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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Vino Vintana v EUIPO - Torrevento (SINCE 1974 PRIMITIVO DI MANDURIA) (EU trade mark - Judgment) French Text [2024] EUECJ T-276/24 (27 November 2024) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2024/T27624.html Cite as: [2024] EUECJ T-276/24, ECLI:EU:T:2024:868, EU:T:2024:868 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
27 novembre 2024 (*)
« Marque de l’Union européenne - Procédure de nullité - Marque de l’Union européenne figurative SINCE 1974 PRIMITIVO DI MANDURIA DENOMINAZIONE DI ORIGINE CONTROLLATA Una antica tradizione familiare - Cause de nullité absolue - Absence de caractère distinctif - Article 52, paragraphe 1, sous a), et article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenus article 59, paragraphe 1, sous a), et article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »
Dans l’affaire T‑276/24,
Vino Vintana AG, établie à Ebikon (Suisse), représentée par Me F.‑M. Orou, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M .V. Ruzek, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été
Torrevento Srl, établie à Corato (Italie),
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, M. Kancheva (rapporteure) et M. U. Öberg, juges,
greffier : M. V. Di Bucci,
vu la phase écrite de la procédure,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Vino Vintana AG, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 26 mars 2024 (affaire R 1483/2021-4) (ci-après la « décision attaquée »).
Antécédents du litige
2 Le 5 novembre 2019, l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, Torrevento Srl, a présenté à ce dernier une demande de nullité de l’enregistrement international désignant l’Union européenne, dont la demande a été déposée par la requérante le 20 juin 2012, avec une priorité revendiquée au 24 avril 2012, pour le signe figuratif suivant :
3 Les produits couverts par la marque contestée pour lesquels la nullité était demandée relevaient de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient à la description suivante : « Vins avec l’indication géographique protégée “Primitivo di Manduria” ».
4 Les causes invoquées à l’appui de la demande en nullité étaient celles visées à l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), au motif que cette marque avait été enregistrée en violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), c), g) et j), de ce règlement.
5 Le 30 juin 2021, la division d’annulation a fait droit à la demande en nullité sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 2, du même règlement.
6 Le 27 août 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.
7 Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif à la date de son dépôt en 2012, en raison du message purement promotionnel qu’elle renvoyait pour les vins avec l’indication géographique protégée, existante depuis 1974, « Primitivo di Manduria ». Dès lors, cette marque n’était pas en mesure de remplir sa fonction essentielle, qui était de garantir l’identité d’origine des produits qu’elle désignait par rapport à la perception qu’en avait le public pertinent italophone.
Conclusions des parties
8 La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner l’EUIPO aux dépens.
9 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens dans le cas où une audience est organisée.
En droit
10 À titre liminaire, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement de la marque contestée, à savoir le 20 juin 2012, laquelle est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié (remplacé par le règlement 2017/1001) (voir, en ce sens, ordonnance du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, points 39 et 40). Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties à l’article 7, paragraphe 1, sous b), c), g) et j), à l’article 7, paragraphe 2 et à l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, comme visant les dispositions, d’une teneur identique, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), c), g) et j), de l’article 7, paragraphe 2 et de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009.
11 Dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), les règles procédurales applicables sont celles prévues par le règlement 2017/1001.
12 À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.
13 Aux termes de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement nº 207/2009, la nullité d’une marque de l’Union européenne est déclarée, sur demande présentée auprès de l’EUIPO, lorsque ladite marque a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 du même règlement.
14 Conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. Selon l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement, ce motif de refus est applicable même s’il n’existe que dans une partie de l’Union.
15 Le caractère distinctif d’une marque au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 signifie que cette marque permet d’identifier les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ces produits et ces services de ceux issus d’autres entreprises (voir arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 33 et jurisprudence citée). À cet effet, il n’est pas nécessaire que la marque transmette une information précise quant à l’identité du fabricant du produit ou du prestataire de services. Il suffit que la marque permette au public concerné de distinguer le produit ou le service qu’elle désigne de ceux qui ont une autre origine commerciale et de conclure que tous les produits ou les services qu’elle désigne ont été fabriqués, commercialisés ou fournis sous le contrôle du titulaire de cette marque, auquel peut être attribuée la responsabilité de leur qualité [arrêt du 8 février 2011, Paroc/OHMI (INSULATE FOR LIFE), T‑157/08, EU:T:2011:33, point 44].
