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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Puma v EUIPO - V. Fraas (FRAAS) (EU Trade Mark - Judgment) French Text [2022] EUECJ T-329/21 (22 June 2022) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2022/T32921.html Cite as: [2022] EUECJ T-329/21, ECLI:EU:T:2022:379, EU:T:2022:379 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)
22 juin 2022 (*)
« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne verbale FRAAS – Usage sérieux de la marque – Usage pour les produits pour lesquels la marque a été enregistrée – Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001] – Preuve de l’usage sérieux »
Dans l’affaire T‑329/21,
Puma SE, établie à Herzogenaurach (Allemagne), représentée par Me M. Schunke, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant
V. Fraas GmbH, établie à Helmbrechts-Wüstenselbitz (Allemagne), représentée par Mes R. Kunze et F. Tyra, avocats,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre),
composé de Mme V. Tomljenović (rapporteure), présidente, MM. F. Schalin et I. Nõmm, juges,
greffier : M. E. Coulon,
vu la phase écrite de la procédure,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Puma SE, demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 24 mars 2021 (affaire R 2714/2019-5) (ci‑après la « décision attaquée »).
Antécédents du litige
2 Le 19 mars 2007, l’intervenante a, sous sa dénomination antérieure, présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].
3 La marque dont l’enregistrement est demandé est le signe verbal FRAAS.
4 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent notamment, pour chacune de ces classes, à la description suivante (ci‑après les « produits litigieux ») :
– classe 18 : « Sacs à main (ces produits étaient compris dans le terme générique initialement demandé : “Produits en cuir et imitations du cuir”) » ;
– classe 25 : « Vêtements, chapellerie, foulards, fichus et châles, excepté les produits en fourrure et en imitations de fourrures ; gants, bonnets, accessoires vestimentaires textiles et chapellerie (compris dans la classe 25) ».
5 La demande a été publiée le 13 août 2007 et la marque a été enregistrée le 22 février 2008.
6 Après son enregistrement, la marque est, occasionnellement, apparue également dans les variantes suivantes :
7 Le 10 juin 2013, la requérante a présenté, à l’EUIPO, une demande en déchéance de la marque de l’Union européenne FRAAS pour tous les produits énumérés au point 4 ci‑dessus. Elle a fondé sa demande sur l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001]. À cet égard, elle a fait valoir en substance que la marque contestée n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux pendant la période pertinente en l’espèce.
8 Après une suspension de la procédure de plusieurs années, celle-ci a repris le 21 février 2018.
9 Par une décision du 25 octobre 2019, la division d’annulation a rejeté la demande en déchéance en ce qui concerne les produits litigieux. À cet égard, la division d’annulation a considéré en substance qu’un usage sérieux de la marque contestée au regard des produits litigieux avait été suffisamment démontré.
10 Le 29 novembre 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO à l’encontre de la décision de la division d’annulation et sollicité l’annulation de la décision de la division d’annulation.
11 Par la décision attaquée, la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours et confirmé la décision de la division d’annulation. Dans le cadre d’une appréciation globale de l’ensemble des éléments de preuve présentés par l’intervenante, elle a conclu que la marque contestée avait fait l’objet d’un usage sérieux durant la période pertinente.
Conclusions
12 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée et ordonner que la marque contestée soit également annulée pour les produits litigieux ;
– condamner la partie défenderesse aux dépens, en ce compris les dépens de la procédure devant la chambre de recours.
13 L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
14 Au surplus, l’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de condamner la requérante aux dépens exposés par elle devant la chambre de recours.
En droit
Sur la recevabilité du recours
15 L’intervenante fait valoir que les griefs formulés par la requérante à l’égard de certains points de la décision attaquée doivent être rejetés comme étant manifestement irrecevables, car ils ne préciseraient pas où les constatations contestées figurent exactement dans la décision attaquée. Bon nombre de références à la décision attaquée, faites par la requérante, seraient imprécises, voire erronées. Ces défaillances de la requête permettraient de conclure qu’il y a lieu de faire application de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, et de considérer donc que le recours est en grande partie irrecevable.
16 Les arguments de la requérante que l’intervenante désigne comme étant imprécis ou erronés peuvent être regroupés en trois catégories. Premièrement, il s’agit d’arguments par lesquels la requérante conteste la valeur probante d’une déclaration sous serment de l’associé gérant de l’intervenante que le représentant de l’intervenante devant l’EUIPO avait présenté comme annexe B 12 à un mémoire du 13 septembre 2018. Deuxièmement, il s’agit d’arguments par lesquels elle remet en cause en substance la valeur probante d’éléments de preuve autres que cette déclaration sous serment. Troisièmement, l’intervenante qualifie de « vagues » des arguments de la requérante qui sont dirigés contre les appréciations de la chambre de recours concernant divers facteurs qui lui ont permis de conclure qu’il y avait eu un usage sérieux de la marque contestée. À cet égard, il y a lieu de constater que, de par leur substance, les arguments critiqués par l’intervenante visent la légalité de la décision attaquée. Ils sont suffisamment clairs et circonstanciés pour que l’EUIPO et l’intervenante, elle‑même, aient pu y répondre et que le Tribunal puisse les examiner. Il n’y a pas lieu de rejeter ces arguments comme étant irrecevables. Le recours ne peut pas non plus être rejeté comme étant irrecevable.
Sur le fond
17 Compte tenu de la date d’introduction de la demande en déchéance en cause, à savoir le 10 juin 2013, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009.
18 Dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le présent litige est susceptible d’être régi, en principe, par les dispositions procédurales qui étaient en vigueur à la date de l’adoption de la décision attaquée, c’est-à-dire par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.
19 Sont d’application, en l’espèce, toutefois également les dispositions procédurales s’appliquant aux demandes en déchéance déposées avant le 9 août 2017, à savoir celles du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1), ainsi qu’il résulte d’une lecture combinée de l’article 82, paragraphe 2, sous f), du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), d’une part, et de l’article 81, paragraphe 2, sous f), du règlement délégué (UE) 2017/1430 de la Commission, du 18 mai 2017, complétant le règlement no 207/2009 et abrogeant les règlements (CE) no 2868/95 et (CE) no 216/96 (JO 2017, L 205, p. 1), tel que modifié, d’autre part.
20 Dans la mesure où la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95, intitulée « Examen de la demande en déchéance ou en nullité », commande une application de la règle 22 de ce règlement, intitulée « Preuve de l’usage », et dans la mesure où la règle 22, paragraphe 4, du même règlement renvoie, pour sa part, s’agissant des déclarations écrites faites sous serment, à l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié, compte tenu du fait que le règlement délégué no 2868/95 n’ordonne qu’une application rétroactive de ses propres dispositions – mais non des dispositions du règlement no 40/94 – et étant donné que ledit article 76, paragraphe 1, sous f), n’existait plus à la date de l’adoption de la décision attaquée, il y a lieu de conclure que la règle procédurale régissant lesdites déclarations écrites doit être tirée de l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001.
21 À l’appui du recours, la requérante soulève expressément un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001. Par ce moyen, elle conteste en substance la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la marque contestée a fait l’objet d’un usage sérieux pour les produits litigieux. Compte tenu de ce qui a été relevé au point 17 ci‑dessus, il y a lieu d’interpréter le moyen de la requérante comme visant une violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009.
22 Aux termes de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, le titulaire de la marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque de l’Union européenne n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et s’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage. Selon l’article 51, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 58, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), si la cause de déchéance n’existe que pour une partie des produits ou des services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, le titulaire n’est déclaré déchu de ses droits que pour les produits ou les services concernés.
23 Selon une jurisprudence constante, une marque fait l’objet d’un usage sérieux, au sens de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lorsqu’elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle, qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages à caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (arrêt du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, point 38 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43). De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du 4 avril 2019, Hesse et Wedl & Hofmann/EUIPO (TESTA ROSSA), T‑910/16 et T‑911/16, EU:T:2019:221, point 29 et jurisprudence citée].
24 Dans l’interprétation de la notion d’usage sérieux, il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 32 et jurisprudence citée, et du 27 septembre 2007, La Mer Technology/OHMI – Laboratoires Goëmar (LA MER), T‑418/03, non publié, EU:T:2007:299, point 53 et jurisprudence citée].
25 L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci dans la vie des affaires, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque [arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 40 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43].
26 L’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [arrêts du 12 décembre 2002, Kabushiki Kaisha Fernandes/OHMI – Harrison (HIWATT), T‑39/01, EU:T:2002:316, point 47, et du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, EU:T:2004:292, point 28].
27 En vertu de la règle 22 du règlement no 2868/95 (devenue article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2018/625), applicable aux procédures de déchéance conformément à la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 (devenue article 19, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625), la preuve de l’usage d’une marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque et se limite, en principe, à la production de pièces justificatives, comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement no 40/94 [devenu article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001].
28 Par ailleurs, l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 n’exige pas un usage continu et ininterrompu de la marque contestée pendant la période pertinente, mais uniquement un usage sérieux au cours de celle‑ci [arrêt du 10 juin 2020, Leinfelder Uhren München/EUIPO – Schafft (Leinfelder), T‑577/19, non publié, EU:T:2020:259, point 28].
29 Enfin, concernant la charge de la preuve, il ressort de l’article 15, de l’article 42, paragraphe 2, de l’article 51, paragraphe 1, ainsi que de l’article 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 que la preuve de l’usage sérieux ou de l’existence de justes motifs de non-usage incombe au titulaire de la marque contestée.
30 C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu d’examiner les différents griefs invoqués par la requérante.
31 En l’espèce, la chambre de recours a relevé au point 29 de la décision attaquée que, la demande en déchéance ayant été déposée par la requérante le 10 juin 2013, la période de cinq années à prendre en considération, s’étendait du 10 juin 2008 au 9 juin 2013. Il convient d’entériner cette appréciation, qui, d’ailleurs, n’est pas contestée par les parties.
