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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> WT v Commission (Civil service - Members of the temporary staff - Retirement pension - Judgment) French Text [2024] EUECJ T-282/23 (09 October 2024) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2024/T28223.html Cite as: [2024] EUECJ T-282/23, EU:T:2024:685, ECLI:EU:T:2024:685 |
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WORKING PAPER
JUDGMENT OF THE GENERAL COURT (Tenth Chamber)
9 October 2024 (*)
(Civil service - Members of the temporary staff - Retirement pension - Pension rights acquired before entering the service of the European Union - Transfer to the EU scheme - Rejection of the request for transfer - Application submitted out of time - Exceptional circumstances - Article 77 of the Staff Regulations - Article 11(2) of Annex VIII to the Staff Regulations - Sixth subparagraph of Article 5(1) of the General Provisions for the Implementation of Articles 11 and 12 of Annex VIII to the Staff Regulations)
In Case T-282/23,
WT, representedby M. Velardo, lawyer,
Applicant
against
European Commission, representedby M. Brauhoff, G. Niddam and L. Hohenecker, acting as Agents,
Defendant
THE GENERAL COURT (Tenth Chamber),
composedof O. Porchia, President, M. Jaeger (Rapporteur) and S. Verschuur, Judges,
Registrar: P. Nuñez Ruiz, Administrator,
having regard to the written part of the procedure,
further to the hearing on 5 March 2024,
makes the present
Stop
1 By its action under Article 270 TFEU, the applicant, WT, seeks annulment, first, of the European Commission's decision of 4 August 2022 rejecting its request for the transfer of her pension rights acquired before entering the service of the European Union ('the contested decision') under Article 11(2) and (3), Annex VIII to the Staff Regulations of Officials of the European Union ('the Staff Regulations') and, secondly, the decision of 13 February 2023 rejecting his complaint against the contested decision ('the decision rejecting the complaint').
Facts giving rise to the dispute
2 Since1 October 2011, the applicant has been employed as a member of the temporary staff by the European Food Safety Authority (EFSA).
3 Before entering the service of the European Union, the applicant worked in the private sector in Italy.
4 On 14 July 2022, the applicant submitted an application for the transfer of her contributions accumulated in the Italian pension system to the pension scheme of the EU institutions ('the EUIP'), pursuant to Article 11(2) of Annex VIII to the Staff Regulations.
5 On 4 August 2022, the Commission's Office for the Administration and Payment of Individual Entitlements (PMO) adopted the contested decision. In that decision, first of all, in accordance with Article 5(1) of the General Implementing Rules for Articles 11 and 12 of Annex VIII to the Staff Regulations ('the GIP'), relating to the transfer of pension rights, the PMO stated that the member of staff had to submit his application no later than six months from the expiry of the period necessary for the entitlement referred to in Article 77 of the Staff Regulations. Next, the PMO stated that, once that time limit had expired, a transfer request could no longer be granted, unless the delay in submitting it was due to exceptional circumstances not attributable to the staff member. Lastly, the PMO considered that the delay in submitting the applicant's application was not justified by such exceptional circumstances and therefore rejected that application.
6 Le 25 octobre 2022, la requérante a introduit, auprès de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC »), une réclamation à l’encontre de la décision attaquée, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut.
7 Le 13 février 2023, l’AHCC a adopté la décision de rejet de la réclamation.
Forms of order sought by the parties
8 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– annul the decision rejecting the complaint;
– order the Commission to pay the costs.
9 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– dismiss the action;
– condamner la requérante aux dépens.
Law
The subject-matter of the dispute
10 La requérante dirige son recours tant contre la décision attaquée que contre la décision de rejet de la réclamation.
11 À cet égard, il convient de rappeler que la réclamation administrative, telle que visée à l’article 90, paragraphe 2, du statut, et son rejet, explicite ou implicite, font partie intégrante d’une procédure complexe et ne constituent qu’une condition préalable à la saisine du juge. Dans ces conditions, un recours, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation a une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (voir arrêt du 8 juillet 2020, WH/EUIPO, T‑138/19, non publié, EU:T:2020:316, point 33 et jurisprudence citée).
12 En effet, toute décision de rejet d’une réclamation, qu’elle soit implicite ou explicite, ne fait, si elle est pure et simple, que confirmer l’acte ou l’abstention dont le réclamant se plaint et ne constitue pas, prise isolément, un acte attaquable, de sorte que les conclusions dirigées contre cette décision sans contenu autonome par rapport à la décision initiale doivent être regardées comme dirigées contre l’acte initial (voir arrêts du 12 septembre 2019, XI/Commission, T‑528/18, non publié, EU:T:2019:594, point 20 et jurisprudence citée, et du 8 juillet 2020, WH/EUIPO, T‑138/19, non publié, EU:T:2020:316, point 34 et jurisprudence citée). Toutefois, une décision explicite de rejet d’une réclamation peut, eu égard à son contenu, ne pas avoir un caractère confirmatif de l’acte contesté par la partie requérante. Tel est le cas lorsque la décision de rejet de la réclamation contient un réexamen de la situation de la partie requérante, en fonction d’éléments de droit et de fait nouveaux, ou lorsqu’elle modifie ou complète la décision initiale. Dans ces hypothèses, le rejet de la réclamation constitue un acte soumis au contrôle du juge, qui le prend en considération dans l’appréciation de la légalité de l’acte contesté, voire le considère comme un acte faisant grief se substituant à ce dernier (voir arrêts du 10 octobre 2019, Colombani/SEAE, T‑372/18, non publié, EU:T:2019:734, point 19 et jurisprudence citée, et du 8 juillet 2020, WH/EUIPO, T‑138/19, non publié, EU:T:2020:316, point 35 et jurisprudence citée).
