Green Power Technologies v Commission (Arbitration clause — Seventh Framework Programme for research, technological development and demonstration activitie - Judgment) French Text [2022] EUECJ T-753/20 (14 December 2022)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2022/T75320.html
Cite as: ECLI:EU:T:2022:806, [2022] EUECJ T-753/20, EU:T:2022:806

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

14 décembre 2022  (*)

« Clause compromissoire – Septième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) – Contrat de subvention – Coûts éligibles – Rapport de l’OLAF ayant constaté un caractère non éligible de certaines dépenses exposées – Remboursement des sommes versées – Charge de la preuve – Règlement (UE, Euratom) no 883/2013 – Obligation de motivation – Enrichissement sans cause – Recours en annulation – Rapport de l’OLAF – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑753/20,

Green Power Technologies, SL, établie à Bollullos de la Mitación (Espagne), représentée par Mes A. León González et A. Martínez Solís, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. B. Araujo Arce et J. Estrada de Solà, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Royaume d’Espagne, représenté par MM. L. Aguilera Ruiz et Á. Ballesteros Panizo, en qualité d’agents,

partie intervenante,


LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé, lors des délibérations, de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise et Mme R. Frendo (rapporteure), juges,

greffier : Mme P. Nuñez Ruiz, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure, notamment la requête déposée au greffe du Tribunal le 21 décembre 2020,

à la suite de l’audience du 30 juin 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours, la requérante, Green Power Technologies, SL, demande, d’une part, sur le fondement de l’article 263 TFUE, l’annulation du rapport de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) du 9 juillet 2018 portant la référence B.4(2017)4393 et, d’autre part, sur le fondement de l’article 272 TFUE, qu’il soit constaté, premièrement, que les montants avancés par la Commission européenne en exécution du contrat de subvention no 2567509 (ci-après le « contrat de subvention »), conclu dans le contexte du septième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) (ci-après le « programme-cadre »), en vue de financer plusieurs projets correspondants, dont, notamment, le projet Powair, portant sur le développement de « batteries Zinc-flux d’air pour le réseau de distribution d’énergie électrique » (ci-après le « projet Powair » ou le « projet litigieux »), et dont le recouvrement est demandé par l’émission de la note de débit no 3242010798 correspondaient à des coûts éligibles et, deuxièmement, que les montants réclamés par la Commission par l’émission de la note de débit no 3242010800, relative aux pénalités contractuelles, n’étaient pas exigibles.

I.      Antécédents du litige

2        La requérante est une société de droit espagnol opérant dans le secteur de l’énergie.

3        En vertu du programme-cadre, le 23 septembre 2010, la Commission a conclu avec la coordinatrice d’un consortium de bénéficiaires (ci-après le « consortium ») le contrat de subvention en vue de financer plusieurs projets, dont, notamment, le projet Powair. La durée dudit projet était de 48 mois à compter du 1er novembre 2010.

4        La requérante était une des sociétés faisant partie du consortium participant au projet litigieux.

5        En vertu du contrat de subvention, la requérante a reçu une subvention d’un montant total de 324 478,41 euros, représentant 75 % du coût total du projet litigieux.

6        L’article II.22 des conditions générales du contrat de subvention (ci-après les « conditions générales ») autorisait les services de la Commission à procéder, à tout moment au cours de la mise en œuvre du projet litigieux et jusqu’à cinq ans après son achèvement, à un audit financier, lequel pouvait être mené soit par des auditeurs externes, soit par la Commission elle-même, y compris par son organe, l’OLAF.

7        Le 21 août 2015, à la suite d’une plainte anonyme, l’OLAF  a ouvert, sur le fondement de l’article 3 du règlement (UE, Euratom) no 883/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 septembre 2013, relatif aux enquêtes effectuées par l’OLAF et abrogeant le règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (Euratom) no 1074/1999 du Conseil (JO 2013, L 248, p. 1), une enquête enregistrée sous la référence OF/2015/0759, portant sur 28 projets auxquels la requérante avait participé au titre du programme‑cadre, dont, notamment, le projet Powair.

8        Dans le rapport de clôture de l’enquête, en date du 9 juillet 2018 (ci-après le « rapport de l’OLAF »), l’OLAF a, en substance, constaté que diverses irrégularités avaient été commises lors de la mise en œuvre des 28 projets menés par la requérante. L’OLAF a relevé, premièrement, que la requérante avait demandé le remboursement de coûts sur la base de budgets artificiellement gonflés, deuxièmement, que celle-ci avait reçu des subventions dépassant le coût des projets subventionnés (en violation du principe de non-profit), troisièmement, qu’elle n’avait pas de comptabilité fiable ou adéquate pour certifier les coûts réels desdits projets et, quatrièmement, qu’elle avait sous-traité des tâches sans en avoir préalablement informé l’autorité chargée de l’octroi des subventions et obtenu son autorisation obligatoire, selon les modalités prévues dans le contrat de subvention. L’OLAF en a conclu que les faits susmentionnés avaient causé une perte pour le budget de l’Union européenne et constituaient une irrégularité au sens du règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers [de l’Union] (JO 1995, L 312, p. 1). Il a ajouté que lesdits faits pourraient également constituer une fraude pour le budget de l’Union au sens de l’article 306 du code pénal espagnol.

9        Sur la base du rapport de l’OLAF, le 14 mai 2019, la Commission a adressé à la requérante une lettre d’information préalable (ci-après la « lettre d’information préalable »), relevant les irrégularités visées au point 8 ci-dessus au regard du projet litigieux, accompagnée, en annexe, du rapport de l’OLAF. Il s’agissait de recouvrer une partie de la subvention qui avait été indûment payée ainsi que d’imposer des sanctions contractuelles au titre du contrat de subvention pour un montant global de 175 426,24 euros (ci-après le « montant litigieux »).

10      À cette occasion, la Commission a également invité la requérante à présenter ses observations sur les éléments figurant dans la lettre d’information préalable ainsi que sur le rapport de l’OLAF, en précisant qu’elle ne prendrait de décision finale, en l’absence de réponse de la requérante, qu’à l’expiration d’un délai de 30 jours calendaires.

11      Le 21 juin 2019, la requérante a présenté ses observations sur la lettre d’information préalable.

12      Le 11 février 2020, la Commission a envoyé à la requérante une lettre d’information préalable complémentaire (ci-après la « lettre d’information complémentaire ») en l’invitant à présenter ses observations sur l’annexe 16 du rapport de l’OLAF, portant sur la sous‑traitance d’une partie de l’activité couverte par le projet litigieux au profit d’un membre du consortium (ci-après l’« annexe 16 »). Ladite annexe était jointe à la lettre d’information complémentaire.

13      Le 29 mai 2020, la requérante a présenté ses observations sur la lettre d’information complémentaire.

14      Par lettre du 9 octobre 2020, la Commission a adressé à la requérante, d’une part, la note de débit no 3242010798, établie au titre de l’article II.22, paragraphe 6, des conditions générales du contrat de subvention, exigeant le remboursement de la partie de la subvention qui avait été indûment payée au titre du projet Powair, et, d’autre part, la note de débit no 3242010800, établie au titre de l’article II.24, paragraphe 2, desdites conditions, relative aux pénalités contractuelles (ci-après, dénommées ensemble, les « notes de débit litigieuses »), la somme des deux montants réclamés correspondant au montant litigieux.

II.    Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        reconnaître et déclarer que, par le rapport [de l’OLAF] et par la décision de le ratifier et de le valider, l’OLAF et la Commission, ont, chacun, violé l’acquis juridique de l’Union, et en conséquence, annuler ledit rapport et la procédure ouverte par la Commission ;

–        reconnaître et déclarer qu’elle a correctement satisfait aux obligations contractuelles qui lui incombaient en vertu du projet litigieux et, partant, déclarer éligibles les dépenses dont la récupération est demandée par les notes de débit litigieuses ;

–        eu égard à ce qui précède, déclarer que la réclamation émise par la Commission s’agissant du montant litigieux est infondée et abusive et, en conséquence, annuler les notes de débit litigieuses, ainsi que la lettre d’information préalable qui en est à l’origine ainsi que les actes ultérieurs à celle-ci ;

–        à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la nullité des notes de débit ne serait pas prononcée, déclarer la responsabilité de la Commission pour enrichissement sans cause ;

–        condamner la Commission aux dépens ou, dans l’hypothèse où les conclusions formulées dans la présente requête ne seraient pas accueillies, s’abstenir de condamner la requérante aux dépens compte tenu de la complexité de la présente affaire, ainsi que des doutes de fait et de droit qu’elle présente.

16      La Commission, soutenue par le Royaume d’Espagne, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours manifestement irrecevable et, en tout état de cause, irrecevable pour autant qu’il est dirigé contre le rapport de l’OLAF ;

–        rejeter le recours pour le surplus en ce qu’il est fondé sur l’article 272 TFUE ;

–        condamner la requérante aux dépens.

17      Avant l’introduction du présent recours, la requérante a introduit devant le Tribunal, le 24 août 2020, un autre recours dirigé contre l’Entreprise commune ECSEL, devenue entretemps, l’Entreprise commune « Technologie numériques clés » et la Commission enregistré sous le numéro T‑533/20, fondé, d’une part, sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation du rapport de l’OLAF et, d’autre part, sur l’article 272 TFUE et tendant, en substance, à faire constater que le montant avancé par l’Entreprise commune ECSEL, à laquelle a succédé juridiquement l’Entreprise commune « Technologie numériques clés », dont le recouvrement avait été demandé en exécution d’un autre contrat conclu, à l’instar du projet litigieux, au titre du programme-cadre, correspondait à des coûts éligibles. Par l’ordonnance du 16 juin 2021, Green Power Technologies/Commission et Entreprise commune ECSEL (T‑533/20, non publiée, EU:T:2021:375), le Tribunal a déclaré ce recours partiellement irrecevable.

III. En droit

18      À l’appui de son recours, la requérante invoque cinq moyens, tirés, respectivement, en substance :

–        le premier, de la violation des droits fondamentaux et de l’acquis juridique de l’Union par l’OLAF et par la Commission ;

–        le deuxième, de l’éligibilité des dépenses déclarées dans le cadre du projet litigieux au regard d’une analyse générale de l’éligibilité préalable à l’analyse détaillée ;

–        le troisième, de l’éligibilité des dépenses déclarées dans le cadre du projet litigieux au regard d’une analyse individualisée et détaillée des irrégularités prétendument commises par elle ;

–        le quatrième, de la violation de l’article 296 TFUE et des articles 41, 42, 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») ;

–        le cinquième, à titre subsidiaire, de l’enrichissement sans cause de la Commission.

A.      Sur la recevabilité

1.      Sur la recevabilité des documents annexés à la réplique

19      En annexe à la réplique, la requérante a produit de nouveaux éléments de preuve visant, en substance, à démontrer l’éligibilité des dépenses engagées dans le cadre du projet litigieux.

20      La Commission conteste la recevabilité des documents annexés à la réplique, en raison de leur dépôt tardif au sens de l’article 85, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.

21      Aux termes de l’article 85, paragraphe 1, du règlement de procédure, les preuves et les offres de preuve sont présentées dans le cadre du premier échange de mémoires. En vertu de l’article 85, paragraphe 2, du même règlement, les parties principales peuvent encore produire des preuves ou faire des offres de preuve dans la réplique et dans la duplique à l’appui de leur argumentation, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié.

22      Or, les annexes C.1 à C.11 ont été présentées au stade de la réplique, de sorte que leur présentation est intervenue tardivement au sens de l’article 85, paragraphe 1, du règlement de procédure. Dès lors, il incombe à la requérante de justifier le dépôt de ces annexes au stade de la réplique, conformément à l’article 85, paragraphe 2, dudit règlement.

23      Toutes les annexes de la réplique portent une date antérieure à celle du dépôt de la requête et leur production tardive n’est pas justifiée au sens de l’article 85, paragraphe 2, du règlement de procédure, puisque :

–        la requérante admet expressément qu’elle n’avait pas versé les documents figurant aux annexes C.1 et C.6, attestant, en substance, les dépenses engagées dans le cadre du projet litigieux, avec la requête, dès lors qu’il s’agissait d’éléments qui étaient déjà en possession de la Commission, et qu’une telle explication ne saurait valablement justifier le dépôt tardif de ces documents au sens de l’article 85, paragraphe 2, du règlement de procédure ;

–        la production tardive de l’annexe C.2, qui consiste en un document intitulé « Plainte du ministère public espagnol », présenté de manière accessoire à l’annexe C.1 pour démontrer l’authenticité des documents figurant dans cette dernière, n’est justifiée d’aucune autre manière par la requérante ;

–        la requérante prétend avoir versé l’annexe C.4, comportant les comptes audités des années d’exécution du projet litigieux, dans un « souci d’exhaustivité », ce qui ne peut davantage constituer un motif valable pour justifier la production tardive de ladite annexe ;

–        s’agissant des annexes C.3, C.5 et C.7, qui comportent des documents visant à contester les irrégularités figurant dans le rapport de l’OLAF, en lien avec les dépenses engagées par la requérante au cours de la période éligible et avec la sous-traitance des tâches du projet litigieux, la requérante étant déjà expressément informée, bien avant l’introduction de sa requête, des irrégularités qui lui étaient reprochées, elle était en mesure, dès le début de la présente instance, de se prévaloir des éléments figurant auxdites annexes ;

–        l’annexe C.8, qui comporte un courriel de la requérante adressé à l’entité C, et l’annexe C.9, qui contiendrait un document joint audit courriel (ci-après le « document le plus pertinent »), toutes deux ayant joué un rôle prépondérant dans l’analyse faite par l’OLAF à l’annexe 16 et ayant, par ailleurs, déjà été expressément invoquées par la requérante à l’appui des arguments avancés dans la requête, n’ont pas été produites au stade du premier échange des mémoires et qu’aucune justification de leur dépôt tardif n’a été apportée ;

–        enfin, en ce qui concerne les documents produits en tant qu’annexes C.10 et C.11, visant à répondre à l’argument de la Commission figurant dans le mémoire en défense selon lequel la requérante n’aurait déclaré ni la sous-traitance du projet litigieux ni son lien avec le sous-traitant, il apparaît que, non seulement cette irrégularité figurait déjà dans le rapport de l’OLAF, mais que, en outre, la requérante avait déjà insisté sur l’absence de sous-traitance dans la requête.

24      Questionnée par le Tribunal lors de l’audience sur la justification éventuelle de la production des annexes C.1 à C.11 au seul stade de la réplique, la requérante s’est bornée à réitérer qu’elle n’avait pas déposé ces documents avec la requête, car ceux-ci étaient déjà en possession de la Commission et étayaient le rapport de l’OLAF. Or, ainsi qu’il a été indiqué au point 23, premier tiret, ci-dessus, cette explication ne constitue pas un motif valable pour la présentation d’annexes lors du second tour des mémoires.

25      Il convient donc d’écarter l’ensemble des annexes jointes à la réplique comme irrecevables, en vertu de l’article 85, paragraphe 2, du règlement de procédure.

2.      Sur la recevabilité du premier chef de conclusions

26      Par son premier chef de conclusions, la requérante demande, en substance, l’annulation du rapport de l’OLAF et de la procédure ouverte par la Commission à la suite dudit rapport pour « violation de l’acquis juridique de l’Union ».

27      Cependant, ainsi que le fait valoir la Commission, soutenue par le Royaume d’Espagne, ne constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation que les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celle-ci (arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9, et du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, EU:C:2010:40, point 51).

28      Or, en premier lieu, en ce qui concerne le rapport de l’OLAF, il découle notamment du considérant 31 et de l’article 11 du règlement no 883/2013 que l’avis soumis par ce dernier dans un rapport final n’emporte aucune obligation, même procédurale, pour les autorités auxquelles il est destiné et auxquelles il revient de décider de la suite à donner aux conclusions de l’enquête. Il s’ensuit que les conclusions figurant dans un rapport final de l’OLAF ne sauraient aboutir d’une manière automatique à l’ouverture d’une procédure administrative ou judiciaire (voir, en ce sens, ordonnances du 21 juin 2017, Inox Mare/Commission, T‑289/16, EU:T:2017:414, point 22, et du 22 janvier 2018, Ostvesta/Commission, T‑175/17, non publiée, EU:T:2018:49, point 29 et jurisprudence citée).

29      Dès lors, si l’OLAF peut, dans ses rapports d’enquête, recommander l’adoption d’actes dotés d’effets juridiques obligatoires faisant grief aux personnes concernées, ce sont uniquement les autorités compétentes qui peuvent adopter lesdits actes et arrêter des décisions susceptibles d’affecter la situation juridique des personnes mentionnées dans les recommandations desdits rapports (voir, en ce sens, ordonnances du 21 juin 2017, Inox Mare/Commission, T‑289/16, EU:T:2017:414, point 28, et du 22 janvier 2018, Ostvesta/Commission, T‑175/17, non publiée, EU:T:2018:49, point 28 et jurisprudence citée).

30      Lors de l’audience, la requérante a avancé que, s’il était vrai que, de manière générale et abstraite, un rapport de l’OLAF ne produisait pas d’effets juridiques, tel n’était pas le cas dans la présente espèce. À cet égard, la requérante insiste sur le fait que le rapport de l’OLAF constitue un acte de l’Union, de nature à produire des effets juridiques à son égard, étant donné, notamment, que les autorités espagnoles seraient liées par son contenu. Les effets juridiques de celui-ci seraient, notamment, démontrés par l’engagement d’une procédure pénale devant les juridictions espagnoles ainsi que par l’ouverture d’autres procédures administratives par les autorités espagnoles à la suite dudit rapport.

31      Toutefois, la transmission d’informations par l’OLAF aux autorités nationales ne saurait être considérée comme un acte faisant grief, dès lors qu’elle ne modifie pas de façon caractérisée la situation juridique de l’intéressé, les autorités compétentes des États membres demeurant libres d’apprécier, dans le cadre de leurs pouvoirs propres, le contenu et la portée desdites informations et, partant, les suites qu’il convient d’y donner. En effet, aux termes de l’article 11, paragraphe 6, du règlement no 883/2013, à la demande de l’OLAF, lesdites autorités lui envoient, en temps utile, des informations sur « les suites éventuellement données » aux recommandations transmises (voir, en ce sens, ordonnance du 12 juillet 2018, TE/Commission, T‑392/17, non publiée, EU:T:2018:459, point 23 et jurisprudence citée).

32      Par ailleurs, il ressort des dispositions de l’article 11, paragraphe 2, du règlement no 883/2013 que les rapports de l’OLAF établis à la suite d’une enquête ne constituent que des éléments de preuve susceptibles d’être utilisés dans les procédures administratives ou judiciaires nationales, qu’ils sont à apprécier selon les règles établies en matière de preuve dans le droit national et qu’ils ont la force probante établie par ce dernier. Il ne s’agit donc pas d’actes qui font grief, en tant que tels, aux personnes qui y sont nommées (voir, en ce sens, ordonnance du 12 juillet 2018, TE/Commission, T‑392/17, non publiée, EU:T:2018:459, point 24 et jurisprudence citée).

33      Par conséquent, l’ouverture de procédures administratives et judiciaires à la suite de la transmission d’informations par l’OLAF, ainsi que les actes juridiques subséquents, qui, selon la requérante, ont été adoptés à son égard par les autorités espagnoles en l’espèce, relèvent de la seule et entière responsabilité de ces dernières, et non pas de l’OLAF, qui leur avait adressé le rapport d’enquête (voir, en ce sens, ordonnance du 12 juillet 2018, TE/Commission, T‑392/17, non publiée, EU:T:2018:459, point 23 et jurisprudence citée).

34      Eu égard à ce qui précède, le rapport de l’OLAF transmis à la Commission ainsi qu’aux autorités compétentes espagnoles ne saurait être considéré comme un acte attaquable.

35      En second lieu, pour autant que la requérante demande l’annulation de la procédure de récupération des fonds ouverte par la Commission à la suite du rapport de l’OLAF, il y a lieu de rappeler que l’article 263 TFUE ne vise que les actes adoptés par les institutions, organes, organismes de l’Union destinés à produire des effets juridiques à l’égard des tiers. Or, une procédure, en tant que telle, n’est pas un acte attaquable au sens de ladite disposition et, ainsi, elle n’est pas en soi susceptible d’être annulée par le juge de l’Union.

36      À la lumière de ces considérations, il convient d’écarter comme étant irrecevables les demandes de la requérante visant, d’une part, à l’annulation du rapport de l’OLAF et, d’autre part, à l’annulation de la procédure ouverte par la Commission à la suite dudit rapport, qui font l’objet du premier chef de conclusions.

3.      Sur la recevabilité du premier moyen, tiré de la violation des droits fondamentaux et de l’acquis juridique de l’Union par l’OLAF et par la Commission

37      Par son premier moyen, la requérante soutient que l’ensemble des dépenses déclarées dans le cadre du projet litigieux est éligible. Elle en déduit que, en exigeant leur remboursement, la Commission a violé ses droits fondamentaux, tels que garantis par les traités ainsi que l’acquis juridique de l’Union.

38      La Commission, soutenue par le Royaume d’Espagne, soulève l’irrecevabilité du présent moyen, au motif que celui-ci manque manifestement de précision en ce que, en substance, il est rédigé de manière abstraite et ne présente pas de lien avec le fond du litige.

39      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu, de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête doit contenir, notamment, les moyens et les arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui [voir arrêt du 16 juin 2021, Lucaccioni/Commission, T‑316/19, EU:T:2021:367, point 84 (non publié) et jurisprudence citée].

40      En l’espèce, force est de constater que les arguments avancés dans le cadre du présent moyen ne permettent pas d’identifier, avec le degré de clarté et de précision requis, les éléments de droit et de fait sur lesquels se fonde la requérante. En effet, celle-ci se borne à soutenir que, ayant considéré comme inéligible une partie des dépenses déclarées dans le cadre du projet litigieux, la Commission a violé ses droits fondamentaux. La requérante invoque également l’existence de vices flagrants dans le déroulement de la procédure de récupération, lesquels constitueraient, selon elle, une violation de l’« acquis juridico-règlementaire de l’Union ».

41      Il convient toutefois de relever que la requête ne contient aucun élément permettant au Tribunal d’identifier les droits fondamentaux qui auraient été violés ni le comportement, voire les vices, qui auraient été à l’origine des violations que la requérante entendrait reprocher à la Commission.

42      Il s’ensuit que le premier moyen ne satisfait pas aux exigences de l’article 76, sous d), du règlement de procédure et est, partant, irrecevable.

4.      Sur la recevabilité de la demande de la requérante, figurant dans la réplique, visant à la production de certains documents

43      Au stade de la réplique, la requérante invite le Tribunal à ce qu’il demande :

–        à la Commission de produire un rapport indiquant la suite qu’elle donne aux recommandations de l’OLAF et précisant, en particulier, si, lorsque l’OLAF recommande dans son rapport qu’une procédure de recouvrement soit engagée, la Commission engage effectivement une telle procédure ou si, au contraire, elle ignore la recommandation de l’OLAF ;

–        à l’OLAF de lui indiquer si l’une quelconque des autorités compétentes du Royaume d’Espagne auxquelles il a adressé son rapport conformément à l’article 11, paragraphe 3, du règlement no 883/2013 aurait pris des mesures à la suite dudit rapport ;

–        à l’OLAF de fournir, en substance, une copie certifiée conforme des documents saisis auxquels il est fait référence à l’annexe 16.

44      Ainsi, la requérante propose, en substance, des demandes de mesures d’organisation de la procédure au sens de l’article 89 du règlement de procédure.

45      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 88, paragraphe 1, du règlement de procédure, les mesures d’organisation de la procédure peuvent être prises à tout stade de la procédure. Il n’en demeure pas moins que, conformément à l’article 88, paragraphe 2, du même règlement, lorsque de telles demandes sont formulées après le premier échange de mémoires, ce qui est précisément le cas en l’espèce, la partie qui les présente doit exposer les raisons pour lesquelles elle n’a pas pu les présenter antérieurement.

46      En l’espèce, la requérante semble soutenir que l’opportunité de formuler une telle demande se rattache aux allégations de la Commission figurant dans le mémoire en défense, sans pour autant préciser lesdites allégations.

47      Or, en avançant une telle considération d’ordre purement général, sans que celle-ci soit accompagnée d’éléments supplémentaires, la requérante n’expose pas, à suffisance de droit, des raisons susceptibles de justifier le caractère tardif de ses demandes de mesures d’organisation de la procédure conformément à l’article 88, paragraphe 2, du règlement de procédure [voir, en ce sens, arrêts du 13 décembre 2018, Transavia Airlines/Commission, T‑591/15, EU:T:2018:946, points 259 à 264 (non publiés), et du 23 mai 2019, Remag Metallhandel et Jaschinsky/Commission, T‑631/16, non publié, EU:T:2019:352, points 32 à 34].

48      Ainsi, il y a lieu de rejeter les demandes de mesures d’organisation de la procédure visées au point 43 ci-dessus comme irrecevables.

B.      Sur le fond

1.      Observations liminaires

49      Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande, en substance, à ce que le Tribunal déclare éligibles les dépenses dont la récupération est exigée par la Commission. Le troisième chef de conclusions, intrinsèquement lié au deuxième, vise à ce que le Tribunal déclare, par conséquent, la procédure de récupération infondée et, partant, annule les notes de débit litigieuses, la lettre d’information préalable qui en est à l’origine ainsi que les actes ultérieurs à celle-ci.

50      À cet égard, il convient de rappeler que les conclusions des parties définissent l’objet du litige. Il importe, dès lors, qu’elles indiquent, expressément et sans équivoque, ce que les parties demandent (voir ordonnance du 27 mars 2017, Frank/Commission, T‑603/15, non publiée, EU:T:2017:228, point 39 et jurisprudence citée). En particulier, il appartient à la partie requérante de faire le choix du fondement juridique de son recours (voir arrêts du 15 mars 2005, Espagne/Eurojust, C‑160/03, EU:C:2005:168, point 35 et jurisprudence citée, et du 20 mai 2019, Fundación Tecnalia Research & Innovation/REA, T‑104/18, non publié, EU:T:2019:345, point 39 et jurisprudence citée).

51      En l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 1 ci-dessus, la requérante a explicitement indiqué deux fondements juridiques de son recours, à savoir les articles 263 et 272 TFUE.

52      La seconde partie du troisième chef de conclusions évoque l’annulation des notes de débit, de la lettre d’information préalable et des actes ultérieurs à celle-ci (voir points 15 et 49 ci-dessus), employant ainsi la terminologie propre au contrôle de légalité opéré au titre du recours en annulation fondé sur l’article 263 TFUE.

53      Toutefois, il découle clairement de l’économie et de la structure de la requête ainsi que des arguments présentés à l’appui du recours fondé sur l’article 263 TFUE que la requérante rattache explicitement sa demande en annulation uniquement au rapport de l’OLAF et à la procédure ouverte par la Commission à la suite dudit rapport. En revanche, le troisième chef de conclusions, qui, ainsi qu’il ressort du point 49 ci-dessus, constitue un prolongement du deuxième chef de conclusions avec lequel il se confond, vise, en substance, à faire constater l’inexistence de la dette contractuelle réclamée par les notes de débit litigieuses au titre du contrat de subvention et, de ce fait, est clairement fondé sur l’article 272 TFUE.

54      Il s’ensuit que, nonobstant l’usage d’une terminologie caractéristique des recours introduits sur le fondement de l’article 263 TFUE, le troisième chef de conclusions est présenté sur une base contractuelle, et non pas comme visant à l’annulation d’un acte administratif.

2.      Sur les deuxième et troisième moyens, tirés, en substance, de l’éligibilité des dépenses déclarées par la requérante dans le cadre du projet Powair

55      La requérante estime avoir correctement satisfait aux obligations contractuelles qui lui incombaient en vertu du contrat de subvention. Elle reproche à la Commission de s’être fondée sur les conclusions du rapport de l’OLAF pour conclure à l’inéligibilité d’une partie des dépenses déclarées dans le cadre de l’exécution du projet Powair, alors que ledit rapport serait entaché de plusieurs erreurs. Par voie de conséquence, les dépenses dont la récupération est demandée par le biais des notes de débit litigieuses seraient éligibles.

56      Ainsi, il incombe au Tribunal d’examiner l’éligibilité des coûts déclarés par la requérante dont la Commission demande la récupération, au regard des conclusions figurant dans le rapport de l’OLAF.

57      Il ressort de ses écritures que la requérante axe ses arguments avancés dans le cadre des deuxième et troisième moyens, en substance, autour de quatre branches.

a)      Sur la première branche, relative au modèle d’affaires et au système de comptabilisation de la requérante

58      La requérante avance six arguments dans le cadre de la première branche.

1)      Sur le premier argument, tiré, en substance, de ce que la requérante n’était pas tenue de mettre en place un système de comptabilisation des dépenses particulier

59      La requérante fait valoir que la Commission ne pourrait exiger qu’elle utilise de manière exclusive le système BAS ERP ARION, choisi par ailleurs par la requérante comme système intégral de gestion interne et de comptabilisation, une telle utilisation méconnaissant les besoins particuliers d’une société active dans le domaine de la recherche et du développement (R & D).

60      La requérante soutient, en substance, que le système BAS ERP ARION, conçu pour gérer des travaux ou des projets dans des organisations traditionnelles, ne serait pas adapté pour comptabiliser des dépenses dans des projets relevant du domaine de la R & D. Ainsi, elle aurait été contrainte de pallier les insuffisances dudit système, en enregistrant les dépenses encourues, notamment dans le cadre du projet litigieux, de manière séparée, par le biais d’un document Excel. L’absence de compréhension de cette spécificité aurait conduit l’OLAF à interpréter de manière erronée des éléments de preuve recueillis dans le cadre de l’enquête.

61      Toutefois, l’argumentation de la requérante visée aux points 59 et 60 ci‑dessus repose sur la prémisse erronée selon laquelle l’OLAF et, par la suite, la Commission auraient déclaré l’inéligibilité de certains coûts, au motif qu’elle n’aurait pas mis en place un système de comptabilisation bien précis pour pouvoir connaître le montant des dépenses réellement engagées dans le cadre du projet litigieux.

62      En effet, si, ainsi que le fait valoir la requérante, le contrat de subvention ne l’obligeait pas à mettre en place un système de comptabilisation particulier, il n’en demeure pas moins que l’article II.14, paragraphe 1, des conditions générales stipulait que les coûts déclarés devaient être identifiables et contrôlables, tout en laissant au bénéficiaire le choix des moyens de preuve. Il s’ensuit que le contrat de subvention obligeait la requérante à tenir une comptabilité propre et une documentation appropriée pour justifier les coûts et les heures effectivement consacrés au projet litigieux. C’est précisément le non-respect de cette obligation qui est reproché à la requérante, tant par l’OLAF que par la Commission, et non pas la non‑utilisation du système BAS ERP ARION, ni le fait d’avoir suppléé à ce système par le biais d’un document Excel.

63      Dans ces circonstances, il convient de rejeter comme inopérant l’argument de la requérante selon lequel l’OLAF, et, par la suite, la Commission auraient exigé l’enregistrement des dépenses afférentes au projet litigieux exclusivement dans un système de comptabilisation bien précis.

2)      Sur le deuxième argument, tiré de la comptabilisation correcte des dépenses supportées par la requérante

64      La requérante estime que les dépenses encourues dans le cadre du projet Powair ont fait l’objet d’une comptabilisation correcte et pouvaient être aisément identifiées dans ses registres internes. À l’appui de ses allégations, au cours de l’audience, la requérante a invoqué, notamment, des extraits de ses systèmes internes et d’autres documents qui attesteraient l’existence des éléments se rattachant à l’exécution du projet litigieux, en soulignant l’existence de codes internes propres à ses systèmes permettant d’accéder à des pièces justificatives. Ces éléments confirmeraient la crédibilité de ses allégations.

65      Ainsi, ce serait à tort que l’OLAF a considéré que la requérante ne possédait pas un système de comptabilisation approprié pour justifier la réalité et le montant des dépenses engagées dans le cadre du projet litigieux.

66      À cet égard, il convient de rappeler que, selon un principe fondamental régissant les concours financiers de l’Union, celle-ci ne peut soutenir que des dépenses effectivement engagées dans l’exécution d’un projet subventionné. Le bénéficiaire de l’aide doit, notamment, apporter la preuve qu’il a exposé les frais déclarés conformément au contrat de subvention établi pour l’octroi du concours concerné, seuls des frais dûment justifiés pouvant être considérés comme éligibles. Son obligation de respecter les conditions financières fixées constitue même l’un de ses engagements essentiels et, de ce fait, conditionne l’attribution du concours financier (voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2014, Technische Universität Dresden/Commission, T‑29/11, EU:T:2014:912, point 71 et jurisprudence citée).

67      Le même principe fondamental est reflété à l’article II.14 des conditions générales, qui prévoit que les coûts engagés pour l’exécution du projet litigieux doivent être déterminés conformément aux principes et aux pratiques usuelles de comptabilité et de gestion du bénéficiaire de l’aide. Les procédures internes de comptabilité et d’audit de celui-ci doivent permettre d’établir un rapprochement direct entre, d’une part, les coûts et les recettes déclarés au titre du projet et, d’autre part, les états financiers et les pièces justificatives correspondants. Les coûts engagés doivent s’inscrire dans la comptabilité du bénéficiaire de l’aide.

68      Il s’ensuit que le respect scrupuleux par le bénéficiaire d’une subvention des obligations financières auxquelles est subordonné l’octroi de cette subvention n’est pas une exigence purement formelle, mais la condition même pour que la Commission puisse vérifier, lors d’un audit financier ou d’un contrôle ou d’une vérification sur le terrain, que les coûts déclarés par le bénéficiaire correspondent bien à des coûts éligibles et justifiés (voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2015, Amitié/Commission, T‑234/12, non publié, EU:T:2015:601, point 153 et jurisprudence citée).

69      Or, dans son rapport, premièrement, l’OLAF a relevé que les registres internes de la requérante ne permettaient d’identifier que de manière approximative les coûts encourus au titre du projet litigieux. Deuxièmement, il a souligné que lesdits registres faisaient apparaître des montants de dépenses nettement inférieurs à ceux déclarés dans la demande de subvention. Troisièmement, le rapport de l’OLAF faisait état de ce que la requérante ne disposait pas d’un système complet de répartition des coûts internes, qui aurait permis d’identifier les coûts réels supportés au titre des différents projets auxquels celle‑ci participait en tant que bénéficiaire de subventions.

70      L’OLAF a ainsi constaté que les procédures internes de comptabilité et d’audit de la requérante ne permettaient pas d’identifier les coûts réels du projet litigieux. La Commission en a déduit que lesdites procédures ne satisfaisaient pas aux exigences de l’article II.14 des conditions générales.

71      Or, lorsqu’un rapport d’enquête, comme en l’espèce le rapport de l’OLAF, présente des indices concrets de l’existence d’un risque que les dépenses déclarées par le bénéficiaire d’une aide financière de l’Union ne remplissent pas les conditions d’éligibilité, l’inéligibilité est présumée et il appartient à ce dernier de démontrer, par le biais d’éléments probants, que les conditions d’éligibilité ont, au contraire, bien été respectées. Un rapport d’enquête qui s’appuie sur des indices concrets doit, à cet égard, être analysé comme un élément de preuve justifiant l’inéligibilité des dépenses (voir, en ce sens, arrêts du 8 septembre 2015, Amitié/Commission, T‑234/12, non publié, EU:T:2015:601, point 136, et du 27 avril 2016, ANKO/Commission, T‑154/14, non publié, EU:T:2016:246, point 138).

72      En l’espèce, ainsi que la Commission l’a fait valoir au cours de l’audience, le rapport de l’OLAF a été établi sur le fondement de l’article 3 du règlement no 883/2013, à la suite de la suspicion de l’existence d’une fraude portant atteinte aux intérêts de l’Union. Dès lors, il ne s’agit pas d’un simple audit, conduit sur la base des éléments fournis par la requérante, mais d’une enquête, menée dans le cadre de la compétence conférée à la Commission par le règlement (Euratom, CE) no 2185/96 du Conseil, du 11 novembre 1996, relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers [de l’Union] contre les fraudes et autres irrégularités (JO 1996, L 292, p. 2), qui permet nécessairement de parvenir à des conclusions plus approfondies et allant au-delà des éléments susceptibles de figurer dans un simple rapport d’audit.

73      Il s’ensuit que le rapport de l’OLAF possède une valeur probante plus forte qu’un rapport d’audit, en ce qu’il n’est pas uniquement fondé sur les éléments fournis par la requérante en tant qu’entité auditée, mais également sur ceux recueillis par l’OLAF à la suite de ces contrôles et vérifications sur place.

74      Ce n’est que dans l’hypothèse où la requérante apporte des relevés de frais et d’autres renseignements pertinents en vue de contester le rapport de l’OLAF qu’il incombe à la Commission de démontrer qu’il y avait toutefois lieu d’écarter les dépenses litigieuses, en justifiant leur rejet, notamment parce que ces relevés de frais n’étaient pas exacts ou crédibles (voir arrêt du 14 avril 2021, SGI Studio Galli Ingegneria/Commission, T‑285/19, non publié, EU:T:2021:190, point 50 et jurisprudence citée).

75      Or, aucun élément apporté par la requérante n’est de nature à établir la fiabilité de son système de comptabilisation et la réalité des coûts réclamés, pour ainsi remettre en cause les irrégularités relevées par le rapport de l’OLAF indiquées au point 69 ci-dessus.

76      À cet égard, en premier lieu, la requérante fait valoir que la régularité de son système de comptabilisation serait attestée par trois rapports d’audit réalisés par des entités externes.

77      Le premier document invoqué par la requérante est un rapport de la société de conseil A couvrant la période 2011 à 2015, qui serait indispensable pour comprendre son modèle d’affaires, sa pratique opérationnelle ainsi que son plan technologique et qui ne laisserait aucun doute concernant le respect de ses engagements en matière de projets en R & D. Ainsi, ledit rapport ferait état de ce que la requérante distingue et sépare correctement les activités liées aux projets en R & D de celles liées à des projets commerciaux, attestant la cohérence de son plan technologique, des bons résultats obtenus dans le cadre de la réalisation des projets en R & D et du fait que la requérante aurait géré, contrôlé et comptabilisé de manière adéquate ces projets.

78      À cet égard, il convient d’observer que le rapport de la société de conseil A, établi à la demande de la requérante, porte sur des aspects généraux liés à son activité dans le domaine de la R & D. Aucun élément y figurant ne se rattache de manière précise aux irrégularités identifiées dans le rapport de l’OLAF à propos du projet litigieux, de sorte qu’il n’est pas de nature à remettre en cause les constats effectués par ce dernier. Il s’ensuit que le simple fait que le rapport de la société de conseil A fait état de ce que la requérante sépare ses dépenses liées à ses activités en matière de R & D ou que celle-ci gère et contrôle de manière adéquate les ressources consacrées auxdits projets n’est pas suffisant pour attester de la régularité des dépenses déclarées dans le cadre du projet litigieux.

79      La même conclusion s’impose en ce qui concerne le deuxième document dont se prévaut la requérante, à savoir un rapport d’audit établi par la société de conseil B en juin 2013, fourni par celle-ci, aux fins de démontrer la régularité de son système de comptabilisation.

80      D’emblée, force est de constater que le rapport de la société de conseil B a une force probante faible, dans la mesure où, ainsi qu’il découle de son libellé, il a été établi uniquement sur la base des informations fournies par la requérante, sans que ladite société ait effectué une vérification elle‑même auprès de celle-ci.

81      En outre, le rapport de la société de conseil B porte sur des questions relatives à la stratégie commerciale de la requérante et à sa participation à des projets relevant du domaine de la R & D, sans pour autant apporter le moindre éclaircissement sur les irrégularités relevées dans le rapport de l’OLAF en ce qui concerne le projet litigieux, de sorte que ce document n’est pas susceptible d’invalider les conclusions figurant dans ledit rapport.

82      La requérante invoque un troisième document, constitué d’un rapport final d’audit portant la référence Ares(2018)5746953, établi par la direction générale « Recherche et innovation » de la Commission le 9 novembre 2018 (ci-après le « rapport de 2018 »). Ce rapport reconnaîtrait le caractère adéquat du système de comptabilisation des dépenses de R & D encourues dans le cadre de deux projets conclus au titre d’un programme-cadre d’aide financière à partir de 2015. Selon la requérante, la manière dont ces projets auraient été gérés et les dépenses afférentes justifiées serait similaire à celle mise en œuvre dans le cadre du projet litigieux.

83      Or, il convient de relever d’emblée que, ainsi que le reconnaît la requérante elle-même dans ses écritures, le rapport de 2018 portait sur deux projets distincts, élaborés à partir de 2015, faisant partie d’un programme-cadre différent. Ainsi, ledit rapport est dépourvu de pertinence en ce qui concerne le projet litigieux, lequel, ainsi qu’il ressort du point 3 ci-dessus, a été achevé en 2014.

84      De surcroît, ainsi que l’observe pertinemment la Commission, le rapport de 2018 a révélé l’existence de certaines erreurs de « nature potentiellement systémique et récurrente ». Il s’agissait, en particulier, de l’absence d’utilisation des feuilles de temps (timesheets) et du fait que le système d’enregistrement du temps n’a été mis en place par la requérante qu’en 2015 – donc postérieurement à l’achèvement du projet litigieux.

85      En second lieu, s’agissant de la présentation, assurée lors de l’audience, des éléments des systèmes internes de la requérante, il importe de relever qu’il appartient au seul Tribunal d’apprécier la valeur qu’il convient d’attribuer aux éléments qui lui ont été soumis (voir, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2019, ABB/Commission, C‑593/18 P, non publié, EU:C:2019:1027, point 31).

86      Or, les explications complexes et alambiquées qui ont été nécessaires à la requérante pour essayer de démontrer la fiabilité de ses systèmes internes ne sont pas, en raison de leur caractère confus et difficilement compréhensible, de nature à emporter la conviction du Tribunal. Dès lors, la présentation, assurée lors de l’audience, des éléments des systèmes internes de la requérante ne permet pas davantage que les autres éléments fournis par la requérante (voir points 77, 79, 82 et 85 ci-dessus) de renverser la présomption d’inéligibilité d’une partie des coûts déclarés, telle qu’établie par le rapport de l’OLAF, au sens de la jurisprudence citée au point 71 ci‑dessus.

87      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le deuxième argument de la requérante, tiré de ce que les dépenses encourues dans le cadre du projet Powair auraient fait l’objet d’une comptabilisation correcte au titre du contrat de subvention.

3)      Sur le troisième argument, tiré de ce que la régularité du système de comptabilisation de la requérante n’aurait été remise en cause par aucun organisme

88      La requérante avance qu’aucun autre organisme finançant des aides publiques, tant au niveau national qu’au niveau de l’Union, n’a jamais soulevé de critiques quant à la régularité de son système de comptabilisation des dépenses.

89      À cet égard, il suffit d’observer que, même à la supposer établie, l’absence d’objection de la part d’autres organismes d’aide financière n’est pas pertinente pour apprécier si la requérante a respecté ses obligations découlant du contrat de subvention en l’espèce. En effet, dans l’exercice de l’obligation qui lui incombe en matière de contrôle du budget de l’Union au titre de l’article 317 TFUE et de la législation pertinente, la Commission ne peut pas être liée par des constatations ou des considérations ainsi que des actions ou toute absence d’objections, formulées par d’autres organes, soit nationaux, soit européens (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 15 décembre 2010, E.ON Energie/Commission, T‑141/08, EU:T:2010:516, point 295).

90      Dès lors, le troisième argument de la requérante est également rejeté.

4)      Sur le quatrième argument, tiré de l’archivage des projets antérieurs dans le dossier relatif au projet litigieux

91      La requérante fait valoir que le simple constat figurant dans le rapport de l’OLAF que la documentation relative à un projet précédent ait été archivée dans le dossier du projet litigieux n’implique pas que la requérante aurait déclaré les coûts se rattachant audit projet antérieur comme des coûts éligibles au titre du contrat de subvention. Elle souligne que, dans le domaine de la R & D, un tel archivage de la documentation ou des composantes techniques élaborées lors de projets antérieurs peut s’avérer nécessaire pour l’exécution du projet ultérieur.

92      Dans son rapport, l’OLAF a conclu que la documentation interne en ce qui concerne certains projets menés par la requérante comprenait des documents relatifs aux développements de projets antérieurs ou à d’autres développements de l’entreprise. Il convient toutefois d’observer que, ainsi qu’il ressort de la précision que l’OLAF a insérée en note en bas de page à l’égard de ce constat, cette critique ne vise pas le projet litigieux.

93      Dès lors, le quatrième argument est inopérant et doit être rejeté.

5)      Sur le cinquième argument, tiré de ce que les dossiers afférents au projet litigieux ne réunissaient pas l’ensemble des informations sur les coûts supportés

94      La requérante fait valoir que, en concluant que les coûts supportés dans le cadre du projet litigieux étaient inférieurs aux coûts déclarés, l’OLAF aurait ignoré le fait qu’un poste budgétaire d’un projet ne réunit pas toutes les dépenses supportées aux fins de l’exécution dudit projet, mais uniquement les dépenses considérées comme supplémentaires par rapport à celles déjà prévues dans le plan technologique.

95      Or, cet argument n’est aucunement de nature à pallier les manquements de la requérante, tels que relevés dans le rapport de l’OLAF, à son obligation de tenir une comptabilité exacte et précise permettant d’établir un rapprochement direct entre les coûts déclarés et ceux effectivement consacrés au projet litigieux au titre de l’article II.14 des conditions générales.

96      En effet, force est de constater que l’argument de la requérante tiré du fait que les dossiers afférents au projet litigieux ne réunissaient pas l’ensemble des informations sur les coûts supportés ne fait que renforcer la conclusion figurant dans le rapport de l’OLAF selon laquelle, en substance, la requérante ne disposait pas d’un système complet de répartition des coûts internes, qui aurait permis d’identifier les coûts réels supportés au titre du projet litigieux.

97      Certes, lors de l’audience, la requérante a, en s’appuyant sur une présentation visuelle, reproché à l’OLAF, notamment, d’avoir tiré des conclusions incorrectes en appliquant des filtres erronés aux résultats démontrés par son système de comptabilisation.

98      Cependant, ainsi qu’il ressort du point 86 ci-dessus, cet élément de preuve n’a pas une forte valeur probante et, ainsi, la présentation visuelle ne permet pas davantage que les autres éléments fournis par la requérante de renverser la présomption d’inéligibilité d’une partie des coûts déclarés, telle qu’établie par le rapport de l’OLAF, au sens de la jurisprudence citée au point 71 ci-dessus.

99      En outre, à supposer même qu’il ait été nécessaire d’effectuer un filtrage des données figurant dans le système de gestion interne de la requérante et de contraindre l’OLAF à faire usage d’une telle fonctionnalité technique, qui nécessiterait, d’ailleurs, une compréhension au fond dudit système pour éviter l’application de filtres erronés, afin de pouvoir identifier l’ensemble des coûts supportés dans le cadre du projet litigieux, cela démontre, de nouveau, que la requérante a méconnu son obligation contractuelle de tenir une comptabilité fiable et une documentation appropriée. Au demeurant, lors d’un audit, il ne saurait être exigé ni de l’OLAF ni de la Commission de rassembler des éléments parsemés dans la comptabilité de la requérante pour pouvoir établir le coût réel du projet litigieux.

100    Il s’ensuit que, en admettant que les dépenses se rattachant au projet litigieux se trouvaient dispersées à travers ses registres internes et son système de comptabilisation et qu’une connaissance technique approfondie dudit système était nécessaire pour établir la totalité des coûts engagés dans le cadre du projet litigieux, la requérante n’a, de toute évidence, pas satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe au titre de la jurisprudence citée au point 71 ci-dessus.

101    Par conséquent, le cinquième argument est également voué au rejet.

6)      Sur le sixième argument, tiré de l’engagement des ressources propres par la requérante

102    La requérante fait valoir que c’est à tort que l’OLAF et ensuite la Commission ont conclu que les dépenses qu’elle avait déclarées revêtaient un caractère artificiellement gonflé, en partant de la prémisse erronée que son plan technologique était exclusivement financé par des subventions, alors qu’il l’était, pour une grande partie, par ses ressources propres.

103    Le rapport de l’OLAF fait état de ce que les coûts réels se rattachant au projet litigieux couvraient à peine les subventions reçues par la requérante. Ainsi, pour prétendre respecter le principe de cofinancement, la requérante déclarait des coûts gonflés pour pouvoir justifier le montant des subventions reçues. Toutefois, le constat le plus fondamental justifiant la procédure de la récupération n’était pas fondé sur le fait que les coûts réels couvraient à peine la subvention, mais concernait le fait que les coûts déclarés par la requérante étaient gonflés, dès lors que ses registres internes faisaient apparaître des montants de dépenses nettement inférieurs à ceux déclarés dans la demande de subvention (voir point 8 ci-dessus).

104    Par conséquent, même à supposer, quod non, que la requérante ait financé une partie du projet litigieux par des ressources propres, ce fait ne serait pas de nature à invalider la conclusion figurant dans le rapport de l’OLAF selon laquelle les coûts déclarés par la requérante dépassaient largement les coûts réels encourus dans le cadre du projet litigieux et, dès lors, étaient inéligibles.

105    De surcroît, le fait que la requérante ait financé le projet litigieux, en partie, par ses propres ressources est en parfaite conformité avec le principe de cofinancement consacré à l’article II.16 des conditions générales.

106    Dès lors, le sixième argument doit être également rejeté, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la question de savoir si les coûts que le rapport de l’OLAF a établis comme ayant été gonflés l’ont été à un taux qui financerait la totalité du projet litigieux.

7)      Conclusion sur la première branche

107    Au regard des considérations qui précèdent, il convient de conclure que ni dans ses écritures ni lors de l’audience la requérante n’a apporté d’élément de nature à établir la fiabilité de son système de comptabilisation et la réalité des coûts réclamés, permettant de remettre en cause les irrégularités relevées dans le rapport de l’OLAF, au sens de la jurisprudence visée au point 71 ci-dessus. Il en va de même de tout argument de la requérante se rattachant à la prétendue non‑compréhension de son modèle d’affaires par l’OLAF, et, par la suite, par la Commission.

108    Par conséquent, il convient de rejeter la première branche comme non fondée.

b)      Sur la deuxième branche, tirée de l’éligibilité des coûts de matériel et de personnel déclarés dans le cadre du projet litigieux

109    La requérante estime que, contrairement à ce qui a été retenu par l’OLAF et ainsi par la Commission, les coûts tant de personnel que de matériel déclarés au titre du projet Powair étaient éligibles au financement de l’Union.

110    À cet égard, le principe fondamental régissant les concours financiers de l’Union est que celle-ci ne peut soutenir que des dépenses effectivement engagées dans l’exécution d’un projet subventionné (voir point 66 ci‑dessus). Ainsi, les coûts invoqués par la requérante ne peuvent lui être remboursés qu’à condition qu’elle ait démontré leur réalité, en fournissant des informations fiables permettant d’établir que ces coûts ont été exposés conformément aux conditions fixées pour l’octroi des subventions, seuls des frais dûment justifiés pouvant être considérés comme éligibles (voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2019, EKETA/Commission, T‑166/17, non publié, EU:T:2019:26, point 59 et jurisprudence citée).

111    Ce principe est explicitement affirmé à l’article II.14 des conditions générales, selon lequel les coûts engagés doivent être réels et supportés par le bénéficiaire et que seules peuvent être imputées au projet les heures réellement travaillées ainsi que les matériaux réellement utilisés dans celui-ci.

112    Dans son rapport, l’OLAF a relevé que les coûts de personnel et de matériel déclarés par la requérante n’étaient pas éligibles, dans la mesure où ceux-ci présentaient un caractère fictif et gonflé.

113    S’agissant, en premier lieu, des coûts de personnel, le rapport de l’OLAF a relevé plusieurs irrégularités.

114    Premièrement, l’OLAF a déclaré que la requérante n’avait pas mis en place un registre des heures de travail accomplies par chaque employé pour justifier les dépenses imputées au titre du projet litigieux, en se livrant plutôt à des estimations établies au niveau de la société. En ce qui concerne le registre invoqué par la requérante, sous forme d’un tableau Excel, le rapport de l’OLAF a relevé qu’il existait une forte probabilité que les feuilles de temps contenues dans ce registre aient été établies a posteriori. En outre, ledit registre faisait état de manière approximative des heures de travail du personnel dont le remboursement a été demandé.

115    Deuxièmement, le rapport de l’OLAF a relevé que le planning mensuel des employés avait été établi de manière manuelle et aléatoire.

116    Troisièmement, à l’annexe 16 du rapport, l’OLAF a émis des doutes quant à la réalité de la participation au projet litigieux des personnes initialement déclarées par la requérante. En substance, il était douteux que les personnes relevant du service commercial aient participé à des tâches hautement techniques couvertes par le projet litigieux. En outre, il ne serait pas plausible que le directeur général et commercial ait participé, eu égard à leur nombre, à l’ensemble des tâches déclarées par la requérante.

117    S’agissant, en second lieu, des coûts de matériel, l’OLAF a constaté que la requérante avait procédé à une estimation de ces coûts au niveau de la société. Les données figurant dans les registres de celle-ci présentaient des omissions importantes et ne coïncidaient pas avec les montants réellement consacrés au projet Powair. L’OLAF a également constaté que les montants figurant dans les registres internes de la requérante étaient largement inférieurs à ceux qu’elle avait déclarés dans le cadre de la demande de subvention.

118    Il s’ensuit que le rapport de l’OLAF contient des éléments de preuve, ainsi que des constats concrets, de l’existence d’un risque que les dépenses déclarées par la requérante ne remplissent pas les conditions d’éligibilité.

119    Dès lors, eu égard à la répartition de la charge de la preuve en matière de concours financiers de l’Union, telle que définie aux points 71 et 74 ci-dessus, il appartient à la requérante de soumettre des éléments probants démontrant que les coûts dont la récupération est demandée remplissaient les conditions d’éligibilité fixées notamment par l’article II.14, paragraphe 1, des conditions générales, pour ainsi renverser la présomption d’inéligibilité résultant du rapport de l’OLAF, au sens de la jurisprudence citée au point 71 ci-dessus.

120    En premier lieu, la requérante fait valoir que, au moment du versement de la subvention, la Commission avait approuvé les dépenses déclarées pour remboursement.

121    À cet égard, conformément à l’article II.5, paragraphe 2, des conditions générales, le fait que les rapports de justification de dépenses déclarées aient été approuvés pour remboursement n’implique pas une reconnaissance définitive de leur authenticité ou de leur exactitude et n’empêche en aucune manière leur révision ou leur contrôle ultérieur au cours du projet et jusqu’à cinq ans après son achèvement. Ainsi, l’approbation par la Commission des rapports de dépenses présentés par un bénéficiaire d’aide revêt une nature provisoire et ne saurait être assimilée à la reconnaissance incontestable, lors d’une enquête de l’OLAF, que les dépenses déclarées présentaient un caractère justifié.

122    En deuxième lieu, la requérante reproche à l’OLAF et à la Commission d’avoir conclu à l’inéligibilité de ses coûts de matériel et de personnel, en substance, sur la base d’une documentation initiale qui ne pourrait pas servir de fondement à l’évaluation de l’exécution du projet. Il s’agirait, notamment, d’un document relatif à la planification de tâches figurant dans le dossier « old », alors que ce document ne refléterait ni la totalité ni la réalité du projet litigieux en l’occurrence. La requérante souligne que la dénomination même dudit dossier indique qu’il s’agit d’un dossier obsolète et, dès lors, non pertinent. En outre, la requérante invoque l’existence de nombreux documents qui ne figureraient pas dans la documentation technique du projet litigieux et n’auraient donc pas été pris en compte.

123    Toutefois, même à supposer cette circonstance établie, force est de constater que la requérante se borne à avancer des considérations à caractère purement général et abstrait, mais reste en défaut de produire, voire d’identifier, des éléments de preuve concrets permettant d’attester l’impact des erreurs ou lacunes quant aux documents pris en compte sur l’appréciation de l’OLAF et de la Commission.

124    Dans ces circonstances, il est impossible d’établir, en raison du caractère non vérifiable de ces documents, voire de leur absence du dossier, un rapprochement direct, au sens de la jurisprudence visée au point 67 ci-dessus, entre les éléments invoqués par la requérante et les coûts déclarés au titre du projet litigieux.

125    En troisième lieu, la requérante avance une série d’éléments plus spécifiques en vue d’établir l’éligibilité de ses coûts de personnel.

126    Premièrement, la requérante se prévaut du document le plus pertinent, envoyé à l’entité C, en annexe à son courriel du 25 mars 2011, et dénommé comme tel à l’annexe 16 et ensuite au cours de la présente procédure comme le document le plus pertinent. Ce document établi par la requérante ferait état d’une partie des tâches effectuées dans le cadre du projet Powair telles que réparties entre cette dernière et l’entité C.

127    Toutefois, ainsi qu’il a été conclu au point 23, cinquième tiret, ci-dessus, le document le plus pertinent, figurant à l’annexe C8, doit être rejeté comme irrecevable, au titre de l’article 85 du règlement de procédure.

128    En tout état de cause, dans ses écritures, la requérante admet explicitement que le document le plus pertinent ne permet que de procéder à une estimation approximative des coûts de personnel, ce qui revient à reconnaître que, en effet, elle ne dispose d’aucun élément probant permettant de connaître le nombre exact des heures accomplies par son personnel dans le cadre du projet litigieux. Au demeurant, le fait que la requérante essaie de se prévaloir d’une simple estimation est de nature à renforcer le doute quant à la réalité des coûts qu’elle déclare avoir supportés dans le cadre de la réalisation du projet litigieux.

129    Dès lors, cette estimation apportée par la requérante ne satisfait pas aux exigences de l’article II.14, paragraphe 1, des conditions générales et, par voie de conséquence, ne permet pas d’établir le montant des coûts salariaux éligibles.

130    Deuxièmement, la requérante estime que la Commission n’était pas fondée à émettre des doutes sur la participation des personnes qu’elle avait initialement déclarées comme travaillant sur le projet litigieux. Elle fait valoir, au soutien de cette prétention, que la participation de ces personnes au projet pouvait être déduite de leur formation, qui leur permettait de participer aux tâches hautement techniques requises par ledit projet.

131    À cet égard, de nouveau, la requérante se borne à avancer une allégation sans l’étayer par des éléments de preuve. Une telle allégation permet d’affirmer, tout au plus, que les personnes que la requérante avait initialement indiquées comme travaillant sur le projet litigieux auraient pu y participer, sans pour autant démontrer à suffisance de droit, conformément à la jurisprudence citée au point 66 ci-dessus, la réalité de leur participation à l’exécution dudit projet. Par voie de conséquence, cet argument n’est pas de nature à remettre en cause les considérations figurant dans le rapport de l’OLAF.

132    En outre, dans la mesure où la requérante n’a avancé aucun argument permettant de conclure qu’elle avait effectivement mis en place un registre établissant avec précision les heures de travail effectuées par les membres de son personnel, son argumentation tirée de la capacité de son personnel à participer aux tâches requises par le projet litigieux n’est a fortiori pas de nature à renverser la présomption visée au point 71 ci‑dessus.

133    Par ailleurs, le non-respect de l’obligation de produire, dans le cadre d’une enquête de l’OLAF, des relevés de tâches fiables pour justifier les coûts de personnel est un motif suffisant pour rejeter l’ensemble de ces coûts (voir arrêt du 10 mars 2021, Ayuntamiento de Quart de Poblet/Commission, T‑539/18, non publié, EU:T:2021:123, point 84 et jurisprudence citée).

134    Il découle de ce qui précède qu’aucun argument avancé par la requérante n’est de nature à remettre en question les constatations figurant dans le rapport de l’OLAF concernant les coûts de personnel et de matériel encourus dans le cadre du projet litigieux.

135    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante tiré du fait que ni la Commission ni l’OLAF n’auraient fourni d’élément de preuve permettant de considérer que l’activité subventionnée aurait débuté avant la présentation de la demande d’aide.

136    En effet, il ressort à l’évidence de la circonstance que les coûts de personnel et de matériel n’ont pas été dûment justifiés par la requérante qu’il n’est pas possible de conclure que l’activité réalisée dans le cadre du projet litigieux n’a pas commencé avant la présentation de la demande d’aide.

137    Contrairement à ce qu’avance la requérante, le rapport de l’OLAF n’a pas conclu que l’activité subventionnée avait commencé avant sa présentation de la demande de financement, mais a relevé, uniquement, que les éléments qu’elle avait soumis ne permettaient pas de conclure que tel n’était pas le cas.

138    Partant, eu égard à la charge de la preuve incombant au bénéficiaire d’une subvention de l’Union (voir point 71 ci-dessus), il appartenait à la requérante, confrontée aux constatations concrètes figurant dans le rapport de l’OLAF relatives à l’absence d’établissement des coûts de personnel et de matériel, de soumettre des éléments probants démontrant que l’activité faisant l’objet du contrat de subvention avait été effectuée au cours de la période d’exécution du projet litigieux et ainsi que les coûts de personnel et de matériel étaient éligibles à la subvention. Or la requérante n’a pas satisfait à cette charge de la preuve.

139    Par conséquent, il convient de rejeter la deuxième branche comme étant non fondée.

c)      Sur la troisième branche, tirée du degré de participation de la requérante au projet litigieux et de l’accomplissement du projet litigieux

140    La requérante conteste les conclusions du rapport de l’OLAF en ce qui concerne le degré de sa participation au projet Powair.

141    À cet égard, premièrement, le rapport de l’OLAF fait état de ce que les membres du consortium utilisaient leurs liens afin de présenter des budgets distincts et d’obtenir de multiples subventions au titre du même projet, alors que, en réalité, seul l’un d’eux aurait effectué la totalité ou la plupart des prestations faisant l’objet du contrat de subvention.

142    Deuxièmement, dans son rapport, sur la base des documents analysés dans le cadre de l’enquête, l’OLAF a conclu que la requérante avait sous-traité la réalisation des prestations liées au projet Powair à l’entité C, sans que cette délégation ait été portée à la connaissance de la Commission et encore moins autorisée par elle, conformément à l’article II.7 des conditions générales. L’OLAF a aussi relevé que l’entité C, à laquelle la requérante avait sous-traité l’exécution des prestations liées au projet litigieux, faisait partie du consortium bénéficiant du financement du projet litigieux, en méconnaissance de l’article II.7 des conditions générales, selon lequel la sous-traitance n’est autorisée qu’avec des tiers externes à la convention.

143    Troisièmement, le rapport de l’OLAF a relevé que l’entité C était liée à la requérante, dans la mesure où les personnes ayant la capacité de décision étaient les mêmes pour les deux participants au projet litigieux. Ainsi, les deux employés de l’entité C chargés des décisions techniques et économiques, tout comme de la signature des contrats de sous‑traitance, occupaient les fonctions, respectivement, de président et de membre de conseil d’administration de la requérante. La Commission n’aurait jamais été informée de ce lien.

144    Quatrièmement, dans son rapport, l’OLAF a relevé que c’étaient les membres du personnel de l’entité C, et non pas ceux de la requérante, qui apparaissaient comme auteurs de la documentation technique du projet litigieux.

145    Ces aspects relevés dans le rapport de l’OLAF constituent des éléments de preuve suffisamment sérieux pour mettre en doute le degré de participation de la requérante au projet Powair. Aussi, ils permettent raisonnablement de présumer à ce stade que les coûts déclarés par celle-ci dans le cadre dudit projet ne présentaient pas un caractère réel et, dès lors, étaient inéligibles au financement de l’Union.

146    La requérante, à qui revient la charge de la preuve pour renverser ce constat (voir point 71 ci-dessus), avance plus précisément six arguments pour établir sa participation effective au projet litigieux.

1)      Sur le premier argument, tiré de la non-communication à la requérante d’un élément factuel sur lequel reposerait le rapport de l’OLAF

147    Dans le cadre de ses arguments relatifs à son degré de participation au projet litigieux et à la sous-traitance à l’entité C, la requérante reproche à l’OLAF de ne pas lui avoir communiqué un élément factuel repris par la suite dans son rapport, sans que celle-ci ait pu présenter ses observations sur ce point.

148    Toutefois, cette allégation n’est assortie d’aucune précision permettant d’identifier l’élément auquel la requérante fait référence, de sorte qu’il y a lieu de rejeter cet argument comme étant irrecevable pour manque de clarté et de précision, conformément à l’article 76, sous d), du règlement de procédure et au titre de la jurisprudence visée au point 39 ci-dessus.

149    Dans ces conditions il convient de rejeter le premier argument avancé par la requérante.

2)      Sur le deuxième argument, tiré de l’accomplissement du projet litigieux

150    La requérante se prévaut du fait que le projet litigieux a été accompli.

151    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 108 du règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général [de l’Union] (JO 2002, L 248, p. 1), applicable à la date de signature du contrat de subvention, un tel un contrat a, en substance, pour objectif de promouvoir une certaine activité auprès du bénéficiaire et non pas d’obtenir la propriété ou une partie du projet subventionné. Ce principe est expressément rappelé à l’article II.26.1 des conditions générales, selon lequel la propriété des résultats du projet litigieux sont détenus par le bénéficiaire de celle-ci.

152    Ainsi, dès lors que, dans le cadre d’un contrat de subvention, il ne s’agit pas d’avancer des fonds en échange de la réalisation d’un projet, la contribution financière de l’Union ne représente pas la contrepartie du projet litigieux, mais vise à promouvoir la réalisation dudit projet.

153    Il s’ensuit qu’il ne suffit pas que le projet litigieux ait été bien exécuté sur le plan technique et de manière conforme à ce qui était stipulé dans le contrat de subvention pour que la requérante ait droit aux concours financiers stipulés. Il faut également que la requérante ait bien exécuté les obligations qui lui incombaient en vertu dudit contrat, de manière à permettre à la Commission, conformément à l’article II.22 des conditions générales (voir point 6 ci-dessus), de vérifier, notamment lors d’un audit financier, que les coûts déclarés sont éligibles et justifiés (voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2015, Amitié/Commission, T‑234/12, non publié, EU:T:2015:601, point 152 et jurisprudence citée).

154    Dès lors, en cas de violation des obligations financières stipulées dans le contrat de subvention, la bénéficiaire de l’aide financière perd le droit au paiement des subventions et, partant, au titre de l’article II.22, paragraphe 6, des conditions générales, le cocontractant de la requérante est tenu de prendre toutes les mesures appropriées à cet égard, y compris la récupération intégrale ou partielle des subventions, indépendamment du fait que le projet litigieux a été bien exécuté sur le plan technique.

155    Ainsi, le fait que le projet litigieux ait été accompli ne permet pas d’établir que les coûts déclarés par la requérante ont été effectivement supportés dans le cadre de l’exécution dudit projet, et encore moins que celle-ci disposait d’un système complet de répartition des coûts internes, qui permettrait d’identifier les coûts réels exposés au titre des différents projets auxquels elle participait en tant que bénéficiaire de subventions, pour ainsi lui permettre de valablement remettre en cause les critiques contenues dans le rapport de l’OLAF.

156    Dans ces conditions, le deuxième argument ne peut qu’être rejeté.

3)      Sur le troisième argument, tiré des qualifications du personnel de la requérante

157    La requérante estime que c’est à tort que, dans l’annexe 16 de son rapport, l’OLAF a conclu à l’existence d’une sous-traitance entre elle et l’entité C, au motif, entre autres, qu’« il sembl[ait] douteux que le personnel du service marketing [de la requérante ait] particip[é] au développement d’éléments techniques à haut niveau » dans le cadre de l’une des tâches du projet litigieux. Elle souligne que la mission principale de ses employés, dont la plupart possédait un diplôme d’enseignement supérieur, principalement en ingénierie, consistait en la réalisation d’études de marché en vue de concevoir et d’orienter les développements de la requérante vers le marché.

158    Or, la requérante n’apporte aucun élément de preuve pour étayer son allégation quant à la mission de son service marketing, laquelle demeure centrée sur le marketing selon les explications données dans la requête, et encore moins pour étayer la participation effective du personnel concerné aux tâches techniques du projet litigieux et, par voie de conséquence, l’éligibilité des coûts correspondants.

159    Il s’ensuit que, le troisième argument n’étant, au demeurant, étayé par aucun élément de preuve, il doit être rejeté.

4)      Sur le quatrième argument, tiré de la conclusion erronée de l’OLAF en ce qui concerne les auteurs des documents se rattachant au projet litigieux

160    Selon la requérante le fait qu’un employé de l’entité C, à laquelle elle aurait, selon l’OLAF, sous-traité une partie des tâches dans le cadre du projet litigieux, apparaisse comme auteur d’un document ne signifie pas qu’il s’agit de la personne qui a réalisé le travail correspondant. À cet égard, la requérante souligne que l’auteur d’un document Word pourrait décider de commencer la rédaction à partir d’un document antérieur, au lieu d’ouvrir un nouveau document vierge.

161    À cet égard, la requérante ajoute, à juste titre, que le contrat de subvention, ni les conditions générales de celui-ci, ne l’obligeait ni à spécifier l’auteur de chaque document établi dans le cadre de l’exécution du projet, notamment en ce qui concerne les dossiers livrables, ni d’autant moins d’identifier toutes les personnes ayant participé à leur élaboration.

162    Il n’en demeure pas moins que, selon l’article II.14, paragraphe 1, des conditions générales, les coûts déclarés doivent être identifiables et contrôlables et, dès lors, confrontée à une critique portant sur une sous-traitance non autorisée, il appartient à la requérante de renverser la présomption d’inéligibilité à cet égard ressortant du rapport de l’OLAF, selon la charge de la preuve qui lui incombe au titre de la jurisprudence citée au point 71 ci-dessus.

163    Or, l’argument de la requérante tiré, notamment, de la possibilité que l’auteur initial d’un document n’en soit pas l’auteur effectif demeure une assertion de portée générale, qui, même à la supposer établie, ne constitue nullement un élément de preuve permettant d’établir, à suffisance de droit, l’identité des auteurs effectifs des documents se rattachant au projet litigieux, et encore moins que les auteurs apparents desdits documents n’étaient pas les personnes qui avaient effectivement réalisé le travail en cause.

164    Il en va d’autant plus ainsi que la requérante n’avait pas mis en place, au cours de l’exécution du projet litigieux, un système d’enregistrement des heures de travail de son personnel et qu’elle se borne à invoquer une estimation de ses coûts salariaux (voir points 114 et 128 et 129 ci-dessus).

165    Dans ces circonstances, la requérante ne saurait être réputée avoir satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe au sens de la jurisprudence citée au point 71 ci-dessus et le quatrième argument doit aussi être rejeté.

166    Il s’ensuit que le quatrième argument doit être rejeté.

5)      Sur le cinquième argument, tiré des ventilations partielles des activités de l’entité C coordonnées par la requérante

167    La requérante observe que, pour organiser son travail, l’entité C procédait à des ventilations partielles de certaines de ses activités et que le fait que ces activités aient été coordonnées par elle démontre qu’elle y a participé, de manière plus ou moins importante. La requérante souligne que ce degré de participation ne saurait servir à mesurer le respect d’un engagement souscrit dans le cadre du projet litigieux.

168    Or, il convient de relever d’emblée que la requérante n’explicite pas en quoi consisteraient les « ventilations partielles » auxquelles elle se réfère. En tout état de cause, son argument manque de clarté et de précision dans la mesure où il comporte des critiques à caractère général, assorties de simples allégations non étayées par des éléments de preuve de nature à attester sa participation réelle au projet litigieux. La simple allégation concernant la prétendue coordination des activités de l’entité C n’est pas de nature à satisfaire aux obligations contractuelles auxquelles la requérante était tenue, en particulier, en ce qui concerne l’interdiction de sous-traiter des tâches faisant l’objet du contrat de subvention à un autre membre du consortium, sans autorisation préalable, conformément à la lecture combinée de l’article II.3, sous a), et de l’article II.7 des conditions générales, dont fait état le rapport de l’OLAF.

169    Dans ce contexte, le rapport de l’OLAF a, notamment, relevé qu’il existait plusieurs échanges entre la requérante et l’entité C attestant la répartition de tâches dans le cadre de l’exécution du projet litigieux. Au surplus, l’OLAF a souligné n’avoir trouvé, dans les comptes de la requérante, aucune facture ou autre document se rattachant aux coûts du projet litigieux pour l’année 2013 et en a logiquement déduit que lesdits coûts avaient été effectivement supportés par l’entité C.

170    Dans ces conditions, il convient de rejeter le cinquième argument.

6)      Sur le sixième argument, tiré de ce que l’OLAF aurait fondé sa conclusion en ce qui concerne la sous-traitance sur une seule tâche qui aurait été déléguée à l’entité C

171    Lors de l’audience, la requérante a également avancé que, dans l’annexe 16, l’OLAF avait fait référence à une seule tâche relevant de l’exécution du projet litigieux qui aurait été déléguée à l’entité C, et qu’il ne s’agissait pas, dès lors, d’une délégation intégrale de l’exécution du projet. Or, l’OLAF et, par la suite, la Commission ne sauraient fonder leur appréciation sur un élément fragmentaire et isolé, alors qu’il aurait existé d’autres tâches qui auraient été réalisées par elle dans le cadre du projet litigieux.

172    À cet égard, il suffit d’observer que, dans son rapport, l’OLAF a constaté que plusieurs activités prévues dans le cadre de l’exécution du projet litigieux avaient été effectuées par l’entité C. Au demeurant, la requérante n’apporte aucun élément de nature à démontrer que tel n’a pas été le cas, au-delà de son allégation, incorrecte par ailleurs, de ce que l’annexe 16 ferait état d’une seule tâche qui aurait été déléguée.

173    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le sixième argument et, par voie de conséquence, la troisième branche dans son ensemble ne peuvent qu’être rejetés.

d)      Sur la quatrième branche, tirée de l’éligibilité des coûts indirects

174    La requérante reproche à l’OLAF, et, dès lors, à la Commission, de ne pas avoir pris en considération ses coûts indirects. Plus précisément, elle fait valoir que, ayant établi les coûts éligibles sur la base du document le plus pertinent, qui ne prévoit que les lignes budgétaires relatives au personnel et au matériel, la Commission n’a pas ajouté au montant de 220 000 euros y figurant un montant pour subventionner les coûts indirects, à un taux de 60 % des coûts directs, en vertu de l’article II.15, paragraphe 2, sous c), des conditions générales.

175    Cette branche est vouée au rejet, car la requérante est restée en défaut de produire valablement le document le plus pertinent (voir points 23 à 25 ci‑dessus) pour ainsi démontrer que celui-ci ne comportait que les coûts de personnel et de matériel, sans prévoir les coûts indirects. Ainsi, elle n’étaye pas son allégation conformément à la répartition de la charge de la preuve qui lui incombe (voir point 71 ci-dessus), de sorte que son argumentation ne peut qu’être rejetée.

176    En outre et en tout état de cause, il convient de relever que l’article II.15, paragraphe 2, des conditions générales, prévoit, en substance, que les coûts indirects doivent être identifiés et justifiés dans le système de comptabilisation du bénéficiaire de l’aide de l’Union comme ayant été supportés en lien direct avec les coûts directs éligibles se rattachant au projet subventionné.

177    Cependant, en l’espèce, ainsi qu’il ressort de l’analyse du deuxième argument avancé dans le cadre des deuxième et troisième moyens (points 69 à 75 ci-dessus), la requérante n’avait pas mis en place un système de comptabilisation bien précis qui aurait permis de connaître, notamment, les coûts directs engagés dans le cadre du projet litigieux et d’autant moins les coûts indirects supportés en lien direct avec lesdits coûts directs. Or, l’existence d’un tel système d’identification et de justification constitue une condition préalable essentielle pour permettre d’établir, conformément à l’article II.15, paragraphe 2, sous c), des conditions générales, le montant des coûts indirects, réputés être engagés en lien direct avec les coûts directs éligibles se rattachant au projet litigieux.

178    À cet égard, il importe de souligner que, ainsi qu’il ressort de l’analyse de la première branche du quatrième moyen (voir point 208 ci-dessous), en l’espèce, l’OLAF avait établi, à l’annexe 16, que les coûts directs éligibles au titre du projet Powair ne s’élevaient qu’à 20 735,50 euros, de sorte que les coûts indirects plafonnés à un taux de 60 % ne pouvaient être remboursés que dans une limite de 12 441,30 euros.

179    Or, d’une part, la Commission a privilégié l’approche avancée par l’OLAF dans l’annexe 16 en tant que scénario plus favorable à la requérante, en admettant le caractère éligible du montant correspondant à la sous-traitance au profit de l’entité C, effectuée en violation des obligations contractuelles.

180    D’autre part, ainsi qu’il ressort de la troisième branche (voir points 140 à 166 ci-dessus), la requérante n’a pas démontré, à suffisance de droit, l’absence d’irrégularité de la sous-traitance qui lui a été reprochée.

181    Dans ces circonstances, la requérante ne saurait valablement reprocher à la Commission de ne pas lui avoir alloué les coûts indirects, s’élevant, selon les calculs de l’OLAF, à un montant de 12 441,30 euros, équivalent à 60 % de ses coûts directs éligibles de 20 735,50 euros (voir point 178 ci-dessus), alors qu’elle avait déjà bénéficié d’un traitement plus que favorable quant à l’éligibilité de ces derniers. Il en va d’autant plus ainsi que le système de comptabilisation interne de la requérante ne permettait pas d’identifier et de justifier ses coûts indirects comme ayant été supportés en lien direct avec les coûts directs éligibles se rattachant au projet subventionné, au titre de l’article II.15, paragraphe 2, des conditions générales.

182    Dès lors, la quatrième branche doit être rejetée comme non fondée.

e)      Conclusion sur les deuxième et troisième moyens

183    Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que la requérante n’a apporté aucun argument permettant de renverser la conclusion de l’OLAF et, par la suite, celle de la Commission, concernant l’inéligibilité d’une partie des dépenses déclarées au titre du contrat de subvention.

184    Ainsi, il convient de rejeter les deuxième et troisième moyens dans leur ensemble.

3.      Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 296 TFUE et des articles 41, 42, 47 et 48 de la Charte

185    La requérante soutient que, dans le cadre de la procédure de récupération du montant litigieux au titre du contrat de subvention, la Commission a violé l’article 296 TFUE et les articles 41, 42, 47 et 48 de la Charte.

a)      Sur la recevabilité des griefs avancés par la requérante

186    En premier lieu, les articles 47 et 48 de la Charte n’apparaissent que dans l’intitulé du quatrième moyen et aucune argumentation n’est avancée à l’appui du grief tiré de la prétendue violation desdites dispositions, de sorte que ce grief doit être écarté comme irrecevable au titre de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, sans qu’il y ait besoin de se prononcer sur l’applicabilité desdits articles dans le cadre d’un litige contractuel.

187    En second lieu, au stade de la réplique, la requérante reproche à la Commission d’avoir violé l’article 42 de la Charte, consacrant le droit d’accès aux documents.

188    Or, un tel grief est irrecevable pour tardiveté en vertu de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, puisqu’il s’agit, ainsi que le relève d’ailleurs le Royaume d’Espagne, d’un grief qui n’a pas été soulevé dans la requête.

189    À cet égard, force est de constater que ce grief ne constitue pas une ampliation d’un moyen exposé dans la requête. Ensuite, dans la réplique, la requérante n’avance aucun élément de droit ou de fait qui se serait révélé durant la procédure, pour lui permettre ainsi de soulever un grief nouveau, conformément à l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure.

190    Il s’ensuit que ce grief doit être écarté comme irrecevable.

191    Au demeurant, ainsi que le fait également observer le Royaume d’Espagne, il ne ressort pas du dossier que la requérante aurait exercé le droit d’accès aux documents prévu à l’article 6 du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), qui est consacré à l’article 42 de la Charte, dont la requérante invoque la violation. Dès lors, l’argument de la requérante tiré de la violation dudit article est, en tout état de cause, inopérant.

192    Le quatrième moyen comporte également des arguments tirés d’un défaut de motivation dont seraient entachées en particulier l’annexe 16 du rapport de l’OLAF ainsi que la lettre d’information préalable, et d’autres arguments tirés d’une violation du droit d’être entendu prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte.

193    Il s’ensuit que, nonobstant la référence, dans l’intitulé du présent moyen, à plusieurs bases juridiques, le quatrième moyen est recevable uniquement en ce qui concerne les prétendues violations de l’article 41 de la Charte, tirées, la première, de l’obligation de motivation prévue à l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte et, la seconde, du droit d’être entendu, prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte.

b)      Sur la première branche, tirée de la violation de l’obligation de motivation prévue à l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte et de l’article 296 TFUE

194    Dans le cadre de la présente branche, la requérante reproche à la Commission d’avoir violé son obligation de motivation prévue tant à l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte qu’à l’article 296 TFUE, en ce qui concerne, d’une part, la lettre d’information préalable et, d’autre part, l’annexe 16 du rapport de l’OLAF.

195    À cet égard, il convient de relever que l’article 51, paragraphe 1, de la Charte prévoit que ses dispositions « s’adressent aux institutions, organes et organismes de l’Union » et aucune exception n’est prévue. Ainsi, les droits fondamentaux énoncés dans la Charte, qui fait partie du droit primaire, ont vocation à régir l’exercice de toute compétence attribuée aux institutions de l’Union, y compris dans un cadre contractuel (voir arrêt du 24 février 2021, Universität Koblenz-Landau/EACEA, T‑606/18, non publié, EU:T:2021:105, point 28 et jurisprudence citée).

196    En effet, étant donné que le législateur de l’Union a prévu qu’une subvention peut être octroyée tant par la voie contractuelle que par la voie administrative, les institutions, organes et organismes de l’Union ne sauraient, à leur gré, se soustraire à leurs obligations découlant du droit primaire, y compris de la Charte, en fonction de leur choix d’octroyer des subventions par voie de convention plutôt que par décision (voir, en ce sens, arrêt du 24 février 2021, Universität Koblenz-Landau/EACEA, T‑606/18, non publié, EU:T:2021:105, point 31 et jurisprudence citée).

197    Ainsi, lorsque les institutions, organes ou organismes de l’Union exécutent un contrat, ils sont pleinement soumis aux obligations qui leur incombent en vertu de la Charte et des principes généraux du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, point 86).

1)      Sur le premier grief, tiré de l’insuffisance de motivation dont serait entachée la lettre d’information préalable

198    La requérante reproche à la Commission un défaut de motivation de la lettre d’information préalable.

199    À titre liminaire, il importe de souligner que l’obligation de motivation visée à l’article 296 TFUE et consacrée à l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte est un principe essentiel du droit de l’Union (ordonnance du 24 avril 2017, Dreimane/Commission, T‑618/16, non publiée, EU:T:2017:293, point 36), qui a pour objectif, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l’acte lui faisant grief et l’opportunité d’introduire un recours juridictionnel tendant à en contester la légalité et, d’autre part, de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle (voir, en ce sens, arrêt du 18 septembre 2018, Duferco Long Products/Commission, T‑93/17, non publié, EU:T:2018:558, point 67).

200    Dans ce contexte, il convient de rappeler que l’étendue de l’obligation de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances concrètes, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications, et il importe, pour apprécier le caractère suffisant de la motivation, de la replacer dans le contexte factuel et juridique dans lequel s’inscrit l’adoption de l’acte en cause. Ainsi, un acte est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu du destinataire concerné qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 24 février 2021, Universität Koblenz-Landau/EACEA, T‑606/18, non publié, EU:T:2021:105, point 35 et jurisprudence citée).

201    À cet égard, d’une part, il y a lieu de relever que la lettre d’information préalable identifie clairement le fondement juridique des violations contractuelles reprochées à la requérante, à savoir l’article II.4, l’article II.7, paragraphe 1, l’article II.14, paragraphe 1, l’article II.15 des conditions générales et l’annexe VI du contrat de subvention, ainsi que la base contractuelle du recouvrement envisagé, à savoir l’article II.24, paragraphe 6, des conditions générales.

202    D’autre part, la lettre d’information préalable était accompagnée, en annexe, du rapport de l’OLAF, qui expose, de manière détaillée, les motifs, que par la suite la Commission a fait siens, qui ont conduit à la procédure de récupération du montant litigieux.

203    La requérante estime, toutefois, que la motivation de la lettre d’information préalable ne présente pas un caractère suffisant, en ce qu’elle ne contient aucune justification quant à la méthode utilisée pour établir, en substance, le montant litigieux.

204    À cet égard, il convient de rappeler que le montant litigieux global de 175 426,24 euros correspondait à la somme des coûts retenus comme inéligibles et des sanctions contractuelles au titre du contrat de subvention (voir point 9 ci-dessus).

205    En premier lieu, s’agissant des coûts inéligibles, il convient de relever que la lettre d’information préalable était accompagnée, en annexe, d’un document intitulé « Ventilation des coûts à récupérer » (ci-après la « ventilation des montants à récupérer »), qui détaillait les calculs de la Commission.

206    La ventilation des montants à récupérer mentionne le fait que l’OLAF avait recalculé le montant des dépenses éligibles à 220 000 euros, subventionné à hauteur de 75 %, correspondant donc à une subvention de 165 000 euros. Étant donné que la requérante avait reçu une subvention de 324 478,40 euros, la Commission a indiqué que le montant des coûts inéligibles, et qui devait, dès lors, être récupéré, s’élevait à 159 478,40 euros.

207    L’information communiquée au stade de la lettre d’information préalable a été par la suite complétée par l’envoi à la requérante de la lettre d’information complémentaire, à laquelle était jointe l’annexe 16 (voir point 12 ci-dessus). Ces deux éléments additionnels font ainsi partie du contexte dans lequel la lettre d’information préalable est intervenue et à la lumière duquel la motivation de cette dernière doit être examinée au titre de la jurisprudence citée au point 200 ci-dessus.

208    L’annexe 16, quant à elle, fait état d’une ventilation très précise des coûts que l’OLAF avait considérés comme ayant été effectivement supportés par la requérante au titre du projet litigieux, en excluant les coûts supportés par l’entité C. Selon ces calculs, le coût total du projet litigieux s’élevait à seulement 33 176,80 euros, subventionnés par l’Union à hauteur de 75 %, ce qui correspondait à une subvention de 24 882,60 euros. Sur cette base, le montant de la contribution injustifiée devant être restituée par la requérante s’élevait à 297 917, 40 euros.

209    Toutefois, toujours à l’annexe 16, l’OLAF a également observé que, même à supposer que les tâches relevant du projet litigieux aient été effectuées conjointement avec l’entité C, ainsi que le prétend la requérante, le coût total du projet litigieux ne dépassait pas le montant de 220 000 euros, dont 165 000 euros auraient correspondu à la contribution de l’Union.

210    Or, à l’annexe 16, l’OLAF avait établi le coût du projet litigieux à 220 000 euros sur la base du document le plus pertinent, dont l’auteur était la requérante elle-même et, ainsi qu’il ressort du point 126 ci-dessus, et c’est ce dernier chiffre que la Commission a utilisé dans la ventilation des montants à récupérer, pour arriver, conformément à l’article II.16, paragraphe 1, des conditions générales, au montant de la contribution éligible de l’Union de 165 000 euros et, par voie de conséquence, à un montant indûment payé par la Commission de 159 478,40 euros.

211    Il ressort des considérations exposées aux points 205 à 211 ci-dessus que la lettre d’information préalable, telle qu’accompagnée par la ventilation des montants à récupérer et complétée par l’annexe 16, énonce des motifs suffisants permettant de comprendre la méthode utilisée par la Commission pour établir le montant indûment payé.

212    À cet égard, il convient de rappeler que l’obligation de motivation prévue à l’article 296 TFUE constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, cette question relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (arrêt du 16 novembre 2017, Ludwig-Bölkow-Systemtechnik/Commission, C‑250/16 P, EU:C:2017:871, point 16). Ainsi, il ne saurait être question d’examiner, au titre du contrôle du respect de l’obligation de motivation, la légalité au fond des motifs retenus par la Commission pour justifier le montant indûment payé au titre du contrat de subvention – examen qui relève, en réalité, des deuxième et troisième moyens, qui ont déjà été rejetés.

213    En second lieu, la ventilation des montants à récupérer indiquait également le montant des sanctions contractuelles réclamées par la Commission. Ce montant était établi sur la base de la formule figurant à l’article II.24, paragraphe 1, des conditions générales, selon laquelle la contribution injustifiée (159 478,40 euros) a été multipliée par le montant des coûts surestimés (212 637,87 euros) et, par la suite, divisée par le montant de la contribution de l’Union reçue par la requérante (324 478,40 euros, voir point 5 ci-dessus). Selon cette formule, les sanctions contractuelles s’élevaient à 104 509,72 euros. Toutefois, en l’espèce, la Commission a décidé de faire application du principe de proportionnalité et a, ainsi, plafonné lesdites pénalités à 10 % du montant de la contribution injustifiée de l’Union, c’est-à-dire 15 947,84 euros.

214    Il s’ensuit que la motivation relative au montant des sanctions contractuelles réclamées par la Commission ressort avec clarté et précision de la ventilation des montants à récupérer, qui accompagnait la lettre d’information préalable et qui, dès lors, en faisait partie.

215    Il ressort des considérations précédentes que, s’il est vrai que la lettre d’information préalable ne contient pas d’explications précises en ce qui concerne la formule utilisée par la Commission pour établir le montant litigieux, celle-ci tout comme les éléments figurant dans les documents venant la compléter sont intervenus dans un contexte qui était bien connu de la requérante, lui permettant ainsi de comprendre la méthode employée par la Commission pour arriver au montant litigieux, au sens de la jurisprudence visée au point 200 ci-dessus.

216    Il s’ensuit que la lettre d’information préalable comporte une motivation suffisante permettant de comprendre les motifs qui ont amené la Commission à conclure à la violation des obligations contractuelles ainsi que les calculs relatifs au montant litigieux et d’apprécier l’opportunité d’introduire un recours et, enfin, au Tribunal d’exercer son contrôle, au sens de la jurisprudence citée au point 199 dessus.

217    Dès lors, le premier grief est rejeté.

2)      Sur le second grief, tiré de l’insuffisance de motivation dont serait entachée l’annexe 16 du rapport de l’OLAF

218    La requérante reproche également une insuffisance de motivation de l’annexe 16 du rapport de l’OLAF, sans pour autant expliciter en quoi consisterait exactement cette insuffisance.

219    En tout état de cause, premièrement, l’OLAF a fondé ses conclusions figurant dans l’annexe 16, qui concerne la question de sous-traitance, sur la base du document le plus pertinent. Ledit document démontrait la répartition de tâches entre la requérante et l’entité C, la connaissance de cette répartition par leur personnel respectif et le fait que le budget du projet litigieux présenté aux fins de la subvention était gonflé.

220    Or, ayant nécessairement connaissance du contenu du document le plus pertinent, sur lequel se fonde l’annexe 16, la requérante ne saurait légitimement prétendre que cette dernière est dépourvue de motivation.

221    Deuxièmement, l’OLAF a relevé, toujours dans l’annexe 16, que le plan technologique de la requérante comportait une ligne intitulée « 310.01 Projets 100 % [entité C] : Powair », tout en faisant observer qu’il n’était pas possible d’identifier, dans les comptes de la requérante, les montants qui pouvaient correspondre aux coûts exposés dans le cadre du projet litigieux. Ainsi, l’OLAF a estimé que la mise en œuvre dudit projet avait été financée par les résultats obtenus par l’entité C.

222    Il résulte des considérations qui figurent aux points 207 à 210 ci-dessus que l’annexe 16 est également intervenue dans un contexte qui était bien connu de la requérante et comportait une motivation suffisante permettant à celle-ci de comprendre les motifs qui ont amené l’OLAF à considérer qu’elle avait méconnu ses obligations contractuelles, au titre de la jurisprudence citée au point 200 ci-dessus.

223    Il s’ensuit que le second grief est également non fondé.

224    Partant, la première branche du quatrième moyen, tirée d’un défaut de motivation, doit être rejetée comme non fondée dans son ensemble.

c)      Sur la seconde branche, tirée d’une violation du droit d’être entendu prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte

225    Ainsi qu’elle l’a confirmé lors de l’audience, la requérante soutient que l’insuffisance de motivation dont seraient entachées la lettre d’information préalable et l’annexe 16 l’aurait empêchée de connaître les justifications fondant ces documents. Par conséquent, son droit d’être entendue, faisant partie du droit à la bonne administration et consacré à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, aurait été également méconnu.

226    Or, dans la mesure où la première branche, tirée d’une insuffisance de motivation, a été rejetée, il en va nécessairement de même en ce qui concerne la seconde branche.

227    Toutefois, au stade de la réplique, la requérante a également soulevé un argument tiré d’une prétendue violation de ses « droits de la défense » en ce que, en substance, la Commission ne lui aurait pas communiqué la totalité des annexes du rapport de l’OLAF. Cette dernière aurait ainsi privé la requérante de la possibilité de faire valoir utilement son point de vue sur lesdites annexes, à l’exclusion de l’annexe 16.

228    Pourtant, la requérante reste en défaut de fournir un élément de droit ou de fait qui serait de nature à justifier l’invocation d’un nouveau grief à un stade si tardif de la procédure, conformément à l’article 84, paragraphe 2, du règlement de procédure. L’argument tiré de l’absence d’accès aux annexes du rapport de l’OLAF ne constitue pas davantage l’ampliation d’un moyen qui serait déjà exposé dans la requête, de sorte que ce grief doit être considéré comme un moyen nouveau dont la production est interdite en vertu de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure.

229    Partant, il convient d’écarter le moyen nouveau de la requérante tiré de la violation de l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte en ce qui concerne l’accès aux annexes du rapport de l’OLAF comme étant irrecevable.

230    En tout état de cause, une violation d’un droit d’être entendu est sans incidence sur la validité d’une décision attaquée lorsqu’il n’est pas établi que la procédure aurait pu aboutir à un résultat différent sans cette irrégularité alléguée (voir arrêt du 14 mai 2019, Marinvest et Porting/Commission, T‑728/17, non publié, EU:T:2019:325, point 57 et jurisprudence citée).

231    Ainsi, même s’il est vrai que le rapport de l’OLAF fait référence à certaines annexes, tout en indiquant, de manière succincte, le contenu desdites annexes, la requérante n’avance aucun argument de nature à indiquer que la non-communication des annexes en question aurait pu avoir une incidence sur la solution du litige.

232    En outre, au demeurant, il ne ressort pas du dossier que, au cours de la procédure, la requérante, ayant connaissance de leur existence, aurait formulé une demande tendant à la communication desdites annexes.

233    Eu égard aux considérations qui précèdent, la seconde branche du quatrième moyen est irrecevable et, en tout état de cause, inopérante.

234    Il s’ensuit que le quatrième moyen ne peut qu’être rejeté.

4.      Sur le cinquième moyen, tiré, à titre subsidiaire, de l’enrichissement sans cause de la Commission

235    La requérante prétend, en substance, que, dans l’hypothèse où le Tribunal conclurait que les montants exigés par les notes de débit litigieuses n’étaient pas éligibles, la restitution du montant litigieux qui s’ensuivrait entraînerait un enrichissement sans cause au profit de la Commission. Elle fait notamment valoir que le fait que le projet Powair a été finalisé implique, en soi, un enrichissement sans cause.

236    À titre liminaire, il convient de rappeler que, ainsi qu’il a été relevé aux points 151 et 152 ci-dessus, le contrat de subvention ne prévoyait pas un transfert de la propriété du projet litigieux au profit de la Commission. Ledit projet demeurait la propriété de la requérante, de sorte qu’il ne saurait, en principe, être question d’un enrichissement au profit de la Commission, que ce soit avec ou sans cause. Ainsi, le moyen est voué au rejet.

237    En tout état de cause, il convient de relever que, selon une jurisprudence bien établie, pour que l’action fondée sur l’enrichissement sans cause soit accueillie, il est essentiel que l’enrichissement soit dépourvu de toute base légale valable. Cette condition n’est pas remplie, notamment, lorsque l’enrichissement puise sa justification dans des obligations contractuelles (voir arrêt du 6 octobre 2015, Technion et Technion Research & Development Foundation/Commission, T‑216/12, EU:T:2015:746, point 104 et jurisprudence citée).

238    En l’espèce, c’est sur la base des relations contractuelles découlant du contrat de subvention que la requérante a participé à la réalisation du projet Powair. C’est également sur cette base que la Commission a procédé, notamment, à la récupération de la partie des coûts subventionnés qui n’était pas éligible au titre de ladite convention, ainsi qu’il ressort de l’analyse du troisième moyen.

239    Il en résulte que le prétendu enrichissement de la Commission ne saurait être qualifié de « sans cause », dès lors que la récupération du montant litigieux trouve son origine et sa pleine justification dans le cadre contractuel régissant les obligations respectives des parties au contrat de subvention.

240    Eu égard aux considérations qui précèdent, le cinquième moyen ne peut qu’être rejeté et, partant, le recours dans son intégralité.

IV.    Sur les dépens

241    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

242    Il s’ensuit que, la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

243    S’agissant de la demande de la requérante visant à ce qu’elle ne soit pas condamnée aux dépens en raison des doutes de fait et de droit ainsi que de la complexité que présenterait cette affaire, il suffit d’observer, en tout état de cause, que les points tranchés dans le présent arrêt ne soulèvent pas de questions de droit nouvelles ou particulièrement complexes et sont traités sur la base d’une jurisprudence claire et constante. Il en va de même en ce qui concerne les faits de l’espèce, lesquels ne soulèvent pas de difficultés d’appréciation particulières. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 135, paragraphe 1, du règlement de procédure dont entendrait se prévaloir la requérante.

244    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Dès lors, le Royaume d’Espagne supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Green Power Technologies, SL est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

3)      Le Royaume d’Espagne supportera ses propres dépens.

Gervasoni

Madise

Frendo

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 décembre 2022.

Signatures


Table des matières 


I. Antécédents du litige

II. Conclusions des parties

III. En droit

A. Sur la recevabilité

1. Sur la recevabilité des documents annexés à la réplique

2. Sur la recevabilité du premier chef de conclusions

3. Sur la recevabilité du premier moyen, tiré de la violation des droits fondamentaux et de l’acquis juridique de l’Union par l’OLAF et par la Commission

4. Sur la recevabilité de la demande de la requérante, figurant dans la réplique, visant à la production de certains documents

B. Sur le fond

1. Observations liminaires

2. Sur les deuxième et troisième moyens, tirés, en substance, de l’éligibilité des dépenses déclarées par la requérante dans le cadre du projet Powair

a) Sur la première branche, relative au modèle d’affaires et au système de comptabilisation de la requérante

1) Sur le premier argument, tiré, en substance, de ce que la requérante n’était pas tenue de mettre en place un système de comptabilisation des dépenses particulier

2) Sur le deuxième argument, tiré de la comptabilisation correcte des dépenses supportées par la requérante

3) Sur le troisième argument, tiré de ce que la régularité du système de comptabilisation de la requérante n’aurait été remise en cause par aucun organisme

4) Sur le quatrième argument, tiré de l’archivage des projets antérieurs dans le dossier relatif au projet litigieux

5) Sur le cinquième argument, tiré de ce que les dossiers afférents au projet litigieux ne réunissaient pas l’ensemble des informations sur les coûts supportés

6) Sur le sixième argument, tiré de l’engagement des ressources propres par la requérante

7) Conclusion sur la première branche

b) Sur la deuxième branche, tirée de l’éligibilité des coûts de matériel et de personnel déclarés dans le cadre du projet litigieux

c) Sur la troisième branche, tirée du degré de participation de la requérante au projet litigieux et de l’accomplissement du projet litigieux

1) Sur le premier argument, tiré de la non-communication à la requérante d’un élément factuel sur lequel reposerait le rapport de l’OLAF

2) Sur le deuxième argument, tiré de l’accomplissement du projet litigieux

3) Sur le troisième argument, tiré des qualifications du personnel de la requérante

4) Sur le quatrième argument, tiré de la conclusion erronée de l’OLAF en ce qui concerne les auteurs des documents se rattachant au projet litigieux

5) Sur le cinquième argument, tiré des ventilations partielles des activités de l’entité C coordonnées par la requérante

6) Sur le sixième argument, tiré de ce que l’OLAF aurait fondé sa conclusion en ce qui concerne la sous-traitance sur une seule tâche qui aurait été déléguée à l’entité C

d) Sur la quatrième branche, tirée de l’éligibilité des coûts indirects

e) Conclusion sur les deuxième et troisième moyens

3. Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 296 TFUE et des articles 41, 42, 47 et 48 de la Charte

a) Sur la recevabilité des griefs avancés par la requérante

b) Sur la première branche, tirée de la violation de l’obligation de motivation prévue à l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte et de l’article 296 TFUE

1) Sur le premier grief, tiré de l’insuffisance de motivation dont serait entachée la lettre d’information préalable

2) Sur le second grief, tiré de l’insuffisance de motivation dont serait entachée l’annexe 16 du rapport de l’OLAF

c) Sur la seconde branche, tirée d’une violation du droit d’être entendu prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte

4. Sur le cinquième moyen, tiré, à titre subsidiaire, de l’enrichissement sans cause de la Commission

IV. Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’espagnol

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