16 Il résulte de la jurisprudence que le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception que le public pertinent en a (voir arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 34 et jurisprudence citée).
17 En premier lieu, s’agissant du public pertinent, ainsi que la chambre de recours l’a constaté, à juste titre, au point 36 de la décision attaquée, il convient d’examiner le caractère distinctif de la marque contestée par rapport au consommateur moyen italophone de l’Union, étant donné que celle-ci est composée principalement de termes italiens et d’une préposition courante en anglais utilisée pour désigner une période de temps, qui, lorsqu’elle est suivie d’un numéro, sera comprise comme telle par une partie non négligeable des consommateurs italiens.
18 Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette appréciation, au demeurant non contestée par la requérante.
19 En second lieu, s’agissant du caractère distinctif de la marque contestée, l’argumentation de la requérante s’articule en trois branches par lesquelles elle soutient, en substance, que, premièrement, cette marque possède effectivement un caractère distinctif intrinsèque normal, deuxièmement, ledit caractère aurait été constaté lors de son enregistrement et, troisièmement, le caractère distinctif de cette marque aurait été évalué de manière erronée dans la décision attaquée par la chambre de recours, car l’interdépendance des facteurs n’aurait pas été correctement prise en compte.
20 L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante.
21 Il y a lieu de rappeler que, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y aurait pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen successif des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque. En effet, il peut être utile, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs de la marque concernée (voir arrêt du 4 octobre 2007, Henkel/OHMI, C‑144/06 P, EU:C:2007:577, point 39 et jurisprudence citée).
22 S’agissant de marques composées de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou les services visés par ces marques, il résulte de la jurisprudence que leur enregistrement n’est pas exclu en raison d’une telle utilisation (arrêt du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk, C‑64/02 P, EU:C:2004:645, point 41). De même, la nullité d’une marque enregistrée ne saurait être prononcée en raison de ce type d’utilisation. Ainsi, une marque peut concomitamment être perçue par le public pertinent comme une formule promotionnelle et une indication de l’origine commerciale des produits ou des services qu’elle désigne (arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 45).
23 Il s’ensuit qu’une marque constituée de tels signes ou indications doit être considérée comme dépourvue de caractère distinctif si elle n’est susceptible d’être perçue par le public pertinent que comme une simple formule promotionnelle. En revanche, une telle marque doit se voir reconnaître un caractère distinctif si, au-delà de sa fonction promotionnelle, elle peut être perçue d’emblée par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits et des services visés [voir arrêt du 17 septembre 2015, Volkswagen/OHMI (COMPETITION), T‑550/14, EU:T:2015:640, point 17 et jurisprudence citée].
24 De plus, il convient également de tenir compte du fait que les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits et des services en se fondant sur des formules promotionnelles (voir, en ce sens, arrêt du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk, C‑64/02 P, EU:C:2004:645, point 35 et jurisprudence citée).
25 En l’espèce, tout d’abord, la chambre de recours a considéré que, au sein de la marque contestée, les éléments verbaux « since » et « 1974 » étaient les plus grands et, par conséquent, les plus visibles. Eu égard au fait que le consommateur italien est habitué à retrouver sur les étiquettes de vin le mot anglais « since » suivi de l’indication de l’année, il comprendra aisément que l’expression « since 1974 » signifie « depuis 1974 ».
26 Ensuite, d’une part, s’agissant des éléments verbaux représentés sur la partie supérieure de l’étiquette constituant la marque contestée, la chambre de recours a relevé que les éléments « primitivo di manduria », qui constituaient le nom d’appellation d’origine contrôlée (AOC) et d’appellation d’origine protégée (AOP), étaient écrits en de plus petites lettres majuscules entre les éléments « since » et « 1974 » et définissaient le type de produit en cause, à savoir du vin rouge bénéficiant de l’AOC et de l’AOP spécifiques, ce qui serait également compris par le public pertinent. À cet égard, la chambre de recours a considéré que, contrairement à ce que soutenait la requérante, « since 1974 » et « primitivo di manduria » n’étaient pas distincts, mais se renforçaient mutuellement, de façon à produire une déclaration laudative catégorique, mais banale, selon laquelle les produits en question répondaient aux exigences qualitatives du vin en cause, fixées depuis 1974. Selon la chambre de recours, l’ensemble de ces éléments verbaux serait perçu par ce public comme une indication que le vin en cause était produit avec les mêmes exigences qualitatives depuis 1974, ce qui ne constituait qu’un simple message promotionnel de l’invariabilité desdites qualités dans le but d’inciter un achat en toute sécurité. Cette expression promotionnelle ordinaire ferait partie du fond commun des mots qui communiqueraient aux consommateurs le message simple, direct et élogieux que les produits possédaient une qualité souhaitable et préservée depuis longtemps. La chambre de recours a conclu que l’ensemble était donc dépourvu de caractère distinctif dans la mesure où il était incapable de garantir l’identité d’origine des produits.