32 La chambre de recours a conclu que la décision de la division d’annulation du 25 octobre 2019, par laquelle la demande en déchéance de la requérante pour les produits litigieux avait été rejetée, était justifiée, et ce puisque, dans le cadre d’une appréciation globale de « l’ensemble des preuves » (point 91 de la décision attaquée), il pouvait être constaté qu’un usage propre à assurer le maintien des droits sur la marque contestée avait été prouvé par l’intervenante en ce qui concernait lesdits produits.
33 En substance, la chambre de recours a motivé cette conclusion en indiquant que le contenu d’une déclaration sous serment de l’associé gérant de l’intervenante (annexe B 12 d’un mémoire du 13 septembre 2018 présenté par le représentant de l’intervenante devant l’EUIPO), qui serait étayé par des preuves objectives, en particulier des catalogues, manuels de campagne, brochures de collection, planogrammes et présentations de produits (notamment les annexes 6 à 8, 10, 12 et 15 à 17 de ladite déclaration sous serment), avait confirmé un usage propre à assurer le maintien des droits de l’intervenante. Les preuves produites par l’intervenante permettraient de conclure à un usage durant la période pertinente, à l’utilisation géographique, notamment en Allemagne et en Autriche, à l’usage en tant que marque et sous une forme qui n’altère pas de manière substantielle le caractère distinctif ainsi qu’à un usage suffisamment important (points 29 à 91 de la décision attaquée).
34 La requérante remet en cause la crédibilité de certains des éléments de preuve retenus par la chambre de recours à l’appui de ses conclusions, tels que la déclaration sous serment de l’associé gérant de l’intervenante susmentionnée et une partie des annexes à celle‑ci (par exemple, les annexes 5 à 7, 12, 16, 17, 20 et 21), dans la mesure où ces éléments ont été examinés par la chambre de recours pour constater qu’il y a eu un usage sérieux de la marque contestée.
Sur la déclaration sous serment
35 Sous l’intitulé « La valeur probante de la déclaration sous serment produite », la chambre de recours a, aux points 32 et 33 de la décision attaquée, relevé en substance et notamment que la déclaration sous serment de l’associé gérant de l’intervenante devait obligatoirement être étayée par des éléments de preuve supplémentaires pour qu’elle pût être considérée comme étant crédible et pour qu’elle puisse donc prouver l’usage de la marque contestée. Ainsi qu’il ressort du point 34 de la décision attaquée, la chambre de recours a réfuté l’objection soulevée par la requérante, selon laquelle la « force probante d’une déclaration sous serment provenant de la sphère de la partie intéressée [était] faible même en cas de confirmation par des éléments de preuve objectifs ». Selon la chambre de recours, dans une telle situation de fait, les constatations et affirmations figurant dans la déclaration sont réputées comme étant établies. Enfin, quant aux arguments soulevés par la requérante à l’égard de la valeur probante de la déclaration sous serment lors de la procédure devant l’EUIPO, la chambre de recours a notamment indiqué que, dans ladite déclaration sous serment, les différents faits pertinents concernant l’usage de la marque contestée étaient présentés de manière ordonnée et étayés et confirmés par des annexes qui étaient également numérotées et classées dans le même ordre. La « référence sommaire », faite par la requérante, au fait que certaines annexes à ladite déclaration ne relèveraient pas de la période pertinente serait « trompeuse », étant donné que la majeure partie des annexes concernerait clairement et de manière objectivement vérifiable la période pertinente (voir point 36 de la décision attaquée).
36 La requérante avance que la chambre de recours a attribué à tort une valeur probante excessive à la déclaration sous serment en cause en l’espèce. Contrairement à l’appréciation de la chambre de recours, « ainsi qu’il sera exposé [par la requérante] ci‑dessous », l’intervenante n’aurait pas été en mesure de fournir d’autres preuves indépendantes pour étayer la déclaration sous serment, telles que des photographies de produits, d’étiquettes ou de vitrines de magasin. La majeure partie des éléments de preuve sur lesquels la chambre de recours aurait fondé sa décision, soit l’ensemble des preuves de l’usage de l’intervenante, présentés en annexe B13 au mémoire du 13 septembre 2018 exposé par le représentant de l’intervenante devant l’EUIPO, dateraient, certes, prétendument, de la période pertinente. Mais cela ne semblerait pas crédible. En effet, seraient jointes à la même déclaration également des annexes datées qui, de fait, ne seraient manifestement pas de cette période. Enfin, la chambre de recours aurait utilisé la déclaration sous serment pour extraire, des éléments de preuve présentés, une affirmation qui, prise isolément, ne leur est pas inhérente.
37 L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.
38 Les arguments formulés par la requérante ont, pour partie, trait à la valeur probante intrinsèque de la déclaration sous serment en cause. Pour partie et dans une moindre mesure, ces arguments semblent anticiper le rôle que cette déclaration a joué dans le cadre de l’appréciation globale de l’existence d’un usage sérieux de la marque contestée. Dans la mesure où la requérante se réfère à la valeur probante intrinsèque de ladite déclaration, il y a lieu de relever les éléments suivants.
39 Liminairement, il y a lieu de rappeler qu’une déclaration sous serment fait partie des « déclarations écrites faites sous serment ou solennellement ou qui ont un effet équivalent d’après la législation de l’État dans lequel elles sont faites » au sens de l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001. Eu égard à la lecture combinée de cette disposition avec la règle 22, paragraphe 4, du règlement no 2868/95, une déclaration écrite telle que celle dont il s’agit, en l’espèce, constitue un des moyens de preuve de l’usage de la marque [arrêt du 9 décembre 2014, Inter-Union Technohandel/OHMI – Gumersport Mediterranea de Distribuciones (PROFLEX), T‑278/12, EU:T:2014:1045, point 49].
40 Pour apprécier la valeur probante d’un tel document, comme c’est le cas pour tout document, il faut vérifier la vraisemblance et la véracité de l’information qui y est contenue. Il faut alors tenir compte de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable [arrêt du 12 mars 2020, Maternus/EUIPO – adp Gauselmann (Jokers WILD Casino), T‑321/19, non publié, EU:T:2020:101, point 45].
41 Il résulte de la jurisprudence que, lorsqu’une déclaration a été établie au sens de l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001 par l’un des cadres de la partie intéressée, il ne peut être attribué une valeur probante à ladite déclaration que si elle est corroborée par d’autres éléments de preuve (arrêt du 9 décembre 2014, PROFLEX, T‑278/12, EU:T:2014:1045, point 51).
42 Il ressort de la déclaration sous serment présentée par l’intervenante devant l’EUIPO, en substance, que l’intervenante est un fournisseur mondial d’accessoires textiles, en particulier, mais pas exclusivement, de châles. Ces derniers seraient conçus, fabriqués et distribués au nombre de 8 millions d’unités par an. L’entreprise de l’intervenante disposerait de capacités de production en Allemagne ainsi qu’en République tchèque, en Chine, aux États-Unis et au Canada. L’intervenante proposerait, dans le cadre de l’activité sous marque de distributeur (« Private-Label »), la fabrication d’accessoires textiles, notamment de châles et de serviettes, de bonnets, de gants, de ponchos, de capes et d’autres accessoires en matières textiles destinés à des entreprises tierces. Les produits sous marque de distributeur représenteraient environ 75 % de la production totale. De plus, depuis des décennies, l’intervenante commercialiserait des produits fabriqués et tissés sous la marque FRAAS. À titre d’exemple, l’intervenante a joint à la déclaration sous serment des illustrations de châles et de fichus qui, selon elle, sont fabriqués et vendus à environ 2 millions d’unités par an et qui sont presque tous revêtus d’une étiquette textile portant la marque FRAAS. Il est également indiqué dans la déclaration sous serment que les accessoires textiles fabriqués et commercialisés par l’intervenante sont identifiés par la marque FRAAS depuis des années et bien avant l’année 2008. Sont jointes à la déclaration sous serment vingt-trois annexes, à savoir des extraits de certains sites Internet attribuables à l’intervenante (« store.fraas.com ») ou à des tiers (« www.peek-cloppenburg.de »), des reproductions de produits, des photographies de produits et de devantures de magasins, des brochures de collections et de produits, des catalogues, des copies d’articles de presse de revues, notamment allemandes et autrichiennes, et autres documents, qui couvrent dans leur grande majorité la période pertinente. La marque contestée apparaît dans toutes ces annexes.
43 La chambre de recours n’a pas disposé d’éléments qui auraient pu permettre de douter de l’origine de la déclaration sous serment, des circonstances de son élaboration ou de son destinataire. Elle n’a pas non plus disposé d’éléments qui permettraient de déduire que ladite déclaration ne semblait pas sensée et fiable « d’après son contenu » (voir le point 40 ci‑dessus).
44 En effet, dans la mesure où la requérante fait valoir, dans le cadre du présent recours, que, « ainsi qu’il sera exposé ci‑dessous », l’intervenante n’aurait pas été en mesure de fournir d’autres preuves indépendantes pour étayer la déclaration sous serment, telles que des photographies de produits, d’étiquettes ou de vitrines de magasin, cette affirmation est trop vague pour que le Tribunal puisse constater que la chambre de recours aurait été fondée à soulever des doutes quant à la vraisemblance ou sur la véracité du contenu de ladite déclaration.
