Haswani v Council (Judgment) French Text [2020] EUECJ T-521/19 (16 December 2020)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/T52119.html
Cite as: EU:T:2020:608, [2020] EUECJ T-521/19, ECLI:EU:T:2020:608

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ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

16 décembre 2020 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la Syrie – Gel des fonds – Autorité de la chose jugée – Délai de recours – Obligation de motivation – Erreur d’appréciation – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑521/19,

George Haswani, demeurant à Yabroud (Syrie), représenté par Me G. Karouni, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. A. Limonet et V. Piessevaux, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision (PESC) 2016/850 du Conseil, du 27 mai 2016, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2016, L 141, p. 125), du règlement d’exécution (UE) 2016/840 du Conseil, du 27 mai 2016, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2016, L 141, p. 30), de la décision (PESC) 2017/917 du Conseil, du 29 mai 2017, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2017, L 139, p. 62), du règlement d’exécution (UE) 2017/907 du Conseil, du 29 mai 2017, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2017, L 139, p. 15), de la décision d’exécution (PESC) 2017/1245 du Conseil, du 10 juillet 2017, mettant en œuvre la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2017, L 178, p. 13), du règlement d’exécution (UE) 2017/1241 du Conseil, du 10 juillet 2017, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2017, L 178, p. 1), de la décision (PESC) 2018/778 du Conseil, du 28 mai 2018, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2018, L 131, p. 16), du règlement d’exécution (UE) 2018/774 du Conseil, du 28 mai 2018, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2018, L 131, p. 1), de la décision (PESC) 2019/806 du Conseil, du 17 mai 2019, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2019, L 132, p. 36), du règlement d’exécution (UE) 2019/798 du Conseil, du 17 mai 2019, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2019, L 132, p. 1), de la décision (PESC) 2020/719 du Conseil, du 28 mai 2020, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2020, L 168, p. 66), et du règlement d’exécution (UE) 2020/716 du Conseil, du 28 mai 2020, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2020, L 168, p. 1), en tant que ces actes visent le requérant, et, d’autre part, une demande fondée sur l’article 268 TFUE et tendant à obtenir réparation du préjudice que celui-ci aurait prétendument subi à la suite de ces actes,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise et J. Martín y Pérez de Nanclares (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

1        Le requérant, M. George Haswani, est un homme d’affaires de nationalité syrienne.

2        Condamnant fermement la répression violente des manifestations pacifiques en Syrie et lançant un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la force, le Conseil de l’Union européenne a adopté, conformément à l’article 29 TUE, la décision 2011/273/PESC, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2011, L 121, p. 11). Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil a institué un embargo sur les armes, une interdiction des exportations de matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne, des restrictions à l’admission dans l’Union européenne ainsi que le gel des fonds et des ressources économiques de certaines personnes et entités responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne.

3        Les noms des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie ainsi que ceux des personnes, physiques ou morales, et des entités qui leur sont liées sont mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de cette décision, le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, peut modifier ladite annexe. Le nom du requérant n’y figurait pas lors de l’adoption de ladite décision.

4        Étant donné que certaines des mesures restrictives prises à l’encontre de la République arabe syrienne entrent dans le champ d’application du traité FUE, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 215, paragraphe 2, TFUE, le règlement (UE) no 442/2011, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2011, L 121, p. 1). Ce règlement est, pour l’essentiel, identique à la décision 2011/273, mais il prévoit des possibilités de déblocage des fonds gelés. La liste des personnes, des entités et des organismes reconnus comme étant soit responsables de la répression en cause, soit associés auxdits responsables, figurant à l’annexe II dudit règlement, est identique à celle figurant à l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 14, paragraphes 1 et 4, du règlement no 442/2011, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne, physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il modifie l’annexe II en conséquence et, par ailleurs, examine la liste qui y figure à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois.

5        Par la décision 2011/782/PESC, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO 2011, L 319, p. 56), le Conseil a estimé, compte tenu de la gravité de la situation en Syrie, qu’il était nécessaire d’instituer des mesures restrictives supplémentaires. Par souci de clarté, les mesures imposées par la décision 2011/273 et les mesures supplémentaires ont été regroupées dans un instrument juridique unique. La décision 2011/782 prévoit, à son article 18, des restrictions en matière d’admission sur le territoire de l’Union et, à son article 19, le gel des fonds et des ressources économiques des personnes et des entités dont le nom figure à l’annexe I.

6        Le règlement no 442/2011 a été remplacé par le règlement (UE) no 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement no 442/2011 (JO 2012, L 16, p. 1).

7        La décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO 2012, L. 330, p. 21), a été remplacée par la décision 2013/255/PESC du Conseil, du 31 mai 2013, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2013, L 147, p. 14). La décision 2013/255 a été prorogée jusqu’au 1er juin 2015 par la décision 2014/309/PESC du Conseil, du 28 mai 2014, modifiant la décision 2013/255 (JO 2014, L 160, p. 37).

 Sur l’inscription initiale du nom du requérant sur les listes de personnes visées par des mesures restrictives

8        Par la décision d’exécution (PESC) 2015/383 du Conseil, du 6 mars 2015, mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO 2015, L 64, p. 41), et par le règlement d’exécution (UE) 2015/375 du Conseil, du 6 mars 2015, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 64, p. 10), le nom du requérant a été inséré à la ligne 203 du tableau A des listes des personnes, des entités et des organismes visés par les mesures restrictives qui figurent à l’annexe I de la décision 2013/255 et à l’annexe II du règlement no 36/2012 (ci-après, prises ensemble, les « listes en cause »).

9        Étaient également indiqués la date de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, en l’occurrence le 7 mars 2015, et les motifs suivants :

« Important homme d’affaires syrien, copropriétaire de HESCO Engineering and Construction Company, importante société d’ingénierie et de construction en Syrie. Il entretient des liens étroits avec le régime syrien.

George Haswani soutient le régime et en tire avantage grâce à son rôle d’intermédiaire dans le cadre de transactions relatives à l’achat de pétrole à l’[« État islamique d’Iraq et du Levant »] par le régime syrien.

Il tire également avantage du régime grâce au traitement favorable dont il bénéficie, notamment un marché conclu (en tant que sous-traitant) avec Stroytransgaz, une grande compagnie pétrolière russe. »

10      Le 5 mai 2015, le requérant a introduit devant le Tribunal un recours visant à obtenir, notamment, l’annulation de la décision d’exécution 2015/383 et du règlement d’exécution 2015/375, pour autant que ces actes le concernaient. Ce recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous le numéro T‑231/15.

11      Le 28 mai 2015, par la décision (PESC) 2015/837 modifiant la décision 2013/255 (JO 2015, L 132, p. 82), le Conseil a prorogé la décision 2013/255 jusqu’au 1er juin 2016. Le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2015/828 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 132, p. 3).

12      Par mémoire en adaptation déposé au greffe du Tribunal le 23 juin 2015 dans l’affaire T‑231/15, le requérant a également demandé l’annulation de la décision 2015/837 et du règlement d’exécution 2015/828, pour autant que ces actes le concernaient.

13      Le 12 octobre 2015, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2015/1836 modifiant la décision 2013/255 (JO 2015, L 266, p. 75). Le même jour, il a adopté le règlement (UE) 2015/1828 modifiant le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 266, p. 1).

14      Aux termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, « [l]e Conseil a estimé que, en raison du contrôle étroit exercé sur l’économie par le régime syrien, un cercle restreint de femmes et [d’]hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie n’[était] en mesure de maintenir son statut que grâce à des liens étroits avec le régime et au soutien de celui-ci, ainsi qu’à l’influence exercée en son sein », et « le Conseil estime qu’il devrait prévoir des mesures restrictives pour imposer des restrictions à l’admission des femmes et des hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie, identifiés par [lui] et dont la liste figure à l’annexe I, ainsi que pour geler tous les fonds et ressources économiques qui leur appartiennent, qui sont en leur possession, ou qui sont détenus ou contrôlés par eux, afin de les empêcher de fournir un soutien matériel ou financier au régime et, par l’influence qu’ils exercent, d’accroître la pression sur le régime lui-même afin qu’il modifie sa politique de répression ».

15      La rédaction des articles 27 et 28 de la décision 2013/255 a été modifiée par la décision 2015/1836. Ces articles prévoient désormais des restrictions à l’entrée ou au passage en transit sur le territoire des États membres ainsi que le gel des fonds des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » sauf « informations suffisantes indiquant [que ces personnes] ne sont pas, ou ne sont plus, lié[e]s au régime ou qu’[elles] n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’[elles] ne sont pas associé[e]s à un risque réel de contournement ».

16      Le règlement 2015/1828 a modifié, notamment, la rédaction de l’article 15 du règlement no 36/2012 afin d’y intégrer les nouveaux critères d’inscription définis par la décision 2015/1836 et introduits dans la décision 2013/255.

 Sur la réinscription et le maintien du nom du requérant sur les listes de personnes visées par des mesures restrictives

17      Le 27 mai 2016, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2016/850 modifiant la décision 2013/255 (JO 2016, L 141, p. 125). Le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2016/840 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2016, L 141, p. 30). Par ces actes (ci-après les « actes de 2016 »), les motifs d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause ont été modifiés. Ils étaient rédigés comme suit :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et/ou activités dans les secteurs de l’ingénierie, de la construction, du pétrole et du gaz. Il détient des intérêts et/ou exerce une influence considérable dans plusieurs sociétés et entités en Syrie, en particulier HESCO Engineering and Construction Company, importante société d’ingénierie et de construction.

George Haswani entretient des liens étroits avec le régime syrien. Il soutient le régime et en tire avantage grâce à son rôle d’intermédiaire dans le cadre de transactions relatives à l’achat de pétrole à l’[« État islamique d’Iraq et du Levant »] par le régime syrien. Il tire également avantage du régime grâce au traitement favorable dont il bénéficie, notamment un marché conclu (en tant que sous-traitant) avec Stroytransgaz, grande compagnie pétrolière russe. »

18      Par lettre du 30 mai 2016, adressée au représentant du requérant, le Conseil a notifié au requérant une copie des actes de 2016.

19      Par mémoire en adaptation déposé au greffe du Tribunal le 7 juillet 2016 dans l’affaire T‑231/15, le requérant a également demandé l’annulation des actes de 2016, pour autant que ces actes le concernaient.

20      Par arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), le Tribunal a fait partiellement droit au recours en annulation formé par le requérant et a annulé la décision d’exécution 2015/383, le règlement d’exécution 2015/375, la décision 2015/837 et le règlement d’exécution 2015/828 pour autant qu’ils le concernaient. Le Tribunal a rejeté le recours en ce qui concernait les actes de 2016 comme étant irrecevable.

21      Par requête déposée le 26 mai 2017 au greffe de la Cour, le requérant a formé un pourvoi contre l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200). Ce pourvoi a été enregistré au greffe de la Cour sous le numéro C‑313/17 P.

22      Le 29 mai 2017, par sa décision (PESC) 2017/917 modifiant la décision 2013/255 (JO 2017, L 139, p. 62), le Conseil a prorogé la décision 2013/255 jusqu’au 1er juin 2018. Le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2017/907 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2017, L 139, p. 15).

23      Par lettre du 19 juin 2017, adressée au représentant du requérant, le Conseil a informé le requérant de son intention de modifier les motifs de l’inscription de son nom sur les listes en cause après avoir procédé au réexamen de ladite inscription. Le Conseil a fixé un délai au requérant pour formuler d’éventuelles observations.