27 D’autre part, s’agissant des éléments verbaux représentés sur la partie inférieure de l’étiquette constituant la marque contestée, la chambre de recours a considéré que les éléments verbaux « denominazione di origine controllata », signifiant « appellation d’origine contrôlée », seraient perçus comme une autre indication que les vins étaient de qualité reconnue et que les éléments « una antica tradizione familiare », qui signifiaient (s’ils étaient lus compte tenu de la petite taille des lettres) « une ancienne tradition familiale », constituaient une simple formule promotionnelle.
28 Enfin, s’agissant des éléments figuratifs, tels que les deux trapèzes noirs de taille différente, qui seraient perçus comme constituant une banale étiquette de vin en deux parties, mais également les couleurs utilisées (noir, blanc et gris) pour la représentation des trois cadres trapézoïdaux et les lignes géométriques constituées de pointillés apparaissant à l’arrière-plan, la chambre de recours a considéré que ces éléments n’étaient que secondaires, voire purement décoratifs au regard des éléments verbaux. Elle a donc relevé que la stylisation et les caractéristiques graphiques du signe en cause n’étaient pas non plus suffisamment distinctives pour que la marque contestée puisse constituer une indication de l’origine en relation avec les produits couverts par celle-ci.
29 Par conséquent, la chambre de recours a conclu que, dans son ensemble, la marque contestée n’était composée que d’éléments qui, envisagés séparément, s’avéraient dépourvus de caractère distinctif pour la commercialisation des produits concernés. De plus, il n’existait pas d’interaction entre ces différents éléments susceptibles de conférer un caractère distinctif à l’ensemble, contrairement aux allégations de la requérante. Apposée sur une étiquette de vin, la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif dans son contexte, car elle fournissait uniquement des informations purement élogieuses, indiquant que les produits visés étaient des vins produits depuis des années et qu’ils bénéficiaient de l’AOC et de l’AOP « Primitivo di Manduria ». Dès lors, le public pertinent n’aurait pas tendance à percevoir dans le signe contesté une quelconque indication de l’origine commerciale et, partant, aucun caractère distinctif ne pouvait être attribué à l’un des éléments le composant et, encore moins, à l’ensemble de ces éléments.
30 Tout d’abord, par la première branche du moyen unique, la requérante soutient que la marque contestée a un caractère distinctif intrinsèque normal confirmé par « l’expérience de la vie », selon laquelle le public pertinent saurait que les marques de vins sont apposées sur l’étiquette avant de la bouteille avec une taille de police plus grande, ce qui rendrait l’élément verbal « since 1974 » reconnaissable en tant que marque, eu égard à la taille très importante de la police de caractères utilisée.
31 À cet égard, il convient de relever, d’emblée, que le constat de la chambre de recours selon lequel la requérante n’a pas invoqué l’exception prévue à l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, permettant au titulaire de la marque contestée d’établir l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage qui a été fait de cette marque, n’est pas contesté devant le Tribunal.
32 Par conséquent, comme il est précisé au point 49 de la décision attaquée, les photos des bouteilles de vin ne prouvent pas l’existence d’un caractère distinctif intrinsèque de la marque contestée. Ainsi que la chambre de recours l’a constaté à juste titre, face à une bouteille de vin PIMITIVO DI MANDOURI protégé en tant qu’AOC depuis 1974, le consommateur moyen italophone ne percevra pas cette information comme une désignation d’une origine commerciale, mais comme une information commerciale catégorique et banale vantant l’invariabilité qualitative, depuis 1974, des produits en cause.