45 La requérante suggère que, certes, la majeure partie des éléments de preuve sur lesquels la chambre de recours aurait fondé sa décision, à savoir les reproductions de produits portant la marque FRAAS, tels qu’ils ont, selon la titulaire de la marque, été commercialisés entre 2008 et 2013 (annexe B 13 au mémoire du 13 septembre 2018 du représentant de l’intervenante devant l’EUIPO) dateraient de la période pertinente, mais que « cela ne semblerait pas crédible, car à la même déclaration sont jointes des annexes datées qui, justement, ne datent manifestement pas de cette période » (voir point 36 ci‑dessus). À cet égard, il suffit de relever que le simple fait que l’intervenante ait présenté des éléments de preuve qui datent de la période pertinente et a ajouté des éléments de preuve qui ne datent pas de cette période, ne signifie pas forcément que les premiers ne seraient pas « crédibles ».
46 Enfin, dans la mesure où la requérante invoque que la chambre de recours aurait utilisé la déclaration sous serment pour extraire, des éléments de preuve présentés, une affirmation qui, prise isolément, ne leur est pas inhérente, elle semble suggérer qu’une telle déclaration est vraisemblable et vérace uniquement lorsque chacun des détails de son contenu peut être précisément retracé dans les éléments de preuve qui l’accompagnent, et ce sans la moindre lacune. Or, cette interprétation de la requérante ne saurait être retenue.
47 En effet, d’une part, une déclaration établie dans l’intérêt de son auteur n’a, certes, qu’une valeur probante limitée et nécessite d’être étayée par des éléments de preuve supplémentaires, mais cela n’autorise toutefois pas les instances de l’EUIPO à considérer par principe qu’une telle déclaration est en soi dépourvue de toute crédibilité. La valeur probante à accorder à pareille déclaration, prise isolément ou en combinaison avec d’autres éléments de preuve, est fonction, notamment, des circonstances de l’espèce [arrêt du 16 décembre 2020, Forbo Financial Services/EUIPO – Windmöller (Canoleum), T‑3/20, EU:T:2020:606, point 52].
48 D’autre part, l’interprétation de la requérante rendrait toute déclaration sous serment, telle que celle en cause, à savoir une déclaration établie dans l’intérêt de son auteur, inefficace et superflue. Le but de ces éléments de preuve n’est pas de remplacer ladite déclaration, mais de l’étayer. Une déclaration sous serment établie dans l’intérêt de son auteur a une valeur probante intrinsèque et séparée, même si sa valeur probante se trouve limitée. La chambre de recours peut donc conclure que le contenu d’une déclaration sous serment établie dans l’intérêt de son auteur est vraisemblable et vérace même si les éléments de preuve qui l’accompagnent ne recouvrent pas l’intégralité des détails qui y figurent.
49 Dans ces conditions, dans la mesure où la requérante remet en cause la valeur probante intrinsèque de la déclaration sous serment en question, les arguments de la requérante, mentionnés au point 36 ci‑dessus, doivent être rejetés. Pour autant que la requérante anticipe, dans une certaine mesure, les considérations exprimées par la chambre de recours quant à l’existence d’un usage sérieux de la marque contestée, les arguments contenus à ce sujet seront abordés à un stade ultérieur (voir points 120 à 128 ci‑après).
Sur la durée de l’usage de la marque contestée
50 Aux points 37 à 40 de la décision attaquée, la chambre de recours a, en substance et notamment, relevé que les annexes 6, 7 et 12 de la déclaration sous serment consistaient en des brochures de collections et de produits couvrant la période allant de l’automne/hiver 2010 au printemps/été 2011 et celle allant de l’automne/hiver 2012 au printemps/été 2013. Certains articles de journaux et de presse présentés par l’intervenante (annexes 20 et 21 à la déclaration sous serment) dateraient de la période pertinente. La collaboration avec la créatrice de mode Sonja Kiefer (annexes 16 et 17 à la déclaration sous serment) aurait débuté en 2008 et se serait étendue sur plusieurs années. Cette collaboration viserait les produits mentionnés au point 38 de la décision attaquée, à savoir des foulards, des fichus, des bonnets, des gants, des capes ainsi que d’autres accessoires comme des tuniques (de plage), des ceintures, des chapeaux et des sacs, mais également des collections de sacs à main et d’autres accessoires. Le reproche de la requérante, selon lequel certains éléments de preuve ne seraient pas datés ou se situeraient en dehors de la période de référence serait uniquement le résultat d’une appréciation partielle unilatérale. Dans les faits, bon nombre d’éléments de preuve dateraient de la période pertinente, si bien qu’il conviendrait de conclure que les autres éléments de preuve comme les actions promotionnelles et de « merchandising » effectués au travers de bons d’achat, de cartes de Noël et de certaines actions de vente dateraient, à tout le moins en partie, elles aussi, de la période pertinente.
51 Selon la requérante, la chambre de recours n’a pas suffisamment examiné quels étaient les éléments de preuve censés autoriser des déductions quant aux dates prétendues des illustrations, ni de quels éléments de preuve ces mêmes déductions ont été tirées. Les brochures de collections et de produits auxquelles il aurait été fait référence dans la déclaration sous serment n’auraient aucune pertinence. Pour apporter la preuve d’un usage sérieux, il conviendrait plutôt de fournir des informations sur la manière dont ces brochures, catalogues ou autres publicités analogues ont été diffusés, à qui ils ont été proposés et s’ils ont entraîné des achats potentiels ou effectifs. Mais les preuves produites par l’intervenante ne répondraient pas à ces exigences.
52 La brochure intitulée « FRAAS GOES WIESN », produite par l’intervenante dans la procédure devant l’EUIPO en tant qu’annexe 9 à la déclaration sous serment, serait sans pertinence. Tel serait le cas des captures d’écran de pages Internet fournies qui concernent l’Oktoberfest.
53 Il en irait également de même pour la preuve, sur laquelle se fonde l’appréciation, tirée de l’annexe B7 du mémoire du 13 septembre 2018 présenté par le représentant de l’intervenante devant l’EUIPO, qui contient des extraits de la présence de celle‑ci sur Internet, à l’adresse « www.vfraas.com », datant du 16 août 2013.
54 Les impressions de documents provenant d’Internet ne suffiraient pas, elles non plus, à prouver un usage sérieux. Pour que de telles impressions Internet puissent constituer une source de preuve fiable, il serait indispensable d’apporter d’autres éléments de preuve qui démontrent que le site Internet spécifique a été visité et notamment que des commandes de produits et de services concernés ont été effectuées.
55 Enfin, en ce qui concerne le document dénommé « Moodboard » (« tableau de tendances »), datant de 2008 et joint en annexe 5 de la déclaration sous serment, il ne serait pas clair, selon la requérante, si celui‑ci relève déjà de la période pertinente ou bien s’il date des premiers mois de l’année en question.
56 L’EUIPO et l’intervenante contestent ces griefs.
57 Les arguments que la requérante invoque au regard des appréciations contenues aux points 37 à 41 de la décision attaquée portent, premièrement, sur la question de savoir si les éléments de preuve pris en compte par la chambre de recours ont une valeur probante suffisante en ce qui concerne la durée de l’usage de la marque contestée, ainsi que, deuxièmement et en conséquence, sur la question de savoir quelles pourraient être les conclusions concernant l’appréciation globale de la durée de l’usage.
58 Dans la mesure où la requérante remet en cause la valeur probante d’une partie des éléments de preuve utilisés par la chambre de recours pour vérifier la durée de l’usage de la marque contestée, ses arguments appellent les observations suivantes.
59 En premier lieu, contrairement à ce que suggère la requérante, aux points 37 à 41 de la décision attaquée, la chambre de recours a suffisamment précisé quels étaient les éléments de preuve desquels ces mêmes déductions ont été tirées. De plus, la chambre de recours a également suffisamment examiné quels étaient les éléments de preuve censés autoriser des déductions quant aux dates prétendues des illustrations.
60 En effet, la chambre de recours a eu raison de considérer qu’un grand nombre d’éléments de preuve qui avaient été fournis par l’intervenante lors de la procédure devant l’EUIPO dataient de la période pertinente. Tel est le cas des brochures de collections et de produits pour la période allant de l’automne/hiver 2010 au printemps/été 2011 et pour celle allant de l’automne/hiver 2012 au printemps/été 2013. Ainsi que l’a relevé la chambre de recours, au point 37 de la décision attaquée, sur ces pièces, la marque contestée avec la reproduction d’un chardon est clairement apposée non seulement sur la page de couverture, mais également sur les différentes pages. Sur certains produits, l’on peut voir le signe esquissé. D’autres éléments de preuve datent également de la période pertinente. Tel est le cas des articles de journaux et de presse parus dans les revues Wienerin (12/2009), Kieler Nachrichten, Freundin (2009), Textilzeitung (Autriche, 2009), First, Compliment (novembre-décembre 2009) ainsi que Vrouwenmode (2011). Ainsi que l’a indiqué la chambre de recours au point 38 de la décision attaquée, ces revues contiennent des reproductions des produits de l’intervenante. Il s’agit là principalement de foulards et de fichus, mais également de bonnets, de gants, de capes ainsi que d’autres accessoires comme des tuniques (de plage), des ceintures, des chapeaux et des sacs, ainsi que des rapports sur ces produits.
61 Il convient de souligner dans ce contexte que, ainsi qu’il résulte de photocopies contenues dans le dossier du Tribunal, la plupart des documents mentionnés au point 60 ci‑dessus portent expressément des dates qui sont comprises dans la période pertinente. Ensuite, il est vrai que les articles de presse parus dans Kieler Nachrichten et First ne comportent pas une date précise dans le texte de l’article lui‑même. Toutefois, l’intervenante a indiqué que l’article publié dans Kieler Nachrichten était paru le 4 septembre 2012 et que la revue First a été publiée en Autriche en 2009. La requérante ne remet pas en cause la valeur probante de ces éléments, ni leur incidence sur les conclusions de la chambre de recours en ce qui concerne l’appréciation globale de l’existence d’un usage sérieux de la marque contestée.