24      Par lettre du 29 juin 2017, le représentant du requérant s’est opposé à la réinscription du nom du requérant sur les listes en cause.

25      Le 10 juillet 2017, le Conseil a adopté la décision d’exécution (PESC) 2017/1245 mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO 2017, L 178, p. 13). Le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2017/1241 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2017, L 178, p. 1). Par ces actes, le nom du requérant a été réinscrit sur les listes en cause.

26      En particulier, le nom du requérant a été réinscrit à la ligne 203 du tableau comportant les listes en cause sous le titre « A. Personnes », cette réinscription se fondant sur les motifs suivants :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et/ou activités dans les secteurs de l’ingénierie, de la construction, du pétrole et du gaz. Il détient des intérêts et/ou exerce une influence considérable dans plusieurs sociétés et entités en Syrie, en particulier HESCO Engineering and Construction Company, importante société d’ingénierie et de construction. »

27      Par lettre du 11 juillet 2017, adressée au représentant du requérant, le Conseil a répondu à sa lettre du 29 juin 2017 et a notifié au requérant une copie de la décision d’exécution 2017/1245 et du règlement d’exécution 2017/1241.

28      Le 31 juillet 2017, le requérant a introduit devant le Tribunal un recours visant à obtenir l’annulation des actes de 2016, de la décision 2017/917, du règlement d’exécution 2017/907, de la décision d’exécution 2017/1245 et du règlement d’exécution 2017/1241 (ci-après, pris ensemble, les « actes de 2017 »). Ce recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous le numéro T‑477/17.

29      Le 28 mai 2018, par sa décision (PESC) 2018/778 modifiant la décision 2013/255 (JO 2018, L 131, p. 16), le Conseil a prorogé la décision 2013/255 jusqu’au 1er juin 2019 et, le même jour, il a adopté le règlement d’exécution (UE) 2018/774 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2018, L 131, p. 1) (ci-après, pris ensemble, les « actes de 2018 »).

30      Par mémoire en adaptation déposé au greffe du Tribunal le 6 juillet 2018 dans l’affaire T‑477/17, le requérant a également demandé l’annulation des actes de 2018, pour autant que ces actes le concernaient.

31      Par arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), le Tribunal a rejeté le recours du requérant en ce qui concernait les actes de 2016 comme étant irrecevable et, en ce qui concernait les actes de 2017 et les actes de 2018, comme étant non fondé.

32      Par arrêt du 24 janvier 2019, Haswani/Conseil (C‑313/17 P, EU:C:2019:57), la Cour a annulé le point 1 du dispositif de l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), par lequel le Tribunal avait prononcé l’irrecevabilité du recours pour autant qu’il visait à obtenir l’annulation des actes de 2016, et a renvoyé l’affaire devant le Tribunal.

33      Par requête déposée le 18 mars 2019 au greffe de la Cour, le requérant a formé un pourvoi contre l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7). Ce pourvoi a été enregistré au greffe de la Cour sous le numéro C‑241/19 P.

34      Le 17 mai 2019, par sa décision (PESC) 2019/806 modifiant la décision 2013/255 (JO 2019, L 132, p. 36), le Conseil a prorogé la décision 2013/255 jusqu’au 1er juin 2020. Le même jour, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) 2019/798 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2019, L 132, p. 1).

35      Par ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), le Tribunal a rejeté le recours en tant qu’il était dirigé contre les actes de 2016 comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

36      Le 28 mai 2020, par sa décision (PESC) 2020/719 modifiant la décision 2013/255 (JO 2020, L 168, p. 66), le Conseil a prorogé la décision 2013/255 jusqu’au 1er juin 2021. Le même jour, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) 2020/716 mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2020, L 168, p. 1).

37      Par arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), la Cour a rejeté le pourvoi introduit par le requérant contre l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7).

 Procédure et conclusions des parties

38      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 juillet 2019, le requérant a introduit le présent recours.

39      Le 11 octobre 2019, le Conseil a déposé au greffe du Tribunal le mémoire en défense.

40      Dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal a, le 3 avril 2020, demandé aux parties de se prononcer sur les deux fins de non-recevoir d’ordre public qu’il envisageait de soulever d’office. La première fin de non-recevoir envisagée était tirée de l’autorité de la chose jugée qui s’attachait à l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), et qui était susceptible d’avoir des conséquences sur la recevabilité du recours en ce qu’il avait pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation des actes de 2016. La seconde fin de non-recevoir envisagée était tirée de l’exception de litispendance au regard du pourvoi qui était alors pendant devant la Cour dans l’affaire enregistrée sous le numéro C‑241/19 P et qui était susceptible d’avoir des conséquences sur la recevabilité du recours en ce qu’il avait pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation des actes de 2017 et des actes de 2018. Le Tribunal a posé, en outre, une question aux parties. Celles-ci ont répondu dans le délai imparti.

41      À la suite du prononcé de l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), le Tribunal a, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, le 16 juillet 2020, demandé aux parties de se prononcer sur les conséquences qu’elles tiraient de cet arrêt sur la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée que le Tribunal envisageait de soulever d’office à l’égard du recours du requérant en ce qu’il avait pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation des actes de 2017 et des actes de 2018. Le Conseil a répondu dans le délai imparti. Le requérant n’a pas répondu dans le délai qui lui avait été imparti, et ce en dépit du fait que, à sa demande, ce délai, initialement fixé au 14 août 2020, avait été prorogé au 1er septembre 2020.

42      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 27 juillet 2020, le requérant a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure, adapté la requête de sorte que celle-ci vise également l’annulation de la décision 2020/719 et le règlement d’exécution 2020/716, en tant que ces actes le concernent.

43      Le 8 septembre 2020, le Conseil a déposé au greffe du Tribunal les observations sur le mémoire en adaptation.

44      En l’absence de demande en ce sens formulée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, décidé de statuer sans phase orale de la procédure.

45      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes de 2016, les actes de 2017, les actes de 2018 (ci-après, pris ensemble, les « actes de 2016, 2017 et 2018 »), la décision 2019/806, le règlement d’exécution 2019/798, la décision 2020/719 et le règlement d’exécution 2020/716, pour autant qu’ils le concernent ;

–        ordonner la suppression de son nom des listes en cause ;

–        condamner le Conseil au paiement de la somme de 100 000 euros au titre du préjudice moral subi ;

–        condamner le Conseil à supporter ses propres dépens ainsi que ceux qu’il a exposés, qu’il se réserve de justifier en cours de procédure.

46      Le Conseil conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours pour partie irrecevable et pour partie non fondé et, partant, le rejeter dans son intégralité ;

–        à titre subsidiaire, en cas d’annulation des actes de 2016, 2017 et 2018, de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798, maintenir les effets de la décision 2019/806 jusqu’à la prise d’effet de l’annulation du règlement d’exécution 2019/798 ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur le deuxième chef de conclusions du requérant

47      Par son deuxième chef de conclusions, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’ordonner la suppression de son nom des listes en cause.

48      En réponse à une question posée par le Tribunal, le requérant confirme la formulation de ce deuxième chef de conclusions et fait valoir qu’aucune disposition du traité FUE ni du statut de la Cour de justice de l’Union européenne n’empêche formellement le Tribunal de prononcer des injonctions à l’égard du Conseil. Selon lui, l’article 266 TFUE ne fait qu’énoncer l’attitude que devrait adopter l’institution dont l’acte a été annulé ou remis en cause et ne saurait en aucune manière être entendu comme une interdiction faite à la Cour ou au Tribunal d’adresser des injonctions aux institutions. En outre, la jurisprudence existante à cet égard ne serait aucunement motivée et devrait être remise en cause, car l’incompétence du Tribunal ainsi déclarée conduirait à rendre illusoire le droit à un recours effectif dans les cas où l’institution en cause ne réagit pas spontanément en exécutant la décision du Tribunal. En effet, selon le requérant, l’exécution de la décision prise par le juge de l’Union nécessiterait de la personne concernée d’engager une nouvelle procédure pour se faire entendre alors même que la question de l’exécution aurait pu être directement réglée dans la décision annulant l’acte de l’institution ou le déclarant illégal.

49      En réponse à cette même question, le Conseil soutient qu’il résulte d’une jurisprudence constante qu’il n’appartient pas au juge de l’Union d’adresser des injonctions aux institutions de l’Union.

50      À cet égard, tout d’abord, il y a lieu d’observer que, selon la jurisprudence, le juge de l’Union n’est pas habilité à adresser des injonctions aux institutions de l’Union dans le cadre de la compétence d’annulation qui lui est conférée par l’article 263 TFUE. En effet, conformément à l’article 264 TFUE, le Tribunal a uniquement la possibilité d’annuler l’acte attaqué. C’est à l’institution concernée qu’il appartient de prendre, en vertu de l’article 266 TFUE, les mesures que comporte l’exécution d’un éventuel arrêt d’annulation en exerçant, sous le contrôle du juge de l’Union, le pouvoir d’appréciation dont elle dispose à cet effet dans le respect aussi bien du dispositif et des motifs de l’arrêt qu’elle est tenue d’exécuter que des dispositions du droit de l’Union (voir arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 16 et jurisprudence citée).

51      Ensuite, il y a lieu de rappeler que l’Union est une Union de droit dans laquelle ses institutions sont soumises au contrôle de la conformité de leurs actes, notamment, avec les traités, les principes généraux du droit ainsi que les droits fondamentaux (voir arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 18 et jurisprudence citée).

52      Le contrôle juridictionnel du respect de l’ordre juridique de l’Union est assuré, ainsi qu’il ressort de l’article 19, paragraphe 1, TUE, par la Cour de justice de l’Union européenne et par les juridictions des États membres. À cette fin, le traité FUE a, par ses articles 263 TFUE et 277 TFUE, d’une part, et par son article 267 TFUE, d’autre part, établi un système complet de voies de recours et de procédures destiné à assurer le contrôle de la légalité des actes de l’Union, en le confiant au juge de l’Union (voir arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 19 et jurisprudence citée).

53      Il y a également lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, l’absence d’autres possibilités de recours juridictionnel ne saurait en tant que telle fonder un titre de compétence du juge de l’Union, dans un système juridique fondé sur le principe des compétences d’attribution (voir arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 20 et jurisprudence citée).

54      Dans ce contexte, il doit être souligné que l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), s’il confère le droit à un recours effectif, n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, ainsi qu’il découle également de la partie des explications relatives à la Charte afférente à cet article. Lesdites explications doivent, conformément à l’article 6, paragraphe 1, troisième alinéa, TUE et à l’article 52, paragraphe 7, de la Charte, être prises en considération pour l’interprétation de cette dernière (voir arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 21 et jurisprudence citée).

55      Dès lors, sauf à méconnaître complètement le système des voies de recours établi par le traité, il n’est pas possible de reconnaître aux justiciables le droit de demander au Tribunal d’enjoindre aux institutions de l’Union de faire ou de ne pas faire une action déterminée en vue de leur garantir une protection juridictionnelle effective (arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 22).

56      Enfin, il convient encore de rappeler que, en matière de mesures restrictives, lorsque le Tribunal annule des actes ayant inscrit ou maintenu le nom d’une personne ou d’une entité sur les listes en cause, il appartient au Conseil de procéder, sur la base de l’article 266 TFUE, à un nouvel examen des faits afin d’apprécier s’il faut réinscrire ledit nom sur lesdites listes, sur la base de nouveaux motifs étayés à suffisance de droit, ou si, au contraire, il convient de le retirer (voir, en ce sens, arrêt du 31 mai 2018, Kaddour/Conseil, T‑461/16, EU:T:2018:316, point 78). Ainsi, il n’appartient pas au Tribunal d’indiquer au Conseil si, en raison de l’annulation de tels actes, il convient de réinscrire le nom de la personne ou de l’entité concernées ou, au contraire, de le retirer des listes en cause.