33 Eu égard à ce qui précède, ce constat ne saurait être infirmé par la taille de l’élément « since 1974 », contrairement à ce que soutient la requérante. À l’instar de la chambre de recours, il convient de considérer que les éléments verbaux de la partie supérieure de l’étiquette de vin se renforcent mutuellement, afin de délivrer audit public un message promotionnel banal, qui ne saurait être compris comme une indication de l’origine commerciale des produits en cause.
34 Même si les consommateurs peuvent être habitués à retrouver sur l’étiquette d’une bouteille de vin la marque sous laquelle celui-ci est vendu et cette marque est, en général, écrite avec une taille de police de caractères supérieure à celle des autres éléments verbaux, la requérante n’explique pas comment l’élément verbal « since 1974 », vantant la longévité qualitative de la production du vin PRIMITIVO DI MANDURIA, peut donner une information sur l’origine commerciale dudit vin ou permettre de réitérer l’expérience d’achat si elle s’avère positive. En effet, cette formule promotionnelle d’invariabilité qualitative incitant à l’achat est utilisée de façon extrêmement répandue, dans le commerce, à l’égard de toutes sortes de produits et de services, de façon qu’elle ne présente aucune caractéristique permettant de distinguer les produits couverts par la marque contestée de ceux qui ont une autre provenance (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, point 72). Or, comme déjà mentionné au point 24 ci-dessus, les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits et des services en se fondant sur de simples formules promotionnelles, telles que celles en cause.
35 Eu égard à ce qui précède, la première branche du moyen unique doit être écartée comme étant non fondée.
36 Ensuite, il convient de rejeter comme étant inopérante la deuxième branche du moyen unique, selon laquelle le caractère distinctif de la marque contestée aurait été correctement évalué lors de son enregistrement. En effet, il convient de rappeler, à cet égard, que la procédure de nullité a pour objet, notamment, de permettre à l’EUIPO de revoir la validité de l’enregistrement d’une marque et d’adopter une position qu’il aurait dû, le cas échéant, adopter d’office au cours de la procédure d’enregistrement [voir, en ce sens, arrêt du 30 mai 2013, ultra air/OHMI – Donaldson Filtration Deutschland (ultrafilter international), T‑396/11, EU:T:2013:284, point 20]. Ainsi, l’enregistrement d’une marque ne saurait créer une confiance légitime pour le titulaire de ladite marque en ce qui concerne le résultat d’une procédure de nullité ultérieure [arrêt du 19 mai 2010, Ravensburger/OHMI – Educa Borras (Memory), T‑108/09, non publié, EU:T:2010:213, point 25].
37 Enfin, dans le cadre de la troisième branche du moyen unique, la requérante soutient que la marque contestée, appréciée dans son ensemble, possède un caractère distinctif intrinsèque normal en raison de ses éléments de conception et de son originalité, provoquant un processus de réflexion permettant au public pertinent de mémoriser et de distinguer ladite marque.
38 Premièrement, les cadres trapézoïdaux de la marque contestée seraient « très dominants, aussi dominants que les éléments verbaux pertinents » de celle-ci, car ces éléments graphiques affecteraient de manière significative la signification grammaticale et le sens desdits éléments verbaux. Deuxièmement, il serait clair pour le public pertinent que l’élément verbal « since 1974 » constitue une unité de sens qui exclut tout lien grammatical direct avec les autres éléments verbaux de la marque contestée en raison de la taille très importante des lettres utilisées et de la configuration spécifique des éléments graphiques. Dès lors, troisièmement, la configuration particulière de l’élément de création « since 1974 », d’une part, et le besoin de le combiner, après réflexion, avec les éléments verbaux « primitivo di manduria » (lesquels seraient difficilement lisibles en raison de l’utilisation d’une police de caractères blanche sur le fond noir de la barre passant entre les éléments « since » et « 1974 »), d’autre part, rendraient difficile la compréhension, par le public pertinent, de ladite marque, ce qui déclencherait un processus de réflexion créatif amenant le consommateur à s’interroger sur ce qui existe depuis 1974. Partant, en se fondant sur l’arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI (C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 57), la requérante considère que le processus cognitif visant à comprendre la marque contestée confère à l’ensemble de celle-ci une originalité qui la rend facilement reconnaissable et mémorisable.