62 Enfin, contrairement à ce que fait valoir la requérante, en ce qui concerne la durée de l’usage de la marque, l’intervenante n’avait pas à fournir des informations sur la manière dont les brochures ou les autres articles ont été diffusés, à qui ils ont été proposés et s’ils ont entraîné des achats potentiels ou effectifs. Certes, quand le titulaire de la marque contestée peut fournir des informations sur la manière dont certains éléments de preuve ont été diffusés ou autrement utilisés, cela est souvent fort utile, mais cela ne doit pas être fait dans tous les cas. La requérante méconnaît, en l’espèce, les exigences relatives au niveau de la preuve auquel doit répondre l’intervenante.
63 En deuxième lieu, les griefs formulés par la requérante au regard de la brochure intitulée « FRAAS GOES WIESN » et des captures d’écran de pages Internet fournies, qui concernent l’Oktoberfest, qui seraient toutes des documents n’ayant aucun rapport avec les produits ou les marques de l’intervenante ne convainquent pas. Ainsi que le fait valoir, à juste titre, l’intervenante, les captures d’écran concernant l’Oktoberfest, contestées par la requérante, ne sont, certes, pas directement liées aux produits ou aux marques de l’intervenante, mais elles indiquent indirectement que l’Oktoberfest de Munich (Allemagne) 2013, qui a eu lieu du 21 septembre au 6 octobre 2013, suscitait déjà l’intérêt général, des mois avant que ne commence cet événement. Par conséquent, la brochure intitulée « FRAAS GOES WIESN » pour l’Oktoberfest de Munich 2013 pouvait être prise en compte pour établir que la marque contestée a été utilisée au cours de la période d’usage pertinente. En effet, pourvu qu’il existe des preuves d’usage qui se rattachent à la période pertinente, comme en l’espèce, les pièces ne relevant que très peu de celle-ci, loin d’être dépourvues d’intérêt, peuvent être prises en compte et évaluées conjointement avec les autres éléments, car elles peuvent apporter la preuve d’une exploitation commerciale réelle et sérieuse de la marque [arrêt du 8 juillet 2020, Euroapotheca/EUIPO – General Nutrition Investment (GNC LIVE WELL), T‑686/19, non publié, EU:T:2020:320, point 46].
64 En troisième lieu, le fait que, dans les extraits du site Internet « www.vfraas.com », datant du 16 août 2013, présentés par le représentant de l’intervenante devant l’EUIPO en tant qu’annexe B 7 au mémoire du 13 septembre 2018, il n’y ait aucune indication des produits de l’intervenante, n’est pas pertinent. En effet, ces extraits démontrent la présence de l’intervenante sur Internet. Il convient de souligner dans ce contexte que la chambre de recours n’a pas formulé des conclusions concernant la durée de l’usage de la marque contestée pour les produits de l’intervenante sur la base desdits extraits.
65 En quatrième lieu, s’agissant du document dénommé « Moodboard » (« tableau de tendances »), datant de 2008 et joint en annexe 5 de la déclaration sous serment, il est exact que ce document ne fait pas apparaître une date précise et qu’il n’est pas clair s’il relève de la période pertinente ou bien s’il date des premiers mois de l’année 2008 sans inclure toutefois les mois de cette même année qui concernent la période pertinente. Toutefois, la requérante n’a pas contesté l’avant-dernière phrase contenue à la deuxième page de la déclaration sous serment et selon laquelle le document appelé « Moodboard » a servi de base pour le développement des collections de l’intervenante. Même si l’élaboration du document en tant que telle ne date pas de la période pertinente, il n’en demeure pas moins que ce document – dont la rédaction peut, certes, dater de la période précédant le 10 juin 2008 – a néanmoins servi de base pour le développement des collections de l’intervenante pendant la période pertinente. Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours l’a pris en considération en ce qui concerne la durée de l’usage de la marque contestée.
66 Au vu de ce qui précède, dans la mesure où la requérante se réfère à la valeur probante intrinsèque des éléments de preuve pris en considération par la chambre de recours au titre de la durée de l’usage de la marque contestée, les arguments de la requérante mentionnés aux points 51 à 55 ci‑dessus doivent être rejetés. Dans la mesure où la requérante anticipe les considérations exprimées par la chambre de recours quant à l’appréciation globale de la question de savoir s’il y a eu un usage sérieux de la marque contestée, ces arguments seront abordés à un stade ultérieur (voir points 120 à 128 ci‑après).
Sur la nature de l’usage de la marque contestée
67 Aux points 48 à 50 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu, en substance, que la marque contestée avait été utilisée non seulement en tant que dénomination sociale, mais également, à tout le moins de manière concomitante, en tant que marque. Cela pourrait être déduit de certains documents présentés par l’intervenante, tels que des catalogues, des manuels de campagne, des brochures de collections, des planogrammes ainsi que des présentations de produits – présentés en tant qu’annexes 6 à 8, 10, 12, 15 à 17 de la déclaration sous serment. Dans ces documents, le signe figurerait non seulement sur la page de couverture, mais il serait également indiqué sur de nombreuses pages en dessous des produits et apposé sur les produits eux-mêmes. Le même signe serait apposé sur certaines étiquettes présentées en tant qu’annexe 14 de la déclaration sous serment qui sont reconnaissables sur les produits exposés en vitrine (voir l’annexe 18 à la déclaration sous serment). De plus, dans le contexte de la collaboration avec la créatrice de mode Sonja Kiefer (annexes 16 et 17 de la déclaration sous serment), il aurait été clairement exposé qu’il s’agissait d’une coopération entre la marque premium FRAAS et ladite créatrice de mode.
68 Ensuite, aux points 57 à 63 de la décision attaquée, la chambre de recours a exposé les raisons pour lesquelles elle considérait que la marque contestée avait été utilisée sous la forme enregistrée. Dans toutes les formes utilisées, le terme « fraas » constituerait l’élément dominant. Les éléments verbaux et figuratifs ajoutés occuperaient une place secondaire sur le plan optique. Les éléments verbaux autres que le terme « fraas » n’auraient aucune influence sur le caractère distinctif de ce terme et n’altéreraient pas ce dernier. Enfin, la chambre de recours a indiqué que le public pouvait reconnaître facilement, dans les variantes utilisées, la marque contestée reproduite de manière centrale et dominante et qu’il prononcerait le mot « fraas » pour se référer à la marque.
69 Selon la requérante, premièrement, la chambre de recours a méconnu que l’élément « fraas » a été utilisé en tant que nom d’entreprise et non comme marque. Le fait que ce mot soit imprimé notamment sur la couverture de certaines brochures ne suffirait pas pour considérer qu’il a été utilisé en tant que marque. Dans la mesure où la chambre de recours a fondé ses conclusions sur des reproductions d’étiquettes, ces dernières ne constitueraient pas une preuve suffisante. En effet, non seulement les reproductions d’étiquettes ne seraient pas apposées directement sur le produit, mais elles ne seraient pas non plus datées. En outre, la chambre de recours aurait supposé que les produits de l’intervenante existaient et qu’ils avaient effectivement été proposés dans des magasins. Mais l’existence de ces produits ne permettrait pas de conclure qu’ils ont été effectivement proposés « à la vente ». De toute façon, il ne serait pas clair de quels documents pourraient ressortir la date et le lieu de l’offre de vente. Dans l’hypothèse où il s’agirait, à cet égard, de documents déposés avec la déclaration sous serment, il conviendrait de constater que les documents accompagnant la déclaration sous serment ne permettraient pas de prouver un usage au sens du droit des marques. Ensuite, la chambre de recours aurait méconnu le fait que l’ajout des termes « by Sonja Kiefer » à la dénomination « fraas » ferait uniquement référence à une coopération entre l’intervenante et Sonja Kiefer. Dans un article présenté par l’intervenante et que la requérante désigne comme étant un « article litigieux », il serait, certes, question du « mariage » de FRAAS, entreprise de tradition, avec la société Sonja Kiefer Design GmbH, mais il n’y aurait toutefois aucune référence à des produits concrets. Enfin, la chambre de recours aurait également dû tenir compte du fait que les produits présentés dans les différentes brochures ne sont même pas uniquement ceux de la marque FRAAS. Dans ces brochures, l’intervenante aurait également fait la publicité de produits dans le cadre de son activité de marque distributeur. Or, dans la mesure où la dénomination sociale « fraas » a été indiquée dans ces brochures, il faudrait plutôt y voir une simple référence à l’entreprise.
70 Deuxièmement, la requérante allègue que, en ajoutant à la marque contestée des éléments figuratifs et verbaux supplémentaires, l’intervenante a altéré le caractère distinctif de la marque contestée. En effet, le chardon dont la marque aurait été assortie n’aurait pas été utilisé comme un élément décoratif. Cet élément aurait, en revanche, un caractère dominant, ne serait‑ce que par sa taille remarquable et sa position centrale. La mention « fraas », quant à elle, devrait être considérée comme un élément secondaire. Les autres slogans et lettrages utilisés par l’intervenante, « the scarf company » (la compagnie des foulards), « Sonja Kiefer collection » (collection de Sonja Kiefer) et « designed by Sonja Kiefer » (conçu par Sonja Kiefer), qui complètent la marque contestée, renforceraient et expliciteraient en même temps le caractère distinctif élevé, contrairement à la marque contestée.
71 L’EUIPO et l’intervenante réfutent ces arguments.
72 Ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 46 de la décision attaquée, la nature de l’usage d’une marque se rapporte, d’une part, à l’usage en tant que marque et, d’autre part, à l’usage sous la forme enregistrée ou sous une variante n’altérant pas son caractère distinctif.