57      Par ailleurs, dans l’hypothèse, évoquée par le requérant, où le Conseil ne réagirait pas pour exécuter l’arrêt du Tribunal, le requérant serait en droit, conformément à l’article 265 TFUE, d’inviter le Conseil à agir en ce sens et, pour le cas où celui-ci n’aurait pas pris position, de saisir le Tribunal d’un recours en carence visant à faire constater l’illégalité du refus de l’institution. Par ailleurs, dans l’hypothèse où, à la suite de l’invitation à agir, le Conseil adopterait une nouvelle décision d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, le requérant pourrait en demander l’annulation au Tribunal dans les conditions prévues à l’article 263 TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 23).

58      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le deuxième chef de conclusions du requérant doit être rejeté en raison de l’incompétence du Tribunal pour en connaître.

 Sur les conclusions en annulation

 Sur la recevabilité du recours en ce qui concerne les actes de 2016, 2017 et 2018

59      Le Conseil excipe de l’irrecevabilité du recours en ce qui concerne les actes de 2016, 2017 et 2018.

60      En substance, le Conseil fait valoir, premièrement, que le recours en ce qui concerne les actes de 2016, 2017 et 2018 est tardif et, deuxièmement, que le Tribunal s’est déjà prononcé, dans le cadre des arrêts du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), et de l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), sur l’annulation de ces actes en rejetant le recours du requérant contre les actes de 2016 comme étant en partie irrecevable et en partie non fondé et en rejetant le recours du requérant contre les actes de 2017 et les actes de 2018 comme étant non fondé.

61      En réponse aux questions du Tribunal sur les fins de non-recevoir d’ordre public qu’il envisageait de soulever d’office, le Conseil indique, dans ses réponses du 6 mai et du 29 juillet 2020, considérer, en substance, que le recours doit être rejeté en vertu de l’autorité de la chose jugée qui s’attache à l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), en ce qu’il vise l’annulation des actes de 2016, et en vertu de l’autorité de la chose jugée qui s’attache à l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), en ce qu’il vise l’annulation des actes de 2017 et des actes de 2018.

62      Le requérant soutient que l’ensemble des actes qui font l’objet de son recours en annulation ne lui ont jamais été notifiés. Il ajoute que son recours a été formé moins de deux mois suivant leur publication.

63      En réponse aux questions du Tribunal posées par voie de mesures d’organisation de la procédure du 3 avril 2020 (voir point 40 ci-dessus), le requérant réfute l’irrecevabilité de son recours en ce qu’il vise l’annulation des actes de 2016, 2017 et 2018 en faisant valoir que les conditions pour l’invocation de l’exception de l’autorité de la chose jugée et de litispendance ne sont pas toutes remplies en l’espèce. En revanche, ainsi qu’il a été mentionné au point 41 ci-dessus, le requérant n’a pas déposé, dans le délai imparti, la réponse à la question posée par le Tribunal, par voie de mesure d’organisation de la procédure du 16 juillet 2020.

64      À cet égard, il convient de rappeler que les conditions de recevabilité étant d’ordre public, le Tribunal peut les examiner d’office, son contrôle n’étant pas limité aux fins de non-recevoir soulevées par les parties (voir arrêt du 8 janvier 2003, Hirsch e.a./BCE, T‑94/01, T‑152/01 et T‑286/01, EU:T:2003:3, point 16 et jurisprudence citée).

65      Par ailleurs, l’obligation pour le juge de l’Union de relever d’office une fin de non-recevoir doit être exercée à la lumière du principe du contradictoire (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2015, SV Capital/ABE, T‑660/14, EU:T:2015:608, point 58).

66      En l’espèce, ainsi qu’il a été rappelé aux points 40 et 41 ci-dessus, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur les fins de non-recevoir que le Tribunal envisageait de relever d’office. Ainsi, les parties ont été mises en mesure de faire valoir leurs arguments à l’égard de la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée qui s’attache à l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), et qui est susceptible d’avoir des conséquences sur la recevabilité du recours en ce qu’il vise les actes de 2016, à l’égard de la fin de non-recevoir tirée de l’exception de litispendance au regard du pourvoi qui était pendant devant la Cour dans l’affaire enregistrée sous le numéro C‑241/19 P en ce qui concerne les actes de 2017 et les actes de 2018 et, enfin, à l’égard de la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée qui s’attache à l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), et qui est susceptible d’avoir des conséquences sur la recevabilité du recours en ce qu’il vise les actes de 2017 et les actes de 2018. À cet égard, dès lors que l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), a été prononcé, il n’y a plus lieu de soulever une fin de non-recevoir tirée de l’exception de litispendance au regard du pourvoi qui était pendant devant la Cour dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt.

67      Néanmoins, en l’absence de réponse du requérant soumise dans le délai imparti sur la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée qui s’attache à l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), le Tribunal estime qu’il convient de tenir compte des observations et des arguments que ce dernier avait soumis s’agissant de la fin de non-recevoir tirée de l’exception de litispendance au regard du pourvoi qui était pendant devant la Cour dans l’affaire ayant donné lieu à ce dernier arrêt.

68      En effet, il y a lieu de relever que les notions de litispendance et d’autorité de la chose jugée présentent des liens étroits dans la mesure où leur objectif principal est d’empêcher que des décisions contraires voire incompatibles quant à leurs effets ne coexistent dans l’ordre juridique de l’Union (prise de position de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Purrucker, C‑296/10, EU:C:2010:578, point 66). L’existence de tels liens étroits se manifeste d’ailleurs par les conditions fixées par la jurisprudence aux fins de reconnaître, d’une part, une situation de litispendance et, d’autre part, l’autorité de la chose jugée d’une décision.

69      À cet égard, il convient de rappeler que le juge de l’Union a reconnu l’importance que revêt, tant dans l’ordre juridique de l’Union que dans les ordres juridiques nationaux, le principe d’autorité de la chose définitivement jugée. En effet, afin de garantir aussi bien la stabilité du droit et des relations juridiques qu’une bonne administration de la justice, il importe que des décisions juridictionnelles devenues définitives après épuisement des voies de recours disponibles ou après expiration des délais prévus pour ces recours ne puissent plus être remises en cause (voir ordonnance du 22 décembre 2014, Al Assad/Conseil, T‑407/13, non publiée, EU:T:2014:1119, point 49 et jurisprudence citée).

70      Selon une jurisprudence constante, l’autorité de la chose jugée s’attachant à un arrêt est susceptible de faire obstacle à la recevabilité d’un recours si celui ayant donné lieu à l’arrêt en cause a opposé les mêmes parties, a porté sur le même objet et a été fondé sur les mêmes causes, étant précisé que ces conditions ont nécessairement un caractère cumulatif (voir ordonnance du 22 décembre 2014, Al Assad/Conseil, T‑407/13, non publiée, EU:T:2014:1119, point 50 et jurisprudence citée).

71      À l’instar de l’autorité de la chose jugée, la jurisprudence exige une identité des parties, de cause et d’objet afin de rejeter comme étant irrecevable un recours introduit postérieurement à un autre pour cause de litispendance (voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Italie/Commission, C‑138/03, C‑324/03 et C‑431/03, EU:C:2005:714, point 64).

72      Dès lors, les observations et les arguments que le requérant a présentés en ce qui concerne les conditions de l’existence d’une situation de litispendance au regard du pourvoi qui était pendant devant la Cour dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), restent pertinents dans le cadre de l’analyse des conditions de l’autorité de la chose jugée qui s’attache à l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par cet arrêt de la Cour.

73      En premier lieu, il convient de relever que les parties ne contestent pas que la condition relative à l’identité des parties en cause est remplie en l’espèce.

74      À cet égard, il y a effectivement lieu de constater que le recours introduit dans la présente affaire oppose le requérant au Conseil, comme cela était le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), et dans l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545).

75      En deuxième lieu, s’agissant de la condition relative à l’identité d’objet, il convient de remarquer que, en ce qui concerne, premièrement, l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), si le Conseil estime qu’elle est remplie, le requérant conteste que cela soit le cas. Il fait valoir que, si l’objet des deux recours a trait à l’annulation des actes de 2016, il diffère toutefois en ce que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), il avait demandé une somme de 700 000 euros à titre de réparation du préjudice subi, tandis que, dans le présent recours, la somme demandée s’élève à 100 000 euros.

76      Cet argument est néanmoins inopérant dans la mesure où il porte sur les conclusions indemnitaires et non sur les conclusions en annulation dirigées contre les actes de 2016, à l’encontre desquelles la fin de non-recevoir est soulevée d’office par le Tribunal. À cet égard, force est de constater que le requérant ne conteste pas que les actes de 2016 visés par les deux recours sont les mêmes.

77      Or, il convient effectivement de constater que l’objet est identique en ce que le recours vise en l’espèce à obtenir l’annulation des mêmes actes que ceux concernant l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589).

78      S’agissant, deuxièmement, de l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), il y a lieu de relever que le recours introduit par le requérant dans la présente affaire vise à obtenir l’annulation des actes de 2017 et des actes de 2018, ce qui était également le cas dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal susmentionné. Dès lors, la condition relative à l’identité d’objet est remplie, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté par les parties.

79      En troisième lieu, en ce qui concerne la condition relative à l’identité de cause, il y a lieu de relever que les moyens invoqués par le requérant à l’appui de son recours en l’espèce sont tirés, premièrement, d’une violation de l’obligation de motivation, deuxièmement, d’une violation du principe de proportionnalité et, troisièmement, d’une erreur d’appréciation et de l’absence de preuves.

80      Premièrement, dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), le requérant avait invoqué les mêmes moyens ainsi qu’un moyen tiré de la violation des droits de la défense, du droit à une audition préalable et du droit à un procès équitable.

81      Toutefois, dans l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, point 65), le Tribunal a seulement rejeté comme étant manifestement non fondé le deuxième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation. Le mémoire en adaptation relatif aux moyens tirés, le premier, de la violation des droits de la défense, du droit à une audition préalable et du droit à un procès équitable, le troisième, d’une erreur d’appréciation et d’une absence de preuves et, le quatrième, d’une violation du principe de proportionnalité a été jugé irrecevable (voir, en ce sens, ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil, T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, points 64 et 66). Ainsi, le Tribunal n’a pas examiné ces trois derniers moyens.

82      Or, l’autorité de la chose jugée ne s’attache qu’aux points de fait et de droit qui ont été effectivement ou nécessairement tranchés par la décision judiciaire en cause (voir arrêt du 13 février 2003, Meyer/Commission, T‑333/01, EU:T:2003:32, point 26 et jurisprudence citée).

83      Dès lors que, dans l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), le Tribunal n’a tranché aucun point de fait ou de droit relatif aux moyens tirés, le premier, de la violation des droits de la défense, du droit à une audition préalable et du droit à un procès équitable, le troisième, d’une erreur d’appréciation et d’une absence de preuves et, le quatrième, d’une violation du principe de proportionnalité, l’autorité de la chose jugée qui s’attache à cette ordonnance ne s’oppose pas à la recevabilité, en l’espèce, de la partie du recours en annulation des actes de 2016 qui correspond à celle du recours en annulation ayant été rejetée comme irrecevable par ladite ordonnance. En revanche, elle s’oppose à la recevabilité, en l’espèce, de la partie du recours en annulation des actes de 2016 qui correspond à celle du recours en annulation ayant été rejetée comme manifestement non fondée par l’ordonnance susmentionnée.