13 En l’espèce, il y a lieu de constater que, dans la décision de rejet de la réclamation, en répondant aux arguments avancés par la requérante dans sa réclamation, l’AHCC a confirmé les constatations contenues dans la décision attaquée selon lesquelles, d’une part, la demande de transfert des droits à pension acquis dans le système italien avant l’entrée au service de l’Union avait été introduite hors délai par la requérante et, d’autre part, il n’existait pas de circonstances exceptionnelles justifiant le retard du dépôt de cette demande.
14 Ainsi, il convient de considérer que l’acte faisant grief à la requérante est la décision attaquée, dont la légalité doit être examinée en prenant également en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation.
Sur le fond
15 À l’appui de son recours, la requérante soulève deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut et, le second, d’une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de « force majeure » et des dispositions de nature financière.
16 Le premier moyen comporte, en substance, trois branches. Par la première branche, la requérante excipe de l’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE. Par la deuxième branche, la requérante reproche à la Commission d’avoir commis une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de « force majeure ». Par la troisième branche, la requérante reproche à la Commission d’avoir commis une erreur de droit dans l’interprétation des dispositions de nature financière.
17 Le second moyen se divise en deux branches. Par la première branche, la requérante reproche à la Commission d’avoir commis une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de « force majeure ». Par la seconde branche, en substance, la requérante reproche à la Commission d’avoir violé le devoir de sollicitude et le principe de proportionnalité.
18 Compte tenu du fait que les deux moyens se chevauchent partiellement, il convient d’examiner, tout d’abord, la première branche du premier moyen, puis, ensemble, la deuxième branche du premier moyen et la première branche du second moyen, ensuite, la troisième branche du premier moyen et, enfin, la seconde branche du second moyen.
Sur la première branche du premier moyen, tirée de l’illégalité de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE
19 À titre liminaire, la requérante fait valoir que l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut se limite à prévoir la faculté de demander le transfert des droits à pension sans introduire aucun délai pour son exercice.
20 En outre, la requérante soulève une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE.
21 En premier lieu, la requérante fait valoir que le délai de six mois, qui n’est pas prévu par l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, mais uniquement par les DGE, est un délai de forclusion excessivement court, d’autant plus qu’il concerne l’exercice d’un droit subjectif.
22 À cet égard, la requérante observe que, dans le système informatique de gestion du personnel Sysper, au sein de la section intitulée « Transferts de droits à pension – Transfert IN », il est indiqué que la demande de transfert de droits à pension doit être soumise avant d’avoir cotisé pendant dix ans et six mois au RPIUE. Selon la requérante, on ne peut pas additionner les dix ans de cotisation nécessaires à l’acquisition du droit à une pension d’ancienneté et les six mois du délai de forclusion pour l’introduction de la demande de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union. La requérante affirme qu’il n’est pas correct de présenter, comme le font les DGE, le délai de dépôt de la demande comme étant de dix ans et six mois, des situations de natures juridiques profondément différentes étant alors mises sur le même plan.
23 En deuxième lieu, la requérante soutient qu’aucune disposition spécifique du statut ne délègue à une institution le pouvoir de définir par des dispositions générales d’exécution le délai dans lequel le droit subjectif de transfert de droits à pension doit être exercé sous peine de forclusion. Ainsi, le délai de six mois serait arbitraire et contraire aux dispositions de rang supérieur.
24 Dans ce contexte, la requérante observe que l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut ne confère aux DGE que le soin de déterminer, « compte tenu du traitement de base, de l’âge et du taux de change à la date de la demande de transfert, le nombre d’annuités [prises] en compte, d’après le régime de pension de l’Union au titre de la période de service antérieur, sur la base du capital transféré, déduction faite du montant qui représente la revalorisation du capital entre la date de la demande de transfert et celle du transfert effectif ». Partant, la requérante considère que, en prévoyant un délai de forclusion pour l’exercice du droit au transfert de droits à pension, les DGE vont au-delà de la délégation prévue à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, puisqu’elles déterminent non seulement le nombre d’annuités prises en compte, mais aussi le moment d’acquisition du droit au transfert lui-même.
25 En troisième lieu, d’une part, la requérante observe que le fait qu’il est erroné de considérer le délai de dix ans et le délai de six mois comme un seul délai est confirmé par l’information figurant sur l’application Intracomm de la Commission, selon laquelle les droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union transférés vers le RPIUE ne sont pas pris en considération pour calculer les dix ans de service au sens de l’article 77 du statut. D’autre part, la requérante affirme que l’introduction d’une demande de transfert de droits à pension avant l’expiration du délai de dix ans, c’est-à-dire avant l’acquisition du droit à une pension d’ancienneté, ne produirait aucun effet utile et pourrait même être préjudiciable, dans l’hypothèse où un fonctionnaire n’atteindrait pas les dix ans de service, puisqu’il perdrait alors définitivement les cotisations nationales transférées. Cette considération serait d’autant plus importante et centrale pour les agents temporaires, dans la mesure où la situation de ces derniers se caractériserait par une incertitude absolue quant à la durée de leur relation de travail avec l’Union.