73 En premier lieu, s’agissant de l’utilisation de la marque contestée en tant que marque, il y a lieu de constater que tant cette marque que la dénomination sociale de l’intervenante sont constituées du terme « fraas ».
74 À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour relative à l’interprétation de l’article 5, paragraphe 1, de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), en substance, une dénomination sociale, un nom commercial ou une enseigne n’a pas, en soi, pour finalité de distinguer des produits ou des services. En effet, une dénomination sociale a pour objet d’identifier une société, tandis qu’un nom commercial ou une enseigne a pour objet de signaler un fonds de commerce. Dès lors, lorsque l’usage d’une dénomination sociale, d’un nom commercial ou d’une enseigne se limite à identifier une société ou à signaler un fonds de commerce, il ne saurait être considéré comme étant fait « pour des produits », au sens de l’article 5, paragraphe 1, de ladite directive. En revanche, il y a usage « pour des produits » au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive lorsqu’un tiers appose le signe constituant sa dénomination sociale, son nom commercial ou son enseigne sur les produits qu’il commercialise. En outre, même en l’absence d’apposition, il y a usage « pour des produits » au sens de ladite disposition lorsque le tiers utilise ledit signe de telle façon qu’il s’établit un lien entre le signe constituant la dénomination sociale, le nom commercial ou l’enseigne du tiers et les produits commercialisés ou les services fournis par le tiers (arrêt du 11 septembre 2007, Céline, C‑17/06, EU:C:2007:497, points 21 à 23).
75 Ces considérations valent mutatis mutandis pour ce qui est de l’interprétation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, selon lequel, en substance, le titulaire d’une marque est déchu de ses droits notamment dans le cas où, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union « pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée ».
76 Ainsi, s’agissant de cette disposition, l’usage d’une dénomination sociale, d’un nom commercial ou d’une enseigne peut être considéré comme un usage « pour des produits » lorsque le titulaire de la marque de l’Union appose le signe constituant sa dénomination sociale, son nom commercial ou son enseigne sur les produits, ou, même en l’absence d’apposition du signe, lorsque le titulaire de la marque de l’Union utilise ledit signe de telle façon qu’il s’établit un lien entre le signe constituant la dénomination sociale, le nom commercial ou l’enseigne et les produits ou services. Si l’une ou l’autre de ces deux conditions est remplie, le fait qu’un élément verbal soit utilisé en tant que nom commercial de l’entreprise n’exclut pas qu’il puisse être utilisé en tant que marque pour désigner des produits ou des services.
77 Or, il en est ainsi dans la présente affaire. Ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 48 de la décision attaquée, dans les catalogues, dans les manuels de campagne, dans les brochures de collections, dans les planogrammes ainsi que dans les présentations de produits (annexes 6 à 8, 10, 12, et 15 à 17 de la déclaration sous serment), la marque contestée figure non seulement sur la page de couverture, mais elle figure également sur de nombreuses pages en dessous des produits et est apposée sur les produits eux-mêmes. Elle est également apposée sur les étiquettes qui ont été présentées par l’intervenante en tant qu’annexe 14 de la déclaration sous serment et elle est reconnaissable dans les reproductions de vitrines, aménagées de manière luxueuse, de grands magasins situés à Berlin (KaDeWe), à Dresde, à Kiel, à Munich ou à Hambourg (Allemagne) (annexe 18 de la déclaration sous serment). Ces éléments suffisent pour considérer que le terme « fraas » a été utilisé en tant que marque et non uniquement comme enseigne.
78 Ensuite, les arguments de la requérante mentionnés au point 69 ci‑dessus ne peuvent qu’être rejetés.
79 En effet, le fait que les étiquettes d’un produit ne soient pas apposées directement sur le produit lui-même n’est pas inconciliable avec le fait d’avoir utilisé une marque pour un produit. Une étiquette peut être utilisée pour un produit sans qu’il soit nécessairement besoin de l’apposer directement sur le produit. Souvent, les étiquettes ne sont, certes, pas datées, mais cela ne signifie pas qu’une étiquette n’a pas une valeur probante qui pourrait être prise en compte lors de l’appréciation globale des éléments de preuve. Contrairement à ce que suggère la requérante, les produits distribués par l’intervenante ont été proposés « à la vente ». Cela peut être notamment déduit des reproductions de vitrines des magasins situés à Berlin (KaDeWe), à Dresde, à Kiel, à Munch ou à Hambourg (annexe 18 de la déclaration sous serment). Il ne saurait être considéré que les produits de l’intervenante ont été exposés dans une vitrine sans qu’ils soient concomitamment proposés à la vente.
80 Dans la mesure où la requérante indique l’existence d’un article qu’elle désigne comme étant un « article litigieux » et dans lequel il serait question du partenariat de l’intervenante avec la société Sonja Kiefer Design GmbH, sans toutefois qu’une référence à des produits concrets soit reconnaissable, il y a lieu de constater que les conclusions contenues dans la décision attaquée ne reposent pas sur un tel article. En revanche, les conclusions contenues dans la décision attaquée se fondent, en ce qui concerne la coopération de l’intervenante avec la société Sonja Kiefer Design GmbH sur des extraits du site Internet figurant à l’adresse « http ://sonjakiefer.abcde.biz » (annexe 16 de la déclaration sous serment) et sur des extraits provenant de prospectus intitulé « Sonja Kiefer Collection-FRAAS » (annexe 17 de la déclaration sous serment). Dès lors, l’argument de la requérante quant à l’absence d’une référence à des produits concrets dans le document qu’elle désigne comme étant un « article litigieux » est inopérant.
81 Enfin, le fait que, dans les différentes brochures présentées par l’intervenante, cette dernière ait fait également la publicité de produits dans le cadre de son activité de marque distributeur et que les produits présentés ne soient donc pas uniquement ceux couverts par la marque contestée ne signifie aucunement que le terme « fraas » a été utilisé plutôt en tant que dénomination sociale ou comme une simple référence à l’entreprise et non en tant que marque.
82 En deuxième lieu, s’agissant de la question de savoir si la marque contestée a fait l’objet d’usage sous la forme enregistrée, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, est considéré comme usage sérieux d’une marque l’usage de la marque sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée.
83 L’objet de cette disposition, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les variations qui, sans en modifier le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être considéré comme limité aux situations dans lesquelles le signe, concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner les produits ou les services pour lesquels celle-ci a été enregistrée, constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce. En revanche, l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 ne permet pas au titulaire d’une marque enregistrée de se soustraire à l’obligation qui lui incombe de faire usage de cette marque en invoquant à son bénéfice l’utilisation d’une marque similaire faisant l’objet d’un enregistrement distinct [arrêt du 23 février 2006, Il Ponte Finanziaria/OHMI – Marine Enterprise Projects (BAINBRIDGE), T‑194/03, EU:T:2006:65, point 50].
84 En l’espèce, l’intervenante n’a pas altéré le caractère distinctif de la marque contestée en ajoutant le chardon figurant dans les combinaisons verbales et graphiques mentionnées au point 6 ci‑dessus. Ainsi que l’a fait valoir la chambre de recours, à juste titre, au point 58 de la décision attaquée, dans toutes les variantes utilisées, le mot « fraas » constitue l’élément dominant tandis que les éléments verbaux et figuratifs ajoutés occupent une place secondaire sur le plan optique. S’agissant de la reproduction d’un chardon entre les deux lettres « a », contrairement à ce que fait valoir la requérante, cet élément figuratif ne présente pas un caractère dominant, ni par sa taille ni par sa position centrale, ne serait-ce que parce qu’il ne peut être question de position centrale dudit élément figuratif. Il s’agit, en revanche, ainsi que l’a relevé la chambre de recours, d’un élément figuratif qui n’est pas prononcé, ni utilisé par le public pour se référer au signe en cause.
85 Enfin, la requérante cherche à établir un lien entre, d’une part, la position du chardon intégré dans la marque contestée et, d’autre part, le slogan « the scarf compagny » et les lettrages « Sonja Kiefer Collection » ou « designed by Sonja Kiefer ». Elle fait valoir que ces éléments renforcent le chardon en lui conférant un caractère dominant. Or, cette allégation ne peut qu’être rejetée. En effet, ainsi que l’a relevé la chambre de recours, à juste titre, aux points 60 et 61 de la décision attaquée, tous les éléments verbaux autres que le mot « fraas » sont considérablement plus petits et ils ne sont pas en mesure d’imprégner le souvenir du public. L’expression anglaise « the scarf company » décrit simplement l’activité principale de l’entreprise, à savoir la fabrication de foulards, alors que l’ajout « Sonja Kiefer Collection » ou « designed by Sonja Kiefer » constitue une indication informative qui se réfère à la créatrice des produits ainsi désignés. Aucune de ces expressions n’a une influence sur le caractère distinctif du mot « fraas ». Aucune de ces expressions n’altère donc le caractère distinctif de la marque contestée.