39 À cet égard, premièrement, il y a lieu de constater que, contrairement à ce que soutient la requérante, les cadres trapézoïdaux de la marque contestée sont simplement décoratifs et ne sont pas aussi dominants que les éléments verbaux, comme l’a considéré à juste titre la chambre de recours aux points 45 et 46 de la décision attaquée. En effet, selon la jurisprudence, de façon générale, lorsque une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [arrêt du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37]. En particulier, dans le secteur des vins, le public pertinent est habitué à désigner et à reconnaître le vin en fonction de l’élément verbal qui sert à l’identifier et que cet élément désigne notamment le récoltant ou la propriété sur laquelle le vin est produit [arrêt du 13 juillet 2005, Murúa Entrena/OHMI – Bodegas Murúa (Julián Murúa Entrena), T‑40/03, EU:T:2005:285, point 56 ; voir, également, arrêt du 27 juin 2019, Sandrone/EUIPO – J. García Carrión (Luciano Sandrone), T‑268/18, EU:T:2019:452, point 99 et jurisprudence citée], ce qui rend la fonction des éléments verbaux essentielle et difficilement équivalente à celle des éléments graphiques, comme en l’espèce.
40 Dès lors, même si dans certains cas, l’élément figuratif d’une marque complexe peut, notamment en raison de sa forme, de sa taille, de sa couleur ou de sa position dans le signe, détenir une place équivalente à celle de l’élément verbal [arrêt du 23 novembre 2010, Codorniu Napa/OHMI – Bodegas Ontañon (ARTESA NAPA VALLEY), T‑35/08, EU:T:2010:476, point 37], tel n’est pas le cas en l’espèce.
41 En effet, d’une part, il convient de constater que les trois trapèzes (noir, blanc et gris), constituant les trois cadres qui rétrécissent progressivement autour des éléments verbaux « since 1974 » et « primitivo di manduria », apposés dans la partie supérieure de l’étiquette de vin, n’ont rien de particulier, pas plus que les lignes grises pointillées sur le fond noir de l’étiquette ou les différentes tailles de polices de caractères utilisées. Il s’agit de formes géométriques et d’effets de contraste de base visant à décorer l’étiquette de vin en guidant l’attention du public pertinent vers les éléments verbaux susmentionnés de la manière la plus basique possible, en les encadrant avec un effet de contraste. Ce constat est corroboré par l’allégation de la requérante selon laquelle « l’œil et l’attention du public concerné sont immédiatement attirés, par la surface trapézoïdale gris clair de la marque, qui contient les mots "since 1974" dans une grande police de caractères légèrement stylisée ».
42 De plus, il est de jurisprudence constante que les figures géométriques de base ne sont pas susceptibles, en tant que telles, de transmettre un message dont les consommateurs peuvent se souvenir, de sorte que ces derniers ne les considéreront pas comme une marque, à moins qu’elles aient acquis un caractère distinctif par l’usage [arrêts du 12 septembre 2007, Cain Cellars/OHMI (Représentation d’un pentagone), T‑304/05, EU:T:2007:271, point 22, et du 29 septembre 2009, The Smiley Company/OHMI (Représentation de la moitié d’un sourire de smiley), T‑139/08, EU:T:2009:364, point 26].
43 Or, afin de reconnaître aux éléments graphiques un caractère distinctif intrinsèque équivalent à celui des éléments verbaux, le graphisme en cause doit logiquement concentrer l’attention du public pertinent au moins autant que les éléments verbaux et non simplement mettre en relief ou encadrer cette attention en la dirigeant vers les éléments verbaux « since 1974 » et « primitivo di manduria », comme en l’espèce [voir, en ce sens, arrêt du 14 janvier 2016, International Gaming Projects/OHMI (BIG BINGO), T‑663/14, non publié, EU:T:2016:5, point 43]. Partant, les éléments graphiques en cause ne peuvent pas fournir une indication sur la provenance des produits en cause, dans la mesure où les formes géométriques, les couleurs et les tailles de polices de caractères utilisées, telles que celles de la marque contestée, ne présentent pas de particularités qui les distingueraient spécifiquement [arrêt du 15 mars 2018, Hermann Bock/EUIPO (Push and Ready), T‑279/17, non publié, EU:T:2018:149, point 30]. Ces constats s’appliquent également, comme cela a été relevé à juste titre par la chambre de recours au point 46 de la décision attaquée, à la conception de ladite marque sous la forme d’une étiquette de vin constituée, de façon banale, de deux parties.