84      Deuxièmement, en ce qui concerne l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), le Conseil considère que la condition de l’identité de cause est remplie. Dans le cadre de sa réponse concernant la fin de non-recevoir tirée de l’exception de litispendance au regard du pourvoi qui était pendant devant la Cour dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), le requérant estime que cette condition n’est pas remplie.

85      À cet égard, le requérant fait valoir que, dans le cadre de son pourvoi, il invoque trois moyens, à savoir, le premier, tiré d’une erreur de droit, d’une violation du considérant 6 de la décision 2015/1836 et du considérant 5 de la décision 2013/255, d’un renversement de la charge de la preuve et de la violation du principe de présomption d’innocence, le deuxième, tiré de la violation de l’obligation de motivation et d’un défaut de motifs et, le troisième, tiré de la violation du principe de proportionnalité et d’un défaut de motifs. Ainsi, il considère que la cause du présent litige n’est pas identique à celle de son pourvoi en raison de la différence qui existe entre le premier moyen venant au soutien de son pourvoi et le troisième moyen invoqué au soutien du présent recours, tiré d’une erreur d’appréciation et de l’absence de preuves.

86      Il convient néanmoins de relever que l’autorité de la chose jugée doit s’apprécier au regard des moyens ayant été soulevés dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545). Or, force est de constater que le requérant avait invoqué les mêmes moyens que ceux mentionnés au point 79 ci-dessus, à savoir, un premier moyen tiré d’une violation de l’obligation de motivation, un deuxième moyen tiré d’une violation du principe de proportionnalité et un troisième moyen tiré d’une erreur d’appréciation. Dès lors, la condition relative à l’identité de cause est remplie.

87      Dans ces circonstances, d’une part, il convient de constater que l’autorité de la chose jugée acquise par l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), s’oppose à la recevabilité de la partie du recours en annulation des actes de 2016 qui correspond à celle du recours en annulation ayant été rejetée comme manifestement non fondée par cette ordonnance. D’autre part, l’autorité de la chose jugée acquise par l’arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil (T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7), confirmé par l’arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil (C‑241/19 P, EU:C:2020:545), s’oppose à la recevabilité des conclusions en annulation du présent recours tendant à l’annulation des actes de 2017 et des actes de 2018.

88      Il convient encore d’examiner si la partie du recours en annulation des actes de 2016 qui, en l’espèce, correspond à celle du recours en annulation ayant été rejetée comme étant irrecevable par l’ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil (T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589), est recevable.

89      À cet égard, le Conseil fait valoir que le recours en ce qu’il vise l’annulation des actes de 2016 est irrecevable pour cause de tardiveté.

90      Quant au requérant, il soutient que les actes dont il a demandé l’annulation ne lui ont jamais été notifiés.

91      Aux termes de l’article 263, sixième alinéa, TFUE, le recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte attaqué, de sa notification à la partie requérante ou, à défaut, du jour où celle-ci en a eu connaissance.

92      Par ailleurs, en matière de mesures restrictives, le délai pour l’introduction d’un recours en annulation contre un acte imposant lesdites mesures à l’égard d’une personne ou d’une entité commence uniquement à courir soit à partir de la date de la communication individuelle de cet acte à l’intéressé, si son adresse est connue, soit à partir de la publication d’un avis au Journal officiel de l’Union européenne, lorsqu’il est impossible de procéder à la communication directe de cet acte à l’intéressé (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2013, Gbagbo e.a./Conseil, C‑478/11 P à C‑482/11 P, EU:C:2013:258, points 59 à 62).

93      Or, il a déjà été reconnu par le Tribunal que les actes de 2016 avaient été notifiés au requérant le 30 mai 2016 (voir, en ce sens, arrêt du 16 janvier 2019, Haswani/Conseil, T‑477/17, non publié, EU:T:2019:7, point 45). Par conséquent, le recours ayant été, en l’espèce, introduit le 19 juillet 2019, force est de constater que, en ce qu’il tend à obtenir l’annulation des actes de 2016, il a été introduit tardivement et doit donc être rejeté comme étant irrecevable.

94      Au vu de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de conclure à l’irrecevabilité des conclusions en annulation en ce qu’elles visent les actes de 2016, 2017 et 2018.

95      Dès lors, les moyens avancés au soutien de la demande en annulation du requérant ne seront analysés qu’en ce qui concerne la décision 2019/806, le règlement d’exécution 2019/798, la décision 2020/719 et le règlement d’exécution 2020/716 pour autant qu’ils concernent le requérant (ci-après les « actes attaqués »).

 Sur le fond

96      À titre liminaire, il convient de relever que la décision 2019/806 et la décision 2020/719 ont été adoptées sur le fondement de l’article 29 TUE, qui attribue compétence au Conseil pour adopter des décisions qui définissent la position de l’Union sur une question particulière de nature géographique ou thématique.

97      C’est également sur la base de l’article 29 TUE que le Conseil a adopté la décision 2015/1836, selon laquelle être un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie constitue un critère juridique pour l’application des mesures restrictives en cause.

98      En effet, ainsi que le prévoient l’article 27, paragraphe 2, sous a), et l’article 28, paragraphe 2, sous a), de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, les personnes appartenant à la catégorie des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » sont désormais soumises aux mesures restrictives édictées par cette décision. En outre, en vertu de l’article 27, paragraphe 3, et de l’article 28, paragraphe 3, de cette même décision, ces personnes ne font pas l’objet de ces mesures ou cessent d’en faire l’objet seulement s’il existe des informations suffisantes indiquant qu’elles ne sont pas, ou ne sont plus, liées au régime ou qu’elles n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’elles ne sont pas associées à un risque réel de contournement. À cet égard, comme l’expose le Conseil au considérant 6 de la décision 2015/1836 et au considérant 5 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, un cercle restreint de femmes et d’hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie n’est en mesure de maintenir son statut que grâce à des liens étroits avec le régime et au soutien de celui-ci ainsi qu’à l’influence exercée en son sein. Les critères susmentionnés ont été repris, en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1 bis, sous a), et paragraphe 1 ter, du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828.

99      C’est à la lumière de ce contexte juridique qu’il convient d’examiner les moyens soulevés à l’appui du recours.

100    À cet égard, le Tribunal estime opportun d’examiner, en premier lieu, le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, en deuxième lieu, le troisième moyen, tiré de l’erreur d’appréciation et de l’absence de preuves et, en troisième lieu, le deuxième moyen, tiré de la violation du principe de proportionnalité.

–       Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

101    À l’appui de son premier moyen, le requérant fait valoir que les motifs invoqués pour justifier l’inscription de son nom sur les listes en cause sont généraux, vagues et abstraits.

102    Premièrement, le requérant soutient, en substance, que les motifs d’inscription tels qu’ils résultent de la décision d’exécution 2017/1245 et du règlement d’exécution 2017/1241 méconnaissent encore davantage les exigences de motivation posées par la jurisprudence que ne le faisaient les motifs d’inscription, dont ils constituent un « raccourci », tels qu’ils étaient formulés antérieurement à l’adoption de ces deux actes. À cet égard, ils utiliseraient l’adjectif « influent », singulièrement vague, sans préciser en quoi le requérant serait « influent », notamment au regard de son activité au sein de HESCO Engineering and Construction Company (ci-après « HESCO »), et ne détermineraient ni ne qualifieraient les « intérêts » et « l’influence considérable » du requérant, de même que les « secteurs de l’ingénierie, de la construction, du pétrole et du gaz » et les « sociétés et entités » mentionnées. Ces motifs ne sauraient, dès lors, être considérés comme étant précis et concrets.

103    Deuxièmement, la référence aux affaires du requérant ne ferait pas apparaître le raisonnement du Conseil qui viserait, en réalité, les liens avec le régime syrien, non établis faute de base factuelle suffisante. D’ailleurs, le lien sous-jacent du requérant avec le régime syrien, que la nouvelle motivation suppose, serait contredit par l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), qui aurait reconnu que le lien du requérant avec le régime syrien ne serait pas établi par des bases factuelles suffisamment solides, de sorte que la présomption selon laquelle l’exercice d’une activité économique importante en Syrie est nécessairement lié au régime syrien aurait été renversée dans le cas présent. En outre, pareille présomption serait trop générale pour être conforme à l’obligation de motivation et il ne suffirait pas de démontrer la direction d’une activité commerciale et industrielle pour établir un tel lien.

104    Troisièmement, le requérant soutient que la décision d’exécution 2017/1245 et le règlement d’exécution 2017/1241, qui reprennent les critères de la décision 2015/1836, méconnaissent le principe de sécurité juridique, en ce qu’ils punissent l’exercice d’une activité commerciale et économique selon des critères qui sont vagues. Le Conseil violerait le principe de sécurité juridique en omettant de préciser les activités incriminées pour lesquelles le requérant pourrait être sanctionné.

105    Quatrièmement, le requérant fait valoir que les motifs retenus à son égard se contentent de reproduire les critères abstraits et généraux de la décision 2015/1836. Or, la référence à des secteurs économiques très larges ne saurait suffire à conférer à ces motifs un caractère concret.

106    Le Conseil conteste les arguments du requérant. Il estime, en substance, que la motivation des actes attaqués, telle qu’elle résulte de la décision d’exécution 2017/1245 et du règlement d’exécution 2017/1241, a établi de manière suffisamment précise les raisons pour lesquelles le nom du requérant était inscrit sur les listes en cause.

107    À titre liminaire, il convient de rappeler que l’obligation de motiver un acte constitue une forme substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’un acte consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cet acte. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond dudit acte, mais non la motivation de celui-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt du 5 novembre 2014, Mayaleh/Conseil, T‑307/12 et T‑408/13, EU:T:2014:926, point 96 et jurisprudence citée).

108    Or, certains des arguments avancés par le requérant au soutien de son premier moyen se rattachent, en réalité, à l’analyse du bien-fondé de la motivation des actes attaqués. Il s’agit des arguments rappelés aux points 103 et 104 ci-dessus. Dès lors que ces arguments ne visent pas à remettre en cause spécifiquement le caractère suffisant de la motivation des actes attaqués, mais plutôt le bien-fondé de l’existence d’un lien entre le requérant et le régime syrien en raison de sa qualité d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ils doivent être examinés dans le cadre du troisième moyen, tiré de l’erreur d’appréciation et de l’absence de preuves.

109    Ensuite, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, qui constitue le corollaire du principe du respect des droits de la défense, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 60 et jurisprudence citée).

110    Il convient également de rappeler que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 61 et jurisprudence citée).

111    La motivation d’un acte du Conseil imposant une mesure de gel de fonds doit identifier les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles celui-ci considère, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’appréciation, que l’intéressé doit faire l’objet d’une telle mesure (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 63 et jurisprudence citée).

112    Cependant, l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires peuvent avoir à recevoir des explications (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 64 et jurisprudence citée).

113    Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 65 et jurisprudence citée).

114    En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 66 et jurisprudence citée).

115    Il s’ensuit que, afin de déterminer si les actes attaqués satisfont à l’obligation de motivation, il y a lieu de vérifier si le Conseil a exposé de manière compréhensible et suffisamment précise, dans les motifs énoncés dans ces actes, les raisons l’ayant conduit à considérer que le maintien du nom du requérant sur les listes en cause était justifié au regard des critères juridiques applicables.