86 Partant, les arguments de la requérante mentionnés au point 70 ci‑dessus doivent être rejetés comme étant non fondés.
Sur l’importance de l’usage de la marque contestée et le lien entre la marque et certains produits
– Sur les contestations de la requérante d’ordre général concernant l’importance de l’usage de la marque contestée
87 La chambre de recours a indiqué aux points 65 à 71 de la décision attaquée que l’intervenante n’avait, certes, pas produit de factures ou de commandes établissant un usage quantitativement important de la marque, mais qu’elle avait communiqué néanmoins de nombreux catalogues, des manuels de campagne, des brochures de collections, des planogrammes ainsi que des présentations de produits (annexes 6 à 8, 10, 12 et 15 de la déclaration sous serment). Ces preuves couvriraient de manière continue la période allant de l’automne/hiver 2010 au printemps/été 2013. Les éléments produits révéleraient clairement à quel point la gamme de produits offerte par l’intervenante était large, notamment en ce qui concerne les foulards et les fichus, mais également en ce qui concerne les bonnets, les gants, les capes ainsi que d’autres accessoires comme des tuniques de plage, des ceintures, des chapeaux et des sacs. L’offre de produits couvrirait le domaine de la mode tant féminine que masculine, les produits étant disponibles sous les modèles, conceptions et couleurs les plus divers. De plus, l’intervenante aurait également clairement attiré l’attention sur des actions de marketing et de « merchandising » comme la publicité dans des revues renommées ou des stands de présentation des produits sous le signe FRAAS. Les catalogues montreraient également clairement les lieux en Allemagne où il existe des établissements et des représentations de l’intervenante. De même, les brochures et catalogues concernant la collaboration avec Sonja Kiefer (annexes 16 et 17 de la déclaration sous serment) révéleraient clairement que, en l’espèce, il y avait eu une réelle présence sur le marché et un usage sérieux visant à parvenir à une importance considérable. L’intervenante aurait produit des catalogues, des manuels de campagne, des brochures de collections, des planogrammes ainsi que des présentations de produits (annexes 6 à 8, 10, 12, et 15 à 17 de la déclaration sous serment), qui couvriraient de manière régulière et continue la période pertinente et qui révéleraient clairement que les produits avaient été proposés sur le marché et avaient ciblé un large public. Ces circonstances seraient également étayées par des reproductions de vitrines, aménagées de manière luxueuse, de grands magasins situés à Berlin (KaDeWe), à Dresde, à Kiel, à Munich ou à Hambourg (annexe 18 à la déclaration sous serment), ainsi que par des campagnes publicitaires dans des revues renommées (Brigitte, ELLE, MADAME, KaDeWe-Magazin). De plus, les divers articles de presse (annexes 20 et 21 de la déclaration sous serment) refléteraient tant durant la période pertinente qu’en dehors de celle-ci un certain succès commercial remporté par l’intervenante avec son offre de produits sous la marque contestée, ce qui serait directement lié à un usage quantitativement important. La fabrication de dépliants et d’autres matériels promotionnels et publicitaires (annexe 23 de la déclaration sous serment) confirmerait l’usage de la marque contestée d’une importance à tout le moins suffisante. La marque contestée serait reproduite sur toutes ces preuves, qui feraient également référence aux produits. Dès lors, il conviendrait de considérer les indications concernant le chiffre d’affaires réalisé grâce aux ventes de produits sous la marque contestée durant la période pertinente, qui figurent dans la déclaration sous serment, comme étant vérifiables et confirmées par des preuves objectives.
88 Selon la requérante, c’est à tort que la chambre de recours a considéré que la marque contestée avait été utilisée publiquement et vers l’extérieur, pour assurer un débouché aux produits ou aux services qu’elle représentait. La présentation de catalogues, de manuels de campagne et de brochures ne serait pas suffisante dans ce contexte. Des informations seraient requises sur la manière dont ces brochures, catalogues ou autres publicités analogues ont été diffusés, à qui ils ont été proposés et s’ils ont conduit à des achats potentiels ou effectifs. Or, dans les éléments de preuve produits par l’intervenante, il manquerait des informations de référence valables prouvant l’usage sérieux de la marque contestée se rapportant aux produits en cause. Les photographies de vues extérieures et de présentations de produits des magasins de détail, produites par l’intervenante, prouveraient uniquement le fait que les produits de l’intervenante ont bien été proposés à la vente. Il ne pourrait, toutefois, pas en être déduit à quelle date et dans quelles quantités les produits ont été proposés et vendus. Il n’en ressortirait pas davantage combien de clients potentiels se sont vu proposer ces produits, ni si l’offre a également abouti à une vente effective. Ensuite, l’intervenante aurait seulement communiqué le montant de son chiffre d’affaires global en précisant que 75 % de celui‑ci provenait de son activité de marque de distributeur. Même si le chiffre d’affaires de 25 % – qui serait donc attribuable à l’usage de la marque contestée – demeure non négligeable, la chambre de recours aurait méconnu que l’intervenante n’avait toujours pas prouvé avec quels produits enregistrés, et avec quelle part respective des 25 % restants, elle avait effectivement réalisé un chiffre d’affaires. Rien ne permettrait non plus d’identifier le nombre de ces produits, vendus en faible quantité, qui portaient effectivement une désignation visible et dont il aurait ainsi été fait un usage en tant que marque.
89 L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.
90 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, en principe, la présentation, par le titulaire de la marque contestée, de catalogues, de brochures et d’autres documents peut suffire pour prouver un usage sérieux, et ce même lorsque l’existence de ventes directes n’a pas été établie par des factures [voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2010, Engelhorn/OHMI – The Outdoor Group (peerstorm), T‑30/09, EU:T:2010:298, points 38 à 45]. En effet, les factures ne sont que l’un des éléments de preuve mentionnés à titre d’exemple dans la règle 22, paragraphe 4, du règlement no 2868/95.
91 Lorsque la requérante allègue que, afin de vérifier s’il y a eu usage sérieux de la marque contestée, des informations sont requises sur la manière dont les brochures, les catalogues et les autres publicités analogues ont été diffusés par l’intervenante, à qui ces documents ont été proposés et s’ils ont conduit à des achats potentiels ou effectifs (voir point 88 ci‑dessus), elle exagère les exigences auxquelles doit répondre l’intervenante dans le cadre de sa charge de la preuve. De telles informations peuvent, certes, être utiles pour vérifier si une marque de l’Union a fait l’objet d’un usage sérieux, mais elles ne sont pas toujours nécessaires à cette fin. Dès lors, cette allégation doit être rejetée.
92 De même, l’argument selon lequel les photographies de vues extérieures et de présentations de produits des magasins de détail produites par l’intervenante prouveraient uniquement le fait que les produits de l’intervenante ont bien été proposés à la vente, sans toutefois qu’il puisse être déduit à quelle date et dans quelles quantités les produits ont été proposés et vendus (voir point 88 ci‑dessus), doit être également écarté. Par cet argument, la requérante exige, en substance, que les éléments de preuve soient écartés s’ils ne contiennent pas toutes les indications requises en vertu de la règle 22 du règlement no 2868/95, en particulier les éléments temporels. Mais il n’est pas exclu que des éléments de preuve qui ne contiennent pas d’indication de la date de l’usage puissent être pertinents dans le cadre d’une appréciation globale. De tels éléments de preuve peuvent être pris en considération conjointement avec d’autres éléments de preuve datés. Les photographies de vues extérieures et de présentations de produits des magasins de détail produites par l’intervenante démontrent qu’il y a eu des ventes. Il n’est pas nécessaire qu’elles prouvent également à quelle date précise et dans quelles quantités certains produits ont été vendus. Ces deux derniers aspects peuvent être tirés d’autres éléments de preuve si besoin est.
93 Doit être également rejeté l’argument de la requérante, selon lequel les photographies de vues extérieures et de présentations de produits des magasins de détail ne permettraient pas de vérifier combien de clients se sont vu proposer ces produits ou si l’offre a également abouti à une vente effective (voir point 88 ci‑dessus). En effet, le fait de connaître le nombre de clients ou celui des ventes effectives n’est pas une condition nécessaire pour démontrer qu’il y a eu usage sérieux d’une marque.
94 Ensuite, l’argument de la requérante selon lequel, en substance, la chambre de recours aurait méconnu que l’intervenante n’avait pas prouvé avec quels produits enregistrés elle avait réalisé un chiffre d’affaires autre que le chiffre d’affaires attribuable à l’activité de marque de distributeur (voir point 88 ci‑dessus), ne saurait prospérer non plus. Il est vrai que, au point 3 de la déclaration sous serment, l’associé gérant de l’intervenante indique que 75 % du chiffre d’affaires de l’intervenante étaient attribuables à l’activité de marque distributeur, ce qui permet de déduire que les 25 % restants étaient, pour partie ou entièrement, attribuables aux ventes faites sous la marque contestée. Il n’empêche toutefois que la chambre de recours n’a pas opéré sur la base de tels chiffres (25 %, 75 % ou autres). En revanche, la chambre de recours a fait une appréciation globale des éléments de preuve fournis par l’intervenante.
95 Enfin, la requérante déplore le fait que rien ne permet d’identifier le nombre de produits « vendus en faible quantité » et « qui portaient effectivement une désignation visible et dont il aurait ainsi été fait un usage en tant que marque » (voir point 88 ci‑dessus). À cet égard, il suffit de relever qu’il n’y a pas besoin d’établir le nombre précis de produits pour déterminer s’il y a eu usage sérieux d’une marque, raison pour laquelle, cet argument doit être également rejeté.
96 Compte tenu de ce qui précède, les arguments de la requérante mentionnés au point 88 ci‑dessus doivent être rejetés comme étant non fondés.
– Sur l’importance de l’usage de la marque contestée pour les « sacs à main », relevant de la classe 18, et sur le lien entre la marque contestée et ces produits
97 Aux points 77 à 80 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, dans les catalogues et reproductions de produits, notamment des diverses collections comme celles réalisées en collaboration avec Sonja Kiefer, l’on trouvait des sacs à main sous différentes formes, couleurs et modèles, certains portant la marque contestée. Il serait manifeste que la fabrication de « sacs à main » n’était pas l’activité principale de l’intervenante, même si celle-ci ne proposait pas qu’un seul modèle de sacs à main. Cependant, les collections et la gamme de produits de l’intervenante contiendraient également des sacs à main, qui seraient assortis, de manière moderne et élégante, aux produits principaux et qui seraient proposés sur le marché tant conjointement avec ces derniers qu’isolément. Ainsi, en fonction des différentes tendances de la mode et, notamment, conjointement avec les produits principaux compris dans la classe 25, il y aurait lieu de reconnaître la volonté sérieuse de l’intervenante de développer des débouchés dans le domaine des sacs à main. Compte tenu de ces éléments, la chambre de recours a conclu qu’il y avait eu un usage effectif et sérieux de la marque pour des « sacs à main » (compris dans la classe 18).