26 En outre, la requérante fait valoir que, même en admettant que l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE ne soit pas entaché d’illégalité, l’intérêt au transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union devient effectif lorsque le droit à une pension d’ancienneté est acquis, à savoir après dix ans de service. La requérante observe que l’AHCC l’a d’ailleurs implicitement reconnu dans la décision de rejet de la réclamation.
27 En quatrième lieu, la requérante conteste l’affirmation de l’AHCC selon laquelle les DGE contiennent un assouplissement et non une restriction des dispositions statutaires. À cet égard, la requérante considère que soit les dispositions du statut, selon l’interprétation de l’AHCC, imposent au fonctionnaire de présenter sa demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union alors que son droit à une pension d’ancienneté n’est pas encore certain, soit, comme elle-même le soutient, le seul délai de forclusion est le délai de six mois introduit illégalement par les DGE.
28 La Commission conteste les arguments de la requérante.
– Observations liminaires
29 Il convient de rappeler que l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE prévoit que, « indépendamment de son statut, l’agent doit introduire sa demande au plus tard dans un délai de six mois à compter de l’expiration de la période nécessaire à l’ouverture du droit visé à l’article 77 du statut ».
30 En outre, en premier lieu, selon la jurisprudence et comme l’affirme à juste titre la requérante, la faculté de transférer les droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union, reconnue à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, revêt le caractère d’un droit subjectif, conféré par le statut et susceptible d’être invoqué tant à l’égard des États membres qu’à l’égard des institutions de l’Union (arrêt du 22 décembre 2022, INPS et Repubblica italiana, C‑404/21, EU:C:2022:1023, point 55).
31 En second lieu, selon une jurisprudence constante, le délai de six mois prévu par les DGE est un délai simple et non un délai de forclusion (voir arrêts du 24 septembre 1996, Sergio/Commission, T‑185/95, EU:T:1996:131, point 43 et jurisprudence citée, et du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, point 28 et jurisprudence citée).
32 À cet égard, il y a lieu de relever que cette appréciation du juge de l’Union a été effectuée sous l’empire d’un ancien cadre réglementaire. L’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut alors applicable prévoyait que la faculté de demander le transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union devait être exercée par l’intéressé « au moment de sa titularisation ».
33 Dans ce contexte, d’une part, le délai de six mois figurant dans les DGE a été considéré comme étant un délai « de complaisance », introduit par l’administration au bénéficie des fonctionnaires et agents temporaires afin de faciliter le transfert de leurs droits à pension vers le régime de l’Union. D’autre part, ce délai a été jugé comme étant raisonnable, du point de vue de l’application du principe de proportionnalité, dans la mesure où la présentation d’une demande de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union n’implique pas un choix définitif de la part du fonctionnaire ou de l’agent temporaire. En effet, lorsqu’une demande de transfert est présentée, le service compétent adresse une proposition de transfert au fonctionnaire ou à l’agent temporaire concerné et ce n’est qu’à ce moment que celui-ci peut déterminer si le transfert présente un intérêt pour lui (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, points 75, 84 et 85).
34 Or, l’actuel article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, applicable en l’espèce, prévoit qu’un fonctionnaire peut introduire une demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union entre le moment de sa titularisation et le moment où il obtient le droit à une pension d’ancienneté, après avoir accompli au moins dix ans de service au sens de l’article 77 du statut.
35 Cela implique que le fonctionnaire intéressé peut demander le transfert de ses droits à pension, conformément à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, sans avoir la certitude qu’il aura droit à une pension d’ancienneté, cette certitude ne pouvant être acquise qu’au moment où il aura accompli dix ans de service.
36 Il découle de la nature particulière de ces dispositions, lues ensemble, qu’il y a lieu de considérer que le délai de six mois prévu à l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE est un délai simple, au sens de la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus, qui permet aux fonctionnaires et aux agents de disposer d’un délai approprié, pour les raisons expliquées au point 32 ci-dessus, pour introduire leur demande de transfert de droits à pension une fois qu’ils ont définitivement obtenu le droit à une pension d’ancienneté, après avoir accompli au moins dix ans de service au sens de l’article 77 du statut.
– Sur le bien-fondé de la première branche du premier moyen
37 Premièrement, contrairement à ce que la requérante fait valoir, l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE n’introduit pas un délai « excessivement court ».
38 En effet, s’il est vrai qu’il ressort du point 35 ci‑dessus que le fonctionnaire ou l’agent n’a la certitude d’acquérir une pension d’ancienneté qu’au moment où il a accompli dix ans de service au sens de l’article 77 du statut, il n’en reste pas moins que la demande de transfert des droits à pension acquis dans le régime national d’un État membre avant l’entrée de l’intéressé au service de l’Union peut être introduite, conformément à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, à partir de la titularisation ou de la fin de la période de stage de l’intéressé. Ainsi, tout fonctionnaire ou tout agent dispose d’une longue période pour réfléchir à la possibilité de déclencher la procédure de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union. Partant, comme cela est indiqué au point 33 ci-dessus, le délai de six mois figurant dans les DGE est un délai « de complaisance » et raisonnable, introduit par l’administration au bénéfice des fonctionnaires et des agents temporaires afin de faciliter le transfert de leurs droits à pension vers le régime de l’Union.
