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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Greece v Commission (Judgment) French Text [2022] EUECJ T-217/20 (07 September 2022) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2022/T21720.html Cite as: ECLI:EU:T:2022:508, [2022] EUECJ T-217/20, EU:T:2022:508 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)
7 septembre 2022 (*)
« FEAGA et Feader – Dépenses exclues du financement – Dépenses effectuées par la Grèce – Développement rural – Contrôles clés – Corrections financières forfaitaires – Obligation de motivation – Protection de la confiance légitime – Sécurité juridique – Proportionnalité – Principe de bonne administration »
Dans l’affaire T‑217/20,
République hellénique, représentée par Mmes E. Tsaousi, A.-E. Vasilopoulou et E.-E. Krompa, en qualité d’agents,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par M. M. Konstantinidis, Mme J. Aquilina et M. M. Kaduczak, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre),
composé de Mme V. Tomljenović, présidente, MM. F. Schalin (rapporteur) et I. Nõmm, juges,
greffier : Mme S. Spyropoulos, administratrice,
vu la phase écrite de la procédure,
à la suite de l’audience du 4 mai 2022,
rend le présent
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la République hellénique demande l’annulation partielle de la décision d’exécution (UE) 2020/201 de la Commission, du 12 février 2020, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2020, L 42, p. 17, ci-après la « décision attaquée »).
Antécédents du litige
Procédure administrative et recours devant le juge de l’Union
2 Du 24 au 28 septembre 2012, la Commission européenne a mené une enquête en Grèce, portant la référence RD 1/2012/810/GR, relative au développement rural dans le cadre du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), axes 1 + 3 – mesures axées sur les investissements (2007/2013) (ci-après l’« enquête initiale »). À la suite, notamment, de cette enquête, la Commission a adopté la décision d’exécution (UE) 2016/417, du 17 mars 2016, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Feader (JO 2016, L 75, p. 16).
3 Du 20 au 24 avril 2015, puis du 9 au 13 novembre 2015, la Commission a mené successivement deux nouvelles enquêtes en Grèce, relatives au développement rural dans le cadre du Feader (ci-après les « enquêtes subséquentes »). La première de ces enquêtes, qui portait la référence RD 1/2015/805/GR, concernait la mesure 125A, intitulée « Amélioration et développement des infrastructures liées à l’évolution et à l’adaptation des secteurs agricoles et forestiers », la mesure 321, intitulée « Services de base pour l’économie et la population rurale », et la mesure 322, intitulée « Rénovation et développement du patrimoine agricole ». La seconde de ces enquêtes, qui portait la référence RD 1/2015/809/GR, concernait la mesure 123A, intitulée « Augmentation de la valeur des produits agricoles et forestiers ».
4 Le 8 août 2017, par la lettre Ares(2017) 3949831, la Commission a adressé aux autorités helléniques sa position finale au titre de la première des enquêtes subséquentes. Elle leur a indiqué que, en ce qui concernait les dépenses engagées jusqu’au 15 octobre 2015 au titre des exercices financiers de 2010 à 2015, elle entendait appliquer une correction forfaitaire de 10 % aux dépenses relevant de la mesure 125A, compte tenu des insuffisances affectant spécifiquement cette mesure, et une correction forfaitaire de 5 % aux dépenses relevant des mesures 125A, 321 et 322, compte tenu des insuffisances communes à ces mesures. Le montant brut de la correction envisagée s’élevait à 15 631 045,52 euros, ramené au montant net de 12 618 988,75 euros.
5 Le 2 août 2017, par la lettre Ares(2017) 3867854, la Commission a adressé aux autorités helléniques sa position finale au titre de la seconde des enquêtes subséquentes. Elle leur a indiqué que, en ce qui concernait les dépenses engagées jusqu’au 31 décembre 2015 au titre des exercices financiers de 2010 à 2015, elle entendait appliquer une correction forfaitaire de 5 % aux dépenses relevant de la mesure 123A. Le montant de la correction envisagée s’élevait à 2 238 088,23 euros.
6 Dès le 3 août 2017, dans le cadre d’une enquête documentaire portant la référence RD 1/2017/853/GR (ci-après l’« enquête documentaire »), la Commission a envoyé aux autorités helléniques une lettre de constatations portant la référence Ares(2017) 3884660, en application de l’article 34, paragraphe 2, de son règlement d’exécution (UE) no 908/2014, du 6 août 2014, portant modalités d’application du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les organismes payeurs et autres entités, la gestion financière, l’apurement des comptes, les règles relatives aux contrôles, les garanties et la transparence (JO 2014, L 255, p. 59).
7 La Commission a indiqué aux autorités helléniques, premièrement, que les corrections financières appliquées à la suite des enquêtes subséquentes présentaient un caractère provisoire et correspondaient aux constatations de ses services à ce stade de la procédure, deuxièmement, que, en vertu des dispositions de l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014, ses services pouvaient mettre en œuvre des procédures d’apurement consécutives de conformité jusqu’à la mise en œuvre effective par l’État membre concerné des mesures correctives et, troisièmement, que, à défaut d’avoir reçu des autorités helléniques la confirmation de la mise en œuvre de mesures correctives à la suite des enquêtes subséquentes, elle considérait que les irrégularités constatées s’étaient poursuivies, de sorte que les mesures concernées étaient susceptibles de faire l’objet d’une extension de l’exclusion du financement de l’Union européenne. Par conséquent, il était demandé aux autorités helléniques de fournir des indications détaillées sur les mesures correctives déjà prises, en mentionnant leur date effective de mise en œuvre, ainsi que celles envisagées, avec un calendrier précis, ainsi que les indicateurs de progrès et les modalités de suivi adoptées.
8 Le 3 novembre 2017, l’Organismos pliromon kai elenchou koinotikon enischyseon prosanatolismou kai engyiseon (Opekepe, organisme de paiement et de contrôle des aides communautaires d’orientation et de garantie, Grèce) a adressé une réponse à la Commission dans laquelle il a exposé que, contrairement à ce que soutenait cette dernière, un certain nombre de mesures correctives avaient été adoptées à la suite des enquêtes subséquentes.
9 Par lettre du 5 janvier 2018, conformément à l’article 34, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement d’exécution no 908/2014, la Commission a invité les autorités helléniques à une réunion bilatérale le 18 janvier 2018, consacrée aux conséquences à tirer de l’enquête documentaire. Par lettre du 11 janvier 2018, la République hellénique a communiqué à la Commission ses observations et des informations supplémentaires préalablement à cette réunion, de même qu’après la tenue de celle-ci, dans des documents du 27 février et du 30 mars 2018, ainsi que dans un courrier électronique du 24 août 2018.
10 Le 27 février 2018, dans le cadre de la procédure découlant des enquêtes subséquentes, la Commission a adopté la décision d’exécution (UE) 2018/304, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEAGA et du Feader (JO 2018, L 59, p. 3). Par cette décision, la Commission a opéré, au titre des dépenses de la République hellénique relevant du Feader, une correction forfaitaire dont le montant total, qui correspondait à la somme des corrections envisagées au titre des deux enquêtes subséquentes (voir points 4 et 5 ci-dessus), s’élevait à 17 869 131,75 euros, ramené au montant net de 14 857 076,98 euros, et concernait les exercices financiers des années 2010 à 2015. Par arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), le Tribunal a rejeté le recours de la République hellénique tendant à l’annulation de cette décision. Par arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission (C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937), la Cour a rejeté le pourvoi formé par la République hellénique à l’encontre de cet arrêt du Tribunal.
11 Le 12 novembre 2018, par la lettre Ares(2018) 5762051/12, conformément à l’article 34, paragraphe 3, troisième alinéa, du règlement d’exécution no 908/2014, la Commission a communiqué à la République hellénique les conclusions auxquelles elle était parvenue à la suite de la réunion bilatérale du 18 janvier 2018, organisée à l’issue de l’enquête documentaire. Il ressort de cette communication que la Commission a estimé, en substance, que les différentes faiblesses révélées par les enquêtes subséquentes dans les systèmes de gestion et de contrôle des dépenses de l’Union mis en place par les autorités helléniques continuaient d’affecter les dépenses déjà engagées et toujours en cours au titre du plan de développement rural (PDR) pour la période de programmation 2007-2013 et affectaient également les dépenses relevant du PDR en vigueur pour la période de programmation 2014-2020.
12 Premièrement, selon la Commission, ces faiblesses consistaient dans le fait que, dans le cadre de la mesure 125A, le système de sélection des projets devant bénéficier d’un financement sur la base des critères de sélection officiels aurait été défaillant. Cette sélection n’aurait pas été réalisée effectivement par les autorités de gestion, mais dans le cadre d’un système opaque de présélection mis en œuvre par la Diefthinsi Technikon Meleton kai Kataskevon tou Ypourgeiou Agrotikis Anaptyxis kai Trofimon (direction des études techniques et de la construction du ministère du Développement agricole et de l’Alimentation, ci-après la « DTMK »), de sorte qu’il n’aurait existé aucune garantie que les projets financés étaient effectivement les meilleurs au regard des objectifs du PDR, ni que certains des projets susceptibles de répondre à ces objectifs n’avaient pas été exclus.
13 Deuxièmement, tant dans le cadre de la mesure 125A que dans celui des mesures 321 et 322, des insuffisances dans l’évaluation des demandes d’aide par l’autorité de gestion auraient été constatées, en particulier une absence de méthode claire d’évaluation et de notation des différentes demandes, de même que des erreurs et des incohérences dans l’application des critères pertinents.
14 Troisièmement, les insuffisances relevées concernaient également la mesure 123A. Les services de la Commission ont estimé qu’il existait une défaillance du contrôle clé intitulé « Appréciation du caractère raisonnable des dépenses en utilisant un système d’évaluation approprié, tel que le coût de référence, la comparaison des différentes offres ou le comité d’évaluation ». À cet égard, ils ont estimé que les différentes offres requises au stade de la demande afin d’apprécier le caractère raisonnable des dépenses n’étaient pas comparables, que les coûts des travaux n’avaient pas été contrôlés sur la base des coûts maximums de construction définis, qu’il n’y avait pas de transparence quant aux éléments sur lesquels les avis des experts étaient fondés pour apprécier le caractère raisonnable des dépenses et que des dépassements pouvaient être déclarés dans les demandes de paiements intermédiaires.