116    D’une part, il y a lieu de relever que le fait que la motivation des actes attaqués soit un résumé de la motivation des actes adoptés avant le 10 juillet 2017 par le Conseil ne saurait exercer aucune influence sur le caractère suffisant de la motivation des actes attaqués, celle-ci devant être appréciée au regard des circonstances propres de la présente espèce. Par conséquent, l’argument du requérant à cet égard doit être rejeté comme étant inopérant.

117    D’autre part, en ce qui concerne les raisons pour lesquelles des mesures restrictives visant le requérant ont été adoptées et maintenues, il convient de relever que les motifs d’inscription du nom du requérant sont restés inchangés depuis l’adoption de la décision d’exécution 2017/1245 et du règlement d’exécution 2017/1241. En particulier, ils n’ont pas été modifiés lors de l’adoption de la décision 2019/806 et du règlement d’exécution 2019/798 ni lors de celle de la décision 2020/719 et du règlement d’exécution 2020/716, qui sont les actes attaqués en l’espèce. Ainsi, le Conseil a motivé le maintien de son nom sur les listes en cause de la manière suivante :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et/ou activités dans les secteurs de l’ingénierie, de la construction, du pétrole et du gaz. Il détient des intérêts et/ou exerce une influence considérable dans plusieurs sociétés et entités en Syrie, en particulier HESCO Engineering and Construction Company, importante société d’ingénierie et de construction. »

118    Ainsi, la motivation des actes attaqués permettait au requérant de comprendre à suffisance que son nom avait été inscrit sur les listes en cause au motif qu’il était un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. En outre, contrairement à ce que soutient le requérant, la motivation des actes attaqués ne saurait être considérée comme une simple reprise du critère établi à l’article 27, paragraphe 2, sous a), et à l’article 28, paragraphe 2, sous a), de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, puisqu’elle contient des éléments spécifiant les raisons pour lesquelles ce critère est applicable au requérant. Ainsi, ladite motivation précise que le requérant a des intérêts et des activités dans différents secteurs de l’économie syrienne et mentionne les intérêts qu’il possède au sein de HESCO, ce qui suffit à expliquer en quoi le requérant est « influent » dans cette dernière société. De plus, HESCO est décrite comme une importante société d’ingénierie et de construction, ce qui permet au requérant de comprendre la raison pour laquelle le Conseil considère qu’il a des intérêts ou exerce des activités dans ces secteurs.

119    À cet égard, le fait que le Conseil n’ait pas exposé de manière détaillée les « intérêts » du requérant ni la manière dont il exerce une « influence considérable » au sein de HESCO ne saurait conduire à constater une violation de l’obligation de motivation qui lui incombe dès lors que, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 113 et 114 ci-dessus, le Conseil n’est pas tenu de spécifier tous les éléments de fait et de droit pertinents et que le requérant a été mis en mesure de comprendre la portée de la mesure prise à son égard.

120    En revanche, ainsi que l’a indiqué le requérant, la motivation des actes attaqués ne permet pas de déterminer les sociétés et les entités en Syrie, hormis HESCO, dans lesquelles il aurait des intérêts ou exercerait une influence considérable. En outre, une telle identification n’est pas non plus possible à la lecture des autres décisions et règlements d’exécution ayant inscrit ou maintenu le nom du requérant sur les listes en cause ou des lettres échangées entre le Conseil et les représentants du requérant. Dès lors, la référence vague et générale aux intérêts du requérant et à son influence considérable dans ces sociétés et entités en Syrie ne saurait être prise en considération pour justifier ou contribuer à justifier l’inscription de son nom sur les listes en cause (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2013, Nabipour e.a./Conseil, T‑58/12, non publié, EU:T:2013:640, point 64).

121    Néanmoins, dès lors qu’il ne s’agit pas de la seule raison pour laquelle le Conseil estime que le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, mais que d’autres éléments ont été avancés de manière suffisamment concrète et précise dans la motivation des actes attaqués, la constatation effectuée au point 120 ci-dessus ne permet pas de considérer que les actes attaqués sont entachés d’une insuffisance de motivation de nature à entraîner leur annulation (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2013, Nabipour e.a./Conseil, T‑58/12, non publié, EU:T:2013:640, point 65).

122    Partant, il convient de rejeter le premier moyen.

–       Sur le troisième moyen, tiré de l’erreur d’appréciation et de l’absence de preuves

123    À l’appui de son troisième moyen, le requérant considère qu’il convient de distinguer entre, d’une part, les allégations telles que rapportées dans les décisions et règlements antérieurs au 10 juillet 2017 et celles figurant dans les décisions et règlements postérieurs au 10 juillet 2017.

124    En premier lieu, le requérant fait valoir à cet égard, en ce qui concerne les allégations telles qu’elles sont rapportées dans les décisions et règlements antérieurs au 10 juillet 2017, que, en substance, le Tribunal a jugé, dans l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), que les éléments apportés par le Conseil ne constituaient pas un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants pour établir, à suffisance de droit, le bien-fondé des motifs retenus contre lui. Le requérant en déduit que tant les allégations relatives aux liens étroits avec le régime que celles se rapportant à son prétendu rôle d’intermédiaire dans le cadre de transactions pétrolières entre le régime syrien et l’« État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL) », également connu sous le nom de Daech, doivent être définitivement rejetées. Le requérant relève que le Conseil a d’ailleurs procédé à la suppression de ces allégations lorsqu’il a adopté de nouveaux motifs le 10 juillet 2017.

125    En deuxième lieu, en ce qui concerne les allégations telles qu’elles sont rapportées dans les décisions et règlements postérieurs au 10 juillet 2017, le requérant soutient, en substance, que le Conseil n’a pas apporté d’éléments concrets, précis et concordants permettant de déterminer une base factuelle suffisante pour étayer les motifs justifiant le maintien de son nom sur les listes en cause. Le requérant précise que le Conseil n’a pas établi, premièrement, la preuve de ses intérêts et de son implication dans plusieurs sociétés, deuxièmement, la preuve de son caractère « influent », ni celle de l’« influence considérable » qu’il exercerait dans plusieurs sociétés et entités, de sorte que la seule référence à HESCO, sans articuler de façon précise et concrète la réalité, la nature et la portée de son rôle, ne répondrait pas aux exigences requises en matière de preuves.

126    En troisième lieu, le requérant estime que les simples rumeurs d’ordre médiatique ou d’essence politique doivent être catégoriquement rejetées, car elles ne peuvent pallier les insuffisances et les défaillances au regard des exigences en matière de preuves dans un système de droit relevant d’institutions démocratiques.

127    Le Conseil conteste les arguments du requérant.

128    À titre liminaire, il convient de rappeler que l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte exige notamment que le juge de l’Union s’assure que la décision par laquelle des mesures restrictives ont été adoptées ou maintenues, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernées, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119).

129    À cette fin, il incombe au juge de l’Union de procéder à cet examen en demandant, le cas échéant, à l’autorité compétente de l’Union de produire des informations ou des éléments de preuve, confidentiels ou non, pertinents aux fins d’un tel examen (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 120 et jurisprudence citée).

130    C’est en effet à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernées, et non à ces dernières d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 121).

131    À cette fin, il n’est pas requis que ladite autorité produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués dans l’acte dont l’annulation est demandée. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étayent les motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernées (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 122).

132    Si l’autorité compétente de l’Union fournit des informations ou des éléments de preuve pertinents, le juge de l’Union doit vérifier l’exactitude matérielle des faits allégués au regard de ces informations ou éléments et apprécier la force probante de ces derniers en fonction des circonstances de l’espèce et à la lumière des éventuelles observations présentées, notamment, par la personne ou l’entité concernées à leur sujet (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 124).

133    Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’appréciation du bien-fondé d’une inscription doit être effectuée en examinant les éléments de preuve non pas de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent (voir, en ce sens, arrêts du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 51, et du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 50).

134    En l’espèce, ainsi qu’il a été mentionné au point 26 ci-dessus, le motif de maintien du nom du requérant sur les listes en cause est rédigé dans les termes suivants :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et/ou activités dans les secteurs de l’ingénierie, de la construction, du pétrole et du gaz. Il détient des intérêts et/ou exerce une influence considérable dans plusieurs sociétés et entités en Syrie, en particulier HESCO Engineering and Construction Company, importante société d’ingénierie et de construction. »

135    Autrement dit, l’inscription du nom du requérant est fondée sur le critère défini au paragraphe 2, sous a), de l’article 27 et de l’article 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et au paragraphe 1 bis, sous a), de l’article 15 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, à savoir le critère de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

136    Dans un premier temps, dès lors que le maintien du nom du requérant sur les listes en cause, tel qu’il est prévu par les actes attaqués, n’est fondé que sur son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, les arguments avancés par le requérant afin de contester son lien avec le régime syrien en raison de son rôle d’intermédiaire dans les transactions pétrolières entre l’EIIL et le régime syrien, tels qu’ils apparaissaient dans les motifs d’inscription antérieurs au 10 juillet 2017, doivent être rejetés comme étant inopérants.

137    Dans un deuxième temps, il convient de relever que la référence aux « sociétés et entités en Syrie », hormis HESCO, dans lesquelles le requérant aurait des intérêts ou exercerait une influence considérable ayant été considérée, au point 120 ci-dessus, comme étant trop vague et générale pour justifier ou contribuer à justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, il n’y a pas lieu d’examiner si le Conseil a apporté des éléments de preuve permettant d’étayer cet aspect du motif d’inscription.

138    Dans un troisième temps, s’agissant des éléments de preuve produits par le Conseil afin de justifier le maintien du nom du requérant sur les listes en cause, il convient de noter qu’il s’agit d’éléments d’information publiquement accessibles, à savoir des liens, des articles de presse et des captures d’écran provenant :

–        du site Internet de HESCO, consulté le 16 octobre 2017, identifiant le requérant comme étant le président du conseil d’administration de cette société, présentant ladite société comme étant une des principales sociétés d’ingénierie, de sous-traitance et de construction en Syrie, établie en 1990, exécutant d’importants projets en Syrie et à l’étranger et dont les clients appartenant au secteur public sont Syrian Petroleum Company, Syrian Gas Company, Al Furat Petroleum Company, Mahrukat Company et six ministères du gouvernement syrien dont le ministère de la Défense, et décrivant sa participation en tant que sous-traitant de la société russe Stroytransgaz dans un projet gazier de grande ampleur développé en Syrie ;

–        du site Internet « The Japan Times », qui, dans un article du 7 décembre 2015 intitulé « Islamic State’s Raqqa bastion bombed » (Le bastion de Raqqa de l’État islamique bombardé), fait référence au requérant comme étant le copropriétaire de HESCO, décrite comme une importante société d’ingénierie et de construction en Syrie ;

–        du site Internet « The Syria Report », qui mentionne, sur une page du 8 juillet 2012, que le requérant est le président du conseil d’administration de HESCO, elle-même présentée comme une société d’ingénierie et de construction impliquée dans des projets tels que la construction d’un pipeline en Jordanie ou des postes de collecte de gaz dans la région de Palmyre (Syrie) pour la Syrian Petroleum Company, et qui reprend, dans un article consulté le 1er novembre 2017 et intitulé « Stroytransgaz Still Operating in Syria – Minister » (Stroytransgaz toujours en activité en Syrie – Ministre), une déclaration faite par un ministre syrien en 2014 selon laquelle Stroytransgaz continuait d’exercer des activités en Syrie et s’était vu confier par le régime syrien la construction d’une installation de traitement de gaz ;

–        du site Internet « Factiva », qui indique, sur une page consultée le 12 juillet 2016, que le requérant est un haut dirigeant de HESCO ;