39 Deuxièmement, il convient de relever que la procédure administrative de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union peut s’étendre sur plusieurs années, de sorte que l’existence d’un délai pour qu’un fonctionnaire ou un agent puisse introduire une demande de transfert est, selon la jurisprudence, nécessaire en vue d’une organisation efficace de l’activité de transfert de droits à pension (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, point 84).
40 Troisièmement, compte tenu des observations exposées aux points 29 à 36 ci-dessus, la requérante ne peut pas soutenir que, par le biais de l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE, la Commission a introduit un délai de forclusion non prévu par le statut, cet article fixant un délai simple octroyé dans l’intérêt de tout fonctionnaire ou de tout agent pour lui permettre de prendre sa décision de demander ou non le transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union. Il s’ensuit que les arguments de la requérante fondés sur la prémisse selon laquelle le délai prévu par l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE est un délai de forclusion doivent être rejetés.
41 Cette conclusion ne peut pas être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel l’introduction d’une demande de transfert avant l’acquisition du droit à une pension d’ancienneté, au sens de l’article 77 du statut, ne produirait aucun effet utile et pourrait même être préjudiciable dans l’hypothèse où le fonctionnaire n’atteindrait pas les dix ans de service.
42 En effet, en premier lieu, contrairement à ce que la requérante fait valoir, la demande de transfert des droits à pensions acquis avant l’entrée au service de l’Union, même si elle est effectuée avant l’acquisition du droit à une pension d’ancienneté, ouvre une procédure qui peut se clore par l’acceptation, par le fonctionnaire ou l’agent, de la proposition de bonification d’annuités effectuée par l’administration. Cette acceptation ayant pour effet de transférer les droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union vers le RPIUE, l’introduction d’une telle demande ne peut donc pas être considérée comme n’ayant aucun effet utile.
43 En second lieu, l’affirmation de la requérante selon laquelle l’introduction d’une demande de transfert des droits à pension serait préjudiciable dans l’hypothèse où le fonctionnaire n’atteindrait pas les dix ans de service, puisqu’il perdrait définitivement les droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union, se fonde sur une interprétation erronée de l’article 11, paragraphe 1, de l’annexe VIII du statut. En effet, il convient de constater que, si un fonctionnaire ou un agent quitte ses fonctions avant d’avoir acquis le droit à une pension d’ancienneté au sens de l’article 77 du statut, il peut transférer l’équivalent actuariel de ses droits à pension acquis au sein du RPIUE vers son nouveau régime, y compris ceux déjà transférés vers le RPIUE conformément à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2023, OR et OS/Commission, T‑171/22, EU:T:2023:520, point 50).
44 Partant, la première branche du premier moyen doit être rejetée.
Sur la deuxième branche du premier moyen et sur la première branche du second moyen, tirées d’une erreur de droit dans l’interprétation de la notion de « force majeure »
45 À titre liminaire, la requérante conteste les affirmations, contenues dans la décision de rejet de la réclamation, selon lesquelles, d’une part, l’administration est liée par ses propres règles et n’a pas compétence pour y déroger, sauf si une dérogation est expressément prévue, et, d’autre part, les règles applicables en matière de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union ne prévoient pas d’exception ou de dérogation possible. Selon la requérante, la force majeure est au contraire une circonstance ayant une force dérogatoire générale et elle ne doit pas être expressément prévue pour être invoquée.
46 En outre, en premier lieu, la requérante soutient que le dépassement du délai de forclusion pour l’introduction de sa demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union est dû à la situation de force majeure provoquée par l’impact de la pandémie de COVID‑19. Ainsi, en substance, la requérante considère que le retard dans le dépôt de ladite demande ne lui est pas imputable.
47 À cet égard, la requérante affirme que tant l’élément objectif que l’élément subjectif constitutifs d’une situation de force majeure sont réunis en l’espèce.
48 S’agissant de l’élément objectif, la requérante fait valoir que le caractère extraordinaire de la pandémie de COVID‑19 a été reconnu par de nombreuses dispositions tant au niveau des États membres qu’au niveau de l’Union.
49 Dans ce contexte, la requérante soutient que la pandémie de COVID‑19 a eu un impact sur l’activité des institutions de l’Union. Elle observe que la Cour de justice de l’Union européenne a prorogé ou a suspendu les délais de procédure, alors même que les pièces des dossiers pouvaient être transmises électroniquement par le biais de la plateforme e-Curia. En outre, la requérante affirme que l’AHCC elle-même a invoqué la force majeure liée à la pandémie de COVID‑19 pour justifier certains défauts dans l’organisation de concours.