15 Or, dans le cadre de l’enquête documentaire, il serait apparu, tout d’abord, que, s’agissant de la mesure 125A, les autorités helléniques n’auraient pas fourni les données permettant de constater que l’intervention de la DTMK ne faussait pas la procédure de sélection des projets, ensuite, s’agissant des mesures 125A, 321 et 322, que ces dernières continuaient d’être affectées par la défaillance d’un contrôle clé lors de la procédure de sélection et d’évaluation des projets et, enfin, s’agissant de la mesure 123A du PDR en vigueur pour la période de programmation 2007-2013 et de la mesure équivalente du PDR en vigueur pour la période de programmation 2014-2020, que le constat d’une carence dans l’évaluation du caractère raisonnable des coûts demeurait.
16 Par conséquent, la Commission a fait part aux autorités helléniques de son intention de mettre en œuvre une extension de la correction imposée par la décision d’exécution 2018/304 et d’exclure du financement de l’Union un montant brut de 9 657 608,85 euros.
17 Au titre du PDR en vigueur pour la période de programmation 2007‑2013, les mesures 123A,125A, 321 et 322 étaient concernées.
18 Au titre du PDR en vigueur pour la période de programmation 2014‑2020, les mesures ayant succédé aux mesures 123A,125A, 321 et 322 étaient également concernées, à savoir, premièrement, la mesure 4.2 « Investissements dans la transformation, la commercialisation et/ou le développement des produits agricoles » (succédant à la mesure 123A et comportant, notamment, la sous-mesure 4.2.1 « Valeur ajoutée des produits agricoles et sylvicoles »), deuxièmement, les sous-mesures 4.3.1 « Infrastructures d’améliorations foncières », 4.3.2 « Projets de remembrement » et 4.3.4 « Soutien à la desserte forestière et à la mobilisation du bois » (succédant à la mesure 125A et relevant de la mesure 4.3 « Investissements dans des infrastructures liées à l’évolution, à la modernisation et à l’adaptation des secteurs agricole et forestier ») et, troisièmement, la sous-mesure 4.3.4 « Soutien à la desserte forestière et à la mobilisation du bois », la mesure 7.2 « Services de base et rénovation des villages dans les zones rurales : investissements pour la création, l’amélioration et le développement de tout type d’infrastructure à petite échelle, y compris les investissements dans les énergies renouvelables et les économies d’énergie » et la mesure 7.4 « Services de base et rénovation des villages dans les zones rurales : investissements pour la création, l’amélioration ou le développement des services de base au niveau local pour la population rurale, y compris les activités culturelles et récréatives, et des infrastructures qui y sont liées » (succédant aux mesures 321 et 322).
19 Les autorités helléniques ayant sollicité l’intervention de l’organe de conciliation, ce dernier a rendu son avis le 25 mars 2019, dans le cadre de son rapport ARES(2019) 2059734, à la suite duquel la Commission leur a indiqué, dans le courrier ARES(2019) 6057961, du 30 septembre 2019, qui comportait sa position finale, qu’elle maintenait sa position initiale.
Contenu du rapport de synthèse
20 Le rapport de synthèse du 20 décembre 2019 comporte la position définitive de la Commission. Les principales lacunes relevées par la Commission à l’encontre des autorités helléniques sont, en substance, identiques à celles mentionnées dans la lettre Ares(2018) 5762051/12, du12 novembre 2018 (voir points 11 à 18 ci-dessus).
21 Les corrections financières que la Commission envisage d’imposer à la République hellénique sont de trois ordres.
22 Premièrement, la Commission a relevé la persistance d’irrégularités consistant en une intervention de la DTMK au stade de la présélection des demandes, qui devaient s’analyser comme une omission de réaliser le contrôle clé « Procédures adéquates de sélection et d’évaluation des projets ou des demandes », en violation de l’article 24, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE) no 65/2011 de la Commission, du 27 janvier 2011, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil en ce qui concerne l’application de procédures de contrôle et de conditionnalité pour les mesures de soutien au développement rural (JO 2011, L 25, p. 8). Selon la Commission, les faiblesses constatées dans le cadre de la première des enquêtes subséquentes au titre de la mesure 125A ont perduré et ont donc eu une incidence sur les dépenses effectuées par les autorités helléniques après le 15 octobre 2015, notamment sur les dépenses afférentes à des projets sélectionnés au début de la période de programmation 2007-2013 et ayant continué à générer des dépenses au-delà de cette date.
23 À ce titre, la Commission a estimé qu’il y avait lieu d’imposer, premièrement, une nouvelle correction forfaitaire au taux majoré de 10 % sur les dépenses de la mesure 125A afférentes aux exercices financiers de 2011 et de 2012 et, deuxièmement, une correction forfaitaire au taux majoré de 10 % sur les dépenses de la sous-mesure 4.3.2 afférentes aux exercices financiers de 2016 à 2018, pour lesquelles aucune correction n’avait encore été appliquée.
24 Deuxièmement, la Commission a relevé la persistance des irrégularités consistant en des carences lors de l’évaluation et de la sélection des projets à financer, qui devaient s’analyser comme une défaillance dans le fonctionnement du contrôle clé « Procédures adéquates de sélection et d’évaluation des projets ou des demandes », en violation de l’article 24, paragraphe 2, sous b), du règlement no 65/2011. Selon la Commission, les faiblesses constatées dans le cadre de la première des enquêtes subséquentes au titre des mesures 321 et 322 ont perduré et ont donc eu une incidence sur les dépenses effectuées par les autorités helléniques après le 15 octobre 2015.
25 À ce titre, la Commission a estimé qu’il y avait lieu d’imposer une correction forfaitaire au taux de 5 % sur les dépenses des mesures 321 et 322, ainsi que sur celles des mesures 4.3.1, 4.3.2 et 4.3.4 et des mesures 7.2 et 7.4, afférentes aux exercices financiers de 2016 à 2018, pour lesquelles aucune correction n’avait encore été appliquée.
26 Troisièmement, la Commission a estimé que, en dépit de l’instauration par les autorités helléniques de nouvelles procédures améliorées d’évaluation du caractère raisonnable des dépenses en avril 2017, les irrégularités relevées (défaut d’appréciation du caractère raisonnable des dépenses en utilisant un système d’évaluation approprié, tel que le coût de référence, la comparaison des différentes offres ou le comité d’évaluation) devaient s’analyser comme une défaillance dans le fonctionnement du contrôle clé « Appréciation du caractère raisonnable des dépenses en utilisant un système d’évaluation approprié, tel que le coût de référence, la comparaison des différentes offres ou le comité d’évaluation », en violation de l’article 24, paragraphe 2, sous d), du règlement no 65/2011. Selon la Commission, les faiblesses constatées dans le cadre de la seconde des enquêtes subséquentes au titre de la mesure 123A avaient eu une incidence sur les dépenses effectuées par les autorités helléniques après le 31 décembre 2015.
27 À ce titre, la Commission a estimé qu’il y avait lieu d’imposer, premièrement, une nouvelle correction forfaitaire au taux inchangé de 5 % sur les dépenses de la mesure 123A afférentes aux exercices financiers de 2012 à 2014 et de 2016 et, deuxièmement, une correction forfaitaire au taux de 5 % sur les dépenses de la mesure 4.2.1 afférentes aux exercices financiers de 2017 et de 2018.
Décision attaquée
28 Le 12 février 2020, la Commission a adopté la décision attaquée, qui a été notifiée aux autorités helléniques sous la référence C(2020) 541.
29 La Commission a, en vertu de l’article 52 du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) no 352/78, (CE) no 165/94, (CE) no 2799/98, (CE) no 814/2000, (CE) no 1290/2005 et (CE) no 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549), notamment, exclu du financement de l’Union des dépenses effectuées par la République hellénique dans le cadre du Feader, d’un montant brut total de 9 657 608,85 euros, ramené au montant net de 9 590 402,53 euros au titre des exercices financiers de 2011 à 2014 et de 2016 à 2018.
Conclusions des parties
30 La République hellénique conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée en ce qu’elle applique à son égard une correction financière d’un montant total de 9 657 608,85 euros (soit un montant net de 9 590 402,53 euros) aux dépenses effectuées et déclarées dans le cadre du Feader au titre des mesures 123A, 125A, 321 et 322 et au titre des mesures 4.2, 4.3, 7.2 et 7.4, au cours des exercices financiers de 2011 à 2018 ;
– condamner la Commission aux dépens.
31 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la République hellénique aux dépens.
En droit
32 La République hellénique invoque sept moyens au soutien du recours, tirés, en substance, de la violation des dispositions légales fondant la mise en œuvre de corrections financières à des dépenses relevant du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Feader, de la violation de divers principes généraux du droit de l’Union, d’une méconnaissance de l’obligation de motivation et de plusieurs erreurs de fait.
33 La Commission conclut au rejet de l’ensemble des moyens soulevés par la République hellénique comme étant non fondés ou inopérants.
34 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler, s’agissant des griefs avancés par la République hellénique, que, selon une jurisprudence constante, les fonds agricoles européens ne financent que les interventions effectuées conformément aux dispositions du droit de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (voir arrêt du 27 février 2013, Pologne/Commission, T‑241/10, non publié, EU:T:2013:96, point 20 et jurisprudence citée).
35 Lorsque la Commission refuse de mettre à la charge du fonds concerné certaines dépenses pour cause de violation des dispositions du droit de l’Union imputables à un État membre, il lui appartient non pas de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes dudit fonds et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (voir arrêt du 17 mai 2013, Grèce/Commission, T‑294/11, non publié, EU:T:2013:261, point 21 et jurisprudence citée).
36 L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un système adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle (voir arrêt du 9 janvier 2003, Grèce/Commission, C‑157/00, EU:C:2003:5, point 18 et jurisprudence citée).
37 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les moyens avancés par la République hellénique au soutien de son recours en ce qu’ils visent les corrections forfaitaires appliquées dans la décision attaquée.
Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014, d’une extension illégale des corrections découlant des enquêtes subséquentes et d’une méconnaissance par la Commission des limites de son pouvoir d’appréciation ainsi que de son obligation de motivation
38 La République hellénique expose que, dans le rapport de synthèse, la Commission n’aurait pas précisé le fondement juridique de la correction financière. En particulier, elle n’aurait pas expressément mentionné l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014. En outre, en adoptant la décision attaquée, qui consisterait en une extension des corrections imposées à la suite des enquêtes subséquentes, alors que la Cour, saisie d’un pourvoi à l’encontre de l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), n’aurait pas encore statué définitivement sur la légalité de ces corrections, la Commission aurait porté atteinte, d’une part, à l’économie de la procédure telle qu’elle résulte de l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014 et, d’autre part, au principe de coopération loyale tel qu’il résulte de l’article 4, paragraphe 3, TFUE. En particulier, selon la République hellénique, si la Commission peut continuer d’appliquer des corrections financières jusqu’à la mise en place de mesures correctives par l’État membre concerné, il lui appartient de préciser les mesures correctives qui s’imposent afin de respecter à l’avenir la réglementation de l’Union.