98 La requérante estime que la décision attaquée ne permet pas de reconnaître de quoi résulterait un usage sérieux suffisant en ce qui concerne l’importance quantitative de l’usage de la marque contestée pour des « sacs à main ». L’argument de la chambre de recours selon lequel la fabrication de sacs à main ne serait pas l’activité principale de l’intervenante laisserait plutôt penser que la vente de sacs à main sous la marque contestée ne contribuerait pas de manière très significative au chiffre d’affaires de l’entreprise. Certes, dans certaines circonstances, une preuve indirecte, sous la forme, par exemple, de catalogues où figure la marque, pourrait être suffisante pour prouver l’importance de l’usage dans le contexte d’une appréciation globale. Toutefois, l’existence de telles « certaines circonstances » n’aurait cependant pas été établie et encore moins justifiée par la chambre de recours.
99 L’EUIPO et l’intervenante réfutent ces arguments.
100 La requérante ne conteste pas le fait – invoqué par la chambre de recours au point 77 de la décision attaquée – que, « [d]ans les catalogues et reproductions de produits, notamment des diverses collections comme celles réalisées en collaboration avec Sonja Kiefer, l’on trouve des sacs à main sous différentes formes, couleurs et modèles, certains portant la marque [contestée] ». De même, la requérante ne remet pas en question le constat figurant au point 79 de ladite décision, selon lequel « les collections et la gamme de produits de l[’intervenante] contiennent également des sacs à main, qui sont assortis, de manière moderne et élégante aux produits principaux et qui sont proposés sur le marché tant en combinaison avec ces derniers qu’isolément ». Il résulte des éléments du dossier du Tribunal que l’intervenante a bel et bien commercialisé des sacs à main. Au surplus, il résulte des photocopies desdits catalogues et desdites reproductions de produits que la marque contestée est apposée soit sur les sacs à main –parfois sur la poignée d’un tel produit –, soit sur les étiquettes accompagnant un sac à main dans une devanture de magasin.
101 Dans ces conditions, il ne saurait être constaté que la chambre de recours n’était pas fondée à retenir qu’il y avait un lien entre la marque contestée et les produits « sacs à main » relevant de la classe 18.
102 Par les arguments mentionnés au point 98 ci‑dessus, la requérante n’a pas remis en cause à suffisance de droit le fait qu’il y a eu un usage important de la marque contestée concernant lesdits « sacs à main ».
103 En effet, premièrement, l’argument selon lequel le fait que la fabrication de sacs à main n’est pas l’activité principale de l’intervenante laisserait plutôt penser que la vente de ces produits sous la marque contestée ne contribuerait pas de manière très significative au chiffre d’affaires de l’intervenante est une simple spéculation. En effet, même si une entreprise comme l’intervenante se consacre principalement à la commercialisation de châles et de fichus et que son activité ne vise la commercialisation d’un produit autre que lesdits châles et fichus (tels que les sacs à main) qu’accessoirement ou dans une moindre mesure, cela ne signifie aucunement que la vente dudit produit n’a pas contribué de manière importante au chiffre d’affaires global de cette entreprise.
104 Deuxièmement, l’argument tiré en substance de ce que l’intervenante n’aurait pas réussi à prouver indirectement l’importance de l’usage de la marque contestée pour les sacs à main, sous la forme, par exemple, de catalogues où figure la marque, ne peut qu’être rejeté. En effet, le grand nombre de catalogues et de reproductions de produits auxquels fait référence la chambre de recours aux points 77 et 79 de la décision attaquée, sont justement de telles preuves indirectes. En outre, il est difficilement concevable qu’un catalogue puisse contenir des informations sur le nombre de ventes des produits qui y figurent.
105 Les arguments mentionnés au point 98 ci‑dessus doivent, dès lors, être rejetés dans leur totalité.
– Sur l’importance de l’usage de la marque contestée pour les « vêtements, chapellerie et accessoires », relevant de la classe 25, et sur le lien entre la marque contestée et ces produits
106 Aux points 83 à 89 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que les éléments de preuve produits par l’intervenante révélaient un usage pour des foulards, des fichus, des capes, des écharpes à capuche, des gants, des ceintures et des bonnets, sachant que les produits visés seraient destinés tant aux femmes qu’aux hommes. S’agissant des produits « Foulards, fichus et châles, excepté les produits en fourrure et en imitations de fourrures ; gants, bonnets », la preuve de l’usage de la marque contestée aurait donc été apportée. S’agissant des « vêtements et chapellerie », il y aurait lieu de se livrer à la constatation de principe selon laquelle ces termes génériques utilisés dans la classification de Nice pour la classe 25 peuvent être répartis en sous‑catégories. Eu égard à la variété des vêtements pour lesquels la marque a été utilisée, comme les foulards, les châles, les gants, les ceintures, les écharpes à capuche ou les capes, mais également divers articles de chapellerie comme les bonnets, les capuches ou les fichus, il serait justifié de reconnaître, à l’intérieur de la classe 25, l’existence d’un usage propre au maintien des droits pour les produits « Vêtements », d’une part, et les produits « Chapellerie », d’autre part. S’agissant des produits « Accessoires vestimentaires textiles et chapellerie », relevant également de la classe 25, il y aurait lieu de constater que cette catégorie de produits relève des termes génériques que sont les « vêtements » et la « chapellerie ». Il ne serait pas possible d’opérer une distinction nette entre les « accessoires vestimentaires textiles » et les « vêtements ». Dès lors, les produits précités pour lesquels l’intervenante aurait apporté la preuve de l’usage devraient également être qualifiés d’« accessoires vestimentaires textiles ou chapellerie ».
107 Selon la requérante, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits n’emporte protection que pour la sous-catégorie dont relèvent les produits pour lesquels la marque a été effectivement utilisée. En l’espèce, la chambre de recours aurait dû former des sous‑catégories au sein de la classe 25 et limiter la protection de la marque contestée aux produits pour lesquels elle considérait que la preuve d’un usage sérieux avait été rapportée. Compte tenu du fait que, selon les notes explicatives de la classification de Nice, la classe 25 inclut notamment la sous‑catégorie des « parties de vêtements », mais que le produit « Parties de vêtements » couvrirait un domaine tellement vaste que cette notion pourrait être, elle aussi, subdivisée en un bon nombre de sous-catégories, la marque contestée devrait être déchue en ce qui concerne la sous‑catégorie « Parties de vêtements » dans la mesure où les produits proposés par l’intervenante ne tombent pas sous le coup des sous‑catégories « Chapellerie » et « Accessoires ». S’agissant des produits « Ceinture, capuchons et capes », contrairement à ce qu’estime la chambre de recours, ces trois produits ne sauraient soutenir à eux seuls la vaste catégorie des « vêtements ».
108 S’agissant de l’usage du produit « Chapellerie », la chambre de recours aurait dû former également des sous‑catégories. La chambre de recours parlerait, d’ailleurs, de « bonnets, capuches ou fichus » en tant que couvre-chefs, alors qu’un découpage supplémentaire en sous-catégories serait envisageable d’emblée sous ces dénominations.
109 En ce qui concerne les « accessoires vestimentaires textiles et chapellerie (compris dans la classe 25) », la requérante soutient que l’argumentation de la chambre de recours ne permet pas de dire en détail si les écharpes, les fichus et les châles, les gants et les bonnets ainsi que les capes, les capuches et les ceintures doivent être considérés comme « Accessoires vestimentaires et chapellerie » ou bien, pris indépendamment, comme des vêtements ou des couvre-chefs.
110 L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.
111 S’agissant des arguments mentionnés aux points 107 à 109 ci‑dessus, il y a lieu d’opérer deux constats.
112 Premièrement, par ces arguments, la requérante remet en cause l’existence d’un lien entre la marque contestée et certains produits relevant de la classe 25 qui seraient, certes, couverts par ladite marque, mais pour lesquels l’intervenante n’aurait pas apporté la preuve d’un usage sérieux. Deuxièmement, lorsqu’elle remet en cause ledit lien entre la marque contestée et les produits litigieux, la requérante vise concrètement le rapport existant entre la marque et les « vêtements », la « chapellerie » et les « accessoires vestimentaires textiles et chapellerie ». En revanche, le lien entre ladite marque et les « foulards, fichus et châles, excepté les produits en fourrure et en imitations de fourrures ; gants, bonnets » n’est pas remis en cause. De même, le lien existant entre la marque contestée et les produits dénommés « Bonnets, capuches ou fichus » n’est pas non plus en cause en l’espèce.
113 Les arguments de la requérante ne sauraient toutefois prospérer.
114 Il est vrai que les produits dénommés « Vêtements », « Chapellerie » et « Accessoires vestimentaires textiles et chapellerie », relevant de la classe 25, constituent des catégories larges de produits.
115 Il est également vrai que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, en principe, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou services n’emporte protection que pour la ou les sous‑catégories dont relèvent les produits ou services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée. Il s’agit là de la reconnaissance d’un usage partiel. Néanmoins, si la notion d’usage partiel a pour fonction de ne pas rendre indisponibles des marques dont il n’a pas été fait usage pour une catégorie de produits donnée, elle ne doit néanmoins pas avoir pour effet de priver le titulaire de la marque antérieure de toute protection pour des produits qui, sans être rigoureusement identiques à ceux pour lesquels il a pu prouver un usage sérieux, ne sont pas essentiellement différents de ceux-ci et relèvent d’un même groupe qui ne peut être divisé autrement que de façon arbitraire. Il convient à cet égard d’observer qu’il est en pratique impossible au titulaire d’une marque d’apporter la preuve de l’usage de celle-ci pour toutes les variantes imaginables des produits concernés par l’enregistrement [voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, EU:T:2005:288, points 45 et 46].