–        du site Internet « Ariba Discovery », qui présente, sur une page du 27 mai 2014, HESCO comme une entreprise de taille significative opérant dans les secteurs du gaz, du pétrole et de la construction, employant 1 150 personnes et dont le chiffre d’affaires se situe entre 100 et 500 millions de dollars (USD) ;

–        du site Internet « The Economist », qui mentionne, dans un article du 27 avril 2015 intitulé « Oil output falls below 10,000 b/d » (La production de pétrole tombe en dessous de 10 000 b/j), HESCO comme participant à un projet gazier en Syrie avec Stroytransgaz ;

–        du site Internet « Hydrocarbon Technology », qui fait référence, sur une page du 3 février 2016, au projet gazier en Syrie dans lequel HESCO agit en tant que sous-traitant de Stroytransgaz ;

–        du site Internet « Inform Napalm », qui, dans un article du 21 mai 2016 intitulé « Russia’s economy interests behind its risky military move in Syria » (Les intérêts économiques de la Russie derrière son mouvement militaire risqué en Syrie), fait référence à HESCO comme étant la principale sous-traitante de Stroytransgaz pour les projets gaziers et d’irrigation en Syrie, s’étant vu attribuer la construction d’un gazoduc arabe d’une longueur de 319 kilomètres, et dont le directeur est le requérant ;

–        du site Internet « The NewArab », qui fait état, dans un article du 15 février 2016 intitulé « Assad preparing to handover Syria’s energy sector to Russia » (Assad s’apprêtant à céder le secteur de l’énergie syrien à la Russie), du lien entre la Fédération de Russie et la République arabe syrienne dans l’exploitation du secteur gazier en Syrie ;

–        du site Internet « Business Insider », qui identifie, dans un article du 7 mars 2015 intitulé « More details about the Syrian Christian businessman serving as Assad’s liaison to ISIS » (Plus de détails sur l’homme d’affaires chrétien syrien servant de liaison à Assad avec l’État islamique), HESCO comme étant la sous-traitante de Stroytransgaz et comme travaillant conjointement dans des projets à Palmyre, au Soudan, en Algérie, dans les Émirats arabes unis ou en Iraq et qui indique que le requérant, par le biais de sa société HESCO, a livré des pièces de rechange aux véhicules militaires russes et leur a fourni du pétrole ;

–        du site Internet « Le Monde », qui mentionne, dans un article du 26 février 2016 intitulé « En Syrie, le régime, la Russie et l’État islamique unis pour exploiter un champ de gaz », d’une part, le fait que la Syrie a accordé le contrat de la construction de l’une des plus grandes installations gazières du pays à Stroytransgaz, épaulée par HESCO, propriété du requérant, et, d’autre part, le fait que le requérant est très proche de M. Al-Assad ;

–        du site Internet « Financial Times », qui publie, dans un article du 15 octobre 2015 intitulé « ISIS Inc : Syria’s “mafia-style” gas deals with jihadis » (État islamique Inc : le gaz « mafieux » de la Syrie fait des affaires avec les djihadistes), un rapport détaillé sur l’installation de traitement de gaz de Tuweinan en octobre 2015, selon lequel le site est en partie géré par HESCO et selon lequel les approvisionnements en gaz alimentent 90 % du réseau électrique de Syrie, dont dépend le régime de M. Al-Assad ;

–        du site Internet de l’organisation non gouvernementale (ONG) Counter Extremism Project, qui, dans une lettre adressée au requérant du 6 mars 2015, faisait état de ses inquiétudes quant à son rôle supposé d’intermédiaire dans les transactions pétrolières entre l’EIIL et le régime syrien et l’implication de sa société HESCO ;

–        du site Internet de HESCO Engineering and Construction Company Ltd, basée à Londres (Royaume-Uni), qui présente, sur une page consultée le 3 février 2016, le requérant comme ayant été le directeur de cette société, qui indique que l’entreprise poursuit ses activités, qu’elle dispose de 2,04 millions de livres sterling (GPB) d’actifs et que ses dossiers au registre du commerce sont à jour et qui propose d’acheter son rapport de solvabilité ;

–        de la base de données commerciales en ligne Companies House, qui mentionne, sur une page de novembre 2014 et sur une page consultée le 16 octobre 2017, le fait que le requérant n’est plus le directeur de HESCO Engineering and Construction Company Ltd depuis le 20 octobre 2014 ;

–        de la base de données commerciales en ligne Trusted Numbers, qui, sur une page consultée le 11 juillet 2016, indique une même adresse pour HESCO et HESCO Engineering and Construction Company Ltd ;

–        de la base de données commerciales en ligne Data Rex, qui mentionne, sur une page consultée le 11 juillet 2017, le requérant comme étant le directeur de HESCO ;

–        du site Internet de l’United States Department of the Treasury (département du Trésor des États-Unis), qui a relayé, le 25 novembre 2015, l’inscription du nom du requérant ainsi que de HESCO et de son alias, HESCO Engineering and Construction Company Ltd, sur l’« Office of Foreign Assets Control’s Specially Designated Nationals And Blocked Persons List » (Liste du bureau du contrôle des avoirs étrangers des ressortissants et des personnes bloquées spécialement désignés).

139    En outre, le Conseil a également produit la réponse du requérant, du 23 mars 2015, à la lettre de l’ONG Counter Extremism Project qui lui avait été adressée le 6 mars 2015. Dans cette lettre, le requérant définissait HESCO comme une société d’ingénierie et de construction spécialisée dans l’industrie du pétrole et du gaz, travaillant dans ce secteur depuis quinze ans en tant que sous-traitant, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du territoire syrien. Ainsi, il a mentionné les partenariats de HESCO avec deux entreprises russes, dont Stroytransgaz, l’ayant amenée à opérer, notamment, en Algérie, au Soudan ou encore aux Émirats arabes unis. Quant à la filiale de HESCO, basée à Londres, le requérant a indiqué qu’elle concluait des contrats pour l’obtention de matériaux divers afin de réaliser les projets de construction de HESCO. En revanche, il niait tout commerce lié à l’achat ou à la revente dans les secteurs pétroliers et gaziers. En outre, il a soutenu, en substance, que l’allégation selon laquelle il jouerait le rôle d’intermédiaire, avec sa société HESCO, entre l’EIIL et le régime syrien se fonderait uniquement sur leur travail dans un projet gazier, dont il déplorait le contrôle par l’EIIL. Il a cependant indiqué qu’il n’achetait pas de pétrole à ce dernier au profit du régime syrien.

140    En premier lieu, le requérant remet en cause la possibilité pour le Conseil de se prévaloir de preuves émanant de sources journalistiques ou politiques afin d’étayer les motifs d’inscription et en conteste, en substance, la fiabilité.

141    À cet égard, tout d’abord, il convient de rappeler que, dans le cadre de l’appréciation de la gravité de l’enjeu, qui fait partie du contrôle de la proportionnalité des mesures restrictives en cause, il peut être tenu compte du contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures, du fait qu’il était urgent d’adopter de telles mesures ayant pour objet de faire pression sur le régime syrien afin qu’il arrête la répression violente dirigée contre la population et de la difficulté d’obtenir des preuves plus précises dans un État en situation de guerre civile doté d’un régime de nature autoritaire (arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 46).

142    Ensuite, il y a lieu de relever que, en l’absence de pouvoirs d’enquête dans des pays tiers, l’appréciation des autorités de l’Union doit, de fait, se fonder sur des sources d’information accessibles au public, des rapports, des articles de presse ou d’autres sources d’information similaires (voir arrêt du 12 février 2020, Kibelisa Ngambasai/Conseil, T‑169/18, non publié, EU:T:2020:58, point 96 et jurisprudence citée).

143    Enfin, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, l’activité de la Cour et du Tribunal est régie par le principe de libre appréciation des preuves et que le seul critère pour apprécier la valeur des preuves produites réside dans leur crédibilité. En outre, pour apprécier la valeur probante d’un document, il faut vérifier la vraisemblance de l’information qu’il contient et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration et de son destinataire et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable (voir, en ce sens, arrêt du 27 septembre 2012, Shell Petroleum e.a./Commission, T‑343/06, EU:T:2012:478, point 161 et jurisprudence citée).

144    En l’espèce, d’une part, contrairement à ce que soutient le requérant, le Conseil ne s’est pas fondé exclusivement sur des articles de presse ou sur des documents émanant de sources politiques, mais a également produit des captures d’écran provenant du site Internet de HESCO, du site Internet de HESCO Engineering and Construction Company Ltd, des bases de données commerciales Companies House, Trusted Numbers et Data Rex, du site Internet du département du Trésor des États-Unis. Le Conseil s’est également fondé sur une lettre adressée par l’ONG Counter Extremism Project au requérant et sur la réponse de ce dernier à ladite lettre.

145    D’autre part, concernant la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil, le requérant n’avance pas d’argument spécifique à cet égard, soutenant seulement qu’ils ne peuvent pallier les insuffisances et les défaillances au regard des exigences en matière de preuves dans un système de droit relevant d’institutions démocratiques, sans expliciter les insuffisances et les défaillances reprochées.

146    En tout état de cause, il convient de constater que les articles de presse émanent de sources d’informations numériques d’origines variées, non seulement locales, comme « The Syria Report », mais également étrangères, telles que « The Japan Times », « The Economist », « Inform Napalm », « Le Monde » ou encore « Financial Times ». En outre, ainsi qu’il a été signalé au point 144 ci-dessus, le Conseil a produit des pages provenant du site Internet de HESCO, dont le requérant ne conteste pas être le président du conseil d’administration, du site Internet du département du Trésor des États-Unis et de bases de données commerciales, relayant des informations dépourvues de toute appréciation journalistique, et également une lettre adressée par l’ONG Counter Extremism Project au requérant et la réponse de ce dernier à ladite lettre. Il convient encore de remarquer que ces différentes sources relayent des éléments d’information qui se corroborent. Enfin, il a déjà été jugé que, même si les éléments de preuve soumis par le Conseil n’indiquaient pas tous de manière expresse la source primaire de leurs informations, la situation de guerre en Syrie rendait, en pratique, difficile, voire impossible, le recueil de témoignages de la part de personnes acceptant d’être identifiées. Les difficultés d’investigation qui s’ensuivent et le danger auquel s’exposent ceux qui livrent des renseignements font obstacle à ce que des sources précises faisant état de comportements personnels de soutien au régime soient apportées (arrêt du 26 octobre 2016, Kaddour/Conseil, T‑155/15, non publié, EU:T:2016:628, point 87).

147    Ainsi, au vu de ce qui précède, et en l’absence d’élément dans le dossier susceptible de remettre en cause la fiabilité des sources utilisées par le Conseil, il convient de leur reconnaître un caractère sensé et fiable, au sens de la jurisprudence rappelée au point 143 ci-dessus.

148    En second lieu, il convient de vérifier si l’ensemble des éléments de preuve soumis par le Conseil constitue un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants pour étayer le motif d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause.

149    Premièrement, il convient de relever qu’il ressort de la quasi-totalité des éléments de preuve décrits aux points 138 et 139 ci-dessus et soumis par le Conseil que le requérant a fondé HESCO, société active dans le secteur de l’ingénierie et de la construction pétrolière et gazière, et qu’il en est copropriétaire. En particulier, ces éléments d’information se trouvent sur la page extraite du site Internet de HESCO elle-même, mais également sur la page extraite de la base de données commerciales Data Rex et sont confirmés par des articles émanant de différents sites Internet tels que « The Syria Report », « Le Monde » ou encore « The Japan Times ». En outre, il importe de relever que ces éléments d’information sont corroborés par la réponse du requérant à la lettre de l’ONG Counter Extremism Project et que, dans le cadre de la requête, le requérant ne nie pas son implication au sein de HESCO.