39 Or, à la suite des corrections financières imposées à l’issue de l’enquête RD 1/2015/809/GR, relative aux mesures 125A, 321 et 322, la République hellénique se serait vu imposer par la décision attaquée une extension desdites corrections au titre de la période de programmation 2007-2013, alors qu’il aurait été trop tard pour mettre en œuvre des mesures correctives, puisque la sélection des projets aurait été déjà achevée au début de la période de programmation 2007-2013, ce qui aurait contrevenu au principe selon lequel « à l’impossible nul n’est tenu ». Ces corrections auraient dès lors revêtu un caractère purement punitif. En outre, la République hellénique fait valoir qu’elle avait élaboré un plan d’action comportant des mesures correctives, appliquées à partir de 2018, éliminant les insuffisances constatées dans le cadre des enquêtes subséquentes et qui concernaient la phase de sélection des projets bénéficiant d’un financement par le Feader, ce qui était de nature à supprimer le risque financier encouru par ce fonds.
40 Par conséquent, la Commission aurait dû soit s’abstenir d’imposer les corrections en question pour la période postérieure au 15 octobre 2015, dans la mesure où, s’agissant de la mesure 125A, à la suite de la première des enquêtes subséquentes, elle avait déjà appliqué rétroactivement, par la décision d’exécution 2018/304, un taux de correction de 10 % à des dépenses initialement corrigées au taux de 5 % à la suite de l’enquête initiale, soit appliquer un taux réduit de correction. Alors qu’elle aurait été informée de cette situation, la Commission n’en aurait pas tenu compte dans la motivation de la décision attaquée.
41 La Commission conteste les arguments de la République hellénique.
42 En matière de financement, de gestion et de suivi de la politique agricole de l’Union, l’article 52, paragraphe 1, du règlement no 1306/2013, applicable depuis le 1er janvier 2015, dispose, en substance, que, lorsque la Commission considère que des dépenses relevant du domaine du Feader n’ont pas été effectuées conformément au droit de l’Union et de l’État membre concerné, elle adopte des actes d’exécution déterminant les montants à exclure du financement de l’Union.
43 L’article 34, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement d’exécution no 908/2014 dispose que, lorsque, à la suite d’une enquête, la Commission communique à l’État membre concerné ses conclusions, elle indique « le niveau provisoire de correction financière qu’elle considère approprié par rapport à ses conclusions à ce stade de la procédure ». En outre, l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014 dispose que, « [a]près avoir communiqué ses conclusions aux États membres conformément à l’article 34, paragraphe 3 ou 4, du[dit] règlement, la Commission adopte, le cas échéant, une ou plusieurs décisions en vertu de l’article 52 du règlement […] no 1306/2013, visant à exclure du financement de l’Union les dépenses concernées par le non-respect de la réglementation de l’Union[, la] Commission [pouvant] poursuivre des procédures d’apurement de conformité consécutives jusqu’à ce que l’État membre ait effectivement mis en œuvre les mesures correctives ».
44 Tout d’abord, il y a lieu de constater que, dans le cadre de l’enquête documentaire, la Commission a adressé le 3 août 2017 aux autorités helléniques la lettre Ares(2017) 3884660, qui mentionne expressément à la fois l’article 52, paragraphe 1, du règlement no 1306/2013 et l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014. De même, le rapport de synthèse mentionne que son adoption s’inscrit dans la mise en œuvre de l’article 52 du règlement no 1306/2013. Or, cette lettre ainsi que le rapport de synthèse interviennent dans le cadre du processus d’échange entre l’État membre concerné et la Commission, tel qu’il est prévu par l’article 34, paragraphe 2, du règlement no 908/2014, de sorte que la République hellénique était parfaitement informée de la base légale de la correction que lui a notifiée la Commission.
45 L’argument de la République hellénique selon lequel la Commission n’a pas précisé le fondement juridique de la correction financière dans le rapport de synthèse manque donc en fait, en particulier si l’on prend en considération la totalité des échanges entre les parties dans le cadre de la procédure d’apurement.
46 Ensuite, s’agissant de l’argument de la République hellénique tenant au fait que, en tirant les conséquences financières de l’enquête documentaire sans attendre l’issue définitive du pourvoi dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission (C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937), la Commission aurait violé le principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, TUE ainsi que l’économie de la procédure d’apurement des comptes, il y a lieu de rappeler que le principe de coopération loyale entraîne une obligation pour les États membres de prendre toutes les mesures propres à garantir la portée et l’efficacité du droit de l’Union et impose aux institutions de cette dernière des devoirs réciproques de respect et d’assistance à l’égard des États membres dans l’accomplissement des missions découlant des traités [voir arrêt du 1er mars 2018, Pologne/Commission, T‑402/15, EU:T:2018:107, point 53 (non publié) et jurisprudence citée].
47 Or, s’agissant du respect de l’économie de la procédure d’apurement des comptes, il y a lieu d’observer que, en vertu des dispositions de l’article 34, paragraphes 2 et 7, du règlement d’exécution no 908/2014, la Commission a la possibilité de poursuivre des procédures d’apurement consécutives jusqu’à ce que l’État membre concerné ait effectivement mis en œuvre les mesures correctives et que le niveau de correction communiqué initialement dans le cadre de la procédure d’apurement n’est pas définitif, de sorte qu’il revêt un caractère provisoire et qu’il peut être aggravé.
48 Cette disposition ne comporte aucune obligation expresse qui imposerait à la Commission d’attendre l’issue d’une éventuelle procédure judiciaire pour mettre en œuvre des procédures d’apurement consécutives, étant précisé que la Commission s’est vu conférer des compétences d’exécution dans le but de faire respecter une discipline budgétaire dans la gestion des fonds de l’Union et que, dans ce cadre, elle a l’obligation de procéder à une correction financière si les dépenses dont le financement est demandé n’ont pas été effectuées conformément aux règles de l’Union (voir, par analogie, arrêt du 11 janvier 2001, Grèce/Commission, C‑247/98, EU:C:2001:4, point 14).
49 Il ne saurait donc être considéré que l’économie de la procédure d’apurement des comptes a été violée en l’espèce. Au surplus, dès lors que la Commission est également tenue de garantir la portée et l’efficacité du droit de l’Union, le caractère suspensif d’une procédure de pourvoi ne saurait davantage lui être imposé en l’absence de dispositions expresses en ce sens. En tout état de cause, il y a également lieu de constater que par l’arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission (C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937), la Cour a rejeté le pourvoi formé par la République hellénique. Au surplus, la Cour a relevé, au point 74 dudit arrêt, que « la circonstance qu’une décision d’exécution imposant une correction financière forfaitaire ait été attaquée au titre des articles 263 et 256 TFUE n’empêch[ait] pas la Commission d’ajuster cette décision, le cas échéant, en ce qui concern[ait] le taux de correction appliqué lors de la réévaluation d’une carence déjà constatée ». L’argument tiré d’une violation de l’économie de la procédure doit donc être écarté.
50 S’agissant de l’argument tiré de la violation de l’économie de la procédure et du principe de coopération loyale, il doit également être rejeté, dans la mesure où la Commission s’est limitée à adopter des mesures répondant au non-respect par la République hellénique de ses propres obligations, comme en atteste le défaut de mise en œuvre par cette dernière de mesures propres à garantir la portée et l’efficacité du droit de l’Union.
51 Cette carence de la République hellénique dans l’adoption de toutes les mesures propres à garantir la portée et l’efficacité du droit de l’Union ne pouvait donc empêcher la Commission de tirer les conséquences financières de ladite carence, précisément afin de garantir la portée et l’efficacité du droit de l’Union.
52 En outre, en ce qui concerne l’impossibilité alléguée de mettre en œuvre des mesures correctives à la suite des corrections financières imposées à l’issue de l’enquête RD 1/2015/809/GR, relative aux mesures 125A, 321 et 322, il convient de relever, à l’instar de la Commission, que, en vertu de l’article 34 du règlement d’exécution no 908/2014, l’extension de corrections financières au moyen de décisions consécutives ne dépend pas de la possibilité pour l’État membre concerné de prendre des mesures correctives. Au contraire, en l’absence de mise en œuvre par l’État membre concerné de mesures correctives en réponse aux irrégularités constatées par la Commission, cette dernière peut, jusqu’à la date effective de mise en œuvre des mesures correctives qu’elle impose, exclure les dépenses affectées par le non-respect des règles de l’Union (voir, par analogie, arrêt du 7 juin 2013, Portugal/Commission, T‑2/11, EU:T:2013:307, point 80).
53 Or, en l’espèce, si la République hellénique se prévaut de la mise en œuvre de mesures correctives, ces dernières n’ont été appliquées à de nouveaux projets que depuis 2018, de sorte que, contrairement à ce qu’elle soutient, lesdites mesures n’étaient pas susceptibles d’exclure la mise en œuvre par la Commission de corrections financières. Au demeurant, de telles corrections ne revêtent pas un caractère punitif, dès lorsqu’elles tendent uniquement à éviter la mise à la charge du fonds concerné de montants n’ayant pas servi au financement d’un objectif poursuivi par la réglementation de l’Union en cause et qu’elles ne constituent donc pas une sanction (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2013, Pays-Bas/Commission, T‑343/11, non publié, EU:T:2013:468, point 111 et jurisprudence citée). En tout état de cause, la République hellénique ne démontre pas que, dès le constat par la Commission de l’existence de défaillances, elle n’aurait pas été en mesure de mettre en œuvre des mesures correctives.
54 Dans ces conditions, il n’appartenait pas à la Commission de s’abstenir d’imposer des corrections financières aux dépenses relatives aux mesures 125A, 321 et 322 pour la période postérieure au 15 octobre 2015, ni même de modérer les mesures de corrections en appliquant un taux réduit de correction. En revanche, dans la mesure où les mesures correctives mises en œuvre à partir de 2018 seraient susceptibles de pallier les carences relevées par la Commission, la République hellénique pourrait escompter, au titre des exercices financiers postérieurs à la mise en œuvre desdites mesures, l’absence de nouvelles corrections financières appliquées aux dépenses en question.