44 D’autre part, il convient de relever que la requérante se limite à affirmer que les cadres trapézoïdaux, constituant l’étiquette de vin, sont aussi distinctifs que les éléments verbaux de la marque contestée. La requérante soutient que ces cadres affectent la signification grammaticale et le sens des éléments verbaux de ladite marque. Pour autant, elle n’étaye pas la question de savoir quel est l’impact grammatical ou comment le sens des termes basiques utilisés peut varier de sorte à conférer aux éléments graphiques un caractère distinctif. En outre, s’agissant de la conception desdits éléments, la requérante n’a pas précisé en quoi la superposition des trois trapèzes cadrant l’étiquette de vin crée une combinaison conceptuelle pourvue d’un caractère distinctif équivalent à celui des éléments verbaux. La requérante n’a également pas présenté d’argument s’agissant de la forme, de la taille, de la couleur ou de la position spécifiques des éléments graphiques au sein de la marque contestée, spécificités au regard desquelles ces derniers pourraient avoir un caractère distinctif quelconque.
45 Or, il appartient au titulaire d’une marque, qui se prévaut du caractère distinctif de celle-ci, de fournir des indications concrètes et étayées établissant que ladite marque est dotée d’un caractère distinctif intrinsèque [voir, en ce sens, arrêt du 5 mars 2003, Unilever/OHMI (Tablette ovoïde), T‑194/01, EU:T:2003:53, point 48 et jurisprudence citée ; arrêt du 17 novembre 2021, Think Schuhwerk/EUIPO (Représentation d'extrémités rouges de lacets de chaussures), T-298/19, non publié, EU:T:2021:792, point 74].
46 Il s’ensuit que les éléments graphiques de la marque contestée n’ont qu’une fonction décorative, visant à embellir l’étiquette de vin en guidant l’attention du public pertinent vers les éléments verbaux « since 1974 » et « primitivo di manduria ».
47 Deuxièmement, il convient de rappeler que, conformément aux conclusions tirées au point 33 ci-dessus, les éléments verbaux « since 1974 » et « primitivo di manduria » se renforcent mutuellement de manière à produire une déclaration catégorique, mais banale vantant l’invariabilité qualitative, depuis 1974, du vin PRIMITIVO DI MANDURIA. Le fait que ces derniers éléments sont disposés entre l’élément « since » et l’élément « 1974 » et qu’ils sont tous dans la partie supérieure de l’étiquette suggère inévitablement un lien direct à opérer entre eux. La taille des caractères ne saurait empêcher cette tendance naturelle de tout consommateur à essayer d’identifier l’origine du produit proposé. En effet, les variations de tailles et de couleurs des polices de caractères ainsi que du fond n’empêchent pas la combinaison logique et spontanée entre les éléments verbaux représentés dans la partie supérieure de l’étiquette de vin, constituant la marque contestée. Bien au contraire, les effets recherchés de contraste entre les couleurs, telles que le noir et le blanc ou le noir et le gris, facilitent la distinction des éléments verbaux et, par conséquent, leur combinaison logique et spontanée. Dès lors, il n’y a pas lieu de considérer que l’élément verbal « since 1974 » puisse constituer une unité grammaticale distincte sans lien direct avec les éléments « primitivo di manduria ».
48 Troisièmement, contrairement à ce que soutient la requérante, force est de constater que la compréhension, par le public pertinent, de la marque contestée ne nécessite pas une interprétation et ne déclenche pas un processus de réflexion créative conférant à l’ensemble de cette marque une originalité qui la rendrait facilement reconnaissable et mémorisable.
49 La marque contestée est tout à fait compréhensible et claire pour les consommateurs pertinents des produits en cause et ne présente aucune caractéristique qui la rendrait aisément mémorisable par ces consommateurs. Le fait que les éléments « since » et « 1974 » sont écrits dans une taille de police de caractères plus grande que celle des autres éléments verbaux, de façon à inciter le consommateur à commencer la lecture de l’étiquette du vin par l’indication de longévité qualitative avant même de désigner le type de produit (le cépage de vin ou le récoltant), ne saurait conférer un caractère distinctif intrinsèque à ladite marque.