150    Deuxièmement, il y a lieu de noter que la quasi-totalité des preuves énumérées aux points 138 et 139 ci-dessus indique que HESCO est une société active dans le secteur de l’ingénierie et de la construction opérant dans les secteurs du gaz et du pétrole, ayant son siège à Damas (Syrie) et développant des projets de grande importance au Moyen-Orient. En particulier, ces éléments d’information sont mis en avant sur le site Internet de HESCO qui se décrit comme étant l’une des principales sociétés d’ingénierie, de sous-traitance et de construction en Syrie, établie en 1990, exécutant d’importants projets en Syrie et à l’étranger. À cet égard, le site Internet de HESCO mentionne un projet gazier de grande ampleur réalisé en Syrie pour le compte de la société Syrian Gas Company, en tant que sous-traitant de la société russe Stroytransgaz. Cet élément d’information est d’ailleurs confirmé par les articles émanant des sites Internet « The Economist » et « Le Monde », tandis que de nombreux autres articles, comme ceux provenant des sites Internet « The Syria Report », « Inform Napalm », « The NewArab » et « Financial Times », relayent l’information relative à la place importante occupée par HESCO dans le secteur gazier et font référence à d’autres projets auxquels ladite société participe. De plus, il convient de noter que l’extrait du site Internet « Ariba Discovery » présente HESCO comme étant une société de taille significative dont le chiffre d’affaires se situe entre 100 et 500 millions d’USD et employant 1 150 personnes. Enfin, il importe de relever que ces éléments d’information sont corroborés par la réponse du requérant à la lettre de l’ONG Counter Extremism Project.

151    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que le Conseil a apporté un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants susceptible de mettre en évidence le fait que le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie en raison du rôle qu’il exerce et des intérêts qu’il possède dans HESCO, importante société d’ingénierie et de construction.

152    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments avancés par le requérant.

153    Premièrement, le requérant ne saurait soutenir que le Conseil n’a pas démontré l’influence considérable qu’il était susceptible d’avoir au sein de HESCO dès lors qu’il ressort très clairement de l’ensemble des preuves fournies, y compris les propos mêmes du requérant, qu’il est le copropriétaire de cette société et en est le président du conseil d’administration. Dans la mesure où, en outre, HESCO jouit d’une place particulière dans l’industrie pétrolière et gazière en tant que société spécialisée en ingénierie et en construction dans ces secteurs, le Conseil était fondé à considérer que le requérant avait des intérêts et des activités dans les secteurs de l’ingénierie, de la construction, du pétrole et du gaz. Enfin, HESCO elle-même se prévaut, sur son site Internet, d’être l’une des principales entreprises d’ingénierie, de construction et de sous-traitance en Syrie, de sorte que le requérant ne saurait être autrement considéré que comme un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

154    Deuxièmement, le requérant nie l’existence d’un lien entre lui et le régime syrien en raison de son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. Il convient de comprendre l’argument du requérant comme visant à renverser la présomption de lien existant entre lui et le régime syrien.

155    En ce sens, il entend se prévaloir, d’une part, des conclusions du Tribunal dans l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200). En effet, selon le requérant, cet arrêt aurait établi de manière définitive qu’aucun lien n’existait entre lui et le régime syrien. D’autre part, le requérant invoque l’arrêt du 12 février 2015, Akhras/Conseil (T‑579/11, non publié, EU:T:2015:97, point 69), qui aurait reconnu que la direction d’une activité commerciale et industrielle ne suffisait pas à établir un lien avec le régime.

156    À cet égard, il convient de relever que l’arrêt du 12 février 2015, Akhras/Conseil (T‑579/11, non publié, EU:T:2015:97), a été rendu dans un contexte législatif différent de celui existant au moment de l’adoption des actes attaqués en l’espèce. En particulier, il s’inscrivait dans un contexte législatif spécifique, à savoir celui résultant de la décision 2013/255 avant sa modification en 2015 par la décision 2015/1836, où les seuls critères qui existaient pour l’inscription du nom d’une personne sur les listes en cause étaient, précisément, les liens étroits entretenus avec le régime syrien, le soutien à ce dernier ou le bénéfice tiré de celui-ci.

157    Toutefois, en l’espèce, l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause a eu lieu dans le contexte législatif résultant de la décision 2013/255 telle que modifiée par la décision 2015/1836. À ce titre, la décision 2015/1836 a notamment introduit comme critère d’inscription objectif, autonome et suffisant celui des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie », de sorte que le Conseil n’est plus tenu de démontrer l’existence d’un lien entre cette catégorie de personnes et le régime syrien, au sens où l’entendait la décision 2013/255 avant sa modification, ni non plus entre cette catégorie de personnes et le soutien apporté à ce régime ou le bénéfice tiré de ce dernier, étant donné qu’être une femme ou un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie suffit pour l’application des mesures restrictives en cause à une personne [voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil, C‑241/19 P, EU:C:2020:545, points 66 et 74 ; du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, points 55 et 56 (non publiés), et ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil, T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, point 56].

158    En ce sens, le Tribunal a considéré qu’il pouvait être déduit du critère relatif à la qualité de « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » une présomption réfragable de lien avec le régime syrien (voir, en ce sens, arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 106, et ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil, T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, point 60). Cette présomption trouve à s’appliquer dès lors que le Conseil est en mesure de démontrer non seulement que la personne est une femme ou un homme d’affaires exerçant ses activités en Syrie, mais aussi qu’elle peut être qualifiée d’influente. En effet, ainsi qu’il ressort des termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, tels qu’ils sont rappelés au point 14 ci-dessus, c’est l’influence que cette catégorie de personnes est susceptible d’exercer sur le régime syrien que le Conseil vise à exploiter en les poussant, par l’intermédiaire des mesures restrictives qu’il adopte à leur égard, à faire pression sur le régime syrien pour qu’il modifie sa politique de répression. Ainsi, dès lors que le Conseil est parvenu à démontrer l’influence qu’une femme ou un homme d’affaires est susceptible d’exercer sur ledit régime, le lien entre ladite personne et le régime syrien est présumé.

159    Par conséquent, il convient également de rejeter l’argument du requérant visant à contester le caractère suffisant de la présomption de lien entre la qualité de « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » et le régime syrien. En effet, cet argument prend appui sur un courant de jurisprudence, auquel appartient l’arrêt du 12 février 2015, Akhras/Conseil (T‑579/11, non publié, EU:T:2015:97), qui n’est plus pertinent dans le cadre du contexte législatif des actes attaqués. De plus, force est de constater que le requérant n’a pas contesté la légalité du critère d’inscription prévu à l’article 27, paragraphe 2, sous a), et à l’article 28, paragraphe 2, sous a), de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, dans ses écritures. Il ne saurait non plus être déduit de son argument, visant à faire valoir que la décision d’exécution 2017/1245 et le règlement d’exécution 2017/1241, qui reprennent les critères de la décision 2015/1836, méconnaissent le principe de sécurité juridique, qu’il entend soulever une exception d’illégalité, conformément à l’article 277 TFUE, à l’encontre de l’article 27, paragraphe 2, sous a), et de l’article 28, paragraphe 2, sous a), de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836. En effet, par cet argument, il entend contester le bien-fondé des actes attaqués qui, selon lui, ne lui permettent pas de savoir pour quelles activités il pourrait être sanctionné et ne soutient pas que la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, devrait être déclarée inapplicable à son égard.

160    En outre, il y a lieu de rappeler que le respect des règles relatives à la charge et à l’administration de la preuve en matière de mesures restrictives par le Tribunal implique que ce dernier respecte le principe énoncé par la jurisprudence mentionnée au point 130 ci-dessus et rappelé par la Cour dans l’arrêt du 11 septembre 2019, HX/Conseil (C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, points 48 à 50), selon lequel, en substance, la charge de la preuve incombe à l’institution en cas de contestation du bien-fondé des motifs d’inscription. La Cour a ainsi jugé que la charge de la preuve de l’existence d’informations suffisantes, au sens de l’article 27, paragraphe 3, et de l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, indiquant que la partie requérante n’était pas, ou n’était plus, liée au régime syrien, qu’elle n’exerçait aucune influence sur celui-ci et qu’elle n’était pas associée à un risque réel de contournement des mesures restrictives adoptées à l’égard de ce régime n’incombait pas à la partie requérante (voir, en ce sens, arrêts du 14 juin 2018, Makhlouf/Conseil, C‑458/17 P, non publié, EU:C:2018:441, point 86, et du 11 septembre 2019, HX/Conseil, C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, points 50 et 51).

161    Par conséquent, il ne saurait être imposé à la partie requérante un niveau de preuve excessif aux fins de renverser la présomption de lien avec le régime syrien. Ainsi, la partie requérante doit être considérée comme ayant réussi à renverser ladite présomption si elle fait valoir des arguments ou des éléments susceptibles de remettre sérieusement en cause la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil ou leur appréciation, notamment au regard des conditions posées par l’article 27, paragraphe 3, et l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ou si elle produit devant le juge de l’Union un faisceau d’indices de l’inexistence ou de la disparition du lien avec ledit régime, de l’absence d’influence sur ledit régime ou de l’absence d’association à un risque réel de contournement des mesures restrictives, conformément à l’article 27, paragraphe 3, et à l’article 28, paragraphe 3, de cette décision.

162    En l’espèce, force est de constater que le requérant ne se fonde que sur l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), pour renverser cette présomption.

163    Or, son argument ne saurait prospérer dès lors qu’il part de la prémisse erronée que l’annulation par le Tribunal de décisions en matière de mesures restrictives adoptées par le Conseil aurait pour conséquence que ce dernier ne puisse plus adopter de nouvelles mesures pour les mêmes motifs. Au contraire, il ressort de la jurisprudence que le Conseil a la possibilité de réinscrire le nom du requérant sur les listes en cause sur la base des mêmes motifs que ceux retenus lors de la première inscription pour autant, toutefois, que d’autres éléments de preuve que ceux apportés par le Conseil lors de la première inscription étayent à suffisance de droit lesdits motifs (voir, en ce sens, arrêts du 29 novembre 2018, National Iranian Tanker Company/Conseil, C‑600/16 P, EU:C:2018:966, points 45, 52 et 54, et du 31 mai 2018, Kaddour/Conseil, T‑461/16, EU:T:2018:316, points 57, 69 et 83).

164    Il convient de déduire de cette jurisprudence que l’annulation de la décision d’exécution 2015/383, du règlement d’exécution 2015/375, de la décision 2015/837 et du règlement d’exécution 2015/828 prononcée par l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), n’empêchait pas le Conseil, lors de l’exécution de cet arrêt, de se fonder, à nouveau, sur l’existence d’un lien entre le requérant et le régime syrien pour réinscrire et maintenir son nom sur les listes en cause, dès lors que de nouveaux éléments de preuve substantiels auraient été présentés afin d’étayer à suffisance de droit celle-ci.

165    En l’espèce, il y a lieu de relever que les éléments de preuve invoqués par le Conseil au soutien des actes attaqués sont distincts de ceux qui avaient été soumis au Tribunal dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200). En effet, le Conseil invoque à l’appui de sa décision de maintien de nouvelles pièces qui ne figuraient pas dans le dossier du requérant lors de la première inscription de son nom sur les listes en cause et sur lesquelles le Tribunal n’a dès lors pas statué dans l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200). Or, ainsi qu’il résulte du point 151 ci-dessus, les éléments de preuve produits par le Conseil sont suffisants pour étayer à suffisance de droit le motif d’inscription tiré de la qualité d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, qui présume l’existence d’un lien avec le régime syrien. Dès lors, le requérant ne saurait se prévaloir de l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), pour renverser la présomption de lien avec le régime syrien en l’espèce et aurait dû apporter des indices de nature à la renverser, ce qu’il n’a pas fait.