55 Enfin, il convient de relever que l’argumentation développée par la République hellénique ne porte pas spécifiquement sur une éventuelle erreur de la Commission dans son appréciation de la gravité des manquements en question, mais sur l’impossibilité alléguée, par une correction financière susceptible de produire des effets rétroactifs, de corriger les dépenses affectées par ces manquements. Or, l’évolution du taux de correction, y compris à l’égard de dépenses relevant d’exercices financiers ayant déjà fait l’objet de corrections, dépend uniquement de l’évaluation de la gravité des manquements constatés par la Commission. Dans ces conditions, l’argumentation de la République hellénique ne peut être accueillie, dans la mesure où elle ne saurait aboutir à restreindre la capacité de la Commission à tirer les conséquences de son évaluation de la gravité des manquements constatés. Au demeurant, la faculté pour la Commission d’aggraver rétroactivement le taux de correction appliqué à des dépenses préalablement corrigées, permettant ainsi à la Commission d’évaluer la carence en question dans sa globalité, a été confirmée par la Cour dans son arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission (C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937, point 72).
56 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme non fondé.
Sur le deuxième moyen, tiré de l’absence de base légale de la correction opérée à l’égard des dépenses effectuées plus de 24 mois avant la lettre contenant les constatations initiales, d’une violation de l’article 52 du règlement no 1306/2013 et de la compétence rationae temporis de la Commission
57 La République hellénique conteste dans la requête l’interprétation par la Commission de l’article 52, paragraphe 4, sous c), du règlement no 1306/2013, en ce qu’il permettrait l’inclusion dans la base de la correction de la totalité des paiements liés à des paiements finals effectués dans les 24 mois avant la communication des constatations de la Commission. Elle fait valoir que seuls les paiements effectués durant cette période de 24 mois peuvent faire l’objet d’une correction, et non d’autres paiements antérieurs tels que des acomptes ou des paiements intermédiaires qui sont liés à ces paiements finals dans le cadre des programmes de développement rural. La République hellénique invoque, à cet égard, le fait que les termes « avances » et « paiements intermédiaires » ne figurent pas explicitement dans la disposition en question, qui fixe un délai absolu pour tous les paiements à corriger, indépendamment de leur caractère plus spécifique, si bien que la correction ne peut concerner que les paiements effectués au cours de la période de 24 mois avant la communication des constatations de la Commission, et non les paiements effectués auparavant. En se fondant sur cette interprétation erronée, la Commission aurait méconnu les limites de sa compétence rationae temporis.
58 Dans la réplique, la République hellénique admet néanmoins que, par sa jurisprudence récente, la Cour a considéré, en substance, que lorsque des paiements intermédiaires et provisoires étaient effectués avant le paiement du solde, seul ce dernier devait être pris en compte aux fins du calcul du délai de 24 mois, autorisant ainsi la Commission à corriger les paiements intermédiaires et provisoires précédant le paiement définitif pour autant que le paiement final ou du solde ait eu lieu dans le délai de 24 mois. Toutefois, la République hellénique fait valoir que la position de la Commission quant à la question de savoir quelles dépenses peuvent être effectivement corrigées n’est ni claire ni précise et que, dès lors, le rapport de synthèse ainsi que la décision attaquée sont dépourvus de fondement et de motivation juridique. En particulier, la Commission soutiendrait à tort que l’exclusion du financement pourrait porter sur des dépenses relatives à des programmes dont le paiement, quel qu’il soit, aurait eu lieu au cours de la période de 24 mois avant la communication de ses constatations.
59 La Commission conteste les arguments de la République hellénique.
60 En l’espèce, il y a lieu de constater que, lorsqu’elle conteste, dans la requête, l’interprétation par la Commission de l’article 52, paragraphe 4, sous c), du règlement no 1306/2013, en ce qu’il permettrait l’inclusion dans la base de la correction de la totalité des paiements liés à des paiements finals et effectués dans les 24 mois avant la communication des constatations de la Commission, la République hellénique réitère, en substance, une argumentation qu’elle avait préalablement développée dans le cadre des affaires ayant donné lieu aux arrêts du 4 octobre 2018, Grèce/Commission (T‑272/16, non publié, EU:T:2018:651), et du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880).
61 Or, ainsi que la République hellénique l’admet finalement dans la réplique, la Cour, aux points 130 et 131 de l’arrêt du 30 avril 2020, Grèce/Commission (Pâturages permanents) (C‑797/18 P, EU:C:2020:340), a confirmé, s’agissant de la disposition qui était d’application avant l’entrée en vigueur de l’article 52, paragraphe 4, du règlement no 1306/2013, en l’occurrence l’article 31, paragraphe 4, du règlement (CE) no 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 2005, L 209, p. 1), qu’il ressortait expressément du libellé de cet article que la période de 24 mois précédant la notification écrite des résultats des vérifications de la Commission était calculée à compter de la date du paiement ou du paiement du solde, c’est-à-dire du paiement définitif, de sorte que lorsqu’il était procédé à des paiements intermédiaires et provisoires suivis d’un paiement du solde, seul ce dernier devait être pris en compte aux fins du calcul de ce délai de 24 mois.
62 À cet égard, il y a lieu de relever que, comme l’explique la Commission, si le libellé de chacune des dispositions en question diffère légèrement, l’article 31, paragraphe 4, du règlement no 1290/2005 mentionnant les termes de « paiement » et de « paiement du solde », tandis que l’article 52, paragraphe 4, sous c), du règlement no 1306/2013 mentionne les termes de « paiement final », cela reste sans incidence sur la régularité de sa pratique, telle qu’elle a été validée par le juge de l’Union.
63 Cette interprétation de l’article 52, paragraphe 4, sous c), du règlement no 1290/2005 a d’ailleurs été confirmée par la Cour au point 53 de l’arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission (C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937).
64 S’agissant, par ailleurs, de l’identification des dépenses qui peuvent être effectivement corrigées, contrairement à ce que soutient la République hellénique, ces dernières sont clairement identifiées dans le rapport de synthèse qui sert de base à la décision attaquée, en particulier dans le tableau qui figure sous le point 17.2.5 « Position finale de la DG AGRI ».
65 Il s’agit, d’une part, de dépenses relatives aux mesures 125A, 321 et 322 du PDR en vigueur pour la période de programmation 2007-2013 et aux mesures 4.3.1, 4.3.2, 4.3.4, 7.2 et 7.4 pour la période de programmation 2014-2020 et, d’autre part, de dépenses relatives à la mesure 123A du PDR en vigueur pour la période de programmation 2007-2013 et à la mesure 4.2.1 pour la période de programmation 2014-2020. Pour les premières, la Commission a constaté que les dépenses effectuées par les autorités helléniques après le 15 octobre 2015 restaient affectées par des faiblesses et, pour les secondes, après le 31 décembre 2015.
66 Dans la mesure où, s’agissant en particulier des mesures 125A, 321 et 322, les corrections forfaitaires devaient s’appliquer notamment à des dépenses transitoires concernant des projets sélectionnés au début de la période de programmation 2007-2013 et ayant continué à générer des dépenses après le 15 octobre 2015, les corrections financières ont été appliquées à des dépenses qui avaient été effectuées dès l’exercice financier 2011.
67 Enfin, il y a lieu de constater, ainsi que cela ressort de l’examen du premier moyen, que le rapport de synthèse et la décision attaquée mentionnent la base légale de l’intervention de la Commission, de sorte qu’ils ne sont pas affectés d’un défaut de motivation juridique à cet égard.
68 Le second moyen n’étant pas fondé, il y a lieu de le rejeter.
Sur le troisième moyen, concernant les mesures 125A et 123A, tiré d’une violation des principes ne bis in idem, de sécurité juridique, de bonne administration, de protection de la confiance légitime et de proportionnalité
69 La République hellénique expose que, en admettant que, à la suite de l’enquête documentaire, la Commission se soit effectivement fondée sur l’article 52, paragraphe 4, sous c), du règlement no 1306/2013 afin de procéder à des corrections financières en ce qui concerne les mesures 125A et 123A, le calcul adopté pour la correction dans la décision attaquée est contraire au principe ne bis in idem. En effet, si l’interprétation revendiquée par la Commission était retenue, cela l’autoriserait à procéder sans limites de temps à l’infliction de corrections financières sur des dépenses effectuées dans le cadre du Feader, en violation des principes de sécurité juridique, de bonne administration, de protection de la confiance légitime et de proportionnalité. Or, le Tribunal ne se serait pas encore prononcé sur le bien-fondé de tels griefs.
70 En particulier, la République hellénique fait valoir que, à la suite de l’enquête initiale et préalablement aux enquêtes subséquentes, la Commission a adopté la décision d’exécution 2016/417, en vertu de laquelle une correction forfaitaire de 5 % et d’un montant de 3 107 504,78 euros lui a déjà été imposée sur les dépenses de la mesure 125A au titre des exercices financiers 2010, 2011, 2012 et 2013, au motif de l’omission de la réalisation d’un contrôle clé lié à l’intervention de la DTMK, lors de la sélection des projets bénéficiant d’un financement. Or, en février 2018, la Commission aurait décidé d’appliquer à une partie des lignes budgétaires concernées une deuxième correction financière au taux de 10 %, pour le même motif, puis, par la décision attaquée, et toujours pour ce même motif, une troisième correction financière sur certaines de ces mêmes lignes financières. La mesure 123A aurait quant à elle fait l’objet de deux corrections successives sur la même ligne budgétaire, également pour le même motif.
71 La démarche suivie par la Commission, consistant à revenir sur des lignes budgétaires déjà contrôlées et corrigées pour les corriger à nouveau, outre qu’elle ne serait pas prévue par la procédure de l’article 52 du règlement no 1306/2013, telle qu’elle est précisée par l’article 34 du règlement d’exécution no 908/2014, serait au surplus contraire à l’article 41 du règlement no 1306/2013, aux lignes directrices relatives au calcul des corrections financières dans le cadre des procédures d’apurement de conformité et d’apurement des comptes, telles qu’elles figurent dans la communication de la Commission C(2015) 3675 final, du 8 juin 2015 (ci-après les « lignes directrices de 2015 »), ainsi qu’à l’article 12 du règlement délégué (UE) no 907/2014, du 11 mars 2014, complétant le règlement no 1306/2013 (JO 2014, L 255, p. 18), qui imposerait à la Commission de calculer de manière définitive et sans réserve la correction financière imposée.