50 Même si le public pertinent peut être tenté de commencer la lecture du signe contesté par l’élément « since », son attention est nécessairement guidée par l’effet, à la fois, de contraste des couleurs (noir, gris et blanc) et du jeu de tailles des caractères des éléments verbaux vers l’élément « primitivo di manduria », inséré entre les éléments « since » et « 1974 ». De plus, même si, du point de vue grammatical, la marque contestée peut être lue de façons différentes, voire de manière incorrecte, eu égard à la nature basique et banale de l’expression promotionnelle en cause, seul l’aspect promotionnel sera spontanément et immédiatement perçu par le public pertinent. La taille des caractères de l’élément « since 1974 », en elle-même, ne saurait communiquer audit public un autre message, notamment quant à l’origine des produits.
51 Or, dans la mesure où le public pertinent est peu attentif à l’égard d’un signe qui ne lui donne pas d’emblée une indication sur la provenance ou la destination de ce qu’il souhaite acheter, mais plutôt une information exclusivement promotionnelle et abstraite, il ne s’attardera ni à rechercher les différentes fonctions éventuelles de l’expression promotionnelle, ni à la mémoriser en tant que marque [voir arrêt du 24 septembre 2019, Daimler/EUIPO (ROAD EFFICIENCY), T‑749/18, non publié, EU:T:2019:688, point 39 et jurisprudence citée].
52 Dès lors, il y a lieu de conclure que l’expression en cause sera perçue par le public pertinent exclusivement comme une formule laudative, en raison de son sens direct et intrinsèquement promotionnel de l’invariabilité qualitative, depuis 1974, du vin PRIMITIVO DI MANDURIA, plutôt que comme une indication d’une origine commerciale [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 5 décembre 2002, Sykes Enterprises/OHMI (REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS), T‑130/01, EU:T:2002:301, points 29 et 30].
53 Appliqué à la marque dans son ensemble, ce constat est renforcé par les conclusions de la chambre de recours rappelées au point 27 ci-dessus, au demeurant non contestées par la requérante, s’agissant des autres éléments verbaux de ladite marque, apposés sur la partie inférieure de l’étiquette la constituant, lesquels amplifient l’indication promotionnelle véhiculée par les éléments verbaux de la partie supérieure de la même étiquette, à savoir qu’il s’agit d’un vin reconnu pour ses qualités, en raison d’un savoir-faire de tradition familiale transmis de génération en génération. Ces éléments verbaux, qu’ils soient pris séparément ou ensemble, sont simplement promotionnels et sans aucune caractéristique permettant à la marque contestée d’exercer sa fonction essentielle d’indication de l’origine commerciale.
54 La référence faite à l’arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI (C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 57), ne saurait étayer davantage l’argument de la requérante. Contrairement à ce qu’elle soutient, la perception, par le public pertinent, de la marque contestée dans son ensemble se distingue de celle analysée par la Cour à l’égard de la marque verbale Vorsprung durch Technik, en cause dans l’affaire susmentionnée.
55 En effet, dans l’arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI (C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 57), la Cour avait relevé que la marque en cause témoignait d’une certaine originalité et prégnance et qu’un effort d’interprétation était nécessaire pour percevoir un éventuel message promotionnel. En l’espèce, en revanche, les éléments verbaux « since 1974 » et « primitivo di manduria » constituent une expression promotionnelle banale qui fait partie du fond commun des mots et communique aux consommateurs le message simple, direct et élogieux que les produits possèdent une qualité souhaitable et préservée depuis longtemps. Partant, le public pertinent n’aura tendance à percevoir dans la marque contestée aucune indication particulière d’origine commerciale au-delà des informations relatives à l’espèce, à la qualité préservée et à la date de début de production des produits couverts par celle-ci.
56 Par conséquent, la troisième branche du moyen unique doit être écartée comme étant non fondée.
57 Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.
Sur les dépens
58 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
59 En revanche, l’EUIPO ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens uniquement dans l’hypothèse où une audience serait tenue, il convient, en l’absence d’organisation d’une audience, de décider que l’EUIPO supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Chaque partie supportera ses propres dépens.
Costeira | Kancheva | Öberg |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 novembre 2024.
Le greffier | Le président |
V. Di Bucci | S. Papasavvas |
* Langue de procédure : le français.
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