116 Dans ces conditions, ainsi que l’a relevé la chambre de recours, à juste titre, en substance au point 88 de la décision attaquée, eu égard au fait que la catégorie de produits dénommés « Vêtements » inclut les foulards, les châles, les gants, les ceintures, les écharpes à capuche ou les capes, il est justifié de reconnaître l’existence d’un lien entre la marque contestée et les produits dénommés « Vêtements ». De même, comme les produits désignés « Chapellerie » incluent divers articles de chapellerie tels que les bonnets, les capuches ou les fichus, il est justifié de reconnaître l’existence d’un lien entre la marque contestée et les produits dits « Chapellerie ».
Sur l’appréciation globale de l’usage de la marque contestée
117 Au point 91 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté, en substance, dans le cadre d’une appréciation globale de l’ensemble des preuves, qu’une lecture combinée de la déclaration sous serment avec les autres éléments de preuve fournis par l’intervenante, notamment des catalogues, des manuels de campagne, des brochures de collections et des planogrammes ainsi que des présentations de produits (annexes 6 à 8, 10, 12 et 15 à 17 de la déclaration sous serment), l’intervenante avait prouvé un usage propre au maintien des droits de la marque contestée en ce qui concerne les produits faisant l’objet du recours devant elle. Ces éléments de preuve permettraient de conclure à un usage, au cours de la période pertinente, à une utilisation géographique, notamment en Allemagne et en Autriche, à un usage en tant que marque et dans une forme qui n’aurait pas altéré de manière substantielle le caractère distinctif, ainsi qu’à un usage suffisamment important.
118 Selon la requérante, c’est à tort que la chambre de recours a retenu l’existence d’un usage sérieux de la marque contestée pour les facteurs pertinents tels que la durée, le lieu, la nature et l’importance de l’usage, en ce qui concerne les produits litigieux. Certes, en raison d’une certaine interdépendance entre les facteurs pertinents, un faible volume de produits commercialisés sous une certaine marque peut être compensé, par exemple, par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement. Néanmoins, l’intervenante n’ayant pas été en mesure de prouver un usage sérieux pour l’ensemble des facteurs pertinents, il n’y aurait, en l’espèce, aucun facteur « allant au-delà de ce qui est obligatoire » permettant de compenser l’absence de preuve des autres facteurs respectifs. En particulier, les éléments de preuve produits par l’intervenante à l’appui de sa déclaration sous serment ne conféreraient à celle‑ci, lors d’une évaluation globale, aucune valeur probante (supérieure), si bien que ladite déclaration ne saurait, dans le cadre d’une appréciation globale, justifier un usage sérieux.
119 L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.
120 À titre liminaire, il y a lieu de relever que l’évaluation des éléments de preuve obéit au principe de l’appréciation globale. Une appréciation séparée des éléments de preuve pertinents, chacun considéré isolément, n’est pas appropriée [voir, en ce sens, arrêt du 17 février 2011, J & F Participações/OHMI – Plusfood Wrexham (Friboi), T‑324/09, non publié, EU:T:2011:47, point 31]. En revanche, les preuves produites doivent être appréciées dans leur globalité et reliées entre elles afin d’établir les indications pertinentes relatives au lieu, à la durée, à l’importance et à la nature de l’usage. Par ailleurs, il se peut que, prise isolément, aucune des preuves ne serait, en soi, de nature à établir l’usage de la marque litigieuse, mais que, dans le cadre d’une analyse globale de toutes les preuves, un usage propre au maintien des droits puisse être établi. En effet, il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits (voir, en ce sens, arrêt du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, non publié, EU:C:2008:234, point 36).
121 En l’espèce, l’élément central du raisonnement visant l’existence d’un usage sérieux de la marque contestée pour les produits en cause est la déclaration sous serment de l’associé gérant de l’intervenante.
122 Ainsi qu’il a d’ores et déjà relevé aux points 42 à 49 ci‑dessus, la requérante n’a pas abouti à remettre en cause la valeur probante intrinsèque de la déclaration sous serment en cause. La durée, la nature, l’importance de l’usage de cette marque ainsi que le lien existant entre celle‑ci et les produits litigieux peuvent être déduits de ladite déclaration et sont corroborés de manière cohérente et convaincante par les autres éléments de preuves présentés par l’intervenante, et notamment par les annexes 1 à 23 de ladite déclaration. Sur ces points, la déclaration sous serment est univoque, dépourvue de contradictions et cohérente. Il n’existe aucun élément de fait de nature à remettre en question sa sincérité.
123 Par un grand nombre d’arguments – en ce compris les arguments dont l’examen a dû être reporté à un stade ultérieur (voir les points 49 et 66 ci‑dessus) –, la requérante cherche, certes, à remplacer l’appréciation détaillée des nombreux documents visant à démontrer l’usage de la marque contestée, effectuée par la chambre de recours, mais elle ne démontre aucune erreur, ni, d’ailleurs, une quelconque faiblesse de la déclaration sous serment.
124 En effet, certes, l’intervenante n’a pas produit de factures concernant les ventes effectives. En ce qui concerne le volume des ventes effectives, le seul élément de preuve est la déclaration sous serment. Au point 1 de cette déclaration, on peut lire notamment que l’intervenante conçoit, produit et commercialise au total 8 millions de châles par an. Environ 2 millions de châles produits sont commercialisés sous la marque contestée, ainsi qu’il ressort du point 3 de la déclaration sous serment. Des étiquettes portant la marque contestée utilisées pour divers produits de l’intervenante ont été produites au nombre de 2 millions entre 2008 et 2013, ainsi qu’il résulte du point 11 de ladite déclaration sous serment. Il résulte enfin notamment du point 13 de la déclaration sous serment que, pour la période 2007-2010, le chiffre d’affaires annuel total de la collection contrôlée par Mme Sonja Kiefer, commercialisée sous la marque contestée, est passé d’environ 2,1 millions d’euros à 36 millions d’euros.
125 Mais la requérante n’a pas remis en cause ces chiffres de manière étayée. De fait, elle n’a pas soulevé un élément qui pourrait inciter le Tribunal à douter de l’exactitude des chiffres avancés. Ainsi, le Tribunal ne dispose pas d’éléments qui permettraient de douter de la crédibilité desdits chiffres. Il ne peut donc être conclu qu’il y a eu un faible volume de produits commercialisés sous la marque contestée.
126 En tout état de cause, même si l’on était de l’avis contraire, il y aurait lieu de rappeler qu’un faible volume de produits commercialisés sous une marque peut être compensé par une forte intensité ou une constance dans le temps de l’usage de cette marque. Or, en ce qui concerne la constance dans le temps de l’usage de la marque contestée, les catalogues, les manuels de campagne, des brochures de collections et des planogrammes ainsi que des présentations de produits (annexe 6 à 8, 10, 12 et 15 à 17 de la déclaration sous serment) sont convaincants. Ces éléments démontrent un usage constant au cours de la période pertinente.
127 En ce qui concerne l’existence d’un lien entre la marque contestée et les produits litigieux, il a d’ores et déjà été relevé que la requérante n’était pas parvenue à remettre en cause ledit lien (voir points 100 à 103 et 111 à 116 ci‑dessus). Par ailleurs, si la règle 22 du règlement no 2868/95 mentionne des indications concernant le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage et donne des exemples de preuves acceptables, comme les emballages, étiquettes, barèmes de prix, catalogues, factures, photographies, annonces dans les journaux et déclarations écrites, cette règle n’indique nullement que chaque élément de preuve doit nécessairement contenir des informations sur chacun des quatre éléments sur lesquels doit porter la preuve de l’usage sérieux, à savoir le lieu, la durée, la nature et l’importance de l’usage [arrêt du 16 novembre 2011, Buffalo Milke Automotive Polishing Products/OHMI – Werner & Mertz (BUFFALO MILKE Automotive Polishing Products), T‑308/06, EU:T:2011:675, point 61].
128 Au vu de ce qui précède, il ne peut qu’être conclu que la requérante n’a pas démontré l’existence d’une erreur dans le raisonnement de la chambre de recours visant à établir qu’il y a eu usage sérieux de la marque contestée pour les produits litigieux.
129 Par conséquent, le moyen unique doit être rejeté et, partant, le recours dans son intégralité, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité de la seconde partie du premier chef de conclusions par laquelle la requérante demande que le Tribunal ordonne que la marque contestée soit également annulée pour les produits litigieux.
Sur les dépens
130 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.
131 La décision attaquée ne devant pas être annulée, le point 2 du dispositif de celle-ci reste en vigueur et constitue la base pour la récupération des dépens de l’intervenante dans la procédure devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêts du 4 octobre 2017, Intesa Sanpaolo/EUIPO – Intesia Group Holding (INTESA), T‑143/16, non publié, EU:T:2017:687, point 74, et du 27 janvier 2021, Turk Hava Yollari/EUIPO – Sky (skylife), T‑382/19, non publié, EU:T:2021:45, point 57]. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu pour le Tribunal de décider sur la demande de l’intervenante visant à la condamnation de la requérante aux dépens de la procédure devant la chambre de recours.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Puma SE est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et par V. Fraas GmbH dans le cadre de la présente procédure.
Tomljenović | Schalin | Nõmm |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 juin 2022.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.
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