72 Dans la réplique, la République hellénique s’oppose à l’argument de la Commission selon lequel, s’agissant de la mesure 125A, cette dernière n’aurait pas fait l’objet d’une évaluation définitive à la suite des enquêtes subséquentes. En effet, les États membres seraient en droit de connaître avec précision, pour chaque période de contrôle, l’étendue de leurs obligations financières envers la Commission, dont l’absence de position définitive serait susceptible de les priver de la possibilité de saisir le juge de l’Union, même si la Commission prétendrait qu’il n’y aurait pas eu d’accumulation de corrections au motif d’une déduction du montant des corrections précédentes du montant définitif.
73 La Commission conteste les arguments de la République hellénique.
74 En l’espèce, le troisième moyen repose, notamment, sur la violation alléguée des principes ne bis in idem, de sécurité juridique, de bonne administration, de protection de la confiance légitime et de proportionnalité.
75 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que le principe ne bis in idem constitue un principe général du droit de l’Union, désormais consacré à l’article 50 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui interdit un cumul tant de poursuites que de sanctions présentant une nature pénale, au sens de cet article, pour les mêmes faits et contre une même personne (voir arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission, C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937, point 66 et jurisprudence citée).
76 S’agissant de l’application du principe ne bis in idem au cas d’espèce, elle supposerait au préalable que les corrections financières se voient reconnaître la nature de sanctions, avant même que soit examinée la question de savoir si elles relèvent du domaine pénal.
77 Or, la Cour a jugé, à cet égard, que, si la Commission avait l’obligation de procéder à une correction financière lorsque les dépenses dont le financement était demandé n’avaient pas été effectuées conformément aux règles de l’Union, une telle correction financière tendait à éviter la mise à la charge du fonds concerné de montants n’ayant pas servi au financement d’un objectif poursuivi par la réglementation de l’Union en cause et ne constituait donc pas une sanction (voir, en ce sens, arrêts du 11 janvier 2001, Grèce/Commission, C‑247/98, EU:C:2001:4, point 14, et du 16 septembre 2013, Pays-Bas/Commission, T‑343/11, non publié, EU:T:2013:468, point 111).
78 Dans ces conditions, les corrections financières appliquées en l’espèce par la Commission ne pouvant se voir reconnaître la nature de sanction, l’argument tenant à la violation du principe ne bis in idem ne peut donc, en tout état de cause, qu’être rejeté.
79 En ce qui concerne les autres principes invoqués par la République hellénique, leur contour a été précisé par la jurisprudence.
80 Le principe de sécurité juridique, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, exige que les règles de droit soient claires et précises et vise à garantir la prévisibilité des situations et des relations juridiques relevant du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2011, Purvis/Parlement, T‑439/09, EU:T:2011:600, point 65 et jurisprudence citée).
81 Le principe de proportionnalité, en tant que principe général du droit de l’Union, exige, selon la jurisprudence, que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs poursuivis par la réglementation en cause. Ainsi, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (voir arrêt du 6 novembre 2014, Grèce/Commission, T‑632/11, non publié, EU:T:2014:934, point 59 et jurisprudence citée).
82 Le principe de protection de la confiance légitime s’étend à tout justiciable chez lequel une institution de l’Union a fait naître des espérances fondées. Constituent des assurances susceptibles de faire naître de telles espérances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels, concordants et émanant de sources autorisées et fiables. En revanche, nul ne peut invoquer une violation dudit principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration (arrêt du 14 mars 2013, Agrargenossenschaft Neuzelle, C‑545/11, EU:C:2013:169, points 23 à 25).
83 Quant au principe de bonne administration, il est consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux et il implique en particulier que toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, les organes et les organismes de l’Union.
84 En l’espèce, il y a lieu d’examiner si les principes en question ont été respectés lorsque la Commission a décidé, sur le fondement de l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014, d’appliquer une nouvelle correction forfaitaire aux dépenses relatives à la mesure 125A au titre des exercices financiers 2011 et 2012 (ligne budgétaire 05040511251001) et aux dépenses relatives à la mesure 123A au titre des exercices financiers 2012 et 2014 (ligne budgétaire 05040511232001), alors que ces dépenses avaient fait l’objet d’une précédente correction forfaitaire au titre des mêmes exercices financiers.
85 À cet égard, la Cour a rappelé que la Commission était expressément habilitée, conformément à l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014, à mener des procédures d’apurement de conformité consécutives, aux termes desquelles elle pouvait adopter des décisions d’exécution au titre de l’article 52 du règlement no 1306/2013 (voir, en ce sens, arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission, C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937, point 74).
86 L’adoption successive de telles décisions, dans la mesure où elles concourent à un objectif de mise en conformité des dépenses concernées par l’État membre, doit nécessairement être possible jusqu’à la mise en œuvre effective par l’État membre concerné des mesures correctives. À cet égard, les lignes directrices de 2015, au point 1.3.5 « Période couverte par les corrections financières », mentionnent que « [l]es dépenses effectuées pendant les mois suivant la communication écrite de la Commission en vertu de l’article 34, paragraphe 2, du règlement [d’exécution] no 908/2014 doivent également être corrigées jusqu’à ce que la défaillance cesse d’avoir une incidence négative sur la légalité et la régularité des dépenses ».
87 Au regard de ces dispositions, il apparaît que la Commission disposait, en vertu de l’article 34, paragraphe 7, du règlement d’exécution no 908/2014, telle que son interprétation a été confirmée par la Cour, d’une base légale claire afin de mettre en œuvre, à l’égard des dépenses concernées, des procédures d’apurement consécutives de conformité jusqu’à la mise en œuvre effective par l’État membre concerné des mesures correctives, de sorte que le principe de sécurité juridique n’a pas été méconnu.
88 En outre, en ce qui concerne la mise en œuvre de telles mesures à l’égard de dépenses qui, comme celles relevant de la mesure 125A, sont effectuées de manière échelonnée, il y a lieu de relever que, si le paiement du solde fixe définitivement la période au cours de laquelle la Commission peut imposer une correction financière, il n’en demeure pas moins que, avant cette échéance, la Commission peut opérer des corrections sur les paiements intermédiaires intervenus au cours de la période de 24 mois précédant la notification de ses observations. Or, en l’espèce, la République hellénique ne conteste pas le fait que des mesures correctives n’avaient pas encore été mises en œuvre, puisqu’elle fait valoir, au contraire, qu’il aurait été trop tard pour appliquer de telles mesures.
89 S’agissant de l’application successive de plusieurs mesures de corrections financières forfaitaires à une même ligne budgétaire au titre du même exercice financier, comme le fait valoir la Commission, elle est la conséquence du fait que la mise en œuvre de la mesure 125A par les autorités helléniques n’avait pas fait l’objet d’une évaluation définitive, de sorte que la Commission conservait la possibilité d’ajuster le taux de la correction en fonction de son évaluation définitive de la carence constatée. Contrairement à ce que soutient la République hellénique, cette faculté dont disposait la Commission ne lui permettait pas d’imposer indéfiniment des corrections financières pour les dépenses relevant d’une même mesure, mais uniquement de procéder à de telles corrections jusqu’à l’évaluation définitive de la mesure en cause après l’intervention du paiement final. Par ailleurs, il est constant que, lors du calcul du montant net des corrections définitives, les montants issus des précédentes corrections ont été déduits.
90 Il apparaît ainsi que la Commission n’a pas dépassé les limites de ce qui était approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs poursuivis par la réglementation en cause, à savoir mettre en œuvre une correction financière en fonction de son évaluation définitive de la carence constatée, à un stade où il n’avait pas encore été remédié à ladite carence. Dans ces conditions, la Commission n’a pas méconnu le principe de proportionnalité.
91 En ce que la République hellénique invoque également une violation des principes de bonne administration et de protection de la confiance légitime, outre qu’il y a lieu de constater que la violation alléguée n’a pas été dûment exposée, elle n’apparaît en tout état de cause pas fondée.
92 En effet, la République hellénique ne démontre pas, premièrement, que la Commission aurait pris à son égard des engagements précis dont elle se serait départie, tenant en particulier à un prétendu engagement d’écarter des corrections financières en méconnaissance des dispositions de l’article 52, paragraphe 4, sous c), du règlement no 1306/2013, et, deuxièmement, que la procédure d’apurement des comptes aurait en l’espèce été partiale, inéquitable et serait intervenue dans un délai non raisonnable.
93 L’interprétation en question n’est pas davantage contraire à l’article 41 du règlement no 1306/2013, à l’article 12 du règlement délégué no 907/2014 ou aux lignes directrices de 2015. Contrairement à ce que soutient la République hellénique, ces dispositions, qui concernent, pour la première, la réduction et la suspension des paiements mensuels et intermédiaires et, pour la seconde, les critères et la méthodologie pour l’application de corrections dans le cadre de l’apurement de conformité, n’imposent pas à la Commission, à l’issue de ses constatations initiales, de calculer de manière définitive et sans réserve la correction financière finalement imposée.
94 Il convient enfin de constater une absence de cumul des corrections financières successives, dans la mesure où, ainsi qu’il a été relevé au point 89 ci-dessus, le calcul du montant net de ces dernières exclut les montants issus des précédentes corrections.
95 Au regard de l’ensemble de ces considérations, il apparaît que le troisième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le quatrième moyen, concernant la mesure 125A, tiré, d’une part, d’une violation de l’article 24, paragraphe 2, sous b), du règlement no 65/2011, de l’article 43 du règlement no 1974/2006 et des dispositions du PDR en vigueur pour la période de programmation 2007-2013 et, d’autre part, d’un défaut de base légale et de motivation de la décision attaquée en ce qui concerne l’infliction d’une correction financière et le taux de 10 % de cette dernière
96 La République hellénique expose que la Commission lui reproche à tort d’avoir méconnu les dispositions de l’article 24, paragraphe 2, sous b), du règlement no 65/2011, qui constituent l’unique base légale de la décision attaquée, selon lesquelles « [l]e contrôle administratif des demandes d’aide porte notamment sur […] le respect des critères de sélection fixés dans le programme de développement rural ». Elle conteste en particulier la constatation de la Commission selon laquelle la présélection des projets à laquelle procédait la DTMK était opaque et avait une incidence sur la validité de la procédure de sélection dans le cadre de la mesure 125A. À cet égard, elle fait valoir que la Commission n’aurait pas tenu compte du fait que la DTMK était le bénéficiaire des aides de la mesure 125A et qu’elle ne sélectionnait pas elle-même les projets bénéficiant d’un financement, mais se limitait à des actions préparatoires en vue d’une sélection finale par l’autorité de gestion.