50 S’agissant de l’élément subjectif, la requérante fait valoir que, dans son cas, la pandémie de COVID‑19 a entraîné des restrictions à la liberté de circulation, surtout dans sa phase initiale, ce qui a significativement compliqué la recherche d’aides à domicile qui auraient pu lui permettre de faire face à des problèmes familiaux graves et complexes liés à l’état de santé de ses parents, de réduire sa charge de travail personnelle et de mieux organiser ses activités, parmi lesquelles figurait sa demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union.
51 En second lieu, la requérante invoque, en substance, une violation du devoir de sollicitude. À cet égard, elle considère que le respect de ce devoir aurait exigé que, dans le contexte dramatique provoqué par la pandémie de COVID‑19, la Commission organise des campagnes de formation ou d’information pour attirer l’attention du personnel sur les droits qu’il pouvait faire valoir en matière de pension. La requérante soutient donc que l’AHCC a été superficielle en concluant qu’elle n’avait pas fait preuve de diligence pour respecter les délais prévus, dans la mesure où, pour elle, les difficultés liées à la pandémie étaient plus fortes en raison de son obligation d’assistance envers ses deux parents âgés et malades demeurant loin de chez elle ainsi que du stress important dont elle a souffert à cause de sérieux problèmes dans l’organisation de ses activités quotidiennes. Dans ce contexte, la requérante fait valoir qu’un psychologue a certifié qu’elle avait perdu, pendant une courte période, la capacité d’organiser correctement ses activités.
52 La Commission conteste les arguments de la requérante.
– Observations liminaires
53 Premièrement, il convient de relever qu’il est constant entre les parties qu’une demande de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union peut être introduite par le biais de Sysper et à distance, sans exiger la présence physique du demandeur dans son bureau. Cela implique qu’un fonctionnaire ou un agent n’est pas censé être présent dans les locaux d’une institution ou d’une agence de l’Union au moment de l’introduction d’une telle demande, celle-ci pouvant être introduite depuis son domicile.
54 Deuxièmement, il convient de relever que, selon la jurisprudence, dans l’hypothèse où une disposition prévoit un délai simple, le fonctionnaire ou l’agent qui invoque une justification pour ne pas avoir respecté ce délai doit démontrer avoir été confronté à une situation exceptionnelle résultant de causes qui ne lui sont pas imputables, alors que, en présence d’un délai de forclusion, le fonctionnaire ou l’agent ne peut être relevé de ce délai qu’en cas de force majeure (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, points 28 à 33).
55 À cet égard, en premier lieu, s’agissant de la phase précontentieuse, il convient de relever que la décision attaquée indique que, si le délai prévu à l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE est expiré, une demande de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union ne peut pas être prise en considération, sauf si le retard dans son dépôt est dû à une situation exceptionnelle résultant de causes qui ne sont pas imputables à l’intéressé. En outre, la décision attaquée précise que, en l’espèce, la requérante n’a apporté aucune preuve démontrant que le retard dans le dépôt de sa demande de transfert ne lui était pas imputable.
56 Dans sa réclamation, même si, dans la partie consacrée aux faits, la requérante a évoqué, de manière générique, la notion de circonstances exceptionnelles, dans la partie contenant ses arguments, elle a soutenu, en substance, que la pandémie de COVID‑19 et son obligation d’assistance envers ses deux parents âgés et malades constituaient une situation de force majeure.
57 Dans la décision de rejet de la réclamation, l’AHCC a considéré, en substance, que le retard était imputable à la requérante.
58 En second lieu, s’agissant de la procédure devant le Tribunal, la requérante se limite, dans la requête, à reprocher à la Commission une erreur dans l’interprétation de la notion de « force majeure ».
59 Si, lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, la Commission a soutenu que les notions de « force majeure » et de « circonstances exceptionnelles » étaient, en l’espèce, interchangeables, la requérante, quant à elle, a fait référence aux conclusions de l’avocat général Emiliou dans l’affaire Austrian Airlines (Vol de rapatriement) (C‑49/22, EU:C:2023:154) évoquant la notion de « circonstances exceptionnelles » et affirmé avoir utilisé de manière distincte les notions de « force majeure » et de « circonstances exceptionnelles ».
60 Or, malgré cette absence de clarté quant à la justification du non-respect du délai par la requérante, il y a lieu de rappeler que la jurisprudence citée au point 54 ci-dessus établit que, en présence d’un délai simple, afin de justifier le non-respect de ce délai, un fonctionnaire ou un agent doit démontrer avoir été confronté à une situation exceptionnelle résultant de causes qui ne lui sont pas imputables et pas à un cas de force majeure. En outre et en tout état de cause, les conditions requises pour justifier de l’existence de circonstances exceptionnelles sont moins exigeantes que celles requises pour justifier d’un cas de force majeure. En effet, pour justifier de l’existence de circonstances exceptionnelles, une personne doit uniquement prouver l’existence ou la survenance d’évènements externes l’empêchant de respecter une obligation, tandis que, pour justifier de l’existence d’un cas de force majeure, celle-ci doit démontrer non seulement la survenance d’évènements anormaux et étrangers à sa volonté, mais aussi qu’elle a adopté un comportement diligent pour se prémunir contre les conséquences de ces évènements. Ainsi, il est constant que le fait de ne pas pouvoir démontrer l’existence de circonstances exceptionnelles tenant aux faits concrets de l’espèce entraîne, a fortiori, l’inexistence d’un cas de force majeure fondé sur les mêmes faits.