166    Au vu de tout ce qui précède, il convient de constater que le requérant n’a présenté aucun argument ni élément permettant de douter de la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil ou de l’appréciation qu’il convenait d’en faire, ni n’a fait état d’aucun indice concret permettant au Tribunal de considérer qu’il n’existait pas, ou plus, de lien entre lui et le régime syrien, qu’il n’exerçait aucune influence sur ce régime ni qu’il était étranger à tout risque réel de contournement des mesures restrictives.

167    Partant, il convient de rejeter le troisième moyen.

–       Sur le deuxième moyen, tiré de la violation du principe de proportionnalité

168    À l’appui de son deuxième moyen, le requérant fait valoir, en substance, que les mesures restrictives prises à son égard sont disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi, à savoir la lutte contre la répression exercée par le régime syrien, d’autant plus que l’effet positif pour la population exposée ne saurait être observé en l’absence de lien, établi avec suffisance, avec le régime syrien. En particulier, elles constitueraient une ingérence injustifiée à l’exercice de ses droits fondamentaux, tels que consacrés aux articles 15 à 17 de la Charte. En outre, le caractère disproportionné de telles mesures découlerait de ce qu’elles visent toute activité économique influente sans autre critère. Enfin, le requérant considère que la motivation indistincte des mesures restrictives équivaudrait à une prohibition générale des activités économiques en Syrie.

169    Le Conseil conteste les arguments du requérant.

170    Il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que les droits fondamentaux invoqués par le requérant, à savoir le droit de propriété, consacré par l’article 17 de la Charte, et la liberté d’exercer une activité économique, consacrée par les articles 15 et 16 de la Charte, ne sont pas des prérogatives absolues et que leur exercice peut faire l’objet de restrictions justifiées par des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union. Ainsi, toute mesure restrictive économique ou financière comporte, par définition, des effets qui affectent le droit de propriété et l’activité économique de la personne ou de l’entité qu’elle vise, causant ainsi des préjudices à cette dernière. L’importance des objectifs poursuivis par les mesures restrictives en cause est toutefois de nature à justifier des conséquences négatives, même considérables, pour les personnes ou les entités concernées (voir, en ce sens, arrêt du 25 mars 2015, Central Bank of Iran/Conseil, T‑563/12, EU:T:2015:187, point 115).

171    En outre, il résulte d’une jurisprudence constante que le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union et qui est repris à l’article 5, paragraphe 4, TUE, exige que les moyens mis en œuvre par une disposition du droit de l’Union soient aptes à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation concernée et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre lesdits objectifs (arrêts du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 122 ; du 25 juin 2015, Iranian Offshore Engineering & Construction/Conseil, T‑95/14, EU:T:2015:433, point 60, et du 14 mars 2017, Bank Tejarat/Conseil, T‑346/15, non publié, EU:T:2017:164, point 149).

172    De plus, si le respect des droits fondamentaux constitue une condition de la légalité des actes de l’Union, selon une jurisprudence constante, ces droits fondamentaux ne jouissent pas, en droit de l’Union, d’une protection absolue, mais doivent être pris en considération par rapport à leur fonction dans la société. Par conséquent, des restrictions peuvent être apportées à l’usage de ces droits, à condition qu’elles répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même des droits ainsi garantis (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 97 et jurisprudence citée).

173    Certes, les droits du requérant sont restreints en partie du fait des mesures restrictives prises à son égard, dès lors qu’il ne peut pas, notamment, disposer de ses fonds éventuellement situés sur le territoire de l’Union, ni les transférer vers l’Union, sauf en vertu d’autorisations particulières. De même, les mesures visant le requérant peuvent avoir un impact sur ses activités professionnelles en raison des mêmes motifs et des limitations prévues quant à l’entrée ou au passage en transit sur le territoire de l’Union.

174    Cependant, en l’occurrence, l’adoption de mesures restrictives à l’encontre du requérant revêt un caractère adéquat, dans la mesure où elle s’inscrit dans un objectif d’intérêt général aussi fondamental pour la communauté internationale que la protection des populations civiles. En effet, le gel de fonds, d’avoirs financiers et d’autres ressources économiques ainsi que l’interdiction d’entrer sur le territoire de l’Union concernant des personnes identifiées comme étant impliquées dans le soutien du régime syrien ne sauraient, en tant que tels, passer pour inadéquats (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 100 et jurisprudence citée).

175    À cet égard, il convient de rappeler que, si les mesures restrictives en cause ne visaient que les dirigeants du régime syrien, et non également les personnes soutenant ce régime, la réalisation des objectifs poursuivis par le Conseil aurait pu être mise en échec, ces dirigeants pouvant facilement obtenir le soutien, notamment financier, dont ils avaient besoin pour poursuivre ladite répression, par le biais d’autres personnes occupant de hautes fonctions de direction au sein des principales institutions de l’État syrien (arrêt du 5 novembre 2014, Mayaleh/Conseil, T‑307/12 et T‑408/13, EU:T:2014:926, point 147). Ainsi, dès lors qu’il a été établi que le requérant était un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie et qu’il n’avait pas renversé la présomption de lien avec le régime syrien, il ne saurait soutenir que l’adoption de mesures restrictives à son égard ne pourrait pas avoir un effet positif afin d’atteindre l’objectif défini au point 174 ci-dessus.

176    Quant au caractère prétendument disproportionné du maintien du nom du requérant sur les listes en cause, force est de rappeler que l’article 28, paragraphes 6 et 7, de la décision 2013/255, dans sa version modifiée, prévoit la possibilité, d’une part, d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins fondamentaux ou satisfaire à certains engagements et, d’autre part, d’accorder des autorisations spécifiques permettant de dégeler des fonds, d’autres avoirs financiers ou d’autres ressources économiques (voir, par analogie, arrêts du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 364, et du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 127).

177    En outre, il convient de prendre en considération le fait que le maintien du nom du requérant sur les listes en cause ne saurait être qualifié de disproportionné en raison de son prétendu caractère potentiellement illimité. En effet, ce maintien fait l’objet d’un réexamen périodique (au moins annuel) en vue d’assurer que les personnes et entités ne répondant plus aux critères pour figurer sur lesdites listes en soient radiées (voir, par analogie, arrêts du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 365, et du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 129).

178    Enfin, il convient de rappeler que l’importance des objectifs poursuivis par les actes attaqués est de nature à justifier que ceux-ci aient pu avoir des conséquences négatives, même considérables, pour le requérant sans que cela affecte leur légalité (voir, par analogie, arrêt du 27 février 2014, Ezz e.a./Conseil, T‑256/11, EU:T:2014:93, point 191).

179    Il en résulte que, étant donné l’importance primordiale du maintien de la paix et de la sécurité internationales, les restrictions aux droits du requérant éventuellement causées par les actes attaqués sont justifiées par un objectif d’intérêt général et ne sont pas disproportionnées au regard des buts visés.

180    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen et, partant, les conclusions en annulation dans leur ensemble comme étant, pour partie, irrecevables et, pour partie, non fondées.

 Sur les conclusions indemnitaires

181    Premièrement, le requérant demande la réparation du préjudice qu’il prétend avoir subi du fait du maintien de son nom sur les listes en cause en raison, notamment, de ses liens avec l’EIIL. En effet, le maintien de cette motivation comme base des actes attaqués serait source d’opprobre et de méfiance. À cet égard, le requérant reproche au Conseil d’avoir maintenu cette motivation, notamment, dans la décision 2017/917 et dans le règlement d’exécution 2017/907, alors que le Tribunal a considéré, dans l’arrêt du 22 mars 2017, Haswani/Conseil (T‑231/15, non publié, EU:T:2017:200), que le Conseil n’avait pas apporté de preuves suffisantes pour démontrer l’existence d’un lien entre le requérant et l’EIIL.

182    Deuxièmement, le requérant fait valoir que l’imputation de certains faits graves non prouvés les expose, lui et sa famille, à des périls, ce qui illustrerait l’importance du préjudice subi. Souffrant, par ailleurs, de sérieux problèmes de santé, le requérant sollicite l’allocation d’une somme de 100 000 euros au titre du préjudice moral subi.

183    Le Conseil fait part de ses doutes quant à la recevabilité des conclusions indemnitaires compte tenu des exigences posées par l’article 76 du règlement de procédure et du manque de précision affectant la définition du caractère, de la réalité et de l’étendue du préjudice immatériel invoqué par le requérant. En tout état de cause, il conteste les arguments du requérant.

184    Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, en matière de responsabilité non contractuelle, l’Union doit réparer, conformément aux principes généraux communs aux droits des États membres, les dommages causés par ses institutions ou par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions.

185    Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, au sens de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions cumulatives, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (arrêts du 29 septembre 1982, Oleifici Mediterranei/CEE, 26/81, EU:C:1982:318, point 16 ; du 14 décembre 2005, Beamglow/Parlement e.a., T‑383/00, EU:T:2005:453, point 95, et du 23 novembre 2011, Sison/Conseil, T‑341/07, EU:T:2011:687, point 28).

186    Dès lors que l’une des trois conditions d’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union n’est pas remplie, les prétentions indemnitaires doivent être rejetées, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si les deux autres conditions sont réunies (arrêts du 20 février 2002, Förde-Reederei/Conseil et Commission, T‑170/00, EU:T:2002:34, point 37, et du 30 septembre 2009, Sison/Conseil, T‑341/07, EU:T:2009:372, point 29 ; voir également, en ce sens, arrêt du 15 septembre 1994, KYDEP/Conseil et Commission, C‑146/91, EU:C:1994:329, point 81). Par ailleurs, le juge de l’Union n’est pas tenu d’examiner ces conditions dans un ordre déterminé (arrêt du 9 septembre 1999, Lucaccioni/Commission, C‑257/98 P, EU:C:1999:402, point 13).

187    En l’espèce, le requérant fait valoir, en substance, subir un préjudice en raison, d’une part, du maintien, dans les motifs d’inscription, de son nom sur les listes en cause et de l’affirmation selon laquelle il aurait des liens avec l’EIIL et, d’autre part, de l’imputation de certains faits graves non prouvés.

188    À cet égard, premièrement, il suffit de constater que le Conseil a retiré la mention des liens entre le requérant et l’EIIL des motifs d’inscription de son nom sur les listes en cause, lors de l’adoption de la décision d’exécution 2017/1245 et du règlement d’exécution 2017/1241, de sorte que celui-ci ne saurait alléguer l’existence d’un préjudice lié au maintien de cette mention.

189    Deuxièmement, il y a lieu de rappeler que les arguments que le requérant a fait valoir afin de démontrer l’illégalité des actes attaqués ont été rejetés.

190    Il résulte de ce qui précède que la condition relative à l’illégalité du comportement reproché à l’institution n’est pas remplie en l’espèce. Ainsi, l’une des conditions rappelées au point 185 ci-dessus n’étant pas remplie, la responsabilité de l’Union ne saurait être engagée.

191    Dès lors, il y a lieu de rejeter les conclusions indemnitaires du requérant comme étant non fondées, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité, et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

192    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil, conformément aux conclusions de ce dernier.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. George Haswani est condamné aux dépens.

Gervasoni

Madise

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 décembre 2020.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

M. van der Woude


*      Langue de procédure : le français.

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