97 Outre que la Commission n’aurait pas motivé sa position sur ce point, ni sur le fait que sa propre appréciation différait de celle de l’organe de conciliation, la République hellénique expose que la législation de l’Union, en particulier l’article 43 du règlement (CE) no 1974/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil concernant le soutien au développement rural par le Feader (JO 2006, L 368, p. 15), n’empêcherait pas le bénéficiaire d’un programme de proposer, pour des raisons stratégiques, de soumettre à approbation l’un ou l’autre de ses choix, sur la base de ses propres besoins et de ses priorités spécifiques.
98 La Commission conteste les arguments de la République hellénique.
99 En l’espèce, il y a lieu de relever, à l’instar de la Commission, que la République hellénique réitère, en substance, l’argumentation qu’elle avait précédemment développée à la suite des enquêtes subséquentes en ce qui concerne la question de la régularité de l’intervention de la DTMK dans la sélection des projets bénéficiant d’un financement au titre de la mesure 125A.
100 À cet égard, il convient tout d’abord de constater, s’agissant de la base légale au regard de laquelle l’intervention de la DTMK a été qualifiée de défaillance, que la Commission a certes visé, dans le rapport de synthèse, l’article 24, paragraphe 2, sous b), du règlement no 65/2011, qui définit la nature et les modalités des contrôles administratifs à mettre en œuvre à l’égard des demandes d’aide et de paiement, mais que, dans la mesure où le rapport de synthèse se réfère aux enquêtes subséquentes, en particulier à l’enquête RD 1/2015/805/GR, qui avait relevé une violation de l’article 71, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil, du 20 septembre 2005, concernant le soutien au développement rural par le Feader (JO 2005, L 277, p. 1), cette disposition doit également être considérée comme constituant la base légale de la décision attaquée.
101 En vertu de l’article 71, paragraphe 2, du règlement no 1698/2005, les « dépenses ne sont éligibles pour la participation du Feader que si elles sont effectuées pour des opérations décidées par l’autorité de gestion du programme concerné ou sous sa responsabilité, selon les critères de sélection fixés par l’organe compétent ». S’agissant du domaine d’intervention et de la compétence de l’autorité de gestion, l’article 75, paragraphe 1, sous a), dudit règlement dispose que cette dernière « est responsable de la gestion et de la mise en œuvre efficaces, effectives et correctes du programme, et [qu’]elle est chargée en particulier […] de veiller à ce que les opérations soient sélectionnées pour le financement conformément aux critères applicables au programme de développement rural ».
102 Des dispositions complémentaires figurent dans le règlement no 1974/2006, dont l’article 43 prévoit que, « [e]n ce qui concerne les mesures d’investissement, les États membres veillent à ce que l’aide soit ciblée sur des objectifs clairement définis reflétant les besoins structurels et territoriaux ainsi que les handicaps structurels qui ont été identifiés ». L’article 48, paragraphe 1, du même règlement prévoit en outre que, pour assurer une protection efficace des intérêts financiers de l’Union, « les États membres veillent à ce que toutes les mesures de développement rural qu’ils entendent mettre en œuvre puissent faire l’objet de contrôles et de vérifications » et « élaborent à cet effet des dispositions en matière de contrôles leur permettant de s’assurer de façon satisfaisante du respect des critères d’admissibilité et autres engagements ».
103 L’article 24, paragraphe 2, sous b), du règlement no 65/2011 dispose, quant à lui, que « [l]e contrôle administratif des demandes d’aide porte notamment sur […] le respect des critères de sélection fixés dans le programme de développement rural ».
104 Il appartient aux autorités des États membres d’agir en respectant les orientations et les limites fixées par l’habilitation que leur confèrent le règlement no 1698/2005, puis, à sa suite, le règlement no 65/2011, dans la fixation de critères de sélection à l’égard des dépenses concernées, d’une part, et dans l’application de ces critères, d’autre part.
105 En l’espèce, l’enquête RD 1/2015/805/GR a permis de constater que la procédure de sélection, telle qu’elle était organisée par la République hellénique, ne répondait pas aux exigences formulées par les dispositions de l’article 71, paragraphe 2, du règlement no 1698/2005 et de l’article 24, paragraphe 2, sous b), du règlement no 65/2011.
106 Or, dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), le Tribunal a constaté que la Commission avait estimé à juste titre que la sélection des projets ne résultait pas uniquement d’une décision prise par l’autorité de gestion, seule compétente pour fixer les critères et pour intégrer les projets à la mesure 125A, mais également de l’intervention de la DTMK, cette dernière ayant en outre été désignée dans le cadre institutionnel découlant du PDR en vigueur pour la période de programmation 2007-2013 comme bénéficiaire de la mesure en cause, en méconnaissance de la distinction des compétences entre autorité de gestion et organe compétent, telle qu’elle découle de l’article 71, paragraphe 2, du règlement no 1698/2005.
107 Ces constatations permettaient de douter du fait que la DTMK agissait en toute neutralité et en toute transparence afin de garantir l’impartialité totale de la procédure de sélection. En outre, dans l’arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission (C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937, point 87), la Cour a constaté que le Tribunal n’avait pas commis d’erreur de droit lorsqu’il avait qualifié d’irrégulière l’intervention de la DTMK, au regard des dispositions de l’article 71 du règlement no 1698/2005.
108 L’enquête RD 1/2015/805/GR mettait également en avant d’autres faiblesses dans la procédure de sélection des projets, comme l’absence de registre de dépôt des demandes, l’absence de critères définis de maturité technique des projets et celle de piste d’audit des demandes.
109 À cet égard, les constatations effectuées par la Commission ont pu légitimement l’amener à considérer que la DTMK avait assuré une gestion opaque de la mesure 125A et qu’elle avait remplacé les autorités locales de gestion, qui, dans la pratique, étaient supposées traiter elles-mêmes les projets au profit des populations locales.
110 La Commission pouvait donc se prévaloir de l’existence d’éléments suffisants pour faire naître un doute sérieux et raisonnable à l’égard des contrôles incombant à la République hellénique dans le cadre de la sélection des projets relevant de la mesure 125A, la République hellénique n’étant pour sa part pas parvenue à démontrer que les constatations de la Commission étaient inexactes.
111 La République hellénique n’apporte aucun élément susceptible de remettre en cause les constatations effectuées par la Commission dès la réalisation de l’enquête RD 1/2015/805/GR et elle n’invoque pas davantage le fait que, au titre de la période pertinente retenue dans le cadre de l’enquête documentaire, elle aurait fourni à la Commission la preuve de la mise en œuvre de mesures correctives.
112 Enfin, s’agissant du grief tenant à la motivation insuffisante de la décision attaquée en ce qu’elle aurait divergé de la position adoptée par l’organe de conciliation, il convient de rappeler que la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître d’une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et au juge de l’Union d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement du libellé de cet acte, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 12 septembre 2012, Grèce/Commission, T‑356/08, non publié, EU:T:2012:418, point 113 et jurisprudence citée).
113 Il y a lieu de relever, au vu des éléments portés à sa connaissance au cours de la procédure administrative, et notamment lors de la procédure de conciliation, qui fait partie de cette procédure et donc du contexte ayant mené à l’adoption de la décision attaquée, que la République hellénique ne pouvait ignorer les éléments ayant fondé la position de la Commission telle qu’elle figure dans le rapport de synthèse et dans la décision attaquée. Le fait que la Commission ait finalement adopté une position pouvant se différencier de celle de l’organe de conciliation relève en définitive du fond de l’affaire, et non de la motivation de la décision attaquée. Le défaut de motivation allégué n’apparaît donc pas fondé.
114 Au vu des considérations qui précèdent, le quatrième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le cinquième moyen, concernant la mesure 125A, tiré, premièrement, d’une violation de l’article 52 du règlement no 1306/2013, de l’article 34 du règlement d’exécution no 908/2014, des lignes directrices de 2015, des principes de respect des droits de la défense, en particulier du droit d’être entendu, de protection de la confiance légitime et de proportionnalité et, deuxièmement, d’une insuffisance de motivation et d’une erreur de fait
115 La République hellénique soutient que la décision attaquée et le rapport de synthèse sont affectés d’un défaut de motivation en ce qui concerne l’aggravation du taux de correction appliqué aux dépenses de la mesure 125A, fixé initialement à 5 % à la suite de l’enquête menée en 2012, puis fixé à 10 % après les enquêtes subséquentes et maintenu à ce niveau à la suite de l’enquête documentaire. La Commission aurait d’ailleurs refusé d’évoquer cette question lors de la réunion bilatérale du 18 janvier 2018, au motif que cette augmentation était intervenue dès 2015 et que les autorités helléniques avaient alors disposé de la possibilité d’en contester le principe. Ce refus serait constitutif d’une violation des garanties procédurales conférées aux États membres et contreviendrait au principe de respect des droits de la défense et de coopération loyale. De même, elle n’aurait fourni aucune explication motivée au fait que sa position était contraire à celle retenue par l’organe de conciliation.
116 En outre, la défaillance identifiée par la Commission n’aurait pas dû être considérée comme un problème récurrent, dans la mesure où elle aurait déjà produit ses effets, qui ne pouvaient plus être corrigés, puisqu’elle aurait concerné la phase d’attribution des projets, qui était close lors de la réalisation de l’enquête documentaire. La République hellénique soutient qu’elle pouvait légitimement s’attendre à ce que seul un taux de correction de 5 % soit appliqué et qu’elle n’a pas été informée de l’existence de nouvelles circonstances aggravantes justifiant une augmentation de ce taux. Au demeurant, de telles circonstances seraient inexistantes, de sorte que la décision attaquée serait entachée d’une erreur de fait. Par conséquent, le respect du principe de proportionnalité aurait à tout le moins imposé le maintien du taux initial de correction de 5 %.
117 Dans la réplique, la République hellénique conteste le fait que, contrairement à ce que soutient la Commission, le juge de l’Union ait confirmé le bien-fondé de l’augmentation du taux de correction en question et elle réitère qu’elle n’avait pas connaissance des éléments nouveaux et complémentaires retenus par la Commission au soutien de cette évaluation plus défavorable, et ce dès la réalisation des enquêtes subséquentes. Elle fait également valoir que l’approche retenue par la Commission revient à appliquer des corrections subséquentes de manière formelle et automatique, privant l’État membre concerné de toute garantie procédurale.