61 Dès lors, à la lumière des circonstances de l’espèce, il convient d’interpréter les arguments de la requérante comme visant à démontrer, en substance, que la Commission a commis une erreur de droit en considérant que le dépôt tardif de sa demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union lui était imputable et ne pouvait pas être justifié par des circonstances exceptionnelles.
62 Troisièmement, selon la jurisprudence, d’une part, il ressort clairement de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut que c’est au fonctionnaire titularisé qu’appartient l’initiative de l’introduction d’une demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union, de sorte qu’il ne peut pas être soutenu qu’une institution a manqué à son devoir de sollicitude en n’informant pas ledit fonctionnaire, de sa propre initiative, de la procédure à suivre en ce qui concerne ce transfert (arrêt du 17 octobre 2000, Drabbe/Commission, T‑27/99, EU:T:2000:236, point 66) et, d’autre part, tout fonctionnaire est censé connaître le statut et, plus particulièrement, les règles régissant sa rémunération ou sa pension d’ancienneté (arrêt du 18 septembre 2018, Barroso Truta e.a./Cour de justice de l’Union européenne, T‑702/16 P, EU:T:2018:557, point 40).
– Sur le bien-fondé de la deuxième branche du premier moyen et de la première branche du second moyen
63 En premier lieu, s’agissant de l’argument de la requérante tiré d’une violation du devoir de sollicitude dans le contexte de la pandémie de COVID‑19 et compte tenu de la situation de ses parents, il convient de constater, d’une part, que, selon la jurisprudence citée au point 62 ci-dessus, une institution ne doit pas informer de sa propre initiative un fonctionnaire ou un agent de l’existence des droits liés à sa pension d’ancienneté et, d’autre part, qu’il est constant qu’une demande de transfert de droits à pension peut être introduite par un fonctionnaire ou un agent par la voie électronique, par le biais de Sysper, sans que celui-ci ait à quitter son domicile.
64 Ces conclusions ne peuvent pas être remises en cause par les circonstances de l’espèce. En effet, d’une part, même en admettant que l’explosion de la pandémie de COVID‑19, qui a eu lieu au mois de février 2020, puisse être considérée comme étant une circonstance exceptionnelle au sens de la jurisprudence citée au point 54 ci-dessus, en l’espèce, dans la période comprise entre le 1er octobre 2021 et le 30 mars 2022 pendant laquelle courait le délai de six mois pour le dépôt de la demande de la requérante, conformément à l’article 5, paragraphe 1, sixième alinéa, des DGE, ladite pandémie sévissait depuis environ deux ans et ses effets avaient déjà commencé à s’estomper. La requérante ne peut donc pas valablement soutenir que la pandémie de COVID‑19 a affecté, entre octobre 2021 et mars 2022, son droit de déposer, en temps utile, une demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union, d’autant plus que cette demande pouvait être introduite par voie électronique, par le biais de Sysper, sans qu’elle ait à quitter son domicile.
65 D’autre part, s’il est avéré que la requérante a eu des difficultés dans l’organisation de ses activités quotidiennes en raison des problèmes liés à l’état de santé de ses parents âgés et malades, circonstance que la Commission déplore par ailleurs, il n’en reste pas moins que la requérante n’a pas démontré que ces difficultés avérées ont rendu impossible ou excessivement compliquée l’introduction de sa demande de transfert de droits à pension, qui pouvait être effectuée par voie électronique, par le biais de Sysper.
66 En deuxième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel, en l’espèce, il convient d’appliquer la théorie des circonstances exceptionnelles élaborée par le Conseil d’État français et reprise, selon elle, dans les conclusions de l’avocat général Emiliou dans l’affaire Austrian Airlines (Vol de rapatriement) (C‑49/22, EU:C:2023:154), il suffit de constater que la requérante elle-même fait valoir que la prémisse de l’application de cette théorie est l’existence de circonstances exceptionnelles, qui rendent la réalisation d’une activité particulièrement compliquée.
67 À cet égard, compte tenu des éléments relevés au point 64 ci-dessus, la requérante ne peut pas valablement soutenir que la pandémie de COVID‑19, au cours de la période comprise entre le 1er octobre 2021 et le 30 mars 2022, a constitué une situation exceptionnelle au sens de ladite théorie, susceptible de rendre particulièrement compliquée et difficile l’introduction de sa demande de transfert de ses droits à pension électroniquement, par le biais de Sysper.
68 En troisième lieu, s’agissant des arguments de la requérante relatifs au fait que les institutions européennes ont adapté certains délais à cause de la pandémie de COVID‑19 et tenu compte de cette pandémie dans l’organisation de leur activité, il convient de constater ce qui suit.
69 Premièrement, s’agissant de l’argument relatif à la prorogation et à la suspension des délais devant la Cour de justice de l’Union européenne, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la pertinence de la comparaison faite par la requérante avec sa propre situation, il suffit de constater qu’il ne peut pas prospérer, dans la mesure où, s’il est vrai que cette institution avait adapté certains délais au moment de l’explosion de la crise sanitaire au cours de l’année 2020, elle a ensuite abandonné ces mesures exceptionnelles, ce qui était déjà le cas durant la période comprise entre le 1er octobre 2021 et le 30 mars 2022.
