structure cohérente pour que la Cour soit en mesure d’exercer un contrôle de légalité sur cette base.

61      En ce qui concerne la qualification juridique de ces faits par le Tribunal, celui-ci a, au point 56 de l’ordonnance attaquée, après avoir relevé que l’erreur concernant les deux corrections en cause apparaissait à la fois dans la version notifiée et dans la version publiée de la décision litigieuse, estimé, à bon droit, que le caractère répétitif de l’erreur commise était sans incidence sur le délai de recours. C’est également à juste titre que le Tribunal a considéré que cette erreur rédactionnelle, commune à ces deux versions, a été sans incidence sur le contenu de ladite décision, la Roumanie ne pouvant utilement prétendre que celui-ci différait selon la version prise en considération.

62      Il découle de tout ce qui précède que la troisième branche du premier moyen doit être rejetée comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondée.

 Sur la quatrième branche du premier moyen, tirée de ce que le Tribunal a violé l’article 263 TFUE en jugeant que les différences entre les versions notifiée et publiée de la décision litigieuse, en tant qu’elles concernaient d’autres États membres, étaient en l’espèce dépourvues de pertinence et inopérantes

–       Argumentation des parties

63      La  Roumanie fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant, au point 51 de l’ordonnance attaquée, que les différences entre les versions notifiée et publiée de la décision litigieuse visant d’autres États membres étaient dénuées de pertinence et inopérantes. Elle soutient à cet égard, d’une part, que le Tribunal a, à tort, rejeté leur argumentation, alors que les États membres ont le statut de requérants privilégiés qui n’ont pas à justifier d’un intérêt à agir et, d’autre part, que celui-ci n’a pas motivé son rejet.

64      La Commission réfute cette argumentation.

–       Appréciation de la Cour

65      Il y a lieu de constater que le Tribunal a, à juste titre, estimé, au point 51 de l’ordonnance attaquée, que d’éventuelles différences dans des dispositions de la décision litigieuse visant d’autres États membres étaient dénuées de pertinence et inopérantes pour apprécier le recours formé par la Roumanie contre cette décision. En effet, dès lors que la Roumanie n’a contesté la décision litigieuse qu’en tant qu’elle porte sur l’exclusion de certaines dépenses qu’elle a effectuées, les éventuelles erreurs figurant dans les dispositions de ladite décision visant d’autres États membres sont dénuées de pertinence et inopérantes aux fins d’apprécier son recours en annulation.

66      Quant à l’argument de la Roumanie tiré de la violation par le Tribunal de l’obligation de motivation au point 51 de l’ordonnance attaquée, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver les arrêts qui incombe au Tribunal en vertu de l’article 36 et de l’article 53, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne n’impose pas à celui-ci de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties au litige. La motivation peut donc être implicite, à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles les mesures en question ont été prises et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle juridictionnel (arrêt du 29 mars 2011, ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., C‑201/09 P et C‑216/09 P, EU:C:2011:190, point 78 ainsi que jurisprudence citée).

67      Certes, les arguments de la Roumanie relatifs à l’existence alléguée d’éventuelles différences dans des dispositions de la décision litigieuse visant d’autres États membres ont été écartés directement par le Tribunal comme étant dénués de pertinence et inopérants. Toutefois, aux fins de fonder son appréciation, le Tribunal a invoqué le point 42 de l’ordonnance du 19 avril 2016, Portugal/Commission (T‑550/15, non publiée, EU:T:2016:237), par lequel le Tribunal constatait, en substance, que l’erreur d’impression commise par la Commission dans cette affaire était sans incidence pour la requérante, car cette erreur portait sur des versions qui concernaient les autres États membres, et non pas celle qui avait été notifiée à la requérante. Ce faisant, la Roumanie ne saurait alléguer que le Tribunal n’a pas motivé son appréciation à cet égard.

68      Il s’ensuit qu’il y a lieu d’écarter la quatrième branche du premier moyen comme étant non fondée et, par conséquent, de rejeter le premier moyen dans son intégralité.

 Sur le second moyen, tiré de la violation du principe du contradictoire

 Argumentation des parties

69      La  Roumanie  fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne lui ayant pas accordé la possibilité de formuler des observations sur les renseignements que la Commission a fournis dans la réponse à la question qui lui avait été adressée par celui-ci. Selon la Roumanie, le Tribunal aurait fondé, aux points 52 à 58 de l’ordonnance attaquée, son appréciation relative à la prise en compte de la notification de la décision litigieuse pour le calcul du délai de recours sur ces renseignements.

70      La Commission  conteste ces allégations.

 Appréciation de la Cour

71      Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour, les droits de la défense occupent une place prééminente dans l’organisation et le déroulement d’un procès équitable (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2008, Weiss und Partner, C‑14/07, EU:C:2008:264, point 47, et du 2 avril 2009, Gambazzi, C‑394/07, EU:C:2009:219, point 28) et les droits de la défense incluent le principe du contradictoire (arrêts du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 61, ainsi que du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 50).

72      S’agissant plus particulièrement du principe du contradictoire, il y a lieu de rappeler que ce principe implique, en règle générale, le droit pour les parties à un procès d’être en mesure de prendre position sur les faits et les documents sur lesquels sera fondée une décision judiciaire, ainsi que de discuter les preuves et les observations présentées devant le juge (voir, en ce sens, arrêt du 14 février 2008, Varec, C‑450/06, EU:C:2008:91, point 47), et les moyens de droit relevés d’office par le juge, sur lesquels celui-ci entend fonder sa décision (voir, en ce sens, arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 54). En effet, pour satisfaire aux exigences liées au droit à un procès équitable, dans l’organisation et le déroulement duquel les droits de la défense occupent une place éminente, il importe que les parties puissent débattre contradictoirement tant des éléments de fait que des éléments de droit qui sont décisifs pour l’issue de la procédure (arrêt du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA, C‑197/09 RX-II, EU:C:2009:804, points 39 et 41).

73      Par ailleurs, ainsi qu’il a été relevé par la Roumanie dans sa requête en pourvoi, l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal est consacré spécifiquement au principe du contradictoire. En vertu de cet article, le Tribunal ne prend en considération que des actes de procédure et les pièces dont les représentants des parties ont pu prendre connaissance et sur lesquels ils ont pu se prononcer. À cet égard, il convient de rappeler que c’est seulement à la suite de la dernière refonte du règlement de procédure du Tribunal du 4 mars 2015 (JO 2015, L 105, p. 1) que celui-ci comporte une disposition relative au caractère contradictoire de la procédure, érigeant celle-ci au rang de disposition générale de la procédure.

74      Quant au fait que le Tribunal n’a pas demandé à la Roumanie de se prononcer, à la suite de la mesure d’organisation de la procédure du 24 janvier 2019 par laquelle il a demandé à la Commission des renseignements sur d’éventuelles différences entre la version notifiée et la version publiée de la décision litigieuse, il résulte certes des termes mêmes de l’article 88 du règlement de procédure du Tribunal que la décision de poser des questions aux parties relève de la libre appréciation du Tribunal et que ce dernier est également libre d’apprécier souverainement la valeur qu’il convient d’attribuer aux différents éléments de fait et de droit qui lui ont été soumis (ordonnance du 31 janvier 2017, Universal Protein Supplements/EUIPO, C‑485/16 P, non publiée, EU:C:2017:72, point 15).

75      Toutefois, cette liberté d’appréciation ne permet pas au Tribunal de ne pas respecter le principe du contradictoire, qui doit bénéficier à toute partie à un procès dont est saisi le juge de l’Union, quelle que soit sa qualité juridique, et qui contribue à assurer le respect du droit à un procès équitable (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA, C‑197/09 RX–II, EU:C:2009:804, points 41 et 42).

76      En l’occurrence, le Tribunal a constaté, au point 55 de l’ordonnance attaquée, à la suite de la réponse de la Commission à la question posée par celui-ci, que deux corrections ont effectivement été classées par erreur sous la dénomination sumă estimată (montant estimé) au lieu de la dénomination rată forfetară (forfaitaire). Or, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, le fait de fonder une décision juridictionnelle sur des faits et des documents dont les parties elles-mêmes, ou l’une d’entre elles, n’ont pas pu prendre connaissance et sur lesquels elles n’ont donc pas été en mesure de prendre position constitue une violation du principe du respect des droits de la défense (arrêt du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité, 42/59 et 49/59, EU:C:1961:5, p. 156, ainsi que ordonnance du 14 avril 2016, Dalli/Commission, C‑394/15 P, non publiée, EU:C:2016:262, point 40). Dans ces conditions, le Tribunal n’a pas respecté le principe du contradictoire en n’accordant pas à la Roumanie la possibilité de présenter ses observations sur les nouvelles constatations apportées par la Commission lors de sa réponse à la question du Tribunal.

77      Cependant, il résulte d’une jurisprudence constante qu’une violation des droits de la défense, en particulier du droit d’être entendu, n’entraîne l’annulation d’une décision adoptée au terme d’une procédure que si, en l’absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent (ordonnance du 14 avril 2016, Dalli/Commission, C‑394/15 P, non publiée, EU:C:2016:262, point 41 et jurisprudence citée). À cet égard, il ne ressort pas du dossier de l’affaire qu’une éventuelle prise de position de la Roumanie sur les observations de la Commission aurait pu conduire le Tribunal à considérer que la date de publication de la décision litigieuse au Journal officiel de l’Union européenne constituait le point de départ du délai de recours contre celle-ci.

78      Par conséquent, le second moyen du pourvoi doit être écarté.

79      Aucun des deux moyens invoqués par la Roumanie n’étant accueilli, il convient de rejeter le pourvoi dans son intégralité.

 Sur les dépens

80      En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

81      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

82      La Commission ayant conclu à la condamnation de la Roumanie et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      La Roumanie est condamnée aux dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : le roumain.

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