118 La Commission conteste les arguments de la République hellénique.
119 En l’espèce, dans la mesure où la République hellénique fonde son argumentation sur un défaut de motivation de la décision attaquée et du rapport de synthèse s’agissant du taux de correction forfaitaire de 10 % appliqué aux dépenses de la mesure 125A, ce qui aurait entraîné, en substance, une violation de ses droits de la défense et de ses droits procéduraux, il y a lieu de rappeler, ainsi que cela résulte de l’examen du quatrième moyen, que la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement du libellé de cet acte, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée.
120 Il est exact que, à la suite de l’enquête initiale, en vertu de la décision d’exécution 2016/417, un taux de correction forfaitaire de 5 % a été appliqué aux dépenses de la mesure 125A, pour les exercices financiers des années 2010 à 2013 (ligne budgétaire 05040511252001) et pour ceux des années 2012 et 2013 (ligne budgétaire 05040511251001), et que ce taux a été porté à 10 % à la suite des enquêtes subséquentes, puis maintenu à ce niveau à la suite de l’enquête documentaire.
121 Or, les motifs de cette augmentation du taux de correction appliqué aux dépenses concernées ont été portés à la connaissance de la République hellénique avant l’adoption de la décision attaquée. En effet, ainsi que le Tribunal l’a constaté au point 65 de l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), cette augmentation tenait au fait que, lors de l’application de la correction initiale de 5 %, le paiement du solde n’était pas encore intervenu et que la Commission a ensuite décidé d’appliquer une correction à l’égard des dépenses qui ont continué à être effectuées dans le cadre de ces mêmes lignes budgétaires, mais en appliquant un taux de correction supérieur, justifié selon elle par sa meilleure appréhension de la carence concernée. Si certaines dépenses ayant déjà donné lieu à une correction avaient néanmoins fait à nouveau l’objet d’une correction, le montant de la correction initiale avait été soustrait du montant définitif retenu dans la décision 2018/304, ainsi que cela apparaissait dans le décompte qui figurait dans le rapport de synthèse établi à la suite des enquêtes subséquentes.
122 Compte tenu de la participation des autorités helléniques à la procédure d’apurement dès le stade de l’enquête initiale, de la correspondance et des échanges qui ont eu lieu avec la Commission au cours des années qui ont suivi ainsi que des motifs de l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), qui est intervenu avant l’adoption de la décision attaquée et s’inscrivait ainsi dans le contexte juridique de l’adoption de ladite décision, connu des autorités helléniques, ces dernières ne peuvent valablement prétendre que les motifs sur lesquels la Commission s’est fondée pour décider du principe des corrections ainsi que du taux de ces dernières n’auraient pas été portés à leur connaissance (voir, en ce sens, arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission, C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937, point 102 et jurisprudence citée).
123 Il y a lieu de considérer que ces motifs satisfont en l’espèce aux exigences de l’article 296 TFUE, de sorte qu’il y a lieu de rejeter le grief tiré d’un défaut de motivation à cet égard.
124 De même, les considérations qui précèdent permettent de relever que, contrairement à ce que prétend la République hellénique, la Commission ne s’est pas limitée à appliquer formellement et mécaniquement les corrections contestées, mais s’est fondée sur une appréciation précise des faits pour décider d’une augmentation du taux initial de correction, à la suite d’un échange avec les autorités helléniques, de sorte que le grief de la République hellénique tiré d’une prétendue violation des droits de la défense et de ses droits procéduraux ne peut qu’être rejeté.
125 Sur le fond, s’agissant des dépenses litigieuses relevant de la mesure 125A, la situation à la suite des enquêtes subséquentes et jusqu’à la réalisation de l’enquête documentaire n’a pas évolué et, ainsi que l’admet la République hellénique, aucune mesure corrective n’a été mise en œuvre au cours de la période visée par cette dernière enquête. Il n’existait donc aucun motif susceptible de justifier une modification du taux forfaitaire de correction de 10 % au regard de la gravité des défaillances qui avaient été constatées. C’est à juste titre que la Commission a donc laissé ce taux inchangé, de sorte que le grief tiré d’une violation du principe de proportionnalité ne peut qu’être rejeté.
126 Le point 17.2.2 du rapport de synthèse mentionne, à cet égard, que « [l]es constatations n’ont pas changé et continuent d’être liées aux anciennes procédures de sélection qui ont été appliquées par les autorités helléniques au début de la période de programmation 2007-2013 ».
127 C’est donc à juste titre que la Commission a décidé d’appliquer une correction forfaitaire au taux de 10 % aux dépenses relevant de la mesure 125A pour les exercices financiers des années 2010 à 2013 (ligne budgétaire 05040511252001) et pour ceux des années 2012 et 2013 (ligne budgétaire 05040511251001).
128 Le grief tiré d’une violation de l’article 52 du règlement no 1306/2013, de l’article 34 du règlement d’exécution no 908/2014 et des lignes directrices de 2015 (voir point 86 ci-dessus) n’est donc pas fondé et doit être rejeté.
129 Par ailleurs, s’agissant du défaut allégué de motivation en ce que la Commission n’aurait pas exposé pourquoi elle avait retenu une position différente de celle préconisée dans son avis par l’organe de conciliation au sujet de la fixation du taux de correction, il y a lieu de relever, ainsi que le fait valoir la Commission, que, au point 17.2.4 du rapport de synthèse, il est mentionné que l’organe de conciliation a tout au plus évoqué des interrogations sur la persistance des défaillances dans les contrôles de la mesure 125A, alors que les projets concernés n’avaient qu’un seul bénéficiaire, mais qu’il n’a évoqué spécifiquement ni la question du taux de correction retenu par la Commission, ni celle de l’augmentation de celui-ci.
130 Dans ces conditions, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir exposé les motifs d’une éventuelle divergence avec l’organe de conciliation, cet argument de la République hellénique manquant en fait.
131 En tout état de cause, il doit être rappelé que, dans le cadre de la procédure de conciliation, les dispositions combinées de l’article 36, sous a), et de l’article 40, paragraphe 4, du règlement d’exécution no 908/2014 ne fondent aucune obligation de motivation plus détaillée (arrêt du 18 novembre 2021, Grèce/Commission, C‑107/20 P, non publié, EU:C:2021:937, point 100).
132 En outre, à supposer même qu’il ait existé une divergence entre l’organe de conciliation et la Commission au sujet du niveau du taux de correction, il s’agissait d’une question portant sur le fond de l’affaire et, dans ses échanges avec la République hellénique, la Commission avait déjà suffisamment exposé les motifs l’ayant amenée à retenir le taux en question. Il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir simplement adopté une position différente, dans la mesure où son appréciation au fond des faits n’était entachée d’aucune erreur.
133 Enfin, s’agissant de la violation alléguée du principe de protection de la confiance légitime, il convient de rappeler que la Commission disposait de la faculté d’ajuster le taux de correction en fonction d’éléments tels que la persistance des irrégularités constatées ou une meilleure appréciation desdites irrégularités, ainsi que cela ressort des dispositions de l’article 34, paragraphes 2 et 7, du règlement d’exécution no 908/2014. Contrairement à ce que soutient la République hellénique, cette faculté n’était aucunement restreinte par le choix d’un taux initial de correction à la suite de l’enquête initiale, puisque ce taux pouvait parfaitement être ajusté par les décisions ultérieures. La République hellénique ne peut donc affirmer que le taux initial de correction avait été définitivement fixé et que la Commission aurait pris de quelconques engagements en ce sens. Le grief tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime doit donc être rejeté comme non fondé.
134 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen dans son ensemble comme étant non fondé.
Sur le sixième moyen, concernant les mesures 321 et 322, tiré,d’une violation des dispositions de l’article 24, paragraphe 2, sous b), du règlement no 65/2011 et des lignes directrices de 2015, d’une erreur de fait, d’un défaut de motivation et d’une violation du principe de proportionnalité
135 La République hellénique fait tout d’abord valoir que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas suffisamment motivé l’infliction d’une correction forfaitaire au titre des mesures 321 et 322. Elle soutient en particulier que les constatations sur lesquelles repose la motivation exposée au point 17.2.2 du rapport de synthèse en ce qui concerne les mesures en question auraient dû être expliquées plus spécifiquement.
136 La République hellénique conteste ensuite la mention figurant au point 17.2.2 du rapport de synthèse selon laquelle « [elle aurait] accepté ces constatations dans le cadre du contrôle RD 1/2015/805/GR ». À cet égard, elle soutient que, pendant toute la procédure, mais aussi dans la requête, sa position était que les insuffisances constatées ne constituaient pas des défaillances dans un contrôle clé justifiant une correction de 5 %, mais des indices de faiblesses concernant la piste d’audit qui justifiaient une correction de 2 %.
137 Enfin, dans la réplique, la République hellénique expose, premièrement, que les griefs identiques qu’elle a formulés et qui ont été rejetés par le Tribunal dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), n’ont pas été contestés dans le cadre du pourvoi, puisqu’il s’agit d’appréciations sur des questions de fait et non des erreurs de droit, de sorte que, si le pourvoi est accueilli, il sera à nouveau statué sur le fond de l’affaire. Elle expose, deuxièmement, que la Commission ne répond pas à l’argument selon lequel l’infliction d’une correction de 5 % viole en tout état de cause le principe de proportionnalité.
138 La Commission conteste les arguments de la République hellénique.
139 En l’espèce, le point 17.2.2 du rapport de synthèse mentionne que, « [e]n ce qui concerne les mesures 321 et 322[,] les défaillances relevées (absence de méthodologie claire pour l’évaluation et la notation des demandes de soutien, absence de justification des notes attribuées, erreurs et incohérences dans l’application des critères correspondants) n’étaient pas des défaillances relatives à la piste d’audit [et que, p]ar ailleurs, l’État membre a admis ces constatations dans le cadre du contrôle RD 1/2015/805/GR ».
140 Ces constatations, si elles sont certes succinctes, s’inscrivent dans le cadre des échanges ayant eu lieu entre les autorités helléniques et la Commission, à l’occasion desquels un éclairage complet a été fourni au sujet des défaillances en question.
141 En particulier, la lettre Ares(2017) 3884660, du 3 août 2017, se réfère expressément au courrier Ares(2015) 3097712, du 23 juillet 2015, qui été envoyé aux autorités helléniques à la suite de l’enquête RD 1/2015/805/GR. Dans ce dernier courrier, ainsi que cela a déjà été mentionné au point 118 de l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), la Commission a fait part de manière détaillée des constatations effectuées par ses services, qui l’ont amenée à considérer que, tant dans la phase initiale de réception et d’évaluation de la maturité technique des propositions de projets que dans la seconde phase d’envoi des projets à l’autorité de gestion aux fins de leur évaluation à l’aune des critères de sélection, des carences avaient été relevées en ce qui concernait les mesures 321 et 322. De telles carences constituent une violation des obligations pesant sur les États membres tenant à la mise en œuvre de contrôles administratifs en vertu de l’article 24, paragraphe 2, du règlement no 65/2011.
142 Ces constatations, qui fondent la correction financière forfaitaire litigieuse, ont déjà été contestées par la République hellénique. Or, au point 119 de l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), l’évaluation de la gravité des carences constatées par les services de la Commission en ce qui concerne les mesures 321 et 322 a été considérée comme relevant de l’absence d’un contrôle clé, susceptible de donner lieu à une correction forfaitaire de 5 %.
143 Dès lors que les carences affectant les mesures 321 et 322 doivent être considérées comme relevant de l’absence d’un contrôle clé et qu’elles se sont poursuivies jusqu’à la réalisation de l’enquête documentaire, aucun motif ne justifiait, contrairement à ce que soutient la République hellénique, l’application d’une correction forfaitaire au taux réduit de 2 %. La violation alléguée du principe de proportionnalité et des lignes directrices de 2015 doit donc être rejetée.
144 Enfin, si la mention figurant dans le rapport de synthèse selon laquelle, en substance, la République hellénique aurait accepté ces constatations, puisqu’elle ne les avait pas contestées dans le cadre du pourvoi qu’elle a formé à l’encontre de l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), peut certes apparaître inexacte, puisque, s’agissant d’une question portant sur les faits, elle ne pouvait pas, en principe, être remise en cause dans le cadre d’un pourvoi, cela n’a cependant aucune incidence sur le fait que, dans le cadre de la présente procédure d’apurement des comptes, la Commission a fourni une motivation suffisante concernant les corrections financières appliquées aux mesures 321 et 322.
145 Il y a donc lieu de rejeter le sixième moyen comme étant non fondé.
Sur le septième moyen, concernant la mesure 123A, tiré, premièrement, d’une violation des dispositions de l’article 24, paragraphes 1 et 2, du règlement no 65/2011, de l’article 52 du règlement no 1306/2013 et de l’article 34 du règlement d’exécution no 908/2014, deuxièmement, d’une erreur de fait, troisièmement, d’un défaut de motivation et, quatrièmement, d’une violation du droit d’être entendu et des principes de respect des droits de la défense et de proportionnalité
146 La République hellénique expose, s’agissant de la correction forfaitaire de 5 % appliquée au titre de la mesure 123A, que la défaillance reprochée, relative à la vérification du caractère raisonnable des dépenses, repose sur une interprétation erronée de l’article 24, paragraphes 1 et 2, du règlement no 65/2011 et sur une erreur de fait, en ce que les contrôles administratifs du caractère raisonnable des dépenses étaient effectués et évalués par le biais d’un système adéquat qui pouvait se fonder, alternativement et non pas cumulativement, sur les coûts de référence, la comparaison des différentes offres ou sur l’avis d’un comité d’évaluation. Ce système aurait permis de garantir que les demandes d’aide étaient examinées au regard des prix de référence maximums fixés annuellement par le ministère des Travaux publics par catégorie de dépenses, sur la base de la liste qui avait été distribuée aux évaluateurs, ainsi que des prix des travaux publics dans le cadre des projets de l’Axe 4 Leader.
147 La République hellénique fait en tout état de cause valoir que le risque encouru par le fonds concerné était extrêmement faible et ne justifiait pas l’application d’un taux de correction de 5 %, qui était disproportionné, mais tout au plus de 2 %. La Commission n’aurait d’ailleurs pas répondu à cet argument.
148 En outre, République hellénique expose que ses droits de la défense ainsi son droit d’être entendu et le principe du contradictoire ont été violés, car, à nouveau, les conclusions de l’enquête RD 1/2015/809/GR n’ont pas été soumises à discussion dans le cadre de l’enquête documentaire.
149 Dans la réplique, la République hellénique explique enfin que la procédure contradictoire ne peut en aucun cas être contournée, ni être remplacée par la présentation d’arguments au stade du recours. À ce titre, elle conteste l’affirmation de la Commission selon laquelle dès lors que, à l’issue des enquêtes subséquentes, la procédure avait été close, les décisions consécutives de correction ne pouvaient plus donner lieu à discussion.
150 La Commission conteste les arguments de la République hellénique.
151 En l’espèce, la République hellénique conteste, en substance, la qualification de défaillance retenue par la Commission en ce qui concerne les constats qu’elle a opérés s’agissant des contrôles mis en œuvre à l’égard des dépenses engagées au titre de la mesure 123A ainsi que les conséquences financières, consistant en une correction forfaitaire de 5 %, tirées par la Commission de cette qualification erronée.
152 Selon l’article 24, paragraphe 1, du règlement no 65/2011, il est prévu ce qui suit :
« Des contrôles administratifs sont effectués pour toutes les demandes d’aide, demandes de paiement et autres déclarations qui doivent être introduites par un bénéficiaire ou par un tiers et couvrent tous les éléments qu’il est possible et opportun de contrôler par des moyens administratifs. Les procédures imposent l’enregistrement des activités de contrôle, des résultats des vérifications et des mesures prises à l’égard des anomalies constatées. »
153 En outre, en vertu de l’article 24, paragraphe 2, sous d), du règlement no 65/2011, le contrôle administratif des demandes d’aide porte sur « le caractère raisonnable des coûts présentés, qui sont évalués à l’aide d’un système approprié d’évaluation tel que des coûts de référence, la comparaison de différentes offres ou un comité d’évaluation ».
154 Il convient également de rappeler que l’article 52, paragraphe 1, du règlement no 1306/2013, applicable depuis le 1er janvier 2015, dispose, en substance, que, lorsque la Commission considère que des dépenses relevant du domaine du Feader n’ont pas été effectuées conformément au droit de l’Union et de l’État membre concerné, elle adopte des actes d’exécution déterminant les montants à exclure du financement de l’Union.
155 Par la lettre Ares(2017) 3884660, du 3 août 2017, qui se réfère expressément au courrier Ares(2015) 3097712, du 23 juillet 2015, la République hellénique a été informée que, à défaut d’adoption et de mise en œuvre de mesures correctives à la suite de l’enquête RD 1/2015/809/GR, la Commission serait amenée à considérer que la mesure 123A continuait de générer des dépenses qui n’étaient pas conformes aux règles de l’Union pour la période postérieure au 31 décembre 2015.
156 Le point 17.2.1.2 du rapport de synthèse, en ce qui concerne la mesure 123A, mentionne ce qui suit :
« À la suite du contrôle RD 1/2015/809/GR, la DG AGRI a appliqué une correction financière de 5 % sur la mesure 123A pour des faiblesses dans l’exécution du contrôle clé “évaluation appropriée du caractère raisonnable des dépenses”. La correction financière a été calculée pour une période s’achevant le 31/12/2015.
Toutefois, l’impossibilité constatée aurait également affecté des dépenses effectuées après cette date, puisque ce n’est qu’au mois d’avril 2017 que les autorités helléniques auraient mis en place de nouvelles procédures, améliorées pour évaluer le caractère raisonnable des dépenses.
Il s’ensuit que la présente enquête vise à étendre la correction financière en cause aux dépenses effectuées à partir d[u 1er janvier] 2016 et qui continuent d’être affectées par l’absence de contrôle constatée au titre de l’enquête RD 1/2015/809/GR. »
157 Ces constatations, qui ont fondé la correction financière forfaitaire initiale et qui continuent de fonder la correction litigieuse au titre de la mesure 123A, ont déjà été contestées par la République hellénique. Or, aux points 134 et 136 à 138 de l’arrêt du 19 décembre 2019, Grèce/Commission (T‑295/18, non publié, EU:T:2019:880), l’évaluation de la gravité des carences constatées par les services de la Commission en ce qui concerne la mesure 123A a été considérée comme relevant de l’absence d’un contrôle clé, justifiant l’application d’une correction forfaitaire de 5 %.
158 En particulier, il a été considéré que rien ne permettait de remettre en cause les constats opérés par les services de la Commission selon lesquels il était indiqué ce qui suit :
« [A]fin de comparer le caractère raisonnable d’une offre, il était fait usage d’une autre offre qui n’était pas comparable, de sorte qu’elle n’aurait pas dû servir de référence. Par ailleurs, le coût raisonnable d’équipements agricoles était quant à lui évalué sur une base empirique par une unité de l’autorité de gestion, mais sans aucune garantie de transparence. De même, quand des réductions de coûts étaient proposées, elles ne comportaient pas d’indications des prix de référence. Enfin, des suppléments de prix portant sur divers postes de projets pouvaient être acceptés et payés, sans vérifications de leur caractère raisonnable, dès lors que le budget global des projets n’était pas dépassé (grâce à une réduction du prix payé pour d’autres postes). »
159 Les constatations qui ont été opérées par la Commission à la suite de l’enquête RD 1/2015/809/GR ainsi que l’absence d’adoption et de mise en œuvre de mesures correctives avant le mois d’avril 2017 permettent, contrairement à ce que soutient la République hellénique, de parvenir à la conclusion que la Commission, en appliquant une correction financière forfaitaire de 5 % aux dépenses relevant de la mesure 123A pour la période postérieure au 31 décembre 2015, d’une part, a fait une exacte application des dispositions de l’article 24, paragraphes 1 et 2, du règlement no 65/2011, de l’article 52 du règlement no 1306/2013 et de l’article 34 du règlement d’exécution no 908/2014 et, d’autre part, n’a pas violé le principe de proportionnalité.
160 L’ensemble des éléments sur lesquels la Commission s’est appuyée a été porté à la connaissance de la République hellénique dans le cadre de la procédure d’apurement des comptes et a pu être discuté par cette dernière, de sorte que l’argument tiré d’une violation des droits de la défense et, en particulier, du droit d’être entendu n’est pas fondé.
161 La République hellénique n’a d’ailleurs fourni aucune indication en ce qui concerne l’existence d’éléments qui auraient dû amener la Commission à reconsidérer les appréciations qu’elle avait effectuées à la suite de l’enquête RD 1/2015/809/GR et qui fondent également les conclusions de l’enquête documentaire.
162 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le septième moyen et, partant, le recours dans sa totalité.
Sur les dépens
163 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
164 La République hellénique ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) La République hellénique est condamnée aux dépens.
Tomljenović | Schalin | Nõmm |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 septembre 2022.
Signatures
* Langue de procédure : le grec.
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