70 Deuxièmement, au soutien de son argument selon lequel l’AHCC a elle-même invoqué la pandémie de COVID‑19 pour justifier certains défauts dans l’organisation de concours, la requérante fournit un document en annexe A.17 de la requête. Il semble s’agir de l’extrait d’une décision adoptée par l’AHCC dans le cadre d’une réclamation dans le domaine des concours, dans laquelle celle-ci indiquait que la réalisation des épreuves à distance, et non en présentiel, avait été décidée par l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) en raison d’un cas de force majeure lié à l’explosion de la pandémie de COVID‑19, empêchant le déroulement normal de ces épreuves.
71 Il y a lieu de constater que cet argument ne peut pas prospérer. En effet, l’extrait reproduit en annexe A.17 de la requête est celui d’une décision qui a été adoptée par l’AHCC dans le cadre d’une réclamation et qui fait état du fait que l’explosion de la pandémie de COVID‑19 avait conduit l’administration à adopter des mesures organisationnelles afin de concilier l’intérêt des candidats à ce que le concours ait lieu et la protection de la santé publique, qui empêchait le déroulement dudit concours en présentiel. Ainsi, cet extrait n’est pas pertinent, dans la mesure où il ne concerne pas une décision de proroger le délai fixé pour l’exercice d’un droit subjectif reconnu à tout fonctionnaire ou tout agent, droit qui, en l’espèce, peut d’ailleurs s’exercer à domicile par le biais de Sysper.
72 En outre, l’argument de la requérante selon lequel le stress important dont elle a souffert lui a fait perdre, pendant une courte période, la capacité d’organiser correctement ses activités et justifie le retard dans le dépôt de sa demande de transfert manque en fait.
73 En effet, le certificat d’un psychologue produit par la requérante ne fait pas état du fait qu’elle a perdu, pendant une courte période, la capacité d’organiser correctement ses activités, mais se limite à indiquer qu’« on peut imaginer que la situation très complexe et objectivement délicate est en train d’engendrer bien des difficultés pour la requérante dans son organisation quotidienne personnelle » (si può immaginare che la situazione molto complessa e delicata da un punto di vista oggettivo sta causando alla ricorrente non poche difficoltà nella sua organizzazione personale). En tout état de cause, il ressort de l’examen effectué ci-dessus que la demande de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union peut être introduite par le biais de Sysper et que cette démarche ne nécessite ni la présence de l’intéressé dans les locaux de son employeur ni beaucoup de temps ou d’efforts d’organisation. En effet, une fois introduite, ladite demande peut être complétée ultérieurement avec les documents pertinents et la décision définitive n’est à prendre par l’intéressé qu’à l’issue de la procédure. Ainsi, en l’espèce, le certificat produit par la requérante n’est pas susceptible, à lui seul, d’établir qu’elle se trouvait face à des circonstances exceptionnelles justifiant le retard dans le dépôt de sa demande de transfert de droits à pension.
74 En conclusion, la requérante n’a pas apporté de justifications suffisantes pour pouvoir conclure que la Commission a commis une erreur en considérant que le retard dans le dépôt de sa demande de transfert de ses droits à pension acquis avant son entrée au service de l’Union lui était imputable et n’était pas justifié par des circonstances exceptionnelles liées aux effets de la pandémie de COVID‑19 et à sa situation personnelle.
75 Partant, la deuxième branche du premier moyen et la première branche du second moyen doivent être rejetées.
Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de la violation des dispositions financières
76 La requérante relève que, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AHCC a fondé sa position sur la jurisprudence selon laquelle les dispositions ouvrant droit à des prestations financières, telles que les dispositions relatives aux pensions, doivent être interprétées strictement.
77 À cet égard, premièrement, la requérante émet des réserves quant au fait que les règles régissant le transfert des droits à pension relèvent bien de la catégorie des dispositions ouvrant droit à des prestations financières.
78 Deuxièmement, en faisant référence à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, la requérante observe que le montant correspondant aux années de service reconnues par la Commission à la suite de la procédure de transfert est entièrement financé par des montants qui appartiennent déjà au fonctionnaire et qui sont versés à cette fin dans les caisses de l’Union. Selon la requérante, l’opération de transfert des droits à pension acquis avant l’entrée au service de l’Union apparaît donc tout à fait neutre d’un point de vue financier. Dans ce contexte, la requérante observe que la jurisprudence citée par l’AHCC concerne des hypothèses différentes qui représentent des charges accrues pour l’administration.
79 La Commission conteste les arguments de la requérante.
80 Il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, si une décision est valablement fondée sur un ou plusieurs motifs, les moyens visant d’autres motifs de ladite décision sont inopérants, dès lors que, à les supposer fondés, ces moyens ne seraient pas susceptibles d’entraîner l’annulation de celle-ci [arrêts du 21 mai 2014, Mocová/Commission, T‑347/12 P, EU:T:2014:268, point 22 (non publié), et du 19 juillet 2017, Parlement/Meyrl, T‑699/16 P, non publié, EU:T:2017:524, point 64 ; voir également, en ce sens, ordonnance du 18 octobre 2001, Kish Glass/Commission, C‑241/00 P, EU:C:2001:556, point 42].
81 Or, s’il est vrai que, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AHCC a effectué un renvoi général à la jurisprudence selon laquelle les dispositions ouvrant droit à des prestations financières, telles que les dispositions relatives aux pensions, doivent être interprétées strictement et même en admettant que cette référence ne soit pas pertinente en l’espèce, il n’en reste pas moins que, dans la décision attaquée, c’est à juste titre que l’AHCC, d’une part, a relevé que l’article 5, paragraphe 1, des DGE était très clair et ne laissait aucune place à l’interprétation et, d’autre part, a conclu que le retard dans le dépôt de la demande de transfert de droits à pension de la requérante ne pouvait être considéré comme étant dû ni à la pandémie de COVID‑19 ni à ses obligations envers ses parents, puisque ladite demande pouvait être introduite à distance par le biais de Sysper ou par un courriel adressé au service des ressources humaines.
82 À cet égard, il ressort de l’examen des première et deuxième branches du premier moyen ainsi que de la première branche du second moyen que la Commission n’a pas commis d’erreur en considérant que le délai requis était expiré au moment du dépôt de la demande de la requérante et que celle-ci n’avait pas établi que le retard dans ce dépôt ne lui était pas imputable, mais était justifié par des circonstances exceptionnelles. Partant, les motifs invoqués par la Commission n’étant pas entachés d’erreur, l’argument de la requérante tiré de la référence erronée à la jurisprudence relative à l’interprétation stricte des dispositions ouvrant droit à des prestations financières doit être rejeté comme étant inopérant.
Sur la seconde branche du second moyen, tirée, en substance, de la violation du devoir de sollicitude et du principe de proportionnalité
83 La requérante affirme qu’elle va subir un préjudice grave et irréparable parce que les sommes qu’elle a cotisées dans le système italien seront définitivement perdues, dans la mesure où elle ne dispose d’aucune autre possibilité raisonnable.
84 En effet, en premier lieu, selon elle, le « transfert out » de ses droits à pension acquis dans le RPIUE vers le système italien n’étant possible qu’à la fin de sa relation de travail avec l’Union, la capitalisation de ses droits à pension ne pourra avoir lieu, en théorie, que lorsqu’elle aura atteint l’âge de la retraite, en vertu des dispositions du statut, dans la mesure où il est inimaginable qu’elle soit tenue de démissionner dans le seul but de capitaliser ses cotisations accumulées jusqu’à présent. À cet égard, la requérante observe que, compte tenu de ses perspectives de carrière, il est raisonnable de penser que la pension d’ancienneté à laquelle elle aura droit en vertu des dispositions du statut sera certainement supérieure à celle à laquelle elle aurait droit au niveau national.
85 En second lieu, la requérante soutient qu’elle ne pourrait pas minimiser ses pertes financières en renonçant au transfert de ses droits à pension pour bénéficier de deux pensions d’ancienneté distinctes et proportionnelles aux périodes de cotisation accumulées dans le système italien et dans celui de l’Union, étant donné qu’elle n’a pas cotisé durant la période minimale requise par la législation italienne pour pouvoir bénéficier d’une pension de retraite nationale.
86 Ainsi, la requérante soutient que la Commission a violé tant le devoir de sollicitude que le principe de proportionnalité, eu égard à la gravité du préjudice qui lui est causé par rapport au bénéfice qu’en retire l’administration elle-même.
87 La Commission conteste les arguments de la requérante.
88 Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la question de savoir si, en l’espèce, la règle de concordance entre la requête et la réclamation a été respectée, les arguments au soutien de la présente branche semblant n’avoir été soulevés qu’au stade de la requête, il convient de relever que le principe de totalisation des périodes de cotisation prévu par le règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2004, L 166, p. 1), selon la jurisprudence applicable aux fonctionnaires et aux agents de l’Union, s’oppose à ce qu’un État membre ne tienne pas compte des périodes d’activité accomplies sous le RPIUE aux fins de l’ouverture du droit à une pension de retraite, pro rata, au titre d’un régime national (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2004, My, C‑293/03, EU:C:2004:821, point 49, et ordonnance du 9 juillet 2010, Ricci et Pisaneschi, C‑286/09, non publiée, EU:C:2010:420, point 34). Il en découle que les périodes d’activité accomplies sous le régime de pension de l’Union par un fonctionnaire ou un agent doivent être prises en compte, aux fins de l’octroi, au prorata, de la pension d’ancienneté prévue par le régime de sécurité sociale d’un État membre.
89 Ainsi, les arguments invoqués par la requérante au soutien d’une violation du principe de proportionnalité et du devoir de sollicitude ne peuvent pas prospérer, dans la mesure où la prémisse factuelle sur laquelle ils sont fondés, à savoir l’existence d’un préjudice causé par la perte des sommes cotisées dans le système italien, manque en fait.
90 À la lumière de ces considérations, il convient de rejeter la seconde branche du second moyen et, partant, le recours dans son intégralité.
Sur les dépens
91 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (dixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) WT est condamnée aux dépens.
Porchia | Jaeger | Verschuur |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 octobre 2024.
Signatures
* Langue de procédure : l